Imágenes de páginas
PDF
EPUB

tout les complots, les réunions secrètes, les mots de passe échangés furtivement, les barricades, les fusils qui partent, les toits qui flambent. Bref, il est romantique. Et les « républicains », amis de M. de Valera, qui se cachent pour conspirer dans la lande ou au milieu des marais, parlent davantage à son imagination que les « constitutionnels », partisans de M. Cosgrave, discutant paisiblement de choses ennuyeuses sur les tristes banquettes du Parlement de Dublin.

Et les partisans de M. Cosgrave doivent comprendre ce sentiment puisqu'ils sont eux-mêmes des conspirateurs assagis, des membres de ce Sinn-Fein, aujourd'hui citadelle conservatrice, ou peu s'en faut, mais hier encore foyer de guerre civile.

L'assassiné de dimanche, M. O'Higgins avait été lui aussi, vers 1916, un agitateur convaincu. Mais, en 1921, il fut touché par la grâce du traité et, ministre de la Justice en 1922, il n'hésita pas à laisser exécuter soixantedix-sept de ses anciens compagnons de lutte coupables d'avoir continué cette campagne. Sans doute avait-il raison raisonnablement ; mais les révolutionnaires irlandais raisonnent peu et c'est sa « trahison » que cet homme énergique et jeune 35 ans a expié dimanche.

-

La France est traditionnellement l'amie de l'Irlande. Tradition sentimentale surtout et qui tient à quelques souvenirs historiques comme à certaines affinités de tempérament plutôt qu'à des intérêts communs bien caractérisés.

Mais enfin, la France est l'amie de l'Irlande. Elle est aussi l'amie de l'Angleterre et elle est surtout l'amie de la paix.

A ce triple titre, elle doit souhaiter que le peuple irlandais écoute enfin la voix de la sagesse et qu'il applique sa vive intelligence non plus à la poursuite de chimères, mais à la mise en valeur de son sol et au développement de son industrie.

Voici le centenaire du romantisme. Qui dit centenaire dit un peu enterrement. Il est temps pour l'Irlande de clore un mélodrame qui n'est plus au goût du jour et n'a que trop duré. JACQUES CHASTENET.

[graphic]

L'Angleterre, maîtresse des eaux irlandaises et dont les AFFAIRES INTERIEURES

banques tiennent bien en main l'économie de l'Ile, regarde sans trop de déplaisir ces enfants terribles se battre autour du cadeau qu'elle leur a fait. Elle se repose sur d'autres du soin laborieux de gouverner l'Irlande. Ce ne serait que les << républicains » partisans du séparatisme absolu reprenaient définitivement le dessus qu'elle s'émouvrait sans doute et interviendrait.

Il est d'ailleurs probable qu'alors tous les Irlandais se réconcilieraient contre elle.

En attendant, le gouvernement britannique vient de profiter de l'assassinat de M. O'Higgins pour se tirer d'un mauvais pas.

La Conférence navale anglo-américano-japonaise réunie à Genève depuis plus de trois semaines ne marchait pas. La sous-commission nommée pour concilier les points de vues des trois puissances, n'avait pu que définir leur divergence. Une séance plénière avait été convoquée où l'impossibilité d'une entente risquait d'éclater.

Or, si l'Angleterre n'entend pas réduire sa flotte de croiseurs, elle voudrait bien aussi ne pas trop déplaire aux Etats-Unis dont elle a, financièrement, tant besoin.

Mais comment éviter un éclat qui paraissait dimanche inévitable?

Le meurtre du ministre irlandais fournit un prétexte élégant. Lorsque la nouvelle en parvint à Genève, le représentant britannique, M. Bridgeman, premier lord de l'Amirauté, fit, en signe de deuil, ajourner sine die la réunion plénière projetée.

Ainsi le pauvre O'Higgins qui jadis combattit si vivement les Anglais, vient de leur rendre, outre tombe, un signalé service.

