Imágenes de páginas
PDF
EPUB

4

L'OPINION

2 juillet 1927

ECE QU'ON DITE

Le maréchal Foch docteur.

Cette semaine, le maréchal Foch a reçu en grande pompe à l'Université d'Oxford le grade et les insignes de docteur en droit.

Sans vouloir le moins du monde faire un rapprochement qui n'aurait pour nous rien d'agréable, rappelons que le 31 mars 1814 cette même Université. conféra le même grade à un autre militaire heureux le général Blucher.

Ce ne fut pourtant que quelques mois plus tard que ce dernier joua à Waterloo le rôle que l'on sait.

Autour de la Santé.

Samedi soir, tout Paris riait au récit de l'évasion de MM. Daudet, Delest et Sémard. Par une amusante coïn cidence ce fut ce soir-là que l'Intransigeant publia sous le titre « Comment il faut se servir du téléphone » une analyse d'une brochure éditée par le secrétariat général des Postes et Télégraphes et qui a pour objet d'enseigner au public le moyen d'utiliser le téléphone et de « se servir du progrès en son temps ».

Ce même soir, M. Abel Bonnard consacrait dans le Journal des Débats un « au jour le jour » au téléphone. On y pouvait lire :

<< Parfois, quand tout marche bien, le téléphone peut donner à une voix une sorte d'évidence délicieuse. La séduction d'une belle voix a toujours été très grande. La voix est vraiment la sœur du regard. Elle a d'autant plus de pouvoir sur nous que, comme le regard et le sourire, et peut-être plus encore qu'eux, elle est à la frontière du physique et du moral. Elle arrive jusqu'à nous comme la messagère d'un monde inconnu. »

[blocks in formation]
[blocks in formation]

On lit dans Travail et Corporation, hebdomadaire com mercial à Liège :

<< M. Steurers est désolé de vous apprendre la mort de sa femme, née Charlotte Van Meerkeens, ravie à son affec tion en pleine jeunesse. Comme il y a des mineurs faut liciter le fonds de commerce. M. Steurens est spe cialiste de la jolie lingerie fine. Il voudrait trouver pour une fois son deuil passé (un an environ) dame avec for tune, jolie, jeune, élégante et avenante avec clientèle Fortune assurée à bref délai. »

Voilà un veuf qui conserve tout son sang-froid.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors]

Extrait d'un jugement rendu par le Tribunal corre tionnel de la Seine (XI Chambre) :

<< Attendu qu'il résulte des débats que l'accident su << venu au sieur Maxime G...., provient de l'inexpérien << et de l'inattention du chauffeur de taxi Benjamin I << Que celui-ci, au dire des témoins, tout en condu << sant sa voiture à une allure normale, fut soudain atti << par la vue d'une dame qui stationnait sur le trottoir << qu'il se retourna même pour la regarder encore ; q << l'apparition soudaine de cette jolie personne fut <«< cause indirecte de l'accident, puisque le chauffe << oublia son volant et alla buter contre la voiture « M. F. où se trouvait la victime... »

Le bulletin.

L'Académie ne vota pas toujours comme elle vote aujourd'hui.

C'est Perrault qui, dans l'espoir candide de conjurer l'arbitraire et l'intrigue, la décida à adopter le mode actuel d'élection.

Avant lui, quand un académicien mourait, quelqu'un de la Compagnie, après l'enterrement, disait : « Nous avons perdu M. Tel, etc. Je crois que nous ne saurions mieux faire que de jeter les yeux sur M. Tel pour remplir sa place: vous connaissez son mérite, etc. »

Une curieuse architecture.

On lit cette amusante annonce dans Cocarde Roug organe des socialistes unifiés du Languedoc, à propos l'Exposition qui se tient actuellement à Montpellier

<< En entrant au Pavillon du Travail où se trouvent << envois des artisans, nous avons été agréablement su << pris de voir un panneau entièrement fabriqué en m << de pin. Songez à la difficulté que cet artisan a e << pour pouvoir sculpter avec ses doigts seuls dans ce << matière aussi difficile et aussi, sans doute, pour se

procurer. »

AFFAIRES EXTERIEURES La réforme de la Chambre des lords

Qu'il y ait quelque chose sinon de pourri du moins d'altéré, dans le royaume de Grande-Bretagne, on n'en saurait douter quand on voit le cabinet conservateur de M. Baldwin toucher à l'arche sacro-sainte de la constitution britannique et interrompre la tradition qui veut que cette constitution ne résulte pas de textes écrits, mais d'un ensemble lentement formé de pratiques et d'usages, quand on le voit, en un mot, proposer la réforme de cette institution tant de fois séculaire la Chambre des lords.

