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Aucune feuille humoristique n'a donné comme légende à quelque dessin le vieux calembour: « Charles attend! ». Et les seules plaisanteries que nous avons pu lire étaient involontaires. Celle-ci par exemple :

« Le correspondant du Daily Mail à Vienne dit que Charles IV se promène dans les rues en uniforme de colonel, passe en revue la garnison et se conduit, ent général, comme s'il était tout à fait chez lui. »>

Un début de prince.

Dans un de ces cafés qui pullulent à Berlin depuis l'armistice, où l'on soupe au champagne, en écoutant des balivernes poivrées qu'on appelle « tranches de vie », Léopold Wolfing débutait la semaine dernière.

Or, ce Wolfing n'est autre que l'archiduc LéopoldFerdinand d'Autriche. Comme sa famille lui envoyait trop peu d'argent, il a décidé de gagner sa vie sur les planches et il a débuté dans une pièce qui met en scène son auguste personne.

L'action se passe dans une maison de rendez-vous; et la pièce est de celles qu'on ne raconte pas en France.

A la fin de la représentation, Wolfing n'a pas caché le plaisir qu'il aurait à interpréter cette œuvre à Londres et à Paris.

Vous vous trompez, Wolfing! Notre « Babylone corrompue » n'est pas encore mûre pour les pièces de Vienne ou de Berlin!

La nouvelle nuit du 4 août.

Un riche industriel anglais, nommé Hopkinson, a, comme beaucoup d'hommes au monde, une théorie sociale, mais, qui plus est, veut la mettre en pratique. Les riches, dit-il, doivent faire quelques sacrifices s'ils veulent éviter la révolution.

Et le voilà qui, pour donner l'exemple, fait cadeau de sa limousine à son chauffeur, donne au conseil municipal d'Andenshaw, avec charge de les distribuer, plus de vingt propriétés, sans compter un château qui valait un petit million, et se retire enfin dans un chalet de quatre pièces, où il veut vivre comme un prolétaire. Il conserve pourtant des intérêts dans toutes sortes d'usines, mais des intérêts extraordinaires plus il y a de bénéfices, moins il touche de dividendes; et, au delà d'une certaine somme, il n'a plus droit à rien l'usine appartient aux ouvriers.

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Comme dans un roman. Simple dépêche :

Alger, 5 avril. Hier est arrivé à Bône, venant de Constantinople, le vapeur français Krym, à bord duquel se trouvaient 370 soldats de l'armée du général russe Wrangel.

Au débarquement, pendant la visite sanitaire, on a constaté que parmi eux s'était glissée une jeune fille d'une rare beauté qui ne voulait pas abandonner son. frère, seul survivant de sa famille.

Les Russes seront dirigés sur Bel-Abbès où ils ont contracté un engagement dans la Légion étrangère.

La jeune fille a été autorisée également à se rendre à Bel-Abbès où elle contractera un engagement comme infirmière.

La débâcle de l'armée Wrangel. Une jeune fille d'une rare beauté déguisée en homme et qui ne veut pas abandonner son frère, seul survivant de sa famille.

Il s'engage. Elle devient infirmière.
On croit relire la Jeune Sibérienne!

Le respect des convenances.

Une bohémienne, qui s'appelait Selina Smith, et honorait de son culte le dieu Bacchus, errait dans un faubourg de Londres, suivant un chemin qui n'était rien moins que droit. Un policeman la rencontra et lui offrit son bras galamment, moyennant cinq shillings d'amende qu'elle se vit infliger par le tribunal d'Hampstead.

Au moment de quitter le prétoire, la bohémienne interpella le policeman qui venait de témoigner : « Vous << êtes un monsieur très bien. Mais ce n'était vraiment << pas convenable de vous promener dans les rues avec « moi comme vous l'avez fait. Songez que mon mari << aurait pu nous rencontrer, ou votre épouse. »

Ce qui prouve qu'une femme pour n'être pas insensible aux charmes de la dive bouteille, n'en est pas moins femme; et garde jusque dans la douce ivresse le souct de sa dignité.

Les Confessions» de Miss Pankhurst.