Les forces politiques de la France

Indre-et-Loire

:

La Touraine n'est point le jardin de la France le jardin de la France était simplement le parc du château de Plessisles-Tours, et donc exactement, le verger du roi Louis. On a nommé le jardin de la France, par extension, la province de Touraine, qui était à peu près le département d'Indre-et-Loire, à ceci près que Bourgueil était en Anjou, que Richelieu était dans le Saumurois, et que, par contre, notre Touraine englobait alors quelques coins du département actuel de l'Indre, au Nord surtout de l'arrondissement du Blanc.

Mais la Touraine fut mieux que le jardin de la France: elle fut une manière de capitale intellectuelle et mondaine pendant le régime des Valois et, de cette gloire d'avoir été tant de fois décrite par des écrivains français, si liée étroitement, dans la tradition française, aux grands mouvements politiques et aux grands mouvements intellectuels, il reste qu'elle a été vraiment une capitale et qu'elle en a conservé, avec une élégante noblesse, quelque légitime orgueil.

Jules Lemaître assurait qu'il y avait, entre la France du Nord et la France du Midi, si différentes par leur culture, leurs traditions et leurs tendances, une France du Centre, avec son originalité propre, et il la circonscrivait assez étroitement. Elle englobait les pays de la Loire, et avant tout, essentiellement, cet Orléanais, que Jules Lemaître aimait passionnément et qui était sa petite patrie, la Touraine et l'Ile-de-France, jusqu'aux confins du Valois, et encore une partie du Berry. Ces divisions sont un Farbitraires toujours, et une telle division de la France laisse en dehors d'elle la Bretagne, puis l'Auvergne, qui est du Midi, assurément, mais d'un Midi très particulier. Il est bien vrai cependant qu'entre le Nord laborieux, sévère, hérissé traditionnellement de citadelles, préoccupé aujourd'hui de gravēs pro

blèmes économiques et sociaux, et le Midi superficiel et politicien, entre le Nord patriote ou mystique et le Midi albigeois, philosophique ou païen, il y a toute une France du Centre, cette France, justement, de la Loire et de la Seine, dont les qualités essentielles sont celles que nous considérons comme les plus essentiellement françaises, les plus représentatives du génie français : la raison légère, la mesure et le goût, sans doute parce que c'est dans cette région que la Renaissance a épanoui sa floraison, et que la tradition s'y est maintenue, sous l'oeil des princes et par une pléiade d'artistes, par une harmonie parfaite entre la civilisation du moyen âge et celle de la France moderne. En tous cas, si nous admettons que le Centre, célébré par Jules Lemaître, est la patrie de toutes ces qualités, c'est dans la Touraine, dans l'Indre-et-Loire qu'il faut surtout les rechercher. La Touraine et le Vendômois ont été plus particulièrement habités par la cour, chantés et célébrés par les artistes, couverts, parmi tant de souvenirs plus anciens, de cette magnifique floraison de châteaux qui sont une expression raffinée et parfaite du goût. L'équilibre y règne entre les qualités de la population agricole et celle des habitants des villes, le génie rural y est moins dur, moins âpre, moins obstiné, et, partant, moins défiant et moins secret que dans

ennemie généralement des exagérations et des violences, et moins
facilement dupe des mots, encore qu'ayant la tête près du bonnet
et cette propension à la couleur un peu vive que nous avons
signalée déjà chez beaucoup de populations vigneronnes. Aussi
bien, certaines nuances se marquent selon les régions de Tou-
raine celles qui avoisinent le Dunois et le Vendômois sont
peut-être plus spontanées et plus excitables, et celles qui sont
proches du Poitou, plus soumises à la tradition, plus accessibles
par conséquent au travail de propagande politique entrepris
contre cette tradition,
(A suivre.)

l'Orléanais et le pays chartrain, moins mystérieux, spontané et AFFAIRES

fruste que dans le Berry, et la culture de la vigne a mis, semblet-il, le paysan tourangeau en harmonie plus franche avec la tradition sceptique, aimable et souriante des écrivains et des conteurs. La nature elle-même, en Touraine, est jolie, souriante et fine, pleine elle aussi, semble-t-il, de mesure, de goût élégant et de raisonnable fantaisie.