Il est vrai que, dans l'esprit de ses auteurs, le projet de réforme, loin d'avoir pour objet l'amoindrissement de la Chambre Haute, est au contraire destiné à rajeunir celle-ci et à augmenter par là son influence... Mais il est des vieillards si fragiles que tout médicament risque de les tuer, ce médicament se donnât-il pour l'eau de Jouvence.

On se représente généralement en France la Chambre des lords comme un Sénat héréditaire.

Ce n'est pas tout à fait exact.

D'abord la Chambre Haute britannique n'est pas seulement composée de membres héréditaires. Ensuite ses pouvoirs sont, depuis longtemps déjà, mais surtout depuis 1911, considérablement inférieurs à ceux de notre Sénat français.

Historiquement, la Chambre des lords correspond à la réunion des ordres du clergé et de la noblesse des Etats généraux de l'ancienne France. Officiellement elle est désignée par l'expression: « Les lords ecclésiastiques et laïques du Royaume assemblés en Parlement. »

En font partie

1° A titre héréditaire, les pairs d'Angleterre (ou du Royaume-Uni). Il y en a actuellement près de six cent quarante, la plupart n'ayant pas une origine bien ancienne car depuis cent ans la Couronne (en fait le premier ministre en fonctions) a exercé très libéralement son droit de créer des pairs à volonté,

2° Pour la durée de chaque Parlement, seize pairs d'Ecosse élus par la pairie écossaise.

3° A titre viager, vingt-huit pairs d'Irlande, élus par la pairie irlandaise.

4° A titre vlager également, vingt-six prélats anglicans (les archevêques de Cantorbéry et d'York, les évêques de Londres, Durham et Winchester, plus les vingt et un plus anciens évêques). C'est une question élégante, toujours dé

battue et jamais résolue, que celle de savoir si ces prélats sont membres de la Chambre en vertu du « temporel » ou 'du « spirituel » de leurs sièges épiscopaux.

5. Enfin, toujours à titre viager, les quatre « lords d'appel ordinaires. »

L'institution de cette dernière catégorie est caractéristique des méthodes constitutionnelles anglaises. Traditionnellement, la Chambre des lords remplit en Angleterre les

fonctions de Cour suprême de justice. En 1876, on s'aper

çut de ce qu'il y avait d'absurde à faire casser les arrêts des plus hauts tribunaux du Royaume par une assemblée de gens qui, pour la plupart, n'étaient là que parce que leurs pères y étaient avant eux. Partout ailleurs on eût transféré à un autre corps les attributions judiciaires de la Chambre des lords. Mais en Angleterre, où, jusqu'à présent, on ne touchait pas volontiers aux coutumes existantes, on décida simplement de conférer à la Couronne le pouvoir de nommer quatre lords à titre viager. Dans la pratique ces quatre << lords d'appel ordinaires » sont toujours choisis parmi les plus éminents magistrats et quand la Chambre siège comme Cour suprême, tous les membres, sauf ces quatre, s'abstiennent de paraître !

Ainsi composée, la « très honorable Chambre des lords » constitue, théoriquement, le corps le plus considérable du Royaume.

Dans les grandes cérémonies, revêtus d'hermine et de pourpre, couronne en tête, ses membres, au milieu des lambris dorés de leur salle des séances, paraissent une assemblée de rois.

C'est d'ailleurs parmi eux que le souverain vient solennellement ouvrir les sessions parlementaires.

C'est chez eux enfin que la sanction royale (sanction jamais refusée depuis deux siècles) est donnée aux bills parlementaires par la formule française: Le roy le veult.

(Le vocabulaire officiel de la Chambre des lords est d'ailleurs en grande partie français. C'est ainsi que, votant oralement pour ou contre un projet, les lords s'écrient : content ou non content. C'est de même aussi qu'un projet de loi amendé par les lords après avoir été voté par les Communes est retourné à celles-ci avec la formule: A ceste bill avec amendements les Seigneurs sont assentus. Aussi bien, il y a vingt ans encore, élisait-on périodiquement à la Chambre des lords une commission chargée de recevoir « les pétitions de Gascogne ». On avait commencé au temps du Prince Noir et on avait continué depuis !)'

