Sechent sur pied; le vent du nord lui tue Ses figuiers qu'il ne couvre pas. Point de fruits au marché, point d'argent dans la bourse; Travailloit en chantant quelque joyeux refrain, Et quand monsieur Jean tout surpris FABLE X I. Le Vacher et le Garde-chasse. COLIN gardoit un jour les vaches de son pere; Et s'ennuyoit tout seul. Le garde sort du bois : Il vient de passer par lå bas, Lui répondit Colin: mais, si vous êtes las, Je réponds du chevreuil. Ma foi, je le veux bien: S'arme, appelle Sultan. Sultan, quoiqu'à regrot, Le chien bat les buissons; il va, vient, sent, arrête, Tire aussitôt, manque la bête Et blesse le pauvre Sultan. Il trouve le garde ronflant; De vaches, point; elles étoient volées. Le malheureux Colin, s'arrachant les cheveux, Parcourt en gémissant les monts et les vallées. Il ne voit rien. Le soir, sans vaches, tout honteux, Colin retourne chez son père, Et lui conte en tremblant l'affaire. Celui-ci, saisissant un bâton de cormier, Corrige son cher fils de ses folles idées, Puis lui dit : Chacun son métier, Les vaches seront bien gardées. FABLE X I I. La Coquette et l'Abeille. CHLOÉ, jeune, jolie, et sur-tout fort coquette, Tous les matins, en se levant, Se mettoit au travail, j'entends à sa toilette; Et là, souriant, minaudant, Elle disoit à son cher confident Les peines, les plaisirs, les projets de son ame Aux levres de Chloé se pose, A l'écraser. Hélas! lui dit avec douceur Et j'ai cru... Ce seul mot à Chloé rend ses sens: Depuis qu'elle te parle à peine je la sens. Que ne fait-on passer avec un peu d'encens! 44 FABLE X II I. La Mort. LA Mort, reine du monde assembla, certain jour, Elle vouloit choisir un bon preinier ministre Du fond du noir tartare avancent à pas lents Rendoient justice à leurs talents. La Mort leur fit accueil. La Peste vint ensuite. Lorsque d'un médecin arriva la visite, La Mort même étoit en balance: FABLE XIV. Le Château de cartes. Un bon mari, sa femme et deux jolis enfants, Couloient en paix leurs jours dans le simple hermitage Où, paisibles comme eux, vécurent leurs parents. Ces époux, partageant les doux soins du ménage, Cultivoient leur jardin, recueilloient leurs moissons; Et le soir, dans l'été soupant sous le feuillage, Dans l'hiver devant leurs tisons, Ils prêchoient à leurs fils la vertu, la sagesse, La mere par une caresse. |