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e tableau en émail de verre qui l'avoisine où l'on voit ne dame, portée en chaise par ses laquais, arriver à sa maison des champs, à Bercy ou à Charenton, car on disingue dans le fond la Salpêtrière, Notre-Dame et d'aures monuments de Paris. De jeunes paysannes lui font ortège, endimanchées et des fleurs à la main. Sur le coeau on découvre l'intérieur du salon où les demoiselles e compagnie attendent leur maîtresse.

Fabrication parisienne, de toute évidence, chef-d'œure d'un de ces émailleurs dont le Livre commode donne es adresses pour les cadeaux d'étrennes, Jacques Raux, eut-être, émailleur du roi, rue Saint-Martin, auteur de et amusant tableau du musée de Cluny où sont rangés ous les personnages de la Commedia del Arte.

Les pièces de ce genre sont moins intéressantes et moins rares quand elles représentent des sujets de saineté. Cependant, M. d'Allemagne possède une Annoniation et une Nativité qui sortent du commun. Mais uelle grâce vieillotte dans ces intérieurs ouvrant, comme ette, maison peinte en briques rouges, où la chambre à oucher est garnie de tous ses meubles, de ses tableaux, e ses peintures, de son lit à trois dossiers recouvert de ie jaune, et où le salon de musique montre une jeune rtuose, pinçant de la harpe, devant un cahier portant tte légende: « 1er octobre 1791. Inauguration et comément de ce vaste édifice. » Il n'y avait pas un mois e la Constitution était proclamée. Elle allait être bient emportée par le torrent de la Révolution; mais la frale « Chambre du sublime » devait survivre à tous les

ages sans perdre une vitre ni une paillette de papier

Dré.

La grâce française de ce Trianon en miniature repa-. sit dans maintes figures habillées de l'époque, les perinnages entre autres d'un musée révolutionnaire où l'on ut reconnaître M. de Robespierre et autres notabilités lamment costumées. Mais que les grands personnages crèche allemands, taillés à coups de serpe, sont donc sin de cette élégance et de cette mesure! Il y a poursant des scènes de métier savoureuses, comme cette mille de chapeliers, qui devait faire un certain conaste à côté des saintes figures traditionnelles. Mais à ut prendre je préfère les cartonnages de fantaisie, par temple cet écrivain public dont quelque pâtissier de la estauration, disciple de Carême, orna un jour une pièce e dessert, ou l'un de ces groupes satiriques contre les nglais ou les Alliés de 1815, que l'on pèse avant de es renvoyer dans leur pays pour constater combien la uisine française les. a engraissés.

Le triomphe de l'infiniment petit, dans ces pièces à nultiples personnages, c'est une scène rustique composée l'une centaine de petites figures en ronde bosse finenent coloriées, et pas plus hautes que l'ongle. Sur la place du village, le Van Blarenberghe en carton pâte a groupé des badauds devant les tréteaux d'un saltimSanque. Plus loin on danse. On se livre aux travaux des champs. Sur un côté du plateau, un détachement de Cosaques, la lance en arrêt, charge un convoi de blessés français. Episode de la Campagne de France, sans nul doute.

L'armée du Second Empire occupe toute une tablette, avec l'empereur Napoléon III et son état-major chamarré. Mais il y manque quelques-unes de ces figurines que Frémiet avait modelées avec tant d'art pour le prince impérial, en poussant la minutie de reproduction au point d'employer de la fontisse de drap pour les habits, du cuivre ou du fer pour les armes. J'ai vu, je crois bien, dans le cabinet de feu M. Firmin Raimbeaux, l'écuyer de l'impératrice, la plus belle pièce du régiment, l'empereur, en costume de maréchal de France, étonnant de vie et de vérité.

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En somme, ce qui manque ici, comme un peu partout, c'est la poupée, la vraie poupée de Nanon ou de Catau.

