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France en livres et en dollars s'accroissaient sans cessè, le marché de Londres alimentait une inflation du crédit international, dont on ne pouvait apercevoir la limite.

C'est alors que la Banque de France prit la décision de cesser l'opération qui consistait à prêter sur le marché de Londres les livres sterling dont elle disposait. Elle n'avait 'donc d'autre emploi à en faire que d'acheter de l'or. Ce qu'elle fit au milieu de mai.

Mais l'encaisse métallique de la Banque d'Angleterre ne comprend que 30 millions de livres sterling d'or disponible, le reste (120 millions) étant immobilisé comme couverture des billets, en vertu du Bank Act. Le retrait, en quelques jours, d'une quantité d'or équivalent à 3 millions 'de livres provoqua une émotion immense dans la Cité, et un renchérissement immédiat du taux d'intérêt des bons du Trésor britannique.

La polémique entamée depuis quelques mois par M. Mackenna contre le Bank Act reprit une nouvelle vivacité. Le président de la Midland Bank demande qu'une enquête officielle soit instituée pour réformer complètement la législation monétaire de la Grande-Bretagne. M. Churchill, chancelier de l'Echiquier, s'y refuse formellement.

De toute manière, il apparut que la Banque de France ne pouvait cesser d'acheter de l'or à Londres qu'à la condition d'en acheter à New-York, ce qu'elle fit. On put alors constater qu'un accord entre la Banque de France, la Banque d'Angleterre et le Federal Reserve Board américain était nécessaire, et que le problème se transformait et s'élargissait singulièrement. Il ne s'agit plus, à proprement parler, du franc, mais d'une difficulté générale qui intéresse à la fois la stabilité du franc, celle du sterling, et l'utilisation rationnelle de l'or.

Aussi attend-on avec une vive curiosité des nouvelles précises des entretiens qui ont lieu à New-York entre les trois instituts d'émission, entretiens auxquels a été convié également (sans doute pour les raisons que nous avons indiquées plus haut) le directeur de la Reichsbank.

Pour la première fois, le problème monétaire est posé sur son véritable plan, qui est international. Pour la première fois, peut-être, il apparaît clairement que les grandes nations, c'est-à-dire celles dont la prospérité financière importe à toutes les autres, doivent prendre conscience de leur solidarité.

Telle est la phase actuelle de l'« expérience ». Les esprits les plus prévenus ne lui dénieront pas une certaine grandeur.

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MAX HERMANT.

CHOCOLAT-MENIER

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NOTES ET FIGURES

Le grand prix de l'A. C. F.

Il y a vingt ans, le grand prix de l'A. C. F. remplissait d'émoi tout un département et attirait un public exalté, venu par toutes les routes de France, souvent au prix des plus grands sacrifices et de « pannes » fort angois

santes.

Aujourd'hui, les voitures sont dix fois plus nombreuses ; elles évoquent par leur forme des salons, des boudoirs ou des yachts, s'animent à la pression du pied, s'arrêtent sur place sans effort et ne réclament plus aucun héroïsme de la part de leurs conducteurs. Cependant, on va beaucoup moins au grand prix de l'A. C. F. et les journaux sportifs se répandent en commentaires sur les causes de cette désaffection.

Les engagements ne sont pas assez nombreux. C'est une bonne raison en effet, mais alors comment expliquer que le grand prix de cette année où trois marques françaises étaient inscrites seulement, ait fait venir beaucoup plus de monde que celui d'il y a deux ans, organisé au même endroit et qui donnait lieu à une compétition internationale entre la France, l'Angleterre et l'Italie ?

Autre raison la publicité de cette course est mal faite. C'est possible en effet. On a reproché âprement à l'A C. F. d'avoir « laissé tomber » l'autodrome de Montlhéry. Il y a, paraît-il, du vrai dans cette accusation, mais il faut reconnaître que cette année, le travail de préparation. fut mieux assuré. Il y avait, dimanche dernier, cinquante mille personnes à Montlhéry. Ce n'est pas considérable si l'on songe aux foules que les parties de foot-ball réunissent en Angleterre, mais c'est déjà fort bien que le programme annoncé ait intéressé tant de monde.

