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du cru ainsi que les adresses avec prix des restaurants où la cuisine est honnête et locale, je gage que plus qu'au Syndicat d'Initiative (où neuf fois et demie sur dix on ignore les richesses gourmandes du district comme à Rochefort, Royan, Bordeaux, Carcassonne, Grasse ou Cannes) l'on s'arrêterait à leurs librairies qui, non seulement rappelleraient ainsi les << bureaux d'esprit » de jadis, mais seraient en tous points, et pour le profit de tous, des bureaux de goût.

Et parmi ces touristes qui ne pourraient regarder sans entrer ni acheter, les étrangers, qui- grâce au change, et heureusement pour notre commerce et nos finances - font de la France leur séjour préféré, ne seraient pas les derniers à étudier et à savoir comment comprendre et savourer le caractère et l'esprit de nos vieilles provinces.

ET DOCUMENTS Lubbert Bey

Là où les deux amis différaient peut-être, c'était en matière de politique. L'ancien directeur de l'Académie Royale de musique, doux sceptique pour l'ordinaire, était légitimiste à tous crins et se faisait, sur le retour des Bourbons, des illusions qui étonnaient M. Mimaut, lequel, depuis son entrée dans la carrière, ayant, dans des pays divers, souvent changé de maîtres, avait fini par se faire aux révolutions et ne se souciait plus que d'une chose, servir la France de son mieux.

En Egypte, il la servait, suivant la tradition de M. Drovetti, en recommandant ses compatriotes à Méhémet-Ali. Il en eût fait autant pour M. Lubbert, mais celui-ci, malheureusement, n'était ni demi-solde, ni capitaine de frégate, ni ingénieur. Il était musicien, et c'était le seul genre de spécialiste dont le pacha n'avait pas besoin. Sa cour n'avait point de théâtre, et son

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harem se contentait des pantomimes et des chants d'almées. A Alexandrie, il y avait bien, pompeusement dénommée Théâtre Français, une petite salle de spectacle que MM. L'Hôte, Lehoux et Bertin, les compagnons de Champollion, s'étaient amusés à décorer, mais c'était une entreprise privée, et les italien plus souvent qu'en français, le drame et la comédie, amateurs qui l'avaient montée, jouaient de temps à autre, en trompant par là leur faim d'art dramatiq et celle du quartier franc. Cependant, M. Mimaut se promettait de caser M. Lubbert, et, en attendant que l'occasion s'en offrît, il lui donna l'hospitalité, gracieuseté dont M. Lubbert voulut aussitôt s'acquitter en lui servant de secrétaire particulier. Ainsi, chacun trouvait son compte dans la combinaison qui permettait à l'ancien directeur de l'Opéra d'attendre, exempt de soucis, de meilleurs jours, et au consul général, de ne pas se priver de la société d'un ami dont il ne pouvait plus se passer.

M. Lubbert n'était déjà plus un étranger en Egypte. M. Mimaut l'avait présenté aux plus honorables des résidents français, et à quelques-uns de ses collègues. C'est, chez l'un de ceux-ci, M. de Medem, consul de Russie, qu'un soir de novembre 1833, M. Lubbert rencontra les disciples du Père Enfantin. Ils discouraient longuement sur l'avenir des peuples, la venue de l'industrie, le caractère de l'Egypte et de la Syrie. M. Lubbert les écouta avec sympathie, et s'il lui arriva de sourire, ce ne fut pas par malice, mais parce qu'il était d'humeur naturellement aimable, et il hasarda avec infiniment d'esprit des observations qui ne blessèrent personne. Il laissa aux saintsimoniens le meilleur souvenir, ils allèrent lui rendre visite, et il se lia d'amitié avec la plupart d'entre eux. Il les revit à Guizéh, chez le commandant Varn, où, avec Brod, qui était musicien aussi, il s'amusa à retrouver une foule de souvenirs communs. Le Père lui-même eut avec lui de longues conversations chez Soliman Pacha, où Lubbert allait souvent déjeuner. Un autre soir, chez Varin Bey, assis à une petite table, il applaudit David, Rogé et Gondret, qui venaient de chanter des airs de Guillaume Tell, opéra qu'il avait monté avec un succès inouï à l'Académie Royale.