Les lauriers de Mme Asquith ont troublé le sommeil de Miss Christabel Pankhurst. Voici qu'un journal anglais publie les « Confessions » de la célèbre suffragette.

Elle observe, avant tout, qu'il est « tout à fait vieux jeu d'hésiter à raconter ses petites affaires au monde » et promet de mettre à nu, avec la brutale sincérité dont elle est coutumière, sa vie publique et privée.

Puis elle répond à ces graves questions: Pourquoi je ne me suis pas mariée? Ce que je pense des hommes! Elle ne s'est pas mariée : 1° Parce que l'ensemble des qualités qu'elle aurait exigées d'un mari ne se peut trouver en un seul homme; 2° Qu'il eût été très désagréable pour un mari d'être négligé comme sa vocation de suffragette l'eût exigé; 3° Que son œuvre valait le sacrifice de quelques joies romanesques.

Miss Pankhurst dira aussi ce qu'elle pense de M. Lloyd George. Elle dévoilera les secrets du mouvement féministe; elle révélera la répartition des fonds de propagande.

Que sais-je encore? Ce qu'elle moutrera le plus cortainement, c'est qu'il ne suffit pas d'être une femme d'action pour abandonner le bavardage du beau sexe.

L'Anglais et le uhlan..

Un Anglais de passage à Berlin rencontrait ces joursci un officier de uhlans qui lui rappela qu'ils avient étudié côte à côte à Oxford. Les deux condisciples décidèrent de dîner ensemble. Cependant, l'Anglais demanda s'il était vrai qu'en 1914 les uhlans eussent massacré des femmes et des enfants belges. L'officier rit aux éclats: c'était là une légende stupide; les journaux d'outre-Manche n'en inventaient pas d'autres. Il avait presque convaincu son ancien camarade lorsqu'on vint à parler des territoires allemands occupés par les Alliés. Alors le uhlan changea d'attitude.

Oui, dit-il, les Français sont sur les vignobles de mes ancêtres, près de Metz, mais dans cinq ans nous serons de retour en France, et alors nous ne laisserons pas un Français vivant!

Il parla si bien que le dîner fut remis aux calendes grecques.

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tituée aux Etats-Unis pour venir en aide aux petits | Affaires Extérieures
Chinois qui souffrent de la faim. Et comme il n'est rien
que l'imagination humaine n'invente pour trouver de
l'argent, cette ligue avait demandé à tous les Améri-
cains de supprimer de leurs repas un plat, un plat seule-
ment, dont le prix serait versé à sa caisse.

Du plus petit au plus grand, on s'est exécuté.
Mais on dit qu'à la Maison-Blanche l'accord ne fut
pas immédiat. Mme Harding penchait pour l'entrée, et
M. Harding pour le potage. On finit par tirer à la courte
paille. Et la courte paille sacrifia le potage.
Puisse le règne de M. Harding n'être jamais illustré
que par des querelles d'une telle innocence.

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On a tort de répéter que notre époque est vide d'aventures. Voici une histoire survenue récemment à Bruxelles. La maîtresse d'un pensionnat de jeunes filles voyait se présenter devant elle un jeune homme qui lui dit se nommer le vicomte de Vermois et lui remit une lettre du bourgmestre. Il ajoutait qu'il était chargé de décorer une des pensionnaires.

Aussitôt on convoque toutes les élèves et, quand celles-ci sont réunies, on questionne le jeune vicomte.

Comment se nomme celle de nos élèves dont les services pendant la guerre lui valent cette récompense? On est alors surpris de voir le jeune homme se troubler, ne savoir que répondre. Et l'affaire se termine devant le commissaire de police.

Le vicomte de Vermois est obligé de confesser qu'il est le fils d'un modeste fonctionnaire municipal, qu'il a remarqué l'une des pensionnaires et qu'il avait compté sur son stratagème pour s'approcher d'elle et lui avouer sa flamme.

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Nous recevons ce jour copie de votre article paru le 26 mars sous le titre « Liberté », et qui parle de notre campagne impôts.