M. d'Allemagne en possède une, tout ce qu'il y a de plus enfantine, mais c'est une catin de cinq sols, costumée en Lisette de Béranger. D'autres amateurs sont-ils plus. heureux? J'en doute un peu, même en y comprenant les collections de la duchesse de Rohan, Mme Martin-Guelliot, Mlle Koenig, M. Léo Claretie et M. Bernard Franck.. En revanche les petits meubles, je crois l'avoir dit, sont bien représentés rue des Mathurins, petits modèles de commodes, de tables, de consoles, et même un remarquable petit fauteuil Louis XVI, avec ses garnitures, estampillé Saint Non. Mais ce sont là des pièces de maîtrise qui valent surtout comme objets d'art.

Pendant la guerre, MM. Paulme et Lasquin ont dispersé une collection de ces menus chefs-d'oeuvre. Il s'y trouvait des fauteuils Régence de 30 centimètres, des consoles dorées à pieds cambrés à peine plus hautes, des commodes de 40 centimètres, un petit bureau à cylindre de 34 centimètres. Une chaise d'enfant était signée Dieudonné, une bergère Boucault, un fauteuil G. Jacob.. La merveille des merveilles était un petit canapé canné en bois mouluré et sculpté, dont la longueur ne dépassait pas 88-centimètres et qui provenait de la vente Lelong. Pendant que se vendaient ces fragiles bibelots, les avions ennemis bombardaient Paris. Quelles mains pieuses ont recueilli, aux feux des enchères, ce mobilier de Lilliput?

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HENRI CLOUZOT.

Mémoires & Documents

La fin d'une équivoque

M. l'abbé Muller, député du Bas-Rhin, vient de jouer un bien vilain tour à ceux de ses concitoyens qui, jusqu'à présent, avaient réussi à dissimuler leurs trop réels sentiments séparatistes, leur méfiance à l'égard de tout ce qui vient de la « France de l'intérieur », leur résistance systématique à l'assimilation des départements d'Alsace et de Lorraine, sous le voile du régionalisme et sous l'idée, infiniment vague, mais par là même très séduisante, d'une pénétration réciproque de la législation française et de la législation allemande. Dès le mois de juin dernier, j'ai essayé, dans l'Opinion, de soulever le voile, de mettre à nu la vérité qu'il cachait et d'ouvrir les yeux à ceux qui ne la voyaient pas. Mais, je le reconnais humblement, je n'avais pas mis, à le faire, la même rudesse ni la même vigueur que M. l'abbé Muller.

Si les propos, que la presse a rapportés comme ayant été tenus par lui au récent congrès régionaliste, sont exacts, on ne peut plus avoir aucun doute sur ce que M. Muller et bien d'autres entendent par le régionalisme alsacien-lorrain et par la nécessité de ménager les coutumes locales. Pour eux, l'Alsace-Lorraine doit continuer à former une région; la dualité de langues doit être maintenue, avec la préférence donnée à la langue allemande; la législation locale, c'est-à-dire la législation allemande, doit être conservée. M. l'abbé Muller l'a déclaré sans détour.

On ne peut que l'en remercier et l'en féliciter. Lui, au moins, a eu le rare mérite de la franchise. Il a dissipé l'équivoque si grosse de dangers qui,depuis tantôt deux ans, obscurcit le problème alsacien-lorrain et pèse si lourdement sur la politique du gouvernement en Alsace et en Lorraine. S'il a joué un vilain tour à certains coryphées du régionalisme alsacien, à certains auxiliaires de la justice, qui, en invoquant les « droits acquis » ou la supériorité du statut local ou encore la nécessité d'une période de transition, n'ont d'autre but que d'empêcher la francisation des départements réintégrés, il a, en revanche, rendu le plus grand service à tous ceux qui ne voient la solution du problème alsacien-lorrain que

dans l'assimilation rapide de l'Alsace et de là Lorraine. | Nous savons maintenant à quoi nous en tenir ce que veut M. Muller, ce que veulent les adeptes de la «< pénétration réciproque », c'est le maintien du Reichsland. Aussi bien, personne ne s'y est trompé. Et c'est là un autre mérite de l'abbé Muller ses idées ont provoqué une réaction particulièrement vive dans les milieux alsaciens non contaminés par le germanisme. Après

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qu'il prenne enfin un parti. Ou bien, comme l'y convie l'abbé Muller, il faut maintenir le Reichsland; ou bien, comme l'y convient Hansi, Blumenthal, etc., il faut réa liser au plus tôt l'assimilation par l'introduction de toutes les lois françaises. L'équivoque a pris fin: il est temps d'agir. MARCEL NAST.