Ce serait trop vite fait que de déterminer ainsi la psychologie politique de la Touraine. Aussi bien, la Touraine a-t-elle une psychologie politique? Elle a vu de tout près trop de choses pour avoir conservé une foi politique bien vive. Elle a été trop mêlée, et de tout près, à la vie de la cour, aux conspirations, aux coups d'Etat, aux machinations de toute espèce, et pendant trop longtemps, pour n'être pas devenue sceptique. Et aussi les guerres religieuses se sont déroulées chez elle, non plus comme des épisodes locaux, atroces et tragiques, incompris dans leur principe et passionnant de haines inexpiables les générations futures, mais dans leur essence politique, leurs négociations ou leur aboutissement, et ne pouvant plus donner, sous cet aspect, à ces spectateurs raisonnables et légers qu'une nouvelle leçon de scepticisme.

Aussi bien, c'est là une tradition tourangelle, sans alliage et sans apport, la tradition du terroir : les disciplines politiques et surtout les conditions économiques la modifieront. Jusqu'ici, nous avons une population aimable, policée, un peu sceptique. Le citadin est généralement lettré ; le paysan, moins rude que dans beaucoup de provinces. Certes, il n'a pas dépouillé son caractère rustique et les éléments essentiels de la nature paysanne : le voisinage de la cour ne l'a pas transformé comme dans la bergerie de Trianon, en personnage artificiel de comédie. Il est resté parfois âpre et défiant, et le drame de la Chavonnière, si profondément étudié par les psychologues en même temps que par les criminalistes pittoresques, éclaire d'une lueur singulière les âmes de tous ces paysans de Touraine. Je ne veux pas dire, non plus, que tous les citadins d'Amboise, de Vouvray, de Tours ou de Chinon soient des familiers de Ronsard, de Rabelais ou d'Anatole France. La jalousie sarcastique, ou les haines villageoises, emplissent pour leur part les âmes rustiques, et la société des villes connaît aussi les petites cités, les menues intrigues de la vie de province : Balzac n'a point négligé une si belle étude, et nous a donné le curé de Tours. Mais dans l'ensemble, la population d'Indre-et-Loire est intelligente et fine,

TRYGÉE.

[graphic]

ECONOMIQUES

Le présent et l'avenir du Plan Dawes La presse française, absorbée par les incidents de la politique intérieure, n'a guère parlé du dernier rapport de M. Parker Gilbert, Agent général des Paiements de Réparations. Ce document offre cependant un intérêt de premier ordre, puisqu'il nous donne une analyse détaillée de l'exécution du Plan Dawes et de la situation financière, telles que l'une et l'autre se comportent trois ans après les délibérations des Experts. Essayons donc de voir, à la lumière du très remarquable exposé de M. Parker Gilbert, ce que sont, en matière de réparations, les résultats obtenus jusqu'ici et les perspectives du proche avenir.

Le Plan des Experts procède, on le sait, d'une distinction très nette entre les deux stades du réglement de la créance des réparations: paiement effectué à Berlin, en marks, par les soins du Reich et libératoire pour ce dernier ; transfert en monnaie étrangère des sommes ainsi versées, effectué par l'Agent général des paiements dans la mesure où cette opé ration est compatible avec la stabilité du change allemand. A ces deux points de vue, la période qui fait l'objet du rapport de M. Parker Gilbert, et qui couvre les neuf premiers mois de la troisième année d'exécution du Plan Dawes (1er septembre 1926-31 mai 1927) est particulièrement intéressante à étudier.

Cette troisième année apparaît, en effet, dans l'économie générale du Plan, comme une transition entre la période initiale, pendant laquelle l'effort demandé à l'économie allemande est extrêmement réduit, afin de rendre possible la reconstitution financière du Reich, et la période normale, qui, à partir de 1928-29, exigera d'une nation, dont on présume que le relèvement sera achevé, un sacrifice annuel de 2 milliards et demi de marks, soit 15 milliards de francs au cours actuel.

Les recettes des deux premières annuités provenaient, en majeure partie, de l'emprunt extérieur de 1924 et des versements de la Compagnie des Chemins de fer allemands,

le budget du Reich n'en fournissant directement que le 'dixième environ pour la troisième annuité, au contraire, ce budget doit fournir près du tiers des paiements.

D'autre part, le problème des transferts, qui ne se posait pas pour la première annuité, grâce à l'emprunt extérieur, prend toute sa signification en 1927, quand l'annuité atteint quelque neuf milliards de francs..