Les constructeurs reculent maintenant devant la course et on le comprend un peu. Même si l'on tient compte de la différence des différents prix de revient, elle leur coûte beaucoup plus cher qu'autrefois. La réduction nécessaire de la cylindrée à mesure que croissait le rendement des moteurs, impose maintenant aux ingénieurs de véritables tours de force. Une voiture de course achevée, est une œuvre d'art dont les moindres détails ont demandé des mois de travail et d'expériences. Et la précision de la mécanique est aujourd'hui telle qu'une voiture bien réussie peut, au départ, faire le vide autour d'elle. Les concurrents savent avant la course que un tel est de dix ou de quinze kilomètres plus rapide qu'eux. Ils ne peuvent donc compter que sur l'imprévu pour gagner. Et cet imprévu est aujourd'hui bien diminué. On ne voit plus guère un constructeur perdre une course par la faute de ses bougies, encore moins à cause de ses freins ou de ses pneus. Ajoutons à cela que le plus rapide est souvent celui qui a la marche la plus sûre

car il est le seul à rester maître de sa vitesse et il ne la donne d'essence et d'huile. Ne pourrait-on s'en inspirer pour le qu'à bon escient. prochain Grand Prix ?

Alors à quoi bon risquer tant d'argent quand une course est perdue d'avance ? C'est le raisonnement que chacun se fait. Il n'est valable, bien entendu, que pour une épreuve comme celle de l'A. C. F. où les voitures sont souvent engagées avant leur naissance, ainsi que les chevaux de course, et où l'on peut avoir longtemps à l'avance, des renseignements exacts sur leur mise au point.

Il est rare que plusieurs marques réussissent simultanément la création idéale du type de voiture proposé. En 1922 les Fiat dominaient toutes les autres. 1924 fut l'année d'Alfa-Romeo. Cette année, en France, Delage possède une suprématie incontestable. Fiat a, paraît-il une douzecylindres étonnante. Pourquoi ne l'a-t-il pas engagée à Montlhéry? Parce qu'elle n'avait pas terminé sa mise au point et que la marque, estimant qu'elle n'avait pas de chance sérieuse contre Delage, se réservait pour SaintSébastien Espérons que ces deux rivaux s'y retrouveront.

Dimanche dernier la course de Delage fut d'une sérénité magnifique. La meilleure voiture était menée par le meilleur conducteur. Le vrai signe du talent, c'est l'illusion qu'il donne de la facilité. La précision de Robert Benoist, son sang-froid, son intelligence de la course sont si naturels qu'on oublie de les admirer. C'est aux virages surtout qu'il faut le voir. Je suis resté l'autre jour une demi-heure à la fameuse « épingle » du Fay, tournant très sec et qui se termine en légère descente ce qui en accroît la difficulté. Il était amusant d'apprécier les différents styles: Wagner virant sec se laissait déporter jusqu'à frôler l'herbe du bas côté de sa roue arrière. Williams, autre pilote de Talbot, serrait son virage en égratignant la route d'un coup d'accélérateur rapide. Benoist traçait si bien sa courbe que sa voiture ne « chassait » pas d'une ligne. On l'aurait cru moins rapide que les autres, si grande était son aisance.

Il mena sa course comme il le voulut et accéléra plus tôt qu'à l'ordinaire. Parti à trente mètres derrière Divo, il le passa dès le quatrième tour ce qui montre combien il était sûr de sa voiture. Il faut regretter que Divo n'ait pu lui résister davantage. La lutte eût été fort belle si Benoist n'eût pas trouvé une tâche facile.

Le public qui dédaigne les subtiles questions de cylin drée, ne demande qu'une chose la bataille. Sa bonne volonté était évidente dimanche. Une voiture en dépassaitelle une autre (fût-ce entre conducteurs de la même marque) on le voyait éclater en applaudissements. S'il bouda le prix de la Commission sportive, ce ne fut pas seulement à cause du temps pluvieux, ni parce qu'il se donnait un samedi, mais bien plutôt à cause du souvenir que lui avait laissé le dernier grand prix de tourisme.