[graphic]

Tout cet éclat dissimule une assez médiocre réalité. La pairie anglaise a été, surtout depuis cinquante ans, envahie par des hommes qui ont acheté leur titre au gouvernement du jour et n'ont rien ajouté à l'illustration de l'assemblée. Parmi les représentants des vieilles familles, beaucoup ne paraissent jamais dans la salle des séances. Au cours des dix dernières années, plus de deux cents pairs n'y ont jamais mis les pieds. Aussi bien les débats y sont-ils, sauf exception, courts, mornes et sans grand intérêt.

[ocr errors]

D'ailleurs, depuis 1911, la Chambre des lords n'a plus qu'un pouvoir constitutionnel extrêmement réduit.

Les lords avaient essayé de s'opposer au budget « démagogique présenté par le ministère Asquith-Lloyd George. Le corps électoral consulté ayant donné une écrasante majorité au gouvernement, celui-ci fit voter, sous la menace d'une << fournée» de pairs une loi destinée à empêcher à l'avenir toute répétition de l'essai de résistance tenté par la Chambre haute :

Aux termes du Parliament. Act de 1911, tout projet voté par les Communes et contenant des dispositions financières doit être obligatoirement adopté, sans modifications, par la Chambre des lords dans le mois suivant. Passé ce délai, le projet est promulgué par le roi sans que le vote des lords soit nécessaire. C'est par ailleurs le Speaker des Communes qui décide souverainement du caractère financier ou non d'un projet voté par la Chambre basse.

Quant aux projets ne contenant pas des dispositions financières, les lords peuvent les amender ou même les repousser. Mais si le même texte vient de nouveau à être adopté par les Communes à deux reprises différentes, au ccurs de deux sessions successives, il est promulgué tel quel par le Roi en dépit de l'opposition de la Haute Assemblée.

Ces dispositions ont en fait réduit la Chambre des lords au simple rôle de Chambre d'enregistrement et de parlote académique.

Dans le préambule de l'Act de 1911, il était dit que les dispositions restrictives de l'autorité de la Chambre des lords n'étaient prises qu'en attendant la réforme de celle-ci et son remplacement par une Assemblée « à base populaire ».

Différents projets de réforme furent étudiés, au sein surtout de la Chambre des lords elle-même. Mais aucun ne fut poussé très avant. Parmi les conservateurs, beaucoup de lords ne tenaient nullement à abdiquer des fonctions encore honorifiques, bien que peu effectives. Quant aux libéraux et aux socialistes, ils préféraient la vieille Chambre haute, aux ongles rognés par l'Act de 1911, à une Assemblée rajeunie et vraisemblablement plus active.

Le ministère Baldwin vient de tirer la réforme des cartons où elle sommeillait.

Le projet exposé récemment au nom du gouvernement par le lord chancelier n'a d'ailleurs rien d'attentatoire à la suprématie de la Chambre des Communes.

Le chiffre des membres de la Chambre haute (qui dépasse actuellement largement les sept cents) serait ramené à trois cent cinquante.

Seuls les princes du sang, certains évêques et les << lords 'd'appel ordinaires » seraient membres de droit de la Chambre des lords.

Quant aux autres membres, ils seraient en partie élus pour une période de douze ans par l'ensemble des pairs héréditaires, en partie nommés, pour la même période, par le gouvernement.

(Le dernier mode de recrutement permettrait même à un gouvernement socialiste de se faire adéquatement représenter à la Chambre des lords, ce qui n'est actuellement quère possible).

Le Parliament Act de 1911 ne serait pas modifié dans son ensemble. Toutefois ce serait à une Commission mixte composée de membres des deux Chambres et non plus au seul Speaker des Communes qu'il appartiendrait de décider du caractère financier d'un projet voté par la Chambre basse. De plus les lords retrouveraient le droit d'opposer un veto absolu à tout projet de nature à modifier la Constitution du royaume ou les pouvoirs de la Chambre haute elle-même.

go

Il n'y a rien là, semble-t-il, qui puisse vraiment effaroucher les partis de gauche. Ceux-ci cependant ont immédiatement déclaré la guerre au projet. Les socialistes jettent feu et flammes. Quant aux libéraux, ils renchérissent d'indignation. Leur chef, M. Lloyd George, n'allait-il pas, samedi dernier, jusqu'à s'écrier que ce projet constituait « la plus grande attaque qu'on ait dirigée contre les libertés du peuple anglais depuis le temps de Charles Ier » et que c'était « un chemin menant tout droit à la révolution ».