Cette charge est-elle insupportable pour le budget du Reich, et dangereuse pour sa monnaie ? Le rapport de l'Agent général va nous le dire.

Les paiements qui venaient à échéance au cours des neuf premiers mois de la troisième annuité et qui s'élevaient à près d'un milliard de marks, ont été effectués, avec une extrême ponctualité, aux dates convenues... Mais le budget allemand, qui avait donné un large excédent de recettes en 1924-25 et avait été à peu de choses près équilibré en 1925-26, se solde, pour chacun des exercices 1926-27 et 1927-28, par un déficit supérieur à 800 millions de marks, près de 5 milliards de francs.

Cette situation n'est due en aucune manière aux conséquences, directes ou indirectes, des paiements de réparations.

Le produit des taxes qui garantissent ces derniers et qui comprennent notamment les droits de douane, n'a, en effet, cessé de croître, et il dépasse dès maintenant de près 'de 100 0/0 le montant qu'atteindra, à partir de 1929, la contribution du budget aux annuités normales. Par ailleurs, les recettes fiscales donnent, malgré des réductions de tarifs et des dégrèvements que le contribuable français pourrait envier à celui d'outre-Rhin, des plus-values qui attestent que l'activité générale n'est nullement compromise par l'exécution du Plan, bien au contraire.

La seule cause du déficit budgétaire est l'accroissement formidable des dépenses, qui touche parfois à la prodigalité. C'est ainsi que le Reich rétrocède aux Etats particuliers et aux Communes une part considérable de ses recettes, suivant une méthode qui incite au gaspillage les collectivités secondaires ; que, malgré une baisse certaine des prix de détail, les dépenses administratives et militaires ont été largement augmentées ; et que l'Etat s'est engagé dans une coûteuse politique de subventions distribuées à toutes sortes d'entreprises d'ordre économique.

M. Parker Gilbert marque avec force la nécessité de modifier cette orientation « non seulement du point de vue du Plan des Experts, mais aussi dans l'intérêt de l'économie allemande dans son ensemble. » Il ajoute que c'est là une tâche aisée, pour peu que le gouvernement allemand ait la volonté de l'entreprendre.

Il serait assurément vain de compter sur cette volonté si le Reich entendait démontrer, en créant à dessein les déficits budgétaires, que le Plan Dawes est inexécutable. Mais un tel calcul n'aurait guère chance de réussir. Quelle que

CONSERVATION › ELANCKEUR dos DENTS

POUDRE DENTURIER CHARLARD

Pharmacie.12.3dBonne-Nouvelle,Parið

soit l'obscurité des budgets allemands, il ne serait pas possible de rendre, aux yeux de l'opinion mondiale, le Plan Dawes responsable d'un déficit provoqué par une politique de gaspillage. Si le Reich demande. la revision ou la suppression du Plan, ce sera bien plutôt en invoquant le danger de transferts massifs pour la stabilité du mark...

Ce danger, bien des Allemands l'invoquent déjà. Sans doute, la presque totalité des sommes encaissées par l'Agent général depuis le début de la troisième annuité a été remise effectivement aux diverses nations créancières : la proportion des transferts en espèces réputés les plus dangereux pour la monnaie du débiteur — s'est même notablement accrûe et a atteint, sous diverses formes, 49 % du total, sans que le cours du dollar par rapport au mark variât de plus de 2 pfennigs. Le montant des prestations en nature a, de son côté, augmenté considérablement en valeur absolue, attestant que les pays alliés peuvent absorber les fournitures et les services que l'Allemagne est en mesure de leur livrer au titre des réparations...

Mais le marché monétaire et le marché financier du Reich ont subi, durant cette période, de fortes secousses. Bien que faible, la variation des changes dont il vient d'être question a, pour la première fois depuis l'assainissement de 1923-24, fait approcher le cours du mark du point de sortie de l'or; les conditions du crédit, après avoir été très aisées au début de l'année, se sont brusquement modifiées : le montant des crédits, à court terme, en particulier des crédits de reports, a été comprimé, provoquant un effondrement des cours des valeurs à la Bourse de Berlin, et le taux de l'escompte de la Reichsbank a été porté le 10 juin de 5 à 6 0/0.

