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Recommanda son ame à Dieu.
Mais le renard, s'approchant d'elle,
Lui dit: Hélas! mademoiselle,
Votre frayeur m'étonne peu;

C'est la faute de mes confreres,
Gens de sac et de corde, infâmes ravisseurs,
Dont les appétits sanguinaires

Ont rempli la terre d'horreurs.

Je ne puis les changer, mais du moins je travaille
A préserver par mes conseils
L'innocente et foible volaille

Des attentats de mes pareils.

Je ne me trouve heureux qu'en me rendant utile;
Et j'allois de ce pas jusques dans votre asyle
Pour avertir vos sœurs qu'il court un mauvais bruit,
C'est qu'un certain renard méchant autant qu'habile
Doit vous attaquer cette nuit.

Je viens veiller pour vous. La crédule innocente
Vers le poulailler le conduit';

A peine est-il dans ce réduit

Qu'il tue, étrangle, égorge, et sa griffe sanglante
Entasse les mourants sur la terre étendus,
Comme fit Diomede au quartier de Rhésus.

Il croqua tout, grandes, petites,

Coqs, poulets et chapons; tout périt sous ses dents.

La pire espece de méchants

Est celle des vieux hypocrites.

CETTE

FABLE X VIII.

Les deux Persans.

pauvre raison dont l'homme est si jaloux N'est qu'un pâle flambeau qui jette autour de nous Une triste et foible lumiere;

Par delà c'est la nuit. Le mortel téméraire

Qui veut y pénétrer marche sans savoir où.
Mais ne point profiter de ce bienfait suprême,
Eteindre son esprit, et s'aveugler soi-même,
C'est un autre excès non moins fou,

En Perse il fut jadis deux freres, Adorant le soleil, suivant l'antique loi.

L'un d'eux, chancelant dans sa foi,
N'estimant rien que ses chimeres,
Prétendoit méditer, connoître, approfondir
De son Dieu la sublime essence;

Et du matin au soir, afin d'y parvenir,
L'œil toujours attaché sur l'astre qu'il encense,
Il vouloit expliquer le secret de ses feux.

Le

pauvre philosophe y perdit les deux yeux, Et dès lors du soleil il nia l'existence.

L'autre étoit crédule et bigot;

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Effrayé du sort de son frere,

Il y vit de l'esprit l'abus trop ordinaire,
Et mit tous ses efforts à devenir un sot.
On vient à bout de tout; le pauvre solitaire
Avoit peu de chemin à faire,

Mais,

Il fut content de lui bientôt.'

de peur d'offenser l'astre qui nous éclaire En portant jusqu'à lui des regards indiscrets, Il se fit un trou sous la terre,

Et condamna ses yeux à ne le voir jamais.

Humains, pauvres humains, jouissez des bienfaits
D'un Dieu que vainement la raison veut comprendre,
Mais que l'on voit par-tout, mais qui parle à nos cœurs.
Sans vouloir deviner ce qu'on ne peut apprendre,
Sans rejeter les dons que sa main sait répandre,
Employons notre esprit à devenir meilleurs.
Nos vertus au Très-Haut sont le plus digne hommage,
Et l'homme juste est le seul sage.

FABLE X I X.

Myson.

MY SON fut connu dans la Grece

Par soh amour pour la sagesse;

Pauvre, libre, content, sans soins, sans embarras, Il vivoit dans les bois, seul, méditant sans cesse, fois riant aux éclats.

Et par

Un jour deux Grecs vinrent lui dire: De ta gaîté, Myson, nous sommes tous surpris: Tu vis seul; comment peux-tu rire? Vraiment, répondit-il, voilà pourquoi je ris.

FIN DU LIVRE SECOND.

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DEs singes dans un bois jouoient à la main chaude;
Certaine guenon mauricaude,

Assise gravement, tenoit sur ses genoux
La tête de celui qui, courbant son échine,
Sur sa main recevoit les coups.

Attire

On frappoit fort, et puis devine!
Il ne devinoit point; c'étoit alors des ris,
Des sauts, des gambades, des cris.
par le bruit du fond de sa taniere,
Un jeune léopard, prince assez débonnaire,
Se présente au milieu de nos singes joyeux.
Tout tremble à son aspect. Continuez vos jeux,
Leur dit le léopard, je n'en veux à personne:
Rassurez-vous,
s, j'ai l'ame bonne;

Et je viens même ici, comme particulier,
A vos plaisirs m'associer.

Jouons, je suis de la partie.

Ah! monseigneur, quelle bonté!

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