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Livres d'enfants

Hansi, qui a publié dans le Figaro quelques articles très Le Commerce du Livre Français courageux, c'est Daniel Blumenthal, c'est Laugel, qui, soit dans la presse locale, soit dans la presse parisienne, ont crié casse-cou; c'est le Journal d'Alsace et de Lorraine qui, depuis quelque temps, mène une campagne très vigoureuse, très franche, très loyale, pour l'introduction du régime et des lois françaises en Alsace et en Lorraine désannexées.

Si maintenant le gouvernement n'est pas fixé, c'est qu'il ne veut rien entendre ou ne rien voir. Malheureusement, on ignore sa politique à l'égard du problème alsacien; on ne sait pas s'il en a une, et il semble montrer une insouciance véritable à l'égard des tendances séparatistes et du maintien de la législation allemande. Je n'en veux pour preuve que les trois faits suivants, qui en disent plutôt long. Alors que, pour faciliter les relations commerciales entre les départements d'Alsace et de Lorraine et ceux d'outre-Vosges, il est d'une urgente nécessité d'introduire la loi commerciale française dans les territoires réintégrés, alors qu'un projet en ce sens est prêt depuis longtemps, le service compétent du Commissariat général ne fait que retarder la présentation de ce projet au Parlement.

D'autre part, le Parlement est actuellement saisi d'un projet destiné à résoudre les conflits de lois en AlsaceLorraine. Le projet primitif, qui donnait satisfaction aux intérêts légitimes des Français de l'intérieur (1), a, sous certaines influences faciles à deviner, été tellement << trituré » que, s'il est voté tel qu'il est maintenant rédigé, on continuera à appliquer à ces Français la loi allemande, dans des cas où, s'ils étaient en Allemagne, on leur appliquerait la loi française. Il en sera ainsi notamment pour la tutelle de leurs enfants; et cela, parce qu'il ne plaît pas aux juges de bailliage d'organiser des conseils de famille ! Or, il ne semble pas que la direction de la justice en Alsace-Lorraine ait fait le moindre effort sérieux pour défendre le projet primitif. Tous les Français de l'intérieur, qui habitent les territoires réintégrés, n'ont plus qu'un espoir c'est que, lors de la discussion à la Chambre ou au Sénat, il se trouve quelque député ou sénateur qui, lui, ne les oubliera pas. Enfin, voici qui est encore mieux. Il y a un an, un décret, qu'une loi récente vient de ratifier, a introduit le droit pénal français en Alsace-Lorraine; les lois françaises qui punissent les falsifications de vins sont donc applicables. Or, ces lois gênent certains viticulteurs qui, comme ceux d'outre-Rhin, considèrent le vin, non comme un produit naturel, mais comme un produit fabriqué, et qui prétendent avoir le droit de mouiller, sucrer, couper leurs vins. Sans doute, sont-ils très puissants. Car il paraîtrait que la direction de l'agriculture prépare un projet de décret qui reviendrait en arrière, et qui, en décidant que les lois françaises sur les fraudes vinicoles ne sont pas comprises dans les lois pénales introduites l'an passé, permettrait de faire en AlsaceLorraine ce qui est défendu au delà des Vosges !... Ici, on ne peut que souhaiter une chose : c'est que le décret, si jamais il est rendu, soit l'objet d'un recours en Conseil d'Etat de la part d'un syndicat de viticulteurs. Le Parlement venant de ratifier l'introduction des lois pénales françaises, le décret dont s'agit serait entaché d'illégalité. Il est temps de conclure. Si le gouvernement ne veut pas laisser s'ouvrir une crise qui peut être grave, il faut

(1) Voir l'Opinion du 17 juillet 1920, p. 77 et suiv.