Cette crise financière est-elle la conséquence de l'exécution du Plan Dawes, comme certains voudraient le faire croire en Allemagne ; est-elle au contraire le résultat d'une sorte de complot ourdi par la Reichsbank contre le Plan lui-même, ainsi que l'ont dit certains journalistes alliés ?

Il semble que la véritable explication de la crise se trouve dans le renversement des mouvements de capitaux qui, dans les premiers mois de la présente année, a fait succéder, à un afflux de capitaux étrangers vers l'Allemagne, un reflux de capitaux allemands vers les marchés étrangers.

La confiance dans le mark ressuscité en 1924 avait amené, en 1925 et 1926, de nombreux capitalistes allemands ou étrangers à rapatrier ou à placer en Allemagne des sommes atteignant au moins un milliard de dollars. Cet afflux de disponibilités avait eu, pour la Reichsbank, les mêmes effets qu'a aujourd'hui, pour la Banque de France, le mouvement analogue qui se produit dans notre pays depuis un an: ses réserves d'or et de devises s'étaient accrues, dépassant de beaucoup ce qu'eût exigé la couverture de la circulation fiduciaire. Le D' Schacht jugea cette situation dangereuse, non seulement parce qu'il prévoyait un renversement de tendance toujours possible, mais aussi parce que l'abondance des devises détenues par la Banque d'émission lui paraissait augmenter à l'excès la capacité de

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small]

transfert du Reich et faciliter artificiellement l'exécution du Plan Dawes. Il résolut donc d'arrêter les investissements de capitaux étrangers en Allemagne : les placements à long terme furent découragés par des mesures fiscales et les placements à court terme par la baisse du taux de l'escompte. Ces mesures, coïncidant avec la hausse du franc qui attirait en France les capitaux de spéculation, provoquèrent un véritable exode des fonds placés sur le marché allemand. Ce mouvement entraînait aussitôt une liquidation partielle portant peut-être sur un milliard de marks - des réserves 'de devises de la Reichsbank, tandis que la contrevaleur des devises ainsi vendues servait de base à un développement excessif des crédits intérieurs à court terme et favorisait la spéculation boursière. A ce moment, le D' Schacht jugea prudent de faire machine en arrière, de comprimer les crédits, puis de relever le taux de l'escompte, afin d'éviter une dépréciation trop grande du change allemand et une diminution trop rapide des réserves de devises de la Banque d'émission.

Au total, le léger fléchissement du mark semble dû à des mouvements de capitaux dans lesquels les paiements de réparations ont tenu une place minime et qui, au surplus, auraient pu être modifiés, dans un sens favorable à la monnaie allemande, si la Reichsbank n'avait cherché à diminuer plutôt qu'à accroître ses réserves de devises. L'épisode n'est donc pas de nature à inspirer des craintes sérieuses sur la stabilité de la monnaie allemande qui, comme le dit M. Parker Gilbert « demeure pleinement garantie » ; mais il montre que les dirigeants de l'économie allemande, disposés hier à agir sur les événements lorsqu'ils favorisaient trop l'exécution du Plan Dawes, seraient sans doute prêts à accentuer, sinon à créer, demain, les circonstances défavorables qui pourraient se présenter.

C'est dire qu'ils n'hésiteront pas à aggraver les difficultés que certains de leurs créanciers risquent d'éprouver à absorber les annuités accrues de 1928 et de 1929: à nous de faire dès maintenant tout l'effort nécessaire pour préparer le transfert de sommes dont le rapport de M. Parker Gilbert ne nous permet heureusement pas de douter qu'elles ne soient payées à l'échéance.

[graphic]

INTERIM.

NOTES ET FIGURES

Tournées estivales

Je ne parle pas de ces magnifiques et fructueuses tournées où, sous l'égide d'un impresario avisé, comédiens et comédiennes célèbres, « saouls de gloire et affamés d'argent », comme Corneille, profitent de leurs vacances pour visiter les villes d'eaux et les plages à la mode avec le prestige d'un bagage innombrable et le renfort d'une tapageuse réclame. Les tournées dont il est ici question sont celles qu'organisent les oubliés, les dédaignés et les ignorés du théâtre et du concert, en de vagues villégiatures non mcins oubliées, dédaignées et ignorées qu'eux-mêmes.