Quoi qu'ils n'eussent pas manqué de lui prêter quelques bro

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chures, M. Lubbert ne se convertit pas aux dogmes des Saint-, homme, et non sans étonnement, car, dans les salons de Paris, Simoniens. Ils ne lui en tinrent nullement rancune, et lui conservèrent leur amitié.

M. Lubbert était reçu partout dans la société franque du Caire et d'Alexandrie. Ce petit monde n'était pas sans l'intéresser. Son œil et son oreille y trouvaient un peu de cette pâture de scandale dont ils s'étaient tant régalés à Paris. Il avait son couvert mis dans les plus grandes maisons et il était de toutes les fêtes. Cependant, M. Mimaut, qui n'avait pas cessé de s'occuper de lui, procura, en 1836, à M. Lubbert, un poste aussi honorable que rémunérateur.

Pour instituer et diriger ses écoles, le Pacha avait décidé de créer un Conseil supérieur de l'Instruction publique, composé, sous la présidence du général Moukhtar Bey, des effendis arméniens Artin et Stéfane. M. Mimaut fit à Méhémet Ali un tel éloge des mérites de son protégé, qu'il fut adjoint à ces messieurs et chargé de la rédaction de l'exposé de la situation de l'Egypte et de son tableau, statistique ».

M. Lubbert avait donc désormais une situation assurée, qui le rehaussait à ses propres yeux et aux yeux de ses nombreux amis. Il était haut fonctionnaire et pre-ait la chose le plus sérieusement du monde ; il avait appris à connaître les Turcs et se savait assez fin pour craindre de perdre sa place, à moins d'une invasion étrangère. Autant que des Francs, il avait réussi à se faire aimer des Pachas et des Beys, et de Moukhtar en particulier, notoire mauvais sujet, ivrogne fieffé et débauché crapuleux, qu'il avait fait rire aux larmes en lui contant des grivoiseries. Avec ses manières rondes, sa façon de comprendre la plaisanterie, il avait tout de suite plu au ministre, dont la faveur lui valut d'être bombardé président des examens à l'Ecole d'artillerie de Tourah, fonction que M. Lubbert avait acceptée sans sourciller.

Il avait quitté l'habit français pour adopter le costume turc, et ainsi déguisé, il se trouvait à son avantage. La veste soutachée et les pantalons bouffants accentuaient à la vérité son petit corps déjà obèse, mais on le remarquait à peine quand il montait à cheval; avec son sabre recourbé qui battait la selle, il avait alors fière allure. Lubbert Effendi! Un saïs courait derrière lui, qui portait sa longue pipe et sa blague. Les gens du pays s'écartaient avec respect devant le personnage, et les voyageurs étrangers s'arrêtaient pour l'admirer. Quelque Circassien, sans doute ! Mais, sous le tarbouche pourpre, la figure, ornée d'une petite barbe très coquette, taillée en collier, était toute ronde, poupine, rose et luisante, l'œil rieur, le nez gros au-dessus de la moustache soigneusement taillée en brosse, et les mains blanches et potelées couvertes de bagues. La métamorphose n'était pas telle que, dans ce digne Osmanli, on ne reconnût souvent le vieil

le bruit courait qu'il était bostangi-bachi, chef des jardiniers du sérail à Constantinople. Plus d'une fois, le cavalier turc dressa l'oreille à l'appel de son nom chrétien. Le Caire et Alexandrie étaient devenus l'endroit du monde qui ménageait les rencontres les plus imprévues. Soudain, à quelque détour de ruelle, ballottés sur l'échine d'un âne, ou chaussés de babouches, dans l'encadrement d'un porche de mosquée, surgissaient, pour les Français d'Egypte, des physionomies connues, qu'ils n'espéraient plus revoir, et c'était une aubaine que ces rencontres qui leur permettaient de ranimer des souvenirs éteints et d'apprendre des nouvelles de ceux qu'on avait laissés, là-bas, en France (1).