«...Et puis, je voudrais des images !... >>

Pour obéir à ce vou ingénu, au grand magasin le plus proche vous vous êtes donc rendu, où un monsieur en cravate blanche vous a, d'une geste définitif, désigné le rayon des «< livres d'étrennes ». Ah! vous en avez vu alors des images, des montagnes d'images, de toile rouge vêtues ou de carton colorié, artistement disposées en un savant désordre et déjà vous étiez satisfait que de li vres et que d'images !

Pressé et bousculé, à choisir les moins laides vous êtes longtemps resté perplexe et il n'a fallu rien de moins que les cris de joie du petit bonhomme à votre retour pour dissiper votre méchante humeur alliez-vous donc lu parler de la crise ?

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Au fait, de laquelle, celle des prix ou celle de l'art Vous vous attendiez bien, n'est-ce pas, à la hausse des prix et que les livres d'enfants ne feraient pas exceptio à la règle. Cela n'a rien d'étonnant, d'ailleurs, étant don née la quantité de papier et de carton qu'ils consom ment. Non, à cela vous étiez d'avance résigné. D

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Mais peut-être espériez-vous qu'étant plus chers i seraient de meilleur goût, que le genre se serait reno d'a velé et là vous avez été franchement déçu. Aucune in novation, heureuse ou même malheureuse, aucune origina lité, aucun changement : du déjà vu et souvent du pir Ne vous en étonnez pas. On a très peu produit cett année. Ceci tient encore à la hausse des matières pre mières : elle a atteint son point culminant en juin, épo que où précisément on prépare les nouveautés de fin d'an née et a paralysé la fabrication. Ce que vous voyez au étalages, ce sont en majorité les « bouillons » des an nées passées.

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Aurait-on voulu tenter une rénovation artistique du la livre d'enfants, on ne pouvait donc matériellement l'entreprendre cette année. Pourquoi ne l'a-t-on pas fait aux temps heureux où l'on ignorait la crise de l'édition? On y avait, certes, songé : certains proposaient alors une transformation radicale de la littérature enfantine, rêvant pour les bambins d'ouvrages rédigés par nos meilleurs écrivains et illustrés par des artistes de goût. Il y avait eu commencement de réalisation, notamment par MM. Boutet de Monvel et Francis de Miomandre; dans le même ordre d'idées, cette année même, nous avons l'ouvrage de M. Francis Jammes, Le Bon Dieu chez les enfants, illustré par Mme Franc-Nohain et le Saint François d'Assise de Boutet de Monvel.

Mais il faut reconnaître que ces efforts sont restés isolés et n'ont pas été encouragés c'est infiniment regrettable, au moins en ce qui concerne l'illustration. Quant au texte, c'est discutable: y a-t-il tant de grands écrivains capables d'amuser les enfants? Car toute la question est là: il s'agit de les amuser, le livre d'étren nes est fait pour eux et non pour leurs parents. Ce qui nous paraît charmant et qui l'est, en goûteront-ils (je parle des tout petits), la finesse et le goût? Il faut savoir ou pouvoir se mettre à leur portée et ce ne doit pas être chose aisée. Qu'est-ce donc qui leur plaît ? Nous avons été le demander à un grand éditeur, spécialiste de la littérature enfantine et expert en la matière, M. Languereau.

Ce qu'ils aiment, nous a-t-il répondu, c'est avant tout

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le roman d'aventures, à péripéties multiples et à rebondissement, qui tient leur curiosité en haleine et leur fait perpétuellement se demander « ce qui va arriver ensuite ». Et il a eu cette comparaison amusante: « le feuilleton du Petit Parisien transposé à leur usage ». En un journal d'enfants qu'il dirige, il a récemment organisé un referendum sur le plus intéressant roman publié par ce journal : à une majorité énorme, les suffrages de ses lectrices de 7 à 10 ans ont été à un roman d'aventures abondant en situations imprévues. Des romans de ce genre, il n'est évidemment pas donné à tout le monde d'en fabriquer. Ils sont la spécialité d'un petit nombre d'auteurs et principalement de femmes. La comtesse de Ségur, née Rostopchine, a de nombreuses imitatrices qui, hélas! réussissent beaucoup moins bien qu'elle.