Nous devons d'abord vous faire remarquer que la Fédération de la petite industrie de la Chaussure de France et non des petits fabricants de chaussures, groupe les petits fabricants de chaussures, les bottiers et les réparateurs (les gnafs, comme vous les appelez).

qu

Si la Fédération réclame au sujet des impôts, c'est 'elle estime que devant le fisc tous les intéressés sont égaux, et que du moment que des lois ont été votées, elles sont applicables à tous, il n'y a aucune raison que les uns soient favorisés aux dépens des autres, et la campagne annoncée sera menée jusqu'au bout.

Quant aux fonctionnaires (facteurs, sergents de ville, etc., etc.), qui, à leurs moments perdus, font le métier de bouif, et ils sont nombreux, il est de toute justice qu'ils suivent la règle commune.

Quant à la baisse dont vous parlez, la circulaire cijointe vous montrera que nous sommes les premiers à la réaliser au moyen de la chaussure « La Populaire >>> et du Ressemelage national.

Nous vous prions de bien vouloir insérer dans un le vos prochains numéros la lettre-protestation que nous vous adressons.

Recevez, Monsieur, etc.

Le directeur technique: Illisible.

Angoisses britanniques

Je viens de passer quelques jours au milieu d'un de ces ilots britanniques qui, dans le cadre pittoresque d'une province française, conservent, avec une inflexible rigidité, les moindres usages de la vie anglaise. Ces hivernants ne se recrutent plus dans les mêmes milieux qu'autrefois. Les officiers en retraite, les coloniaux en congé, les gentilshommes en disponibilité ne sont plus seuls à connaître les hivers adoucis des rives méditerranéennes. Leurs rangs sont envahis par des nouveaux riches et des bourgeois modestes qui veulent les uns jouir d'un luxe récent, les autres profiter d'un change favorable. Et ces immigrations temporaires ont ainsi élargi leur valeur représentative.

Au lendemain de l'armistice ces colonies anglaises témoignaient d'un optimisme absolu. Les matières premières ont été monopolisées. L'outillage industriel a été renforcé. Le passif financier n'est point écrasant. La balance commerciale sera vite rétablie. La suprématie britannique reste indiscutée. Et les voyageurs notaient, avec une sympathie rassurée et une attention distraite, les difficultés au milieu desquelles se débattaient ses continentaux.

Cette confiance et ces certitudes n'ont point résisté au soleil de Pâques 1921. Un pessimisme aussi prématuré est à l'ordre du jour. L'effort de l'Europe occidentale a retrouvé des admirateurs La vigueur des Etats-Unis éveille des jalousies. L'avenir de la GrandeBretagne inspire des inquiétudes. Ces angoisses croissantes n'ont point une origine politique. Les petites sociétés insulaires ont pleine confiance dans l'étoile de D. Lloyd George et dans la durée de son règne. Elles connaissent mal le problème irlandais, restent convaincues que la répression est efficace et l'accalmie prochaine. Elles ignorent totalement le problème oriental, se refusent à voir qu'une victoire grecque et un succès turc sont également dangereux pour le prestige britannique et pour la paix indienne et qu'il fallait éviter, même à un large prix, la reprise des hostilités et le choc des armées.

Dans cette société parlementaire, chez ce peuple libre, ses privilégiés de la naissance ou de la fortune, euxmêmes, ne suivent que de loin les événements de la vie politique. Actionnaires, ils font confiance à leur conseil d'administration. Mais les oscillations du baromètre commercial les intéressent directement. Ils les enregistrent avec une attention constante et avec une ardeur passionnée. L'historien n'attachera jamais trop d'importance à l'apparition dans les statistiques mensuelles du signe + ou du signe. Cette croix et cette ligne ont une force de suggestion qu'il est impossible d'exagérer. Elles éveillent tout un monde de visions héréditaires. Elles touchent au centre même des vies intérieures. Elles résument tout l'effort des activités collectives. Or il semble bien que la crise, qui est venue si vite arrêter le brillant essor de 1919-1920, ait, par ses causes économiques et par ses répercussions sociales, une gravité singulière.