Hâtons-nous de dire qu'il eut tort et qu'il perdit le spectacle d'une lutte ardente. Il est rare de voir comme samedi dernier, le vainqueur de la course, se faire dépasser dans le dernier tour, puis reprendre la tête et gagner de quelques mètres ainsi que le fit André Boillot devant Doré. Donc, ce règlement du prix de la Commission sportive paraît bon. Il laisse la cylindrée libre et ne limite que la consommation

Le constructeur Bugatti, interviewé à ce sujet par notre confrère Frantz-Reichel du Figaro réclame la formule libre, entièrement libre. C'est peut-être excessif. Mais la cylindrée libre, avec une consommation limitée paraît fort intéressante et l'A. C. F. devrait bien examiner cette solution. ROBERT BOURGET-PAILLERON,

L'exposition internationale du Livre
à Leipzig

Leipzig n'est pas seulement la ville de la Foire, c'est aussi et surtout la cité du Livre. Les éditeurs y sont innombrables et le promeneur qui circule dans ses belles et larges avenues remarque souvent sur de grands bâtiments modernes les titres répétés de Musée du livre, Maison du livre, Ecole des arts graphiques.

Une foule de documents y sont rassemblés. Ici, ce sont les titres de livres, depuis les éditions originales de Goethe et de Luther jusqu'aux plus modernes à côté c'est une collection de somptueuses reliures françaises et allemandes des XVI, XVIIe et XVIIIe siècles.

A l'Ecole des Arts graphiques, les élèves des deux sexes sont reçus jusqu'à quarante ans. Ils peuvent suivre simulde tanément des cours de brochage, de mise en page, reliure, de gravure sur bois ou à l'eau forte et de lithos. Cette installation modèle comporte des ateliers multiples, a.ec presses mécaniques, presses à bras et tout ce qui est nécessaire à la naissance d'un beau livre.

Berlin, jalouse de la suprématie de Leipzig dans l'industrie du livre, cherche activement à la lui ravir, mais Leipzig se défend énergiquement et vient d'organiser une Exposition internationale du livre dans le rez-de-chaussée de son principal musée. Dix-neuf pays ont participé à cette manifestation très réussie. Celui qui a le plus grand nombre d'exposants est la France.

Bien entendu, les Saxons sont là en grand nombre. Il leur a été facile, étant sur place, de rechercher dans leurs cartons et chez leurs éditeurs tout ce qui pouvait mettre leurs œuvres en valeur. Celui d'entre eux dont la personnalité me semble la plus marquante et dont il m'a été permis d'étudier l'œuvre de près, est le professeur Hugo Steiner Prag. Cet artiste dont la virtuosité étonnante se joue des difficultés de l'eau forte et de la lithographie, joint à une grande puissance, une souplesse et une sensibilité captivantes. Son érudition et sa fantaisie lui permettent de comprendre et d'enrichir par ses compositions les textes les plus variés. Les Contes d'Hoffmann, la Carmen de Mérimée, Flaubert, Heine. Il y a parfois dans ses œuvres, dans scs illustrations pastorales, par exemple, une grâce sensuelle qui s'apparente à celle que possèdent si bien les

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artistes français modernes, et qu'on ne retrouve pas chez les autres illustrateurs allemands.

Bien entendu, plus encore qu'un autre, Steiner-Prag entend que les caractères typographiques et la reliure viennent parfaire son œuvre et non la desservir. Si ce n'est pas lui qui travaille le cuir ou le parchemin de ses reliures, il a soin d'en dessiner les ornements et les lettres. A ses côtés, nous voyons Max Slevogt, Richard Seewald, dont les très beaux bois en couleurs ornent les fables de Gellert, Bruno Goldsmidt, Buhe, Gulbranson du Simplicissimuss, qui a fort bien illustré les contes d'Andersen.

Les Polonais sont des artistes bien intéressants; l'art slave, le bel art slave de Bakst chassé de la Russie par les bolcheviks (qui exposent ici des dessins incohérents) semble s'être réfugié, en s'amplifiant, en Pologne. Les bois de Kaminski, les illustrations et les remarquables couvertures illustrées pour des publications et des revues par Bartlomiejczyk ainsi que les belles lettres et enluminures de Poltawski intéresseront.