C'est au moins exagéré. Il est cependant certain que la Chambre des lords que rêve M. Baldwin, composée d'un nombre relativement restreint d'hommes éminents, compétents et assidus, disposerait, indépendamment de ses pouvoirs légaux, d'un prestige qui lui permettrait peut-être de s'opposer utilement à certaines entreprises de la démagogie.

Et c'est ce dont les démagogues du genre de M. Lloyd George ne veulent pas.

Le ministère avait annoncé l'intention de faire voter rapidement son projet. En présence de l'opposition de gauche et aussi des critiques que la réforme proposée a suscitée chez les conservateurs eux-mêmes, le gouvernement a fait connaître mardi à la Chambre des Communes son intention de renvoyer à la session d'automne l'étude de la question. Encore se bornera-t-on vraisemblablement à faire voter, à ce moment là, une disposition transférant du Speaker à une Commission mixte le pouvoir de décider du caractère financier d'un bill: la vieille Chambre des lords n'est pas encore morte.

Peut-être est-ce en prévision d'un retour offensif des forces de gauche, lors des prochaines élections générales que le cabinet conservateur a songé, par le rajeunissement de la Chambre des lords, à opposer une digue à leur violence. Mais les défenses qui résultent de textes écrits Anglais le savaient naguère mieux que personne étrangement fragiles.

les

sont

Ce n'est vraisemblablement pas en ajoutant un fronton Louis-Philippe à un édifice gothique que M. Baldwin détournerait de son pays le péril démagogique.

Ce serait plutôt en restant fidèle à la grande tradition des conservateurs anglais, de ces conservateurs qui, si longtemps, tinrent à ne laisser à aucun autre parti le soin comme l'honneur de diriger les courants populaires et de réaliser les réformes sociales.

JACQUES CHASTENET.

AFFAIRES

mois de l'exercice, l'excédent des recettes sur les dépenses effectives était de 255 millions, alors que l'excédent total prévu pour les douze mois était de 190 millions..

De 91.309 millions de lires au 30 juin 1926, la dette avait été ramenée à 90. 751 millions le 31 mai 1927 et sur ce chiffre, la dette flottante, grâce au succès de << l'emprunt du licteur » ne représentait plus que 6.167 millions.

Au point de vue monétaire, les résultats ont été étonnants. En juillet 1926, les changes oscillaient autour de

ECONOMIQUES 150 lires pour 1 livre sterling. Aujourd'hui, la cote marque

La politique monétaire de l'Italie

Il va y avoir exactement une année qu'après deux discours retentissants, M. Mussolini et le comte Volpi, ministre des Finances, engageaient la « bataille de la lire » et décidaient d'appliquer à la revalorisation de la monnaie, tous les puissants moyens de l'Etat fasciste.

Afin de diminuer le déficit de la balance commerciale, les industries s'organisaient à l'appel du gouvernement, pour réduire les importations et accroître les ventes au dehors, tandis qu'une série de mesures administratives ou budgétaires conféraient à la Banque d'Italie, avec le monopole d'émission des billets le contrôle du marché des capitaux et orientaient vers une déflation inflexible la politique monétaire de l'Italie.

De l'aveu même des autorités fascistes, la bataille n'est pas encore gagnée, n'est en tout cas pas encore achevée. Mais il est permis de croire qu'une période nouvelle va s'ouvrir. Des déclarations récentes du président du Conseil, un discours du comte Volpi, enfin plus éloquents encore peut-être que les harangues officielles, les chiffres qui révèlent la situation exacte et les besoins du pays font augurer un changement prochain de direction.

Les résultats acquis en une année par l'effort du peuple italien et de son gouvernement méritent l'admiration.

La balance commerciale en dépit de difficultés immenses qui sont particulières à l'Italie a été améliorée. Les importations, qui s'élevaient à 26.200 millions de lires en 1925, ont été, en 1926, de 25.871 millions. Les exportations sont passées de 18.274 millions en 1925 à 18.670 millions en 1926. Le déficit du commerce a donc diminué de 725 millions de lires soit plus d'un milliard de francs.