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A la fin du mois dernier, la situation dans les principales industries pouvait être résumée comme suit:

L'extraction du charbon baisse et les stocks d'invendus grandissent. La métallurgie est paralysée par l'incertitude des prix. Seul le marché des fontes de moulage s'est amélioré. La fonte de puddlage coûte moins cher, mais ne trouve pas de commandes. Les acheteurs étrangers de tubes ont arrêté leurs ordres. La quincaillerie et la coutellerie retrouvent les jours sombres d'il y a vingt ans Sheffield gémit. Birmingham lutte. Les cités de la laine sont inquiètes, celles du coton sont touchées. Bonnetiers et passementiers ont réduit les salaires, sans accroître leurs ventes. La foire du vêtement (18 mars), malgré un succès certain, n'a point encore provoqué d'effets réels sur les industries textiles. Le cuir reprend un peu. La poterie et la verrerie n'enregistrent que des résiliations. Les produits chimiques avaient fondé d'ardents espoirs sur la défaite allemande. Ces espoirs ont duré l'espace d'un matin.

La hausse régulière des prix de revient et le ralentissement croissant de la production individuelle sont venus paralyser les divers organes de cette industrie exportatrice, à l'heure même où la crise des changes et l'anarchie en Orient, le réveil des usines allemandes et le rendement de l'outillage américain réduisaient les débouchés. Un exemple suffira. De 1913 à 1920, les achats de machines effectués par les tisseurs russes, allemands, européens, sont tombés de 13.800 tonnes à 97, de 12.700 à 31, et de 20.390 à 7.535.

Dans une lettre au premier ministre, sir Peter Ry lands, président de la Fédération des industries britanniques, a résumé les causes principales de cette crise générale :

« Aujourd'hui, l'industrie britannique lutte pour sa vie ; et les douze mois qui viennent, pourraient bien être les plus critiques de notre histoire économique.

A l'intérieur, nous sommes en présence d'une situation charbonnière d'une gravité sans précédents. Le coût du charbon est dès maintenant supérieur à celui pratiqué dans tous les pays producteurs de houille; or, nous sommes menacés, soit d'une hausse sensible dans les prix, soit de voir fermer

des puits nombreux. L'industrie envisage ces deux alternatives avec une égale angoisse.

La situation, en ce qui concerne les transports, n'est pas moins sérieuse. Avant la guerre, le coût du tonnage kilomé-, métrique par voie ferrée était déjà supérieur à ce que payaient des pays concurrents. Aujourd'hui les tarifs sont écrasants; et malgré des augmentations énormes, qui ont déjà sensiblement accru les prix de revient, les chemins de fer coûtent beaucoup plus qu'ils ne rapportent.

L'état de choses au dehors est, si possible, plus menaçant encore que la situation à l'intérieur. Le mécanisme des changes a craqué partout, compromettant ainsi nos relations commerciales avec les marchés importants du globe.

La situation des changes intensifie singulièrement la concurrence que font à nos industries beaucoup d'Etats continentaux, et notamment l'Allemagne, où le taux des salaires évalués en monnaies anglaises, est bien inférieur à celui, qui a cours en Angleterre.

La Fédération se rend compte des difficultés au milieu desquelles se débat le gouvernement. Elle se permet néanmoins d'exprimer à nouveau l'opinion, qu'au cours de la période critique que va traverser le pays pendant les douze mois à venir, la meilleure politique à suivre pour le gouvernement serait de réaliser toutes les économies possibles dans les frais d'administration, de réduire l'impôt sur le revenu et de considérer que la restauration de l'industrie nationale est un problème d'une importance nationale qui doit passer même avant celui de la liquidation de la Dette. » (The Economist, 19 mars).

Lorsque le gouvernement, désireux d'alléger les charges fiscales qui paralysent la production industrielle, décida de supprimer dès le 31 mars et non le 31 août, le contrôle de l'Etat sur les centres de charbon et demain celui sur les chemins de fer, d'imposer ainsi une réduction dans les salaires du travail et dans les prix de revient, il se heurta à la résistance ouvrière. Le conflit éclate en pleine stagnation commerciale. Il ac croît les misères du chômage. Il révèle les progrès du bolchevisme. Il ouvre une crise profonde dans la vie politique du Royaume-Uni.