Cependant, M. Lubbert était monté en grade. Appréciant sa parfaite connaissance des usages du monde, Méhémet-Ali décida qu'il servirait de cicerone officiel aux personnages de marque qui, pour quelques mois ou pour quelques jours, lui faisaient l'honneur de visiter son pachalik. M. Lubbert fut chargé de piloter ces hôtes illustres à travers les ruelles du Caire, et dans les environs, et de leur montrer en même temps que les monuments arabes, les édifices modernes, écoles et usines, qui attestaient le constant souci du maître de l'Egypte de faire des hommes de ses sujets. C'était un rôle délicat tenir, mais M. Lubbert s'en tira, à la satisfaction et du Pacha et des voyageurs. Par sa gaîté et son esprit, il mettait à leur aise ses compagnons d'excursion, ravis de trouver dans une telle contrée, un homme aussi charmant, dont la politesse raffinée rappelait qu'il avait été gentilhomme ordinaire du roi Charles X, et les historiettes qu'il avait été directeur de l'Opéra ; un parfait homme du monde, qui prenait la vie par le bon côté, et savait sourire des choses et des gens, sans trop égratigner ni médire. D'une mosquée du Caire aux pyramides ou à Abouzabel la course s'effectuait sans ennui dans le tête-à-tête de la calèche où M. Lubbert, dont la mémoire était prodigieuse, dévidait avec infiniment d'agrément les anecdotes les plus diverses sur le Paris de la Restauration et l'Egypte de Méhémet-Ali, si bien qu'au terme du voyage, c'est avec un sincère regret que les hôtes du Pacha disaient adieu à leur cicerone.

Les compliments qu'ils en faisaient à Méhémet-Ali augmentèrent son estime pour M. Lubbert. En janvier 1843, il l'éleva à la dignité de conseiller au département de ses « affaires étrangères», et quelques années plus tard, en 1847, à celle de secrétaire de son « cabinet >>.

M. Lubbert approchait maintenant de la soixantaine, mais il demeurait toujours aussi alerte et aussi jeune. Sa figure, que le soleil n'avait pas brunie, restait rosée, et sa peau tendue et luisante; les rides seules, sur son front, et les pattes d'oie autour de ses petits yeux vifs marquaient son âge, et tel quel, il avait l'air d'un vieil enfant bouffi ». Plus intransigeant que jamais sur ses principes politiques, il déclarait hautement qu'il ne souhaitait pas rentrer en France, sinon à la suite de la branche aînée des Bourbons, en quoi il ne mentait pas, puisque rien ne l'empê chait plus de revoir Paris. Il n'y tenait pas, ayant définitive

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(1) Dans ses Derniers Souvenirs et Portraits (Paris, 1863, p. 147), F. Halévy, rapporte cette anecdote : « Il y a environ dix ans, deux jeunes voyageurs français qui parcouraient l'Egypte, rencontrèrent non loin des Pyramides, un seigneur, un effendi, monté sur un beau cheval et suivi de deux esclaves. L'effendi s'arrêta devant eux. C'était un homme d'un âge mur, pourvu d'une abondante barbe blanche qui lui donnait un aspect parfaitement vénérable. Il leur adressa la parole en très bon français. « Parlez-moi de Paris, messieurs, leur dit-il ; donne-t-on toujours à l'Opéra Moïse, la Muette, le Comte Ory, Guillaume Tell? Certes, monsieur, ces beaux ouvrages sont toujours pleins de vie. C'est moi qui les ai montés, messieurs ; je suis Lubbert-Bey. Puis il piqua des deux, laissant les deux voyageurs un peu surpris d'une aussi singulière apparition et de cette conversation dans le désert. C'était, en effet, l'ancien directeur de l'Opéra. »

