principes magistraux, comme les bœufs au joug, retardent le progrès en copiant des recettes immuables » (p. 41); que n'a-t-il parcouru, parfois, la revue Culina, le Pot-au-Feu ou, surtout, la Revue Culinaire dont le numéro de décembre contenait précisément un menu « Réveillon à Montmartre en l'An de grâce 1925 » dont l'auteur, le chef Pellaprat s'avérait, avant M. Reboux, humoriste et novateur avec ses << Sacristains de l'Abbaye de Thélème ». servir (il prétend que c'est aussi plat du soir) une bouilla- | authentique, il pense enfin, que « les cuisiniers, attachés aux baisse (p. 309), n'était qu'entre nous, elle est piteusement yarabustée, pauvre et stylisée et, trop cuite de dix minutes, mais, pour la corser, vous la verseriez sur du pain repassé (p. 314) lequel est fourré d'une sardine à l'huile. A défaut de bouillabaisse, et tout aussi plat du soir paraîtil, vous auriez l'omelette au fromage (p. 229) complétée de mie de pain et de... chapelure! vous lui bailleriez de ses ricadelles coiffées (p. 91), qui sont l'antonyme des vieilles Fricadelles belges dont Paul Bouillard donne la recette dans sa Gourmandise à bon marché. Après un demi-camembert pétri avec une demi-livre de beurre et fiché de petits gâteaux salés (p. 50) vous le gratifieriez de cette chère vieille bonne salade d'oranges, bananes et pommes (p. 307), dont la nouveauté consiste en une réclame pour une liqueur. En user ainsi serait lui faire injure. En cette occasion, Vous vous devez, Madame, d'apporter aussi du nouveau. Et soyez sans inquiétude, car, bien qu'il admette avec Brillat-Savarin qu'inviter quelqu'un c'est se charger de son bonheur pendant toute la durée du repas, il n'hésite pas à déclarer que « l'on n'invite pas à dîner des gens mal 'élevés ». ceux qui n'aiment pas absolument tout ce que la fantaisie de l'amphytrion peut leur présenter. Mangeraitil avec le sourire ces mets indo-chinois et chinois, exquis comme les vers de chou palmiste et les saucisses de chien, ou un peu hallucinants comme les sauterelles en saumure et les œufs de plus de trente ans ?... Mais son intransigeance est rassurante: Madame, votre hôte mangera de tout et de n'importe quoi, il en redemandera même ! Combien de services au menu? Mais... un seul plat, j'imagine; car Paul Reboux est l'homme d'un plat (p. 28), pourvu que ce plat soit précédé et suivi de quelque chose, plus un fromage tarabiscoté (Ch. « Les Fromages » passim) et un plat de douceur. Nous sommes donc, une fois 'de plus, d'accord avec lui, car il y a comme cela, en gastronomie, quelques vérités premières et quelques truismes qui nous unissent tous. Et puis, il est versatile, votre invité : ainsi (p. 34),, il a « vu avec horreur et dégoût, des individus absorber avant le repas, des cocktails », voilà qui est parfait, mais pourquoi (p. 121), donne-t-il cette salade de fruits frappés aux sept liqueurs, véritable cocktail imaginé par la pauvre Renée Vivien qui pêcha peut-être par luxure, mais jamais par gourmandise ? Avec lui ne craigniez rien. Il a des naïvetés charmantes : il ajoute (p. 77) une goutte de teinture d'iode pour que ses moules évoquent le port, les bateaux dans la vase et les algues! il crée en remplaçant l'ail par l'échalotte l'échalotade « aïoli du Nord » (p. 244); il découvre ce vieil erzatz des familles le gigot de mouton en chevreuil (p. 175), mais ignore cet autre « le jambon d'ours ». Avec lui, les << pommes Devonshire » deviennent des pommes de terre grillées sauce tomate (150) et (p. 238) escalopes à l'oignon, la vieille formule viennoise, en faveur dans toutes les brasseries européennes. Il croit (p. 39) que le fumet de poisson ne peut être fait qu'au restaurant ; il est sûr (p. 40) que l'on ne récolte que dix barriques par an de Madère Aussi, lorsque M. Paul Reboux se demande (p. 31) << Suis-je un anarchiste de la cuisine ?... peut-être !» tran quillisons-le, Madame, car — n'était son abus du gruyère suisse et du chester anglais il serait plutôt réactionnaire d'ailleurs son amour immodéré du veau lui donne un cache de fonctionnarisme tout à fait rassurant Alors, voici, Madame, le menu inédit que vous pourrez offrir à votre hôte (notez que M. Paul Reboux supprime l'article liminaire à chaque mets) : Réception du Néo-Gastronome (le) Beau potage bleu (les) Petites gourdes en salade. (le) Gex au gruyère (la) Mule flambée aux pommes vertes Le beau potage bleu. Faites-un potage quelconque et le corsez d'une tasse de bouillon concentré. Ajoutez-y un rien de bleu de méthylène et couvrez de gruyère en lamelles Le veau sur le toit. — Faites-un pot-au-feu ordinaire, en remplaçant le bœuf par du veau. Dressez le veau sur les bouillies et liés d'une béchamel; saupoudrez de gruyère légumes que vous aurez pétris avec des pommes de terre râpé et plantez un gros cornichon droit dans le veau. Les petites gourdes en salade. Pourquoi les petites coloquintes aux formes voluptueuses ne plairaient-elles point au hardi novateur ? Donc, les éplucher, les faire dégorger, et, tout comme des concombres, les dresser en salade à l'huile d'arachide; couvrir d'un chrysanthème épanou (mauve) et semer de lamelles de gruyère. joyeux lurons d'Algérie, du Roussillon; de l'Hérault et de l'Aude, car « un Château-Yquem, un Haut-Brion, un Chambertin n'évoquent point la vigne » (p. 57), tandis que <ces vins de coupage... musclés et forts en alcool méritent au moins la plus sympathique indulgence » (p. 57). En attendant ce dîner mémorable, peut-être pourriezvous lire je ne dis pas le Cuisinier Royal, ni les doctes traités de Durand, d'Urbain Dubois, d'Escoffier-Gilbert et Fétu, ni le Trésor de Guégan mais cette excellente et simple grammaire de cuisine l'Art de Cuire de Jane Revel (1), ou ces deux bons livres qui viennent de paraître et dont nous reparlerons les Secrets de la Cuisine comtoise, par Pierre Dupin (2) et Petits et Grands Plats, par Suzanne Laboureur et X.-M. Boulestin (3). Relisez même Paul Reboux, tout n'y est point mauvais, ni parfait, ni quelconque ; et puis, par ces temps de vie chère, Paul Reboux peut bien remplacer Brillat-Savarin comme le Tip remplace le beurre et (p. 211) « la déesse Culinette, comme toutes les femmes, n'est pas fâchée d'être bousculée un peu ». Daignez, Madame, agréer, etc. AUSTIN DE CROZE. L'Art et la Mode a consacré à une enquête sur la gastronomie, menée par notre collaborateur Austin de Croze, son numéro de Noël et du Jour de l'an. : Magistralement préfacées par M. Charles-Brun, président de la Fédération régionaliste (numéro du 10 décembre), les réponses sont venues nombreuses. On lira celles de MM. Fernand Laudet (de l'Institut), le comte Austin de Croze, Maurice Brillant (Prix des Vignes 1927), Francis Carton, président de la Société des Cuisiniers de Paris, Henry-R. Chazel (pseudonyme d'un jeune diplomate d'avenir), Raymond Hesse, André Lamandé, le baron Fouquier, Joseph Ageorges, W.-L. Middleton (correspondant du Times), Hubert Filley (président du groupe artistique l'Ecole de la Loire), le comte Clary (président du Saint-Hubert Club de France), Paul Mégnin (directeur de la Revue cynégétique l'Eleveur), Henri Duvernois, Paul Berthelot (rédacteur en chef de la Petite Gironde), Gaston Derys, de Bersaucourt, Carlos Fischer, M. Guégan, Arsène Martel, Pierre Varillon, François Ceccaldi et Léon Abric; ajoutez à cette brillante énumération cinquante belles recettes inédites ou peu connues de ces parfaits maîtres que sont MM. Francis Carton, de Paris; Marcel Dorin, de Rouen ; Henri Racouchot, de Dijon ; François Bouvier, de Lyon ; Jean Cazaux, de Biarritz; G. Dumont-Lépine, de Paris; J. Walsdorff, de Montargis ; Sicard, de Bordeaux ; G. Royère, d'Aixen-Provence ; Aristide Riché, de Blois; Louis Didon, de Périgueux; A. Terrail, de Paris; Maurice, de Paris; M. Bouleston, de Londres ; L. Olivier, de Langon; Marius Lhoste, de Saint-Bénin-d'Azy; Léon Isnard, de Mascara; Raoul Rémon, de Meschers-en-Saintonge; Fernand Morpain, de Paris, et Mme Bourgeois, de Priay (Ain). (1) Rombaldi, édit, Paris, 1922, 15 francs. (2) E. Nourry, édit., Paris, 18 francs. (3) Au Sans Pareil, édit., Paris, 20 francs. ENQUETE L'affaire de Glozel et les spécialistes (Suite et fin) Un écrivain-commissaire M. Ernest Raynaud a été un des fondateurs de l'Ecole Romane, mais ce n'est pas comme poète que je voulais l'interroger; je me suis rappelé qu'il avait publié dans des pages bien savoureuses ses souvenirs de commissaire d police. Voici ce qu'il a bien voulu m'écrire à propos de Glozel : Ne comptons pas trop sur les spécialistes, en quelque parte que ce soit, pour débrouiller l'énigme de Glozel. Tous les spécialistes ont ce défaut d'être aveuglés par des partis-pris d'école. Ils nient les faits les plus évidents qui s'adaptent mal à leurs préjugés. Ils ne discutent que pour aboutir à leur point de départ. J'aurais, certes, plus de confiance en l'expérience d'un simple carrier ou du vulgaire potier du coin qu'en la science rassemblée de tous les pontifes de l'Institut. Les gens du peuple ne sont pas assez instruits pour déraisonner. L'histoire de Glozel est bien faite pour rabattre notre superbe. C'est l'affaire Dreyfus de la Science. Appelons, si vous le voulez, au secours des sommités scientifiques des gens du commun, mais gardons-nous des professionnels de l'antiquaille, infatués de leur« ignorance acquise » et si nous y déléguons un fin limier du quai des Orfèvres, que ce soit pour nous éclairer sur la mentalité des fouilleurs et non sur la qualité des fouilles. Le roman policier est déjà suffisamment amorcé pour que l'un des suppôts du genre s'avise d'en chercher la clé mais j'estime qu'il ne faut attendre la lumière que de ce dieu qui règle souveraienement toutes les choses d'ici-bas, je veuz dire le Hasard. M. Steinbach, jardinier-chef de Bagatelle M. Steinbach m'avait été signalé comme un jardinier particulièrement expert. Ce qu'il dit des racines des arbres est extrêmement intéressant ; sur un point seulement, je me permettrais d'indiquer que M. Steinbach sort légèrement de la question, car il a cru, ce que je supposais moi-même avant d'être allé à Glozel, que le gisement se trouvant à plusieurs mètres au-dessous du niveau du sol, alors qu'il est presque immédiatement au-dessous de la couche de terre végétale « A quelle profondeur trouvez-vous les objets ? demandai-je au grand-père Fradin, au moment où j'entrais dans le champ. A quatre-vingts, me répondit le vieillard. Quatre-vingts quoi ? interrogeai-je naïvement. Quatre-vingt centimètres naturellement répartit le grand-père avec un regard qui m'intimida. J'ai lu, en effet, dans les journaux, m'écrit: M. Steinbach, In passionnante affaire de Glozel, et ne vous cacherai pas que les critiques, faites par la presse sur ces fouilles, me laissent franchement: sceptique. Impartialement, je serais tenté de croire qu'il y a là-dessous une mise en scène, ancienne peut-être. Oui, je crois qu'une commission composée de spécialistes, pris dans différentes branches, serait très utile, car, souvent, le praticien peut indiquer des riens qui pourraient être de précieuses indications pour les savants. Les jardiniers, terrassiers, céramistes, potiers, maçons, mentiers, seraient, à mon avis, d'excellents auxiliaires pour guider les recherches. Le jardinier idoine doit avoir le don de l'observation. Il est constamment en contact avec les éléments de la nature. Aussi, son rôle, dans cette commission, serait d'une très grande utilité. Il doit pouvoir se rendre compte, s'il est attentif, que, lors de la fouille, le terrain a été remué ou non antérieurement. Les couches successives du sol sont, dans le premier cas, mélangées. Dans le deuxième cas, elles doivent offrir la même analogie à cet endroit qu'à 50 ou 100 mètres plus loin. La comparaison est donc facile à faire, sans pour cela se creuser les méninges. D'autre part, je ne sais pas exactement à quelle profondeur les objets ont été trouvés; mais ce qu'il y a de certain, c'est que le même jardinier idoine vous dira que les racines pivotantes des plus gros arbres, selon l'essence, ne vont guère à plus de trois mètres de profondeur dans le sol, et encore à cette condition que le sol soit absolument perméable; sinon, les racines s'étalent au lieu de s'enfoncer. Jamais une racine ne traversera un corps dur, à moins que celui-ci ne soit crevassé. Dans ce cas seulement, les radicelles pourront se développer et, en grossissant, arriveront, non pas à percer ce corps, mais à le fendre davantage. J'ai vu des murs s'écrouler sous la poussée de vieux arbres ; des pavages se cabosser, des grilles se tordre, des conduites se rompre. Ce travail s'opère lentement avec le temps. J'ai vu aussi, en sens inverse, abattre des arbres qui avaient dans leur flanc, à la hauteur de leur collet des pierres qui émous-saient les outils. Des arbres, étranglés par des fils de fer, arrivaient à encercler complètement ceux-ci avec la couche généra trice, mais jamais je n'ai vu une racine traverser une brique, ou un pot intacts. La racine contourne toujours ces objets jusqu'à ce qu'elle retrouve son chemin libre. Elle laisse même des traces dans la plupart des cas, car les jeunes racines (les radicelles) forment suçoirs sur ces objets. Maintenant, à Glozel, c'est peut-être autre chose ; si les briques et les pots trouvés sont mous, c'est peut-être parce qu'ils ne sont pas cuits. Dans ce cas, la racine se comporte là comme me dans un terrain argileux et suivant l'essence de l'arbre, il se peut fort bien que les radicelles arrivent patiemment à traverser ces objets mous et en grossissant, augmentent le diamètre de leur passage en comprimant les parois si ceux-ci sont malléables. Mais seulement à cette condition. A une certaine profondeur, ces briques et poteries peuvent être, selon le terrain qui les entoure sèches ou humides. Dans le second cas seulement, elles peuvent être molles et toujours à la condition de n'être pas cuites au four, car si ces objets sont cuits, ils ne peuvent jamais se ramollir. Ils ne s'altèrent même pas, à moins d'être dans un lieu très humide. Comme, grâce à M. Dumesnil, nous avons eu une déclaration collective des fossoyeurs du Père-Lachaise, voici une déclaration collective des jardiniers du Bois de Boulogne que nous devons à l'amabilité de M. Petitjean, chef-ouvrier au service d'architecture de la Ville de Paris (Bois de Boulogne): Je vous prie de bien vouloir m'excuser pour vous avoir fait attendre aussi longtemps une réponse à votre lettre datée du 12 courant. En voici la raison. C'est que je voulais consulter des jardiniers méritants en titre et il m'a fallu un certain temps pour les rencontrer tous. Sur cinq surveillants de section, j'en ai consulté quatre et en plus le jardinier en chef, M. Lelay. Ces chefs de section ont obtenu leurs grades au concours, c'est vous dire qu'ils sont compétents pour apprécier et analyser comme il convient les questions posées dans votre lettre. Et bien, Monsieur, comme les savants, ils sont eux-mêmes très divisés. J'ai pris quelques notes sur l'opinion de chaque surveillant et, ma foi, je ne sais plus comment faire pour en dégager des indications bien équilibrées. Je vais essayer de vous donner un résumé des opinions de ces Messieurs. se Commençons par le jardinier en chef (son avis me paraît le plus intéressant); il dit d'abord qu'il lui est impossible de sc prononcer sans avoir vu la fouille, la sature du taillis qui la recouvrait, sans savoir si les racines, qui existaient dans le terrain, étaient de bois dur ou de bois tendre, si elles étaient pivotantes ou ramifiantes, sans connaître le degré de dureté de la brique ou de la poterie. Exemple Pour un pot en terre cuite ordinaire (pot enterré), la racine de la plante qu'il contient sort souvent par le trou ménagé à la partie inférieure. Si cette racine est de bois dur, en se développant, elle fera éclater le pot. Si, au contraire, elle est de bois tendre, elle sera étranglée au passage et formera bourrelet en dehors et en dedans du pot. Pour les briques, si elles sont peu cuites et molles, rien d'extraordinaire qu'elles soient traversées par les racines. Mais si les racines trouvées dans les briques sont encore actuellement vivantes, celles qui y sont n'ont rien d'ancien. Celles qui ont pu exister autrefois ne peuvent avoir laissé que des orifices; car plantes n'ont pas une longévité extraordinaire. Dans le cas où la décomposition a dû en avoir raison : les racines comme les tes briques seraient d'une époque très reculre, il y aurait eu des perforations successives suivant les générations des plantes et on doit trouver des orifices vides occupés autrefois par des racines vivantes et mortes maintenant depuis longtemps; les racines vivantes seraient de notre époque. Le chef des bûcherons qui s'occupe principalement des arbres, dit qu'il n'y a rien d'extraordinaire à ce que de l'argile molle soit traversée par des racines. Les autres collègues sont divisés. Les uns disent que la poterie aurait éclaté, les autres que des briques ou poteries peu cuites et ayant la consistance de la terre ont laissé facilement passer lesdites racines. Le durcissement de la terre par la cuisson est pour eux le point intéressant du problème. L'un d'eux m'a dit que, si les briques sont truquées, les racines ont été incorporées dans les briques pendant la fabrication, qu'après moulage, on a pu couper sur toutes les faces; mais dans ce cas, lesdites racines ne doivent pas traverser de part en part mais se retrouver agglomérées par paquets; pour s'en assurer, il faut briser la brique. Voici, Monsieur, le résultat de ma petite enquête, résultat bien maigre. Mais vous savez par expérience, Monsieur, combien il est difficile d'avoir des renseignements précis, même de praticiens qui n'ont rien vu et par conséquent ne donnent que des probabilités. Pour moi, Monsieur, je ne puis pas vous donner mon opinion, n'étant pas jardinier. Un graveur J'ai demandé son opinion à l'éminent artiste graveur Gauguet, car nul mieux qu'un graveur ne me semblait apte à déterminer si les inscriptions de Glozel avaient été tracées ou non avec un outil de métal : A mon avis me répondit M. Gauguet cette Commission, en dehors des archéologues, devrait être composée de praticiens, techniciens, spécialistes de divers métiers; un graveur (Dieu sait s'il y en a de compétents dans la matière) reconnaîtra une éraflure sur galet ou os produite par un silex ou une pointe de métal. Au point de vue de la patine, le temps est un grand maître que l'on ne peut imiter que grossièrement, surtout en ce qui concerne l'os et l'ivoire; un fossoyeur de campagne reconnaîtra à première vue un fragment d'ossement truqué. Je ne doute pas un seul instant de la bonne foi et de la sincérité absolue du D' Morlet et des autres savants, mais, d'après les journaux, on n'a aucune trace de faune véritablement ancienne, ce qui me laisse rêveur. Pour terminer, je citerai enfin la réponse du fossoyeur de Glozel lui-même, celui qui, incontestablement, a l'habitude d'enterrer des Glozéliens, puisque, s'il est en titre fossoyeur de Ferrières-sur-Sichon, il n'y a pas d'autre fossoyeur qui habite plus près que lui de Glozel. Le fossoyeur de Glozel est partisan de l'authenticité glozélienne, mais peut-être des raisons sentimentales jouent-elles chez lui un rôle aussi important que ses convictions de technicien : En réponse à votre lettre du 20 courant, écrit-il, j'ai l'honneur de vous faire connaître : 1° A mon avis, il serait indispensable de supplémenter la Commission d'archéologues par des spécialistes, notamment par des puisatiers qui vont plus profond dans leurs travaux que les fossoyeurs ; 2° J'estime que des fossoyeurs doivent faire partie de cette Commission de spécialistes, en raison qu'ils connaissent mieux la nature du terrain pour la conservation des objets. Le terrain de Glozel étant un terrain gras argileux, peut parfaitement conserver en bon état les objets qu'il renferme. Je ne me souviens pas et je n'ai jamais entendu dire que l'endroit où repose le gisement ait été travaillé. Et comme conclusion, j'ajoute que la famille Fradin est composée de très honnêtes gens dans toute l'acception du mot, De l'avis unanime des Praticiens, la PO' DRE ORIENTALE et les CIGARETTES ORIENTALES de BARTHELEMY, constitueut le plus puissant, le plus commode des remèdes contre l'ASTHME, les OPPRESSIONS,, etc. Birthélemy, ex-int. hóp Paris, LA GARENNECOLOMBES (Seine) et toutes Pharmacies, 4 fr. 50 la boite de Poudre ou Cigarettes. Et maintenant, que conclure de tout cela ? D'abord, que la presque unanimité de ceux à qui je me suis adressé, est convaincue comme moi qu'il y aurait intérêt à adjoindre à la Commission d'archéologues une Commission de véritables techniciens appartenant à des professions variées. Un des archéologues antiglozéliens qui ont pris la part la plus ardente à la bataille de Glozel, a bien voulu m'écrire qu'il ne tenait aucun compte du jugement des potiers, fossoyeurs, etc., qu'il appelle « des non-spécialistes ». Sont-ils donc tellement non-spécialistes que cela? Et voici qui me rappelle une anecdote qu'un de mes amis me racontait il y a quelques jours; cet ami était caporal-fourrier de la petite garnison cantonnée à Belle-Isle-en-Mer, quand le pain consommé par les hommes se gonfla et devint brusquement immangeable; alors, pour délibérer sur la question, on fit venir de la grande terre » des intendants à plusieurs galons; quant à des boulangers, pas un seul ne fut consulté par la Commission, qui dédaignait l'avis des << non-spécialistes >>. Qu'est-ce qu'un spécialiste ? Et, surtout, qu'est-ce qu'un non-spécialiste ? Voilà des termes dont je recommande la définition à la sagacité de nos académiciens. Est-ce une tare que d'avoir eu contact avec les choses elles-mêmes au lieu de n'avoir fréquenté que leurs noumènes ? Je ne prétends certes pas soutenir que le métier de fossoyeur confère l'infaillibilité à celui qui est investi d'une pareille fonction et qu'un fossoyeur doive dédaigner un archéologue; mais ce que je soutiens en revanche, c'est qu'un archéologue pourrait considérablement apprendre d'un de ces fossoyeurs à qui Hamlet allait demander des conseils de sagesse et d'humilité. De même, quand M. le D' Morlet affirme que l'antiquité de telle racine de bruyère prouve l'ancienneté du pot qu'elle traverse, qui pourrait mieux qu'un jardinier donner des indications sur l'antiquité ou l'éblouissante jeunesse de cette racine? Mais vos pseudo-spécialistes, me répliquera-t-on, n'ont point porté d'appréciation précise sur les divers problèmes qui se posent à Glozel? Non, et c'est justement ce qui prouve leur prudence très objective. Cependant, ces hommes prudents vous disent en même temps (et leur réserve nous donne confiance en eux) que s'ils étaient mis en face des objets, ils croient qu'ils pourraient donner sur eux un avis motivé. Et toutes leurs paroles, ces hommes ne les exprimentils point avec une sérénité défiante d'elle-même que, dans nos rêves, nous avions longtemps associée au véritable esprit scientifique ? Je le répète, je sors de ces consultations plus convaincu que jamais de la nécessité qui s'impose d'adjoindre, tout au moins en tant qu'« observateurs » des techniciens de Pendant bien des siècles, l'humanité n'a connu que deux sources naturelles de force motrice: le vent, qui a depuis longtemps déjà servi à pousser les bateaux et, plus tardivement, les ailes des moulins; l'eau courante ou tombante, qui faisait tourner les palettes de roues à demi immergées. Mais l'installation éolienne ou hydraulique était fixe, et ne fournissait d'énergie, utilisable que sur son emplacement même si les bateaux à voiles seuls pouvaient