Le Hongrois Julius Conrad expose une amusante reliure en parchemin peint et doré pour un livre de Jean Cocteau, le Belge Tytgat enchante avec un envoi très important de dessins pour livres d'enfants. Son « Carroussel de VaterMael» est une manière de petit chef-d'oeuvre. Dans le domaine des éditions pour la jeunesse, l'Angleterre, la Hongrie, la Pologne, T'Italie et la Belgique occupent les premières places.

La salle française donne une impression de fraîcheur et de spontanéité délicieuses. Quel esprit délicat dans cette pléiade d'artistes Barbier, Brissaud qui chantent le chic de la femme moderne avec ses jupes et ses cheveux écourtés; Dethomas, Segonzac qui peint des boxeurs avec un réalisme spirituel; Maurice Denis, Hémard, Guérin, Laprade, Silvain Sauvage, de magnifiques bois d'Hermann-Paul, Galanis, Carlègle, Lepape, Gus Bofa. Les bois d'Emile Bernard sont hors de pair. Ce bel artiste grave avec un esprit, une virtuosité et une souplesse incomparables; ses compositions pour les Fioretti sont d'un style admirable.

Et voici trois livres édités avec un tel goût qu'ils me semblent approcher de bien près la perfection : le Bouclier du Zodiaque orné des bois de Galanis; les Affaires sont les affaires illustré par Hermann Paul et enfin les Fêtes galantes orné de lithos dessinés par Guérin avec un brio, une spontanéité qui charment infiniment. Les reliures de Legrain et de Baudin sont fort belles.

Qui croirait, en visitant le Stand de l'Angleterre, que le but de cette Exposition saxonne est de montrer la production de ces douze dernières années! Ses artistes sont restés dans la tradition des préraphaélites! Que de faux Burne Jones, de faux Rossetti !

Dulac, Rackham sont bien présents et ils ont encore du talent et de la distinction, mais qu'ils sont donc loin de la note moderne et comment ont-ils pu rester insensibles devant cette évolution universelle ?

Cette Exposition organisée par un Comité, dont le président est le professeur Hugo Steiner-Prag, avec un souci d'impartialité et de déférence envers tous les pays invités, vient à son heure. Il faut espérer que cet effort dont l'initiative honore la Saxe sera continué.

Mais n'oublions pas qu'il y a vingt ans déjà M. Frantz Jourdain avait créé au Salon d'Automne une Section du Livre. GENEVIÈVE GRANGER.

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Palmarès.

LITTERATURE

Si le Pape met parfois des livres à l'index, il lui arrive d'en recommander d'autres. C'est ainsi qu'on a pu lire dans les journaux romains une liste de volumes offerts par Pie XI à sa nièce, qui vient de se marier, pour lui constituer une bibliothèque. Naturellement, ce sont surtout des livres de piété ou de morale ; mais les auteurs français y sont en grosse majorité, et certains appartiennent à la littérature.

On relève dans cette bibliothèque les Sources, du P. Gratry; Féminisme et christianisme, du P. Sertillanges, membre de l'Institut; la Charité à travers la vie, de feu M. d'Haussonville; six volumes de Mgr Dupanloup; les seize volumes bien connus de Dom Guéranger, abbé de Solesmes, sur l'Année liturgique, et d'Eglise) sur le Mariage. Le Pape actuel apprécie aussi viveun livre du P. Monsabré (que Huysmans appelait un Coquelin lique » des nouveaux auteurs ne semble pas avoir sa faveur. ment les œuvres de Johannès Joergensen. La « littérature catho

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L'Immortel distrait.

M. André Chevrillon n'a pas voté l'autre jeudi à l'Académie. Il avait promis sa voix à M. Fernand Gregh, et il est homme de parole, mais un peu distrait.

Il était revenu tout exprès du fond de la Bretagne, pour mettre son bulletin dans l'urne. On l'a vu arriver à l'Institut sur le coup de trois heures de l'après-midi... Tout était fini.