L'industrie minière travaille à perte. Le déficit entre le coût de l'extraction (salaires, bois, réparations, direc tion, royalties) et le produit des ventes était en janvier 1921 de 5 shillings 9 pence par tonne. Il a été en février de 4 millions et demi de livres sterling, soit 5 sh. 11 pence par tonne. Le déficit réel est plus grand encore, puisque dans le chiffre ne figurent ni les provisions pour l'amortissement, ni les intérêts des emprunts, ni les bénéfices des propriétaires. Sur les dix districts. miniers, deux seulement, le Yorkshire, Derby, Notts et Leicester ont, en février, réalisé un bénéfice, un bénéfice de 3 sh. I pence et I sh. 6 pence par tonne! Les huit autres ont travaillé à perte: 5 ont enregistré un déficit supérieur à la moyenne du mois :

Lancashire, Cheshire, Galles-Nord

Northumberland
Autres comtés anglais
Cumberland et Westmorland
Galles-Sud

Shillings Pence

Par tonne 8

9

IO

16

18

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Le charbon, qui en 1913 représentait 84 0/0 du tonnage total des exportations britanniques, ne figure plus en 1919 et en 1920, que pour 83 et 71 0/0. Il est chassé du Sud-Amérique et concurrencé sur les marchés français et italien par le charbon américain.

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Pour combattre cette concurrence et retrouver commandes, il faut accroître le rendement, et réduire le coût de l'extraction, diminuer le prix de revient. Pour y arriver, il ne suffit pas de renoncer à la centralisation étatiste de l'industrie minière, qui favorisait les houillères pauvres aux dépens des filons riches, faussait les cours du charbon et ralentissait l'esprit d'entreprise. Il est également nécessaire de réaliser, entre patrons et ouvriers, l'accord direct qui mettra fin aux grèves répétées et fixera les salaires d'après une base nouvelle.

Les propriétaires de mines, qui, s'il faut en croire le Times du 1er avril, peu suspect de sympathies révolutionnaires, ont bien quelques responsabilités dans la crise actuelle, se sont efforcés de les effacer en formulant des propositions conciliatrices :

(1) Le salaire minimum des ouvriers sera égal aux « prix de base actuellement existants dans chaque exploitation »>, augmentés des « pourcentages », qui s'ajoutaient aux prix de base en juillet 1914.

2) Le bénéfice minimum sera égal à 17 0/0 de la valeur totale des salaires ci-dessus définis ;

3) Le surplus des ressources, fournies par le prix de vente sur le carreau, sera réparti à raison de 80 o/o aux ouvriers et 20 0/0 aux patrons

4) Cette part de 20 0/0 sera temporairement versée aux ouvriers, au cours de règlements mensuels ;

5) La part du bénéfice minimum non perçu sera considérée comme une dette privilégiée à rembourser avant toute augmentation du salaire minimum.

'Les propriétaires de mines offraient d'acheter une réduction temporaire des salaires et un accroissement immédiat du rendement, au prix d'une limitation des bénéfices et d'une participation du travail. Les mineurs ripostèrent comme suit :

1) Le salaire minimum des ouvriers sera le salaire payé en 1921, en incorporant aux « prix de base » tous les «< pourcentages » actuellement versés dans chaque district.

2) Le bénéfice minimum sera égal à 10 o/o de la valeur totale des salaires ci-dessus définis, mais ne sera perçu qu'après prélèvement sur le prix de vente de la totalité du salaire minimuin.