Pendant les quatre premiers mois de 1927, la tendance a été plus favorable encore et le déficit pour cette période a été réduit de plus de 800 millions de lires par rapport à 1926. D'autre part, les profits invisibles de la balance des comptes ont grossi, grâce à l'activité du tourisme étranger et du fait du développement intensif de la marine marchande, dont le tonnage a plus que doublé depuis la

guerre.

La situation budgétaire, en dépit de la revalorisation, est restée favorable. Au 30 avril, le total des rentrées s'élevait à 17.251 millions de lires, alors que les évaluations pour l'année fiscale s'achevant au 30 juin prévoyaient un total de recouvrements de 18.543. Pour les dix premiers

85 lires. La réserve de la Banque d'Italie était au dernier bilan de 2.812 millions de lires or, ce qui correspond au cours actuel des changes à une circulation gagée dans une proportion de plus de 50 %. Il n'y a guère en Europe que la Banque de France qui offre aux porteurs de billets une garantie plus élevée.

La rapidité et l'amplitude de l'appréciation de la lire en ont fait mettre en doute le caractère durable.

La politique budgétaire si vigoureuse du gouvernement ne pouvait, en effet, suffire à elle seule à expliquer l'extraordinaire hausse de la monnaie. Celle-ci semble avoir été provoquée par les mouvements massifs de capitaux qui depuis douze mois ont été continuellement en faveur de la balance des comptes de l'Italie.

Les achats de lires sur le marché des changes ont eu deux causes principales: la spéculation à la hausse de la monnaie italienne et les emprunts étrangers. Le gouvernement ne disposait, pour s'opposer à la première, que de moyens d'une efficacité limitée. Ayant renoncé à toute faculté d'augmenter la circulation fiduciaire, le Trésor italien ne pouvait offrir aux spéculateurs à la hausse les contre-parties théoriquement illimitées que la loi du 7 août a mis chez nous à la disposition de la Banque de France. Le contrôle du gouvernement sur les emprunts étrangers était en revanche absolu. Au cours de la période de douze mois qui s'est écoulée depuis le 1er juillet 1926, le ministère du Trésor italien a autorisé l'émission à l'extérieur par des Sociétés industrielles, des institutions publiques ou des municipalités, d'emprunts dont le montant total atteint aujourd'hui 200 millions de dollars environ. Ce chiffre n'a, en lui-même, rien d'excessif si on le rapproche de celui de la population italienne et si l'on pense aux économies que les opérations de crédit effectuées par nos voisins leur permettront de réaliser.

La plupart des emprunts auxquels le ministère des Finances italien a donné son autorisation ont eu, en effet, pour objet de fournir aux grandes entreprises les ressources nécessaires au perfectionnement de leurs moyens de production. L'industrie électrique entre autres a largement bénéficié de cet afflux de capital qui, permettant l'équipement immédiat et rapide des chutes des Alpes et des Apennins, aura pour conséquence d'entraîner une sensible réduction des importations de combustibles.

Les emprunts extérieurs n'ont eu un effet considérable sur le change que parce que leurs produits en dollars out

7.

[graphic]

en livres ont dû être convertis en une monnaie dont la quantité totale était non seulement limitée de manière 'étroite, mais encore avait tendance à constamment diminuer.

[graphic]

Donc, la lire a sans discontinuer augmenté de valeur et atteint maintenant le cours de 85 par rapport à la livre. Cette revalorisation n'a eu d'abord que des conséquences favorables. Tributaire de l'étranger pour presque toutes les fournitures de matières premières, l'Italie trouvait grand avantage à restaurer le pouvoir d'achat de sa monnaie. Mais l'accentuation de la hausse, son accélération pendant les dernières semaines ont rendu inéluctable le brusque rajustement des prix intérieurs. Alors que le niveau des prix exprimés en or s'établissait en 1926 à 131, par rapport à 100 en 1914 et à 151 aux Etats-Unis, l'indice italien passait en mai dernier à 152 contre 135 aux Etats-Unis.

Ce décalage qui risquait de compromettre le succès des efforts accomplis pour le rétablissement de la balance commerciale a pour effet de donner à la « bataille de la lire >> un nouvel aspect. De l'extérieur, des grandes places financières où s'établissent les prix des monnaies, le théâtre de la lutte est transporté à l'intérieur même du pays. Ramener les prix, tous les prix, celui du travail comme celui des marchandises, à la nouvelle valeur de la lire, devient l'objet de l'effort fasciste. Une première ordonnance supprime l'indemnité de vie chère des hauts fonctionnaires et diminue celle des petits serviteurs de l'Etat et des cheminots. Les corporations ouvrières font accepter par leurs membres d'immédiats retranchements de salaires; les tarifs des transports des marchandises subissent une réduction de 15 % et, bón gré mal gré, les loyers sont abaissés de 15 à 25 %, en dépit de la résistance inattendue des propriétaires.