Chanteurs presque aphones, Manons de jadis devenues obèses, ex-misses Helyett alourdies par la maternité, premiers prix de violon ou de piano du Conservatoire de Carpentras, jeunes premiers des théâtres de banlieue, pères nobles toujours exaltés de leurs triomphes rancis de lointaines provinces, fils et filles de concierges en mal de renommée et qui suivent des « cours de diction »>, ils sont quelques-uns et elles sont quelques-unes, qui, l'hiver durant, végètent au chiche hasard des cachets problématiques et des incertaines leçons. Mais voici venir les vacances, et le problème se pose. Comment iront-ils, eux aussi, à la mer ? Leurs illusions, sans doute, forment un trésor intact et éternel que ni les vaines et hasardeuses démarches, ni les déconvenues successives n'ont épuisé ni n'épuiseront jamais. Hélas! elles ne suffisent pas. Les hôteliers ne sont pas dispensateurs de rêve et ces êtres grossiers, qui ont réalisé le problème de déjeuner et de diner chaque jour, ignorent l'Art. Alors ?

Alors, un brusque réveil anime ce petit monde où existe, du reste, une touchante fraternité, une sorte de francmaçonnerie d'échanges réciproques et de services mutuels. On se visite, on s'interroge, on se concerte. Leur plan est invariable organiser entre eux, et par leurs seuls moyens, une troupe qui, de plage modeste en grève perdue, ira distraire ces malheureux asservis au repos annuel, que leur manque de ressources pécuniaires et intellectuelles condamne à attendre, dans un morne ennui, la fin de la journée devant l'infini. Guides et indicateurs sont pointés, annotés. Des renseignements sont transmis, des itinéraires suggérés. Où n'y a-t-il pas de casino ? Quelles sont les plus perdues et les plus abandonnées des victimes de l'exode obligatoire ? Et, bientôt, tout est organisé, arrangé, prévu. Les premiers prix de violon et de piano du Conservatoire de Carpentras soutiendront, de leurs accords, la voix expirante du chanteur presque aphone; l'obèse Manon roucoulera ; l'ex-miss Helyett trouvera un regain de jeunesse, et, dans un suprême effort, fera la petite folle; le jeune premier du théâtre de

[graphic]

banlieue, le père noble qui fut l'inoubliable suborneur de Chaste et Flétrie, l'ingénue qui souhaite briller aux feux de la rampe plutôt que de faire briller la rampe de l'escalier maternel, le futur tragédien, son frère, qui préfère changer de loge, se donneront la réplique.

On rédige un programme de tout repos, ne changeant guère, d'année en année, qui permettra aux mamans boutiquières de dodeliner sur des airs connus et aux vieux messieurs de frétiller en évoquant leurs souvenirs de jeunesse. Il ne reste maintenant qu'à avertir les hôteliers de l'honneur que leur accorde en les visitant une compagnie fort illustre, si l'on en juge par les titres honorifiques que les uns et les autres se sont soudain découverts et par les noms de théâtres cotés, au lieu d'à côté, voire subventionnés, qui flamboient sur les humbles affiches polycopiées. De pays en pays, la salle du dortoir-gargote est louée pour un soir contre modeste redevance. Tout est prêt, cette fois. On part; on est parti.

[graphic]
[ocr errors]

Qu'importent la rudesse du voyage en troisième classe, la chaleur abrutissante, la petite angoisse des frais de toilette qu'il a bien fallu faire et qu'il s'agit de couvrir, l'incertitude enfin de l'entreprise, ils sont joyeux, s'exaltent aux récits de leurs prouesses vocales et instrumentales, au rappel triomphant de leurs succès imaginaires qu'ils croient véridiques tant ils en ont redit le détail, et, dans la trépidation du train qui les emmène, ils revivent, oublieux des départs trop matinaux, des valises trop lourdes, des sandwiches remplaçant les repas, des nuits écourtées, des cachets impayés, des recettes dérisoires, des sifflets qui ne furent pas toujours ceux des chefs de gare, ils revivent le temps où la triste vieillesse ne les avait pas mis au rebut, leurs tournées de jadis, tandis que leurs jeunes compagnons rêvent de l'époque certaine et prochaine où, fêtés, adulés, comblés, ils voyageront en sleeping.