3) Le surplus des ressources fournies par le prix de vente sera réparti à raison de go o/o au ouvriers et 10 0/0 aux patrons ;

4) Une commission nationale, formée de 26 délégués patronaux et de 26 délégués mineurs procédera à la fixation des salaires et à la répartition des bénéfices, pour la totalité des exploitations;

5) L'Etat, qui devait maintenir son contrôle jusqu'au 31 août 1921, « prêtera à l'industrie minière, telle assistance nécessaire pour lui permettre de survivre à la crise en cours. -»>

Les ouvriers des mines acceptent le principe d'une limite des bénéfices et d'une participation du travail, mais ils réduisent cette limite et accroissent cette participation, tout en exigeant le maintien intégral des salaires actucls, la centralisation complète de l'industrie minière et l'intervention temporaire des finances publiques. La baisse des prix de revient est impossible. La hausse du prix des charbons est inévitable. Les exportations des houilles britanniques restent menacées. La situation de la métallurgie anglaise devient précaire. La Fédération des mineurs n'avait plus qu'une faute à commettre capituler devant les exigences des extrémistes, redouter la menace d'une scission, donner l'ordre aux ouvriers d'abandonner les pompes d'épuisement

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et d'aération. Cette dernière étape fut franchie. Cette « décision désespérée» fut prise. Et dans les régions les plus travaillées par la propagande bolcheviste, dans les terres celtiques du Nord et de l'Ouest, l'opinion britannique assista avec stupeur à des épisodes sanglants et stupides, dont elle croyait avoir pour toujours libéré vallée l'histoire anglaise. Dans la vallée galloise de la Rhondda l'eau monte rapidement, et plusieurs mines sont menacées de destruction. Dans le comté écossais de Lanark, à West Benhor, le 3, les mineurs ont marché à l'assaut des machines, au son des cornemuses. Ce courant d'anarchie destructrice a mordu sur les districts sud du Lancashire et du Staffordshire. Les têtes saxonnes du Yorkshire, du Somerset, résistent seules à ces effluves du mysticisme révolutionnaire. Les pompes fonctionnent. Le matériel est intact.

Lorsque le 23 mars dernier, D. Lloyd George dénonçait le périle socialiste, son discours n'eut qu'un succès médiocre. Des conservateurs critiquèrent. Les radicaux s'esclaffèrent. Ils ont dû, le 5 au soir, par l'organe de M. Asquith, approuver la décision du Cabinet, reconnaître l'impossibilité de maintenir une centralisation et un contrôle qui, à la veille du 31 mars coûtaient à l'Etat I million de livres par semaine, s'incliner, une fois de plus, devant la supériorité du seul homme d'Etat qu'ait aujourd'hui l'Angleterre.

Même si dockers et cheminots écartent l'éventualité d'une grève générale et limitent leur appui à des subsides généreux, quand bien même le Cabinet ajournerait un referendum inévitable et les élections générales, cette crise violente ne saurait se dénouer en quelques jours. Elle vient paralyser les forces économiques, militaires et morales du Royaume-Uni, à l'heure exacte où l'Allemand refuse de payer et de désarmer. En 1921 comme en 1918 et 1914, comme toujours, les impérialistes prussiens n'ont pas de collaborateurs plus précieux, d'agents plus sûrs, de serviteurs plus dociles, que les socialistes révolutionnaires. Une fois de plus, ils sabo tent la paix et préparent la guerre.

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JACQUES BARDOUX.

NOTES ET FIGURES

L'attentat des Tuileries.

Il y a trois semaines, un rédacteur de l'Opinion, apercevant un équivoque terrassement aux Tuileries, posa quelques questions au chef de ce chantier inquiétant. Celui-ci dit au journaliste: « On va mettre là une statue, par Bartholomé, de la Parisienne. » Cet homme se trompait de peu : l'allégorie devait montrer non la Parisienne, à proprement parler, mais la vertu parisienne, au sens le plus antique du mot. C'est alors que nous rédigeâmes une petite note qui fut publiée ici.

Très exactement, la question se posait dès lors ainsi : toute considération relative à la valeur de l'oeuvre, à la personnalité du sculpteur une fois écartée, pouvait-on admettre qu'un bloc, même digne de Michel Ange, vint boucher cette vue incomparable et illustre, obstruer dès son départ une avenue merveilleuse entre toutes, qui fait la gloire de Paris. Evidemment non.

Au lu de notre note, l'Intransigeant, avec le souci d'information précise qui l'honore, dépêcha quelqu'un près de l'artiste et lui fit part des craintes que causaient ces étranges fondations.