Cette lutte audacieuse contre les prix montre la puissance 'dont disposent, à l'heure actuelle, les pouvoirs publics italiens. Mais, quels que soient cette puissance et l'esprit de discipline du pays, les possibilités d'adaptation de l'industrie, du commerce et même du budget sont restreintes. C'est en consultant les statistiques de chômage, en suivant les rentrées d'impôts et les mouvements prochains du commerce extérieur, qu'il sera possible de dire si une nouvelle revalorisation de la lire est plausible ou si, au contraire, le taux actuel doit être regardé comme aventuré. Aussi longtemps que ces données demeureront incertaines, les jugements portés sur la politique financière italienne resteront prématurés.

RENÉ PLEVEN.

Fraiche et savoureuse

Fraiche, exquise et tonique, la Veramint, grande liqueur de menthe verte, fabriquée par de Ricqlès, est la consommation de la saison. Bue glacée ou dans de la glace pilée, la Veramint est le régal des délicats.

NOTES ET

ET FIGURES

A la santé de M. Léon Daudet

Donc, le samedi 25 juin, jour de la Saint Prosper-heureux présage! M. Léon Daudet, frais et gaillard, a

quitté la prison de la Santé. Ses adieux au personnel furent

touchants. Il remercia le directeur, M. Catry, de sa courtoisie, le félicita de l'excellente organisation de son domaine et ajouta même : « On est vraiment très bien traité ici... Je vous enverrai du monde ! »

De nos jours on ne s'évade plus on se fait libérer. La lime cachée dans une miche de pain, le trou foré lentement dans le mur, la corde faite avec des draps de lit sont devenus autant d'accessoires périmés et bons pour le bas mélodrame. La technique du prisonnier s'est renouvelée. Latude, à notre époque, ne perdrait pas six mois de sa belle jeunesse à desceller les barreaux de fer d'une cheminée. Du fond de sa prison il se ferait tout bonnement élire député ou, pour le moins, conseiller municipal. Et ce n'est pas dans un canot chétif mais bien plutôt sur vaisseau de haut bord que le condamné Henri Rochefort quitterait la Nouvelle-Calédonie.

L'ère des évasions dramatiques est passée (sauf dans les bagnes lointains, bien entendu, où les aventures récentes d'Albert Dieudonné lui donnent une suite), mais verrait-on encore aujourd'hui un sacrifice comme celui d'Hégésistrate, ce Grec d'Elée, qui, fait prisonnier par les Spartiates et la cheville enchaînée, eut le courage de se couper le pied pour recouvrer la liberté ? Nous ne le pensons pas, et d'ailleurs cette méthode primitive fut grandement perfectionnée au cours des siècles suivants, par un prisonnier italien des guerres de religion, le rusé Secundus Curion. Il faut même s'étonner que ce nom ne soit pas plus connu car il mérite de demeurer immortel pour l'ingéniosité que son possesseur déploya.

Voici quelle fut sa ruse: Enchaîné par les deux pieds il se plaignit de vives douleurs et obtint ainsi qu'on supprimât l'une de ses chaînes. A l'aide de sa chemise roulée, d'un bâton de roseau et d'un soulier, il fabriqua aussitôt une fausse jambe qu'il aligna à côté de l'autre en repliant la vraie sous son manteau. Quand le gardien revint lui rendre visite, il demanda qu'on lui changeât les fers d'une jambe à l'autre, afin qu'il pût se reposer. Il ne lui restai plus qu'à s'en aller, ce qu'il fit, aussitôt la nuit venue. Ce gens de la Renaissance savaient fort bien se débrouiller

L'évasion de Lavalette, qu'a si bien contée M. Lucas Dubreton, est d'une école plus moderne, surtout dans se détails: ce prisonnier en fuite qu'on cache pendant dix-hui jours au ministère des Affaires étrangères, c'est d'une bell ironie. A-t-on fouillé les combles de l'hôtel de la plac

« AnteriorContinuar »