Les petits s'intéressent moins au texte qu'à l'image, mais, comme ils ont l'esprit très observateur, ils exigent une concordance parfaite du texte et de l'image. Si un monsieur est représenté avec un bouquet dans la main droite, il ne faut pas leur dire qu'il l'a dans la main. gauche ou bien ils réclament. Editeur des fameux albums de Bécassine, M. Languereau nous disait à ce sujet le mal que lui donne leur rédaction, au point qu'il est obligé de remanier minutieusement son texte d'après l'illustration.

Tels qu'ils sont, on s'étonnera peut-être que nos livres d'enfants soient très prisés des étrangers: cela est pourtant. Un libraire de Boston signalait même l'an dernier qu'ils étaient un de nos meilleurs instruments de propagande et demandait qu'on lui en envoyât beaucoup Pour l'aider à écouler nos romans et nos autres œuvres. Dans une famille qui achète un livre d'images français pour un petit enfant, disait-il, on s'amuse de sa joie d'abord, de sa curiosité ensuite, on est obligé de lui expliquer le texte souvent, on finit par s'y intéresser, on en prend d'autres et fatalement il arrive un jour où la grande soeur, le père ou la mère achètent des romans français.

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Mais combien de nos livres enfantins sont appelés à la vogue de ces images d'Epinal, dédaignées aujour

J'avais oublié Napoléon! Dieu sait pourtant le rôle qu'ont pu jouer les images d'Epinal, gravées par l'ancien grognard Georgin, dans la propagation de la légende napoléonienne. Souvenez-vous! Les Pyramides, La Mère du Grenadier, Quand vous seriez le Petit Caporal..., Les Adieux de Fontainebleau, Le Retour de tlle d'Elbe, Le Saule de Sainte-Hélène, que sais-je encore? Eh bien, ces images naïves à la gloire de l'Empereur ont puissamment contribué à répandre l'histoire de nos fastes militaires.

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Si cet art enfantin et populaire vient à refleurir un jour qui sait ? imaginez la façon dont il illustrera l'histoire de la récente guerre. Je me le figure d'après un petit album d'images coloriées destiné aux enfants. des pays anglo-saxons que j'ai vu l'an dernier.

C'est une biographie du « général » Joffre. Il est certain que c'est sur lui que se cristallisera, que se cristallise déjà la légende: Joffre à l'étranger, c'est l'armée française.

Cet album est amusant comme une image d'Epinal.. On y voit Joffre écolier, mollets nus et gibecière au dos, qui s'en va bien sagement au lycée; Joffre polytechnicien, le tricorne en bataille et le compas au poing; Joffre à Madagascar sous un casque colonial; Joffre à la mobilisation, regardant de sa fenêtre défiler un régiment, capotes bleues, pantalons rouges, baionnettes fleuries; Joffre à la Marne, sur un tertre, sa lorgnette à la main; apothéose enfin : « The great father », Joffre embrassant un soldat qu'il vient de décorer. Moralité les bons sont toujours récompensés.

J'ai idée que cet album enfantin, destiné à des enfants et que verront leurs parents servira mieux notre cause à l'étranger que beaucoup de copieux ouvrages sur l'histoire de la guerre et sur notre effort militaire.

d'hui, et qui, après avoir fait la joie de notre enfance, Au plein air.

font celle des collectionneurs ?

Les contes de fées, les vieilles chansons de l'ancienne France, M. de Crac et Ali-Baba, Abd-el-Kader et Guillaume Tell et toute la littérature larmoyante du commencement du siècle qui survivait là: Victor ou l'Enfant de la Forêt, Adélaïde et Ferdinand, Estelle et Némorin, Geneviève de Brabant et ce pauvre Juif Errant, bouton d'or et carmin vif, condamné à marcher éternellement sur ce quatrain:

De grandes chausses il porte à la marine.
Et une jupe comme à la florentine,
Un manteau long jusqu'en terre traînant;
Comme un autre homme, il est au demeurant.

Et toutes les « moralités » : le méchant Pierre qui fait des dettes et fume des cigares, le bon Paul qui s'engage et revient général... Souvenez-vous !

Belles images pour les petits et les grands enfants au temps lointain du colportage. Où n'ont-elles pas été ? On en conserve sous verre à Madagascar, où le général Galliéni s'en servait comme moyen de propagande. Au mur d'une chaumière italienne, proche le plateau d'Asiago, j'ai moi-même admiré les Pompiers de Nanterre entre l'effigie de la Madone sainte et le portrait de Crispi.

Elles s'inspiraient autrefois de l'actualité; c'est par elles que le monde a appris l'invention des chemins de fer à une époque où il n'y avait pas de journaux illustrés:

Ah! si Napoléon n'était pas mort

Pour les guerriers, quels chemins de victoire!

Les chemins d' fer seraient un heureux sort,
Ils feraient voler nos braves à la gloire !

Post-Scriptum

GEORGES GIRARD.

Je croyais avoir fini. Je reçois une série de numéros d'une publication intitulée « le Génie Rural », organe de la « Néoculture ». J'y trouve une méthode nouvelle de culture du blé. Je m'abstiens de la discuter. Je ne puis me former sur elle qu'une documentation livresque, étude que je considère comme aussi insuffisante que hasardeuse. Mais enfin, les expériences tentées jusqu'ici, la méthode employée, l'idée dont elles découlent me paraissent intéressantes, originales, logiques.. Je pense avoir compris. J'expose donc théorie et faits tout uni

mement.

La néoculture part de cette donnée : les matières premières se trouvent en quantités inépuisables dans le sol et dans l'air. C'est l'acide carbonique, c'est l'azote, ce minéraux. Les uns et les autres triturés, mués, adaptés sont les vapeurs d'eau, les principes organiques, les sels ainsi baignée dans l'atmosphère, ainsi animée d'une vie par les infiniments petits. Cette terre ainsi composée,. organique pullulante, forme une sorte d'habitat, de demeure annuelle où le grain naît et croît. Là, accomplissant sa mystérieuse fonction, la plante reçoit, absorbe, élabore ces matières premières, et les rend en produits assimilables par l'homme. Il s'agit de mettre terre et plante en état d'absorber et de transformer le plus abondamment possible.

Le sol idéal, au regard des néoculteurs, est un sol nonseulement ameubli en surface, mais encore travaillé, I divisé, rendu perméable aux imprégnations solaires,

aériennes et fluviales jusqu'à 60 et 65 centimètres, aussi loin que les racines de céréales robustes descendent, s'étalent et puisent. Après les labours qui malaxent et effritent, ils imaginent des affouillements de plus en plus profonds, envahissant les couches successives de la terre, gagnant en intervalles à mesure qu'ils pénètrent, de telle sorte qu'au-dessous des lits émiettés de la surface soient créés des lits souterrains bouleversés et parsemés de trous espacés, comme faits par arrachements concentriques. Ils prétendent constituer ainsi une masse entièrement travaillée, quoique inégalement, où la terre plus meuble du dessus coule, emplit ces espèces de bouches inférieures, sans les combler toutefois, ménageant à la lante des cheminements inusités, au plus haut degré favorables à son développement. Ici, la méthode marque un temps d'arrêt. Point de pause au reste mécanique. Les instruments nécessaires à ces opérations, qui ameublissent et déchirent, bouleversent et creusent, manquent encore. Ou bien parce que leur prix de revient les rend pratiquement inutilisables. Il n'y a point de doute qu'ils ne soient un jour d'usage courant. Toute idée exacte de l'homme ploie la matière à l'exécution. En attendant les néoculteurs s'adressent à la nature. Elle demeure l'éternelle collaboratrice.

Il est des plantes qui pénètrent, ouvrent, affouillent la terre par la dilatation de leur tronc pour ainsi dire, et la sillonnent, la divisent par l'expansion de racines innombrables, laissant, une fois arrachées, un sol meuble en surface et parsemé dans sa profondeur d'excavations et de canalisations multipliées : ce sont les légumineuses. De plus, comme les racines pourrissent, elles abandonnent à la terre un poids considérable d'humus, elle excitent la vie microbienne en offrant aux animalcules des parcelles végétales en décomposition, elles émettent enfin des toxines qui, poison violent, destructeur des autres semences, constituent un stimulant énergique pour les céréales. Comment? Pourquoi? C'est un pli du voile jeté sur les affinités de la nature... Les plantes remplissent l'office attendu des machines. Les néoculteurs en font un usage constant. Par elles ils émiettent leur sol, par elles ils le travaillent profondément tout en le liant dans ses couches inférieures, tout en l'emplissant de terre pulvérisée, elle-même enrichie d'humus et vivifiée de microbes. Toutes les légumineuses sont bonnes à ces fonctions, les betteraves surtout.

Vient l'époque des semailles. Les néoculteurs cherchent à la fixer. Elle n'est point indifférente, elle ne saurait être laissée à l'habitude, au rite ancestral réglé par le calendrier, les révolutions lunaires ou solaires, limitée à telle ou telle semaine. Non, le grain lui-même indique l'heure où il doit être enfoui.

C'est ce que les néoculteurs appellent l'époque physiologique. Elle est déterminée par le degré de maturité, et celle-ci se manifeste complète à la minute où la graine tombe d'elle-même. Dès cet instant et durant un mois et demi environ la graine possède et garde intacte sa plus grande puissance de germination et de prise. Il semble qu'il faille la livrer alors à la terre, vers la fin de septembre dans nos pays ou dans les premiers jours d'octobre. Le reste est affaire de pluie. A la première ondée elle germe.

Une autre question? Doit-on semer clair ou épais? Les néoculteurs répondent: semence moyenne. Semés épais les grains se nuisent, ils sont trop autour de la table, je veux dire du rond de terre où ils vont vivre semés clairs ils risquent d'être en nombre insuffisant, si l'on considère la quantité de ceux qui ne germent pas ou sont dévorés par les oiseaux. Tous ceux en un mot qui restent écrasés ou disparaissent dans la lutte pour la vie. Et ceci me rappelle une sentence d'un de mes vieux métayers: « Il ne faut jamais affronter la

terre », parole qui peut se traduire ainsi : « Il ne faut pas refuser la semence au sol ». Expérience et science ne font qu'un souvent.

Nous touchons à présent au fond même de la méthode nouvelle. La néoculture regarde beaucoup plus un champ comme une terre à cultiver que comme une terre à ensemencer. Je m'explique : elle veut que dans une pièce de blé l'espace à cultiver l'emporte sur l'espace à ensemencer. C'est pourquoi elle sème en lignes ligne simple, ou double, ou triple. Ces lignes sont à o m. 50 les unes des autres et d'axe en axe, et les tiges, par l'enfouissement exact du grain à la machine, à 18 ou 20 centimètres de pied à pied. Il paraît que le dispositif du blé sur ligne double est le plus productif. Parce qu'il laisse le plus de sol à cultiver, parce qu'il pare le mieux aux manquants par le remplacement du grain avorté ou dévoré par le grain jumeau, parce qu'il évite enfin de créer un fouillis de tiges nuisibles au développement. Cet inconvénient est fréquent dans les blés en ligne triple, l'exubérance des pieds qui talent à l'extrême en atrophie une partie. Cette force, cette poussée de sève, cette expérience de jet est due à la préparation du sol certes, mais surtout aux façons que l'on donne au champ du jour des semailles au jour presque de la moisson: façons que la préoccupation du plus grand espace à cultiver donnait bien à deviner. De fait on butte deux fois la plante et précocement, on la bine ensuite tout le long de sa crue, toutes les fois que le sol semble faire corps et se durcir, on la traite comme une légumineuse. Nouvelle plante sarclée dont on prolonge l'état de réceptivité, de nutrition durant toute sa végétation, en l'inondant de lumière et d'air, de principes fécondants, de vie.

Je me résume. Les néoculteurs préconisent un sol ameubli en surface, travaillé, divisé, affouillé dans ses couches profondes, une quantité moyenne de grains semés, des semailles faites en ligne double, après quoi deux buttages précoces et des binages jusqu'à la fin : je l'oubliais, des semailles faites à l'époque physiologique. Ils espèrent arriver ainsi à une production nettement supérieure aux rendements accoutumés. Ils parlent de deux quintaux de plus à l'hectare. Ils ne rejettent aucun amendement. Ils convient tous les agents à concourir à l'élaboration du grain sacré

J'ai dit que les instruments puissants nécessaires. à la préparation du sol n'étaient pas encore au point. Ceux qui servent aux façons sont trouvés. Ils fonctionnent. Le mieux adapté à son usage est le « néobineur »>. Cet instrument compte un certain nombre de socs sarcleurs et butteurs fixés à des barres-porte-outils et montés sur roues. Ils sont articulés au point qu'ils épousent tous les reliefs du sol; distribués sur le châssis, ils peuvent travailler indépendamment, série par série. Un cheval traîne, un homme assis conduit le néobineur. Enfin une direction permet de conserver exactement la ligne droite. On passe le néobineur jusqu'à ce que le blé ait atteint I mètre. Bien entendu, au moment voulu, un semoir et un épandeur d'engrais se montent sur le châssis.

Je n'ai vu que des photographies de blé en ligne double. Autant qu'on en peut juger dans le lointain de la plaque, cela donne l'impression de haies parallèles se dirigeant vers l'horizon. Haies épaisses, rigides, vêtues d'or, étincelant sous le firmament. C'est lorsque les blés sont immobiles, enveloppés de flamme estivale et «< qu'ils épuisent sans peur la coupe du soleil ». Mais qu'on se les figure agités par le vent. Ils ondulent, s'enflent, bruissent alors, flots vivants de la terre, pareils aux autres, aux moutons de l'Océan poussés et dressés par le flux et que la brise hérisse.

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JOSEPH DE PESQUIDOUX

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LETTRES

Feuillets de la Semaine

Sir Jagadish Bose

De taille moyenne, légèrement corpu-. lent, les cheveux noirs bouclés, séparés dans le milieu par une raie, la figure rasée, il passerait fort bien pour un Européen, si son teint cuivré ne décelait immédiatement son origine hindoue.

Né le 30 novembre 1858 à Calcutta, où il commença ses études, il vint de bonne heure en Angleterre pour les compléter.

Les ouvrages dans lesquels il a publié les résultats de ses travaux scientifiques lui ont acquis, en Angleterre, une notoriété qui lui a valu, en 1903, l'ordre de F'Empire des Indes et en 1917 le titre de chevalier.

En 1900 Sir Jagadish Bose a pris part au Congrès Scientifique International qui se tint à Paris..

Mettant à profit son séjour qu'il vient Ide faire parmi nous, aidés par l'Association des Amis de l'Orient, MM. Daniel Berthelot et Mangin ont présenté Sir Jagadish Bose à l'Académie Erdes Sciences et à différents auditoires au musée Guimet et au Museum d'Histoire Naturelle, devant lesquels le savant étranger a parlé de ses études et exposé quelques-unes des idées qui lui sont chères.

C'est surtout à la vie des plantes qu'il s'est intéressé; c'est à des observations sur leurs manifestations vitales qu'il a consacré ces vingt dernières an.nées.

Pour mener à bien ses recherches, il lui a fallu créer des appareils qui lui permissent d'enregistrer des phénomènes biologiques qui échappaient au microscope le plus puissant. Il a donc imaginé un système de leviers lui permettant d'atteindre une amplification qui peut aller jusqu'à cent millions de fois. Muni de cet appareil il a noté les réactions produites sur les végétaux par les chocs, par les excitants, par les -anesthésiants, par les poisons. Et il a pu constater que les plantes témoignent dans leur vie tout entière, dans leur croissance, leur développement et leur mort, des mêmