Imágenes de páginas
PDF
EPUB

JUPITER ET MINOS.

-Mon fils, disait un jour Jupiter à Minos,
Toi qui juges la race humaine,

Explique-moi pourquoi l'Enfer suffit à peine
Aux nombreux criminels que t'envoie Atropos.
Quel est de la vertu le fatal adversaire

Qui corrompt à ce point la faible humanité?

C'est, je crois, l'intérêt.-L'intérêt ! non, mon père. -Et qu'est-ce donc? - L'oisiveté.

[graphic][subsumed]

LE PETIT CHIEN.

[ocr errors]

La vanité nous rend aussi dupes que sots.
Je me souviens à ce propos

Qu'au temps jadis, après une sanglante guerre
Où, malgré les plus beaux exploits,
Maint Lion fut couché par terre,
L'Éléphant régna dans les bois.

Le vainqueur, politique habile,
Voulant prévenir désormais

Jusqu'au moindre sujet de discorde civile,
De ses vastes États exila pour jamais
La race des Lions, son ancienne ennemie.
L'édit fut proclamé. Les Lions affaiblis,

Se soumettant au sort qui les avait trahis,
Abandonnent tous leur patrie.

Ils ne se plaignent pas; ils gardent dans leur cœur

Et leur courage et leur douleur.

Un bon vieux petit Chien, de la charmante espèce

De ceux qui vont portant jusqu'au milieu du dos

[ocr errors]

Une toison tombante à flots,

Exhalait ainsi sa tristesse :

- Il faut donc vous quitter, ô pénates chéris! Un barbare, à l'âge où je suis.

M'oblige à renoncer aux lieux qui m'ont vu naître.
Sans appui, sans secours, dans un pays nouveau
Je vais, les yeux en pleurs, demander un tombeau
Qu'on me refusera peut-être.

O tyran, tu le veux! Allons, il faut partir.
Un Barbet l'entendit; touché de sa misère :

- Quel motif, lui dit-il, peut t'obliger à fuir?

[ocr errors]

Ce qui m'y force? ô ciel! et cet édit sévère

Qui nous chasse à jamais de cet heureux canton?

- Nous?—Non pas vous, mais moi. - Comment! toi,

mon cher frère?

Qu'as-tu donc de commun? Plaisante question!

Eh! ne suis-je pas un Lion1?

1 La petite espèce de chiens dont on veut parler porte le nom de chiens-lions.

LE LEOPARD ET L'ÉCUREUIL.

Un Écureuil sautant, gambadant sur un chêne, Manqua sa branche et vint, par un triste hasard, Tomber sur un vieux Léopard'

Qui faisait sa méridienne.

Vous jugez s'il eut peur! En sursaut s'éveillant, L'animal irrité se dresse,

Et l'Écureuil, s'agenouillant,

Tremble et se fait petit aux yeux de son altesse. Après l'avoir considéré,

Le Léopard lui dit: Je te donne la vie,

Mais à condition que de toi je saurai

Pourquoi cette gaîté, ce bonheur que j'envie
Embellissent tes jours, ne te quittent jamais,
Tandis que moi, roi des forêts,
Je suis si triste et je m'ennuie.
— Sire, lui répond l'Écureuil,
Je dois à votre bon accueil
La vérité : mais pour la dire

Sur cet arbre un peu haut je voudrais être assis.

-Soit, j'y consens; monte.

J'y suis.

A présent je peux vous instruire.

Mon grand secret pour être heureux,

C'est de vivre dans l'innocence:

L'ignorance du mal fait toute ma science;

Mon cœur est toujours pur, cela rend bien joyeux. Vous ne connaissez pas la volupté suprême

De dormir sans remords; vous mangez les Chevreuils,
Tandis que je partage à tous les Écureuils

Mes feuilles et mes fruits; vous haïssez, et j'aime :
Tout est dans ces deux mots. Soyez bien convaincu
De cette vérité que je tiens de mon père :
Lorsque notre bonheur nous vient de la vertu,

La gaîté vient bientôt de notre caractère.

[graphic]
« AnteriorContinuar »