Il avait oublié que si les séances ordinaires de l'Académie commencent à trois heures et demie, celles d'élections s'ouvrent à deux heures!

Il avait fait inutilement 500 kilomètres de chemin de fer. Il en eût été de même d'ailleurs s'il avait voté, car son suffrage n'aurait rien changé au résultat du scruti

Aussi, M. Chevrillon est-il reparti pour la Bretagne avec le sentiment du devoir accompli

Les Dix.

La double élection de MM. Abel Hermant et Emile Mâle porte à dix le nombre des normaliens qui siégeront désormais à l'Académie.

C'est le quart de la Compagnie !

Ces Dix sont: MM. René Doumic et Henri Bergson, Mgr Baudrillart, MM. Joseph Bédier, Georges Goyau, Camille Jullian, Emile Picard, Louis Bertrand et les deux derniers élus. Que va faire ce Conseil des Dix ?

Rimbaud en 1870.

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M. Georges Izambard fut, en 1870, le professeur de rhétorique, le confident et l'ami d'Arthur Rimbaud, alors élève au collège de Charleville. Depuis lors, il est demeuré parmi les fervents défenseurs de la mémoire du poète. Et ce mois-ci cinquante-sept ans après ! il publie sous le titre A Douai et à Charleville, et sous la signature d'Arthur Rimbaud, des lettres inédites de son disciple maître. On y voit Rimbaud, avant de devenir le communard que l'on sait, fuir à Paris, s'y faire emprisonner, rapatrier de force, errer à Charleville, puis à Douai, où il tâta du journaliste et devint garde national ... sans uniforme ni fusil. Rimbaud était alors si bon patriote qu'il écrivit de sa main une pétition au maire de la ville pour réclamer des armes et une instruction plus active.

Ajoutons que M. Izambard, doyen d'âge des rimbaldistes, et qui a eu maille à partir avec MM. Marcel Coulon et Paterne Berrichon, a públié son premier article sur Rimbaud, en 1891 !

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La Chronique Médicale ouvre sur ce point une enquête. L'allégation a été, en effet, plusieurs fois soutenue.

L'auteur ou les auteurs des Mémoires d'une femme de qualité sous Louis XVIII, ouvrage plus ou moins apocryphe, mais dont on n'a pas le droit de suspecter entièrement la véracité, écrit de Châteaubriand au tome I, p. 309:

<< Sa tournure est presque bourgeoise; il a des épaules un peu inégales, mais je n'y avais pas fait attention, le voyant toujours à travers la beauté de son style, jusqu'à ce que je lusse ce singulier éloge des bossus, qu'il a introduit dans la Vie du Duc de Berry, où il nous dit que les épaules du prince étaient un peu élevées, ainsi que dans toutes les grandes races militaires. »

Nous commencerons dans notre prochain numéro la publication d'une enquête de notre collaborateur Robert Bourget-Pailleron, sur les écrivains et les artistes de la période romantique.

CE QU'ON LIT

Euvres complètes de Villon, publiées avec une Introduction et des notes, par Louis DIMIER (Librairie Delagrave).

La nouvelle édition de Villon profite naturellement des travaux remarquables d'Auguste Longnon et de Thuasne, de Marcel Schwob et de Pierre Champion. Mais elle s'adresse au grand public et sa première originalité est d'offrir l'orthographe moderne. Entendez par là non pas la réduction constante des mots de Villon à la forme qu'ils ont prise aujourd'hui, ou qu'ils auraient prise s'ils avaient survécu (ce serait dangereux), mais une écriture propre à être prononcée par le lecteur moderne, sans dommage pour la métrique, et avec de grands avantages pour la clarté. M. Dimier s'explique longuement du principe adopté, dans sa préface qui est pleine de bon sens et de hardiesse spiri

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tuelle. L'orthographe du XVe siècle était arbitraire, parfois absurde, la nôtre aussi; entre les deux, la préférence doit aller à la vivante. Mais en indiquant par des signes d'aujourd'hui la prononciation attestée ou probable. Exemple: seuf (soif), je❘ veuil (je veux) ou soies (sois) subsistent, commandés par la rime et l'usage. Quatre pages résument la règle suivie, qui paraît bien se conformer à la raison et à ce qu'on sait de l'histoire de notre langage. Voici les deux transcriptions d'une pièce connue, selon les deux méthodes :

Advis m'est que j'oy regreter
La belle qui fut heaulmiere
Soy jeune fille souhayler:

Ha! vieillesse felonne et fiere (etc.).