La petite troupe gardera belle et bonne humeur. Elle est à l'épreuve de toutes les aventures et de tous les avatars. Le plus baroque et le plus morne public ne l'intimideront pas. Presque toujours, ajoutons-le, ce ne sont nullement des déconvenues qui les attendent dans leur pèlerinage estival. Ils sont aimablement accueillis, au contraire, et comme ils s'adressent à un public facile et docile de braves gens, comme ces braves gens ont un peu oublié, depuis leur départ de Paris, la vraie musique et les vrais artistes... quand ils les connaissent, comme la petite troupe offre la garantie de ses titres illusoires qui aident à l'illusion, ce prodige se réalise non seulement qu'elle gagne sa vie au moyen de ses quêtes ou de ses astucieuses tombolas, mais encore qu'elle obtienne quelques applaudissements. Ainsi de vieux comédiens et de pauvres artistes ont leur vacances, et, pour un temps, double nourriture assurée : celle du corps et l'autre, qui leur est peut-être plus nécessaire, celle du succès. Comme vous, j'en suis bien aise.

[blocks in formation]

LITTERATURE Enquête sur les romantiques Réponses de M.M. Henri de Régnier, Paul Souday, Louis Dimier et Gonzague Truc.

L'idée de cette enquête naquit d'une conversation tenue à l'Opinion voici quelques mois. Les romantiques y étaient durement traités comme ils devaient être insupportables dans le privé, disait-on ! Si ceux que nous admirons le plus vivaient à notre époque, chacun les fuirait avec horreur. Hugo, cet animal géant, n'a pas été conçu aux proportions de l'homme normal. Il écrase les autres de sa masse, comme les saints dans les tableaux primitifs. Lamartine ? Celui du Lac peut-être et des Méditations. Mais le Lamartine de 48 serait bien ennuyeux. Ne s'aviserait-il pas d'écrire l'Ode au scrutin d'arrondissement ? Vigny?« Ce vieux cygne constipé » comme a dit si justement Musset. Et Musset luimême, à l'humeur changeante et qui connaîtrait aujourd'hui cent mille recettes de cocktails, n'en userait que pour s'enivrer...

Sainte-Beuve ne récoltait guère plus de suffrages mais, au moins, devait-on convenir, qu'un critique a ce mérite de poursuivre, par métier, d'autres sujets de curiosité que luimême. On pouvait donc regretter la conversation de SainteBeuve.

Un autre fut proposé. Celui-là trouva un défenseur et même un ami en la personne de Jacques Boulenger : « On a toujours été injuste pour lui, s'écria notre rédacteur en chef cœur sec, égoïste, ennemi de toute générosité, voilà comme l'accablent ceux qui ne veulent pas le connaître. Pourquoi refuser de voir la dignité de sa vie, son élégance d'esprit, son tact? Je le trouve fort sympathique en dépit des apparences. >>

Si nous ne nommons pas cet oiseau rare c'est qu'il n'a listes que nous avons interrogés. Peut-être les nouvelles encore été désigné par aucun des écrivains et des journaréponses que nous attendons feront-elles tomber son nom dans l'urne. Pour l'instant, on l'ignore ou bien on l'oublie.

Donc, la question posée fut celle-ci : « Quel est, selon Voici les premières réponses. vous, le plus sympathique représentant du romantisme ?>>>

M. Henri de Régnier, de l'Académie française

Il n'est pas étonnant que M. Henri de Régnier choisisse Stendhal. Leur commun amour de l'Italie est la cause de ce rendez-vous. Et le père de Tito Bassi dut s'attarder pendant ses promenades sous les feuillages du jardin Boboli de Florence, à prêter l'oreille aux chuchotements du vent pour y percevoir les dernières confidences amoureuses du hussard romantique >>.

Si Stendhal peut être considéré comme un romantique, nous

« AnteriorContinuar »