profiter de la puissance du vent tout en se déplaçant, tout véhicule terrestre, aussi bien que tout engin de peu d'importance ou devant changer souvent de place ou être installé en des lieux dépourvus d'eau courante ou de vent, n'avaient d'autre source d'énergie que l'effort musculaire celui-ci fût donné par des hommes ou bien par des animaux. Presque toute l'histoire de l'humanité n'a donc pas connu d'autre manière de se procurer de la force motrice : il n'y a pas deux cents ans que la machine à vapeur est devenue utilisable, pas cent que l'électricité meut des moteurs, pas cinquante que Forest et Daimler ont mis au point et rendu léger le moteur à explosion imaginé par Lenoir d'après une vieille idée de Huygens, pas trente, enfin, que Rudolf Diesel a créé le moteur à combustion interne auquel son nom reste attaché. que Aujourd'hui encore, la force humaine reste une source motrice très employée, et cela dans les pays les plus civilisés. Non seulement la propulsion des petits bateaux à l'aviron est partout de pratique courante, mais il est en pleine Europe nombre de régions où l'homme et la femme tirent la charrue; en France même, c'est souvent l'effort humain qui hâle la péniche au long d'un canal, et dans Paris il est certainement autant de voitures à bras que d'automobiles. Quant aux animaux de trait, leur nombre dépasse de beaucoup celui des moteurs mécaniques, qu'ils soient employés à faire rouler des voitures, à labourer, ou à mouvoir des meules, norias, pressoirs et autres machines. Quelle est la puissance que peut déployer un homme de force moyenne et au cours d'un travail de durée notable, par exemple huit heures par jour ? Disons d'abord qu'il ne faut pas confondre les trois termes de force, de travail et de puissance: la force est ce qui est susceptible de produire un travail, mais tant qu'elle ne s'exerce pas effectivement elle est tenue pratiquement pour nulle, bien qu'on la possède réellement à l'état latent ou potentiel : tout de même qu'un milliardaire, pendant qu'il ne dépense pas de l'argent, est au même point qu'un pauvre diable, ou qu'une gargousse que l'on ne fait point exploser paraît dépourvue de force, bien qu'il en dorme une grande quantité dans son explosif. Le travail, lui, est l'application de la force à une masse pour la déplacer ou la déformer. Dans l'évaluation dudit travail, le temps ne fait rien à l'affaire, on ne tient compte, par exemple, que de l'importance de la masse déplacée et du trajet qu'on lui a fait faire verticalement. Un kilogramme (1) qui a été élevé de 1 mètre - qu'on y emploie six mois ou un centième de seconde - représente un travail d'un kilogrammètre. Ainsi, une malle de 30 kgr. hissée au troisième étage, soit à 10 mètres de haut, exige un travail de 300 kilogrammètres ; et le locataire du «< cintième » qui monte en soufflant péniblement les 80 kilogrammes de son corps à 20 mètres au-dessus du trottoir, y dépense 1.600 kilogrammètres. On comprend fort aisément que le temps n'ait pas à être pris en considération : le porteur peut bien y mettre le temps qu'il voudra, le travail demandé se trouvera fait et sera payé une fois la malle rendue sur le palier, tout comme celui qui a été donné à faire à l'écolier se trouve accompli une fois le point final mis, que l'enfant l'ait bâclé en dix minutes ou ait traîné dessus pendant une semaine. Tout au contraire, dans la définition de la puissance, on introduit la notion de temps. Un déménageur qui mettrait toute une journée à monter sa malle, aurait sans doute accompli finalement son travail tout comme celui qui l'aurait fait en trois minutes, mais il aurait fait preuve d'une bien piètre vigueur (on dit qu'il n'est pas fort, on devrait dire qu'il n'est pas puissant). On définira la puissance : la faculté de faire un travail donné - par exemple un kilogrammètre grammètre en un temps donné, par exemple en une seconde. Pratiquement, on a employé comme unité de puis |