'Avis m'est que j'ouis regretter (1)
La belle qui fut héaumière
Soi jeune fille souhaiter:

'Ah! vieillesse félonne et fière...

M. Dimier se recommande d'ailleurs de l'exemple donné par M. Henri Clouzot pour Rabelais. Il prétend détruire « le fantôme d'un faux vieux-français ridicule » qui n'a jamais existé. Son introduction historique discute aussi les légendes tissées autour de Villon et le romantisme qu'on a ajouté à cette figure. Toutes ses observations, écrites dans le style qu'on connaît à M. Dimier, sont pleines de vie, d'agrément et de verdeur polémique.

Enfin, les notes, rapportées vers par vers, en bas de page (elles occupent la moitié du texte) rachètent par une commodité évidente l'aspect scolaire qu'elles donnent au livre grâce à elles, l'ouvrage devient complet comme avec une traduction et un commentaire, accessible enfin à tout lecteur. Ce résultat est obtenu sans doute en ne prêtant aucune confiance à l'érudition philologique ou historique du public. De fait qui, en dehors de quelques étudiants, peut lire un Villon ordinaire ? La vulgarisation doit faire acte de franchise.

A. T.

Historiettes, contes et fabliaux du marquis de Sade, publiés sur le texte authentique avec un avant-propos de Maurice Heine (Kra, éditeur).

Le lecteur aurait tort de frémir cette fois au nom du Divin Marquis. On ne publie ici en édition restreinte que de courts. récits qu'il rassembla lui-même avant de mourir, et qui sont .au plus dignes de la reine de Navarre ou de Boccace. Il est

(1) Le texte de M. Dimier porte ouïs; le tréma fait faux-sens et donne une syllabe de trop.

MARCEL CHAMINADE

L'EXPÉRIENCE

FINANCIERE

DE

MONSIEUR POINCARÉ

Où nous mène-t-elle ?

Emile-Paul - 12 fr.

curieux de voir réunies dans cet ouvrage la vieille tradition gauloise et l'inspiration libertine du XVIII° siècle. La plus longue nouvelle, le Président mystifié, ressemble beaucoup à certains épisodes du Roman Comique ou du Francion. Les autres ne sont ni bien méchantes, c'est le cas de le dire, ni bien passionnantes. L'impiété et le satanisme transparaissent à peine dans une ou deux, et font bien regretter La Fontaine... M. Maurice Heine a donné tous ses soins à la présentation de ce recueil, enrichi d'un fac-similé de manuscrit qu'il compare très justement à ceux de Proust.

A. T.

Anthologie des textes sportifs de l'antiquité, recueillis par Marcel BERGER et Emile MOUSSAT (Grasset).

Notre collaborateur, M. Marcel Berger, a mené à bien, avec l'aide de M. Emile Moussat, l'idée dont il entretenait naguère les lecteurs de l'Opinion, celle de « vivifier l'enseignement des langues mortes par l'étude des textes de l'antiquité les plus capables d'intéresser la jeunesse actuelle, c'est-à-dire les textes sportifs. L'idée fit rapidement son chemin dans les esprits, soutenue par toute la presse sportive. Ainsi, cet excellent manuel vient à son heure. Voici désormais, pour maîtres et élèves, un choix judicieux de textes courts et variés, dont beaucoup n'avaient même jamais été traduits en français. C'est bien là un

pont jeté entre les études classiques et la vie moderne. Ajoutons que chaque auteur, Pindare, ou Platon, ou Plutarque, ou dix autres, est présenté dans une pertinente notice liminaire. L'ouvrage était attendu dans les milieux universitaires et va constituer désormais le livre de « lectures » et de « prix » par excellence pour notre enseignement secondaire.

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