Et le maître, on le sait, répondit :

-

- J'ai choisi, moi, cet emplacement pour y mettre unc statue et je n'admettrai même pas d'en discuter. C'était une bien grande erreur. Quand ils sont depuis

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trop longtemps célèbres, leur âge empêche souvent les maîtres de suivre dans sa marche accidentée la pensée publique. Celle-ci, depuis la guerre, a pu trouver nouveau, donc amusant, qu'on la forçât un peu. La révérence qu'on doit aux grands noms officiels, par exemple, elle fit mine d'y souscrire. C'était une mode; et mode, elle a duré ce que durent les modes, l'espace de trentesix mois; naguère, devant la cassante affirmation de M. Bartholomé, on eût pensé : « Fichtre»; aujourd'hui l'on s'est dit : « Sans blague ! ».

C'est ainsi qu'en somme, dans un fort bel article du Figaro, s'exprimait, l'autre vendredi, M. Marcel Boulenger.

L'affaire se corsait. Le lendemain, les Beaux-Arts faisaient un communiqué comparable au lavement de mains dont parle l'Ecriture. C'était une vieille histoire; le syndicat de la Presse, sous la présidence de M. Dupuy, avait arrangé tout, de concert avec M. Dalimier, voilà bientôt quatre années; donc, en l'espèce, M. Léon Bérard était sorti.

Ceci ne pouvait satisfaire personne, sauf M. Bartholomé. Que pour exalter le « poilu civil», comme a dit Tristan Bernard, l'arrière eût pris, en 1917, une telle mesure, soit; mais elle était peut-être sujette à revision, maintenant que quelques-uns des autres sont revenus.

Aussi, en la personne de M. Charles Tardieu, le Figaro s'en alla rue de Valois, à la Direction des Beaux-Arts; il n'en rapporta que le souvenir d'un accueil délicieusement courtois. Le lendemain, avec une obstination admirable, il se transportait chez le maître ! C'était la seconde visite que celui-ci recevait. « Tout ce qu'on a dit est faux proféra l'artiste ; et rien ne put lui faire abandonner cette position, rien ne put l'amener à s'expliquer

mieux.

Comme par un créneau pourtant il lança cet aphorisme étonnant « Le public se désintéresse des questions d'art. Il a bien autre chose à faire. » Et le leit notiv reprenait : « Tout est faux » (sauf bien entendu le choix de l'emplacement et la statue elle-même). « Fausse, entre autres, l'histoire du syndicat de la Presse, qui demeura parfaitement étranger à la chose ».

Alors, il faut admettre que le ministre ne sait plus, où ne veut plus savoir, ce qu'il dit ? Qui connaît M. Bérard adoptera bien difficilement cette conclusion.

Hélas! M. Bartholomé s'y est pris six mois trop tard pour affirmer son bon plaisir. Ce jeu n'amuse plus Il est probable en résumé que la statue, qu'on dit fort belle, ne viendra pas abîmer un point de vue qu'on sait plus remarquable encore. Comme premier gage de cet avenir rassurant, les travaux de soubassement sont désertés. Bien mieux il semblerait qu'on commence à songer que le « Quand même » de Mercier n'est plus indispensable. Nous n'osions en espérer tant !

་་་་འ་

ROBERT REV.

"Vel' d'hiv".

Je ne connaissais ce monument que pour l'avoir vu à travers la glace d'un wagon de Métro, et j'avoue, ma foi, que je n'avais jamais eu envie d'y entrer. Le « Vél' d'Hiv' ne m'attirait pas. On est ainsi fait, on est pétri de préventions...

Mais le soir du vendredi qui était le quatrième des « six jours », un ami me mit sur l'épaule une main autoritaire : « Je vous y emmène, et je vous promets que vous ne le regretterez pas. » En effet, à peine avionsnous pénétré sur la «< pelouse >>> laquelle, au « Vél' 'd'Hiv'», est de bois comme la piste que je faillis sauter au cou de mon introducteur : Ah, merci, m'écriai-je, de m'avoir montré ça ! »>

Et maintenant je voudrais décrire ça. C'est difficile.