1

ment rompu avec le passé. La fuite des ans avait assoupi sa nostalgie. Il s'était acclimaté en Egypte, y avait contracté des habitudes qui lui étaient chères. Il était devenu un autre homme. C'est à Paris qu'il se fût senti dépaysé. La plupart de ses camarades de jeunesse étaient morts ou dispersés. Il n'eût trouvé que des visages inconnus, des moeurs nouvelles. Il se fût rappelé de mauvais souvenirs. Mieux valait ne pas tenter l'épreuve et ne pa bouger du Caire où le retenaient ses intérêts et son harem d'Abyssines. Il était en bons termes avec tous les consuls, avec M. Cochelet, qui avait succédé au pauvre Mimaut, foudroyé par une attaque d'apoplexie dès sa rentrée en France; avec M. de la Valette, qui avait remplacé M. Cochelet, et M. Benedetti, qui gérait par intérim, et il était dans le secret des intrigues diplomatiques et des petits scandales mondains. Méhémet-Ali venait de mourir, mais Abbas Pacha, qu'il avait connu naguère, bien qu'il passât pour francophobe, lui avait conservé sa faveur. Il l'avait maintenu dans les fonctions qu'il exerçait, et même en septembre 1849, l'avait décoré du titre de Bey. M. Lubbert avait beau être frondeur, cette petite distinction chatouilla son amour-propre. Agrafant sur sa veste son nicham de brillants, il alla tout radieux de joie faire sa tournée chez ses nombreux amis et recevoir leurs félicitations.

Lubbert Bey était, pour la seconde fois de sa vie, un homme heureux. Il ne manquait même pas à son bonheur de fréquenter des écrivains et des artistes. L'Egypte, de plus en plus, devenait à la mode, et de tous les coins de l'Europe ils accouraient la visiter. I se souvenait d'avoir dîné naguère chez le consul général de France avec Gérard de Nerval. Il fut ravi de faire la connaissance de Flaubert et de Du Camp. Ils étaient friands d'anecdotes, et il ne se lassait pas de leur en raconter, surtout de grivoises, qu'il détaillait avec un langage châtié qui n'excluait pas la verve ». Sa figure poupine s'épanouissait et il était semblable à un gourmet qui savoure un coulis ux truffes ». Une

Du Camp. « Je ne puis vivre, si je ne suis commandé », avait-il confessé un autre jour. L'ami de Flaubert le détesta carrément, et il nota sur son carnet : « personnage un peu grotesque... Légitimiste à la façon des roturiers. C'est un pauvre sire, parasite habile, ayant résolu le problème difficile partout, presque insoluble au Caire, de dîner chaque jour en ville, et ne laissant jamais pénétrer dans sa maison où, dit-on, quelques négresses achetées au bazar des esclaves dansaient pour lui seul des bamboulas qui ne devaient guère lui rappeler les ballets qu'il avait << montés » jadis à l'Opéra. »

Méchanceté sournoise et basse calomnie que ces notes dont, fort heureusement, le brave Lubbert Bey ne devait pas avoir connaissance, car il mourut dans la capitale de l'Egypte, en mars 1859, regretté des Francs et des Musulmans.

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de ses histoires polissonnes que Flaubert goûta le plus, était celle CHRONIQUE

M. Alfred Machard, l'auteur de l'Epopée au faubourg vient de publier un livre bien curieux : Printemps sexuels. Je n'ai à discuter ici ni son mérite littéraire, ni sa valeur sémantique, mais à traiter, puisqu'il m'en four..it l'occasion, actuelles s'embrouillent et dévient fâcheusement. On devine, d'une question fort sérieuse, au sujet de laquelle les idées d'après le titre du livre, qu'il s'agit d'affabuler, d'une manière intéressante et sur la base d'observations généralement exactes, l'ébauche de la psychosexualité chez des fillettes et des garçonnets de 8 à 12 ans. Par ironie peut

de la princesse Bagration aux Champs-Elysées, « avec un grand escogriffe en redingote blanche et une canne par derrière ». Il parlait de Talleyrand et de Chateaubriand, qu'il avait bien connus, et, à propos de « la vertu bruyamment célébrée de Mme Récamier, il dit : « Ne la jugez pas défavorablement, je vous en prie; elle est plus à plaindre qu'à blâmer; c'était un cas de force majeure. » Levant les bras et les yeux vers le ciel avec une expression de désespoir, il ajouta : « Pauvre Juliette, elle en a bien souffert ». Il racontait aussi qu'étant directeur de l'Opéra, il avait signé un contrat avec Rossini. « Les conditions étaient très avantageuses pour le compositeur qui les avait dictées lui-même et qui manifesta hautement combien il était enchanté de l'affaire et avec quelle ardeur il allait se mettre à l'ouvrage. Mais le lendemain, quand il reçut l'acte et qu'il vit qu'il était daté du 13, il n'eut de repos qu'il n'eût fait annuler le traité. Vainement Lubbert lui objecta que, s'il y avait malheur, ce malheur ne devait être que pour lui, direc-être, plus probablement par conviction, l'auteur a d'ailleurs teur, qui avait fait les concessions trop belles. Rossini tint bon, en assurant que ce serait l'engager dans une série de malheurs et de chutes et que, pour rien au monde, il ne voulait braver cette chance redoutable. » Il fallut passer par où l'Italien voulait et l'acte fut cassé.

Lubbert Bey ne cachait pas à ses jeunes amis ses opinions politiques, ni son horreur de tout ce qui pouvait ressembler à un gouvernement libéral. « Un jour que l'on parlait des visées de l'Angleterre sur l'Egypte, il s'écria: « Ah ! grand Dieu ! L'Angleterre établirait ici le régime parlementaire ! Que deviendrions-nous? Je ne vois que la Russie où je pourrai me réfugier, et encore le climat serait contraire à ma santé. » Ce n'était peut-être qu'une boutade, mais elle lui valut le ménris de

reproduit en épigraphe une page de S. Freud, extraite de la traduction française de ses Trois Essais sur la théorie de la sexualité.

C'est un assez mauvais patronage. On sait, en effet, que ce professeur viennois est le grand découvreur de la sexualité infantile. Pour lui, l'enfant, dès son plus bas âge, est déjà un pervers polymorphe; chacun de ses gestes et de ses actes presser le sein de sa mère, sucer son pouce, toucher son pied, mouiller ses langes, aller sur le pot, etc., a une signification de teinte sexuelle; un peu plus tard, s'éveillent en lui la préférence jalouse pour la mère et la haine à l'égard de ceux qui peuvent partager ses faveurs,

père, frères, sœurs. Ce serait là l'origine et la raison d'être de toutes les perversions que manifeste l'adulte. J'ai déjà signalé, dans l'Opinion (4 et 11 juillet 1925) et ailleurs, notamment dans mon livre sur le Freudisme, et ne suis pas du reste le seul à l'avoir fait, l'absurdité de cette conception. En cette affaire, le point de vue sentimental ne saurait entrer en ligne de compte, non plus que le dogme de la pureté de l'enfance. Nous n'avons à prendre en considération que les faits positifs. Or, d'une part, nous ne possédons aucun moyen de pénétrer dans la mentalité de l'enfant ; c'est pourquoi la tendance est générale de prétendre expliquer ses gestes par des motifs analogues à ceux auxquels l'adulte obéit, et Freud lui-même n'a pas pu faire de l'autre, il est autrement que de le reconnaître ; démontré, de la manière la plus sûre, par l'expérience et l'observation, que la sexualité vraie et, par conséquent, la psychosexualité, qui en représente le reflet mental, n'apparaissent qu'au moment du murissement des glandes génitales, c'est-à-dire à la nubilité. L'enfant, qui a un sexe anatomique, mais non un sexe physiologique, ne peut donc ni éprouver des sensations, ni accomplir des actes de signification réellement érotique avant les approches de l'âge pubéral.

Cependant, il existe des enfants précoces (on a cité George Sand), mais ce sont là des exceptions, tenant à une maturation anormale des glandes sexuelles, le plus ordinairement provoquée par des malformations ou des tumeurs. Cette maturité, étant morbide, n'entraîne pas nécessairement un développement parallèle de la psychosexualité. Un des plus beaux exemples de ce fait a été fourni par Toms et Hershmann; ils rapportent, en effet, l'observation d'une fillette de moins de 4 ans, qui présentait tous les caractères somatiques de la jeune fille nubile, sans témoigner d'une aspiration psychique correspondante. Laissons donc de côté ces exceptions apparentes: comme toujours, en les étudiant de près, on s'aperçoit qu'elles confirment la règle. Néanmoins, beaucoup de tout petits garçons donnent parfois des manifestations de virilité; ces manifestations sont d'origine purement reflexes et n'ont aucun rapport avec la sexualité, puisque Cruchet (de Bordeaux) a pu les provoquer par la simple recherche du reflexe rotulien. Assurément, garçonnets et fillettes ont souvent des gestes et des attitudes qui peuvent paraître de signification suspecte pour des observateurs superficiels ou mal prévenus. Mais on ne doit pas oublier que l'enfant a tout à apprendre et qu'il apprend d'abord en imitant. Un petit garçon de 2 ans et demi avait l'habitude d'embrasser sur la bouche toutes les petites filles qu'il rencontrait et cette habitude s'était montrée à partir du moment où il avait vu son père et sa mère échanger devant lui, dans un moment d'oubli, cette sorte de baiser. Quand, surtout dans le peuple le petit garçon joue à se battre, rudoie les filles ou les entraîne dans les coins, il copie ce qu'il a vu faire, comme la petite fille quand elle dorlotte sa poupée ou se trémousse en coquette, car l'enfant voit tout et cherche à le reproduire pour enrichir son expérience motrice, sans plus. Lorsqu'ils jouent au mari et à la femme, que le garçonnet prend la fillette dans ses bras, la serre contre lui et la caresse, quelle raison a-t-on

de croire qu'ils éprouvent les mêmes sentiments que le père et la mère dans les mêmes circonstances? Aucune, puisqu'il n'y a pas de réactions sexuelles objectives, sinon la supposition gratuite que les gestes de l'enfant répondent aux mêmes excitations cérébrales que les nôtres. Il n'en reste pas moins que les parents devraient prendre de grandes précautions, difficiles, à la vérité, dans l'encombrement des maisons ouvrières, pour cacher à leurs enfants les détails intimes de la vie conjugale.

Il est un autre facteur qui, à côté de l'imitation et mieux qu'elle, apporte une apparente justification au sexualisme infantile, facteur auquel Freud n'a jamais accordé l'importance qu'il mérite: c'est la curiosité. J'avoue ne pas attacher une grande valeur à la prétendue psychologie des romans; les observations qu'ils utilisent peuvent être exactes, mais elles subissent nécessairement une double déformation, tenant aux restrictions verbales qu'impose la littérature et à l'ignorance de la technique et des lois de la psychophysiologie, même chez les auteurs qui ont beaucoup fréquenté des aliénistes de talent. Ces déformations ne manquent pas dans Printemps sexuels et l'on y sent la tendance à sexualiser le comportement des écoliers de la rue Plumette, mais, observateur consciencieux, l'écrivain a bien su pourtant mettre en évidence le rôle primordial de la curiosité.

La curiosité est le désir de savoir, et les philosophes, y compris Stuart Mill, ne vont guère au delà de cette définition qui n'apprend pas grand'chose. Pour comprendre ses origines et sa signification exacte, il faut s'adresser à l'Ethologie, autrement dit l'étude des moeurs des animaux et de leurs rapports avec les conditions de leur existence. On voit ainsi que la curiosité s'applique d'abord à la recherche de la nourriture : c'est une forme de l'instinct de conservation. A mesure que les organismes, se perfectionnent, elle s'étend à des objets très divers concernant le nid, l'habitude, les moyens de protection et d'attaque. Dans l'espèce humaine, elle n'a point perdu ce caractère instinctif, mais son domaine devient immense, parce que les besoins de l'homme se sont multipliés et diversifiés avec le développement de sa sensibilité et de son intelligence. Naturellement, ce sont les jeunes qui se montrent les plus curieux, ayant tout à apprendre, tandis que, chez les vieillards, ce désir de savoir s'épuise par le fait même d'un long exercice. Il y a évidemment des individus fort peu curieux, mais ce sont des anormaux, indifférents, apathiques, faibles d'esprit. Tel n'est point le cas de l'enfant. A peine ses yeux s'ouvrent-ils sur le monde, qu'il regarde avec avidité, palpe, écoute, s'informe voilà pourquoi il pose d'incessantes questions, touche à tout et démolit ses jouets. Or, il est une question qui éveille d'autant plus fortement sa curiosité qu'on n'en parle jamais devant lui ou seulement à mots couverts, la question sexuelle différence entre les petits garçons et les petites filles, naissance des enfants, grossesse, rapports du père et de la mère, etc. Quand, à ce sujet, il demande des renseignements, on le prie de se taire, on le punit ou bien on lui fournit des explications si sottes que lui-même refuse de les accepter. Ayant vu, entendu, retenu déjà beaucoup de choses, il comprend qu'il y a là un secret, puisque les

grandes personnes s'en réservent la possession, et il fait, en conséquence, tous ses efforts pour le percer, non point du tout parce qu'il s'agit de la sexualité, mais simplement parce qu'on le lui cache, tandis que tout le reste est dévoilé sans réticence. Il est dans la situation des femmes de Barbe Bleue en présence de la chambre interdite ; il ne pense

En Banque, les valeurs de pétrole sont lourdes. Les caoutchoutières n'ont pas bénéficié de la diminution des stocks à Londres et l'irrégularité a dominé.

Les mines d'or et de diamants sont délaissées.

plus qu'à çà, il en fait sa préoccupation exclusive, et, CHRONIQUE

:

comme ses parents et ses maîtres ne veulent rien lui dire, il s'adresse à ses petits camarades qui se trouvent dans le même tourment que lui et ne sont pas mieux renseignés de là, les regards coulés, les exhibitions, les attouchements qui font croire à l'existence d'une sexualité infantile très développée, quand il s'agit d'une curiosité quelconque, seulement orientée et exaspérée par l'imprudence des parents. A ce propos, M. A. Machard raconte l'histoire d'un petit garçon d'une douzaine d'années qui va chez une prostituée pour faire << des choses », mais il n'y peut réussir parce qu'il n'est pas physiologiquement mûr. J'ignore si c'est là une observation ou une création de l'imagination de l'auteur, mais j'ai connaissance de deux faits semblables. En de tels cas, comment ne pas invoquer la curiosité bien plutôt que l'instinct sexuel ?

Certes, aux approches de la puberté, la curiosité se colore de teintes vives, car, à ce moment, l'organisme est en travail pour préparer son équilibre normal et définitif. Mais avant cet âge 13, 14, 15 ans et plus, suivant le sexe, la race et le climat, il n'y a pas, chez l'enfant, sauf exceptions rares, d'instinct sexuel ni de psychosexualité. La physiologie expérimentale et l'observation la plus rigoureuse sont d'accord sur ce point. Laissons donc à Freud le bénéfice douteux de ses hypothèses sur la sexualité infantile, dont les extravagances n'ont séduit que les vieux marcheurs, et continuons de voir, dans les yeux clairs et profonds de nos chers petits, la pureté d'une source vive que l'existence, plus tard, se chargera de troubler.

Dr J. LAUMONIER.

LA BOURSE

Au début de la semaine, on avait enregistré des velléités de reprise; malheureusement, l'abstention complète de la clientèle n'a pas permis de consolider les plus-values qui avaient été notées sur plusieurs groupes. Cependant, les disponibilités sont très abondantes et à la liquidation de fin de mois, l'argent pour les reports s'est offert à 1 7/8 % environ au Parquet et 5 1/4 % en coulisse.

Bien que faisant toujours preuve de bonnes dispositions, les rentes françaises ont quelque peu cédé à l'ambiance, mais dans l'ensemble, les différences de cours sont peu importantes.

Parmi les fonds étrangers, les russes terminent plus soutenus, les turcs sont en reprise sensible.

Le compartiment bancaire reste très calme.

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