Pensez d'abord à un cirque. Vous connaissez le Cirque de Paris, avenue de Lamotte-Picquet, où ont eu lieu cette année les luttes pour le championnat du Monde, et qui est si grand, si grand, qu'on s'y croirait à l'intérieur d'une planète ? Vous connaissez en tout cas l'ancien hippodrome du boulevard de Clichy ? Eh bien, le « Vél' d'Hiv' » m'a produit l'effet d'être plus grand encore, et non pas rond, mais ovale. Les gradins les plus élevés, noyés d'ombre, paraissent se perdre. dans le ciel, car toute la lumière des lampes est rabattue sur la piste. Et ces gradins sont ponctués de visages, régulièrement, à l'infmi... Voilà ce que j'ai vu entrevu, en émergeant de l'escalier souterrain qui conduit des guichets à la pelouse, par dessous la piste. J'ai eu en même temps une impression de chaleur étouffante. « Les coureurs, me dit mon guide, se sont plaints hier matin de mourir de froid. Alors, on pousse le chauffage. >> Un cirque, un Colisée qui serait une

serrc.

Sur la « pelouse », les spectateurs déambulent et font résonner le plancher sous leurs pas. Des acteurs sur une scène, plutôt, sur une scène violemment éclairée, et la salle tout autour... Mais non, ce n'est pas nous qu'observent les cinquante mille yeux des gradins. Cette rumeur formidable, ces sifflets, ces oris, cet appel de cloche, ces cuivres forains, ce n'est pas à nous qu'ils vont, c'est aux coureurs que je cherche encore du regard, aux coureurs qui tournent depuis plus de quatre jours. Approchons-nous de la balustrade.

Des poteaux télégraphiques passant en coup de fouet dans le cadre d'une portière d'express, telle probablement est l'image la plus juste. Ah! que ne suis-je poète cubiste, quelle forte page vous écririez sur la course des six jours, cher Blaise Cendrars !

Le peloton est déjà loin. Il vire, là-bas, il revient de l'autre côté, il vire encore, la tache d'un maillot permet de le suivre à travers la haie des assistants. De nouveau le voici, et c'est à peine si j'aurais eu le temps d'écrire ces cinq lignes. En tête roule avec l'autorité tranquille d'un bon chef un petit homme brun, au nez busqué, que j'examinerai mieux au prochain tour. A ce moment éclate un coup de feu, et l'on dirait que l'immense cirque se gonfle, se soulève. Je me retourne, et je m'aperçois que sur toutes les chaises et sur toutes les tables, des hommes, des femmes sont montés, les pieds posés parmi les bocks et les coupes de champagne. Je me renseigne. On court une prime de 300 francs, paraît-il... Ça y est, la prime est courue. Le cirque se dégonfle, retombe, les «pelousards » se rassoient. Un peu de calme se produit. L'orchestre reprend sa respiration.

On me conduit ensuite au quartier des coureurs, sitwe à l'un des virages, dans un étroit espace resserré entre la piste et l'enceinte des spectateurs. Ils sont là, étendus dans des caisses. On les masse, pendant qu'ils mastiquent lentement, l'œil vague, des nourritures spéciales. Ils ont les traits cadavériques, à cause de l'éclairage ou à cause de la fatigue, je ne sais. Ils font pitié. Ce sont des blessés dans un coin du champ de bataille. Et près d'eux, contre eux, leurs camarades continuent la ronde vertigineuse, et, au passage, parfois, il y a un échange de sourires crispés, tordus.

Non moins curieux tous ces gens qui s'agitent dans le quartier des coureurs. Ils sont vêtus de costumes bizarres, empruntés au cirque ou à quelque cour, des miracles. On est ici dans une sorte de moyen âge cynique et convulsif, dans une zône baroque, inhumaine, absurde, agressive. Fuyons !

Maintenant nous sommes autour d'une table et nous buvons comme au dancing. Justement le jazz-band vient d'arriver. Des couples se forment. Un fox-trot s'esquisse, cependant que des hauts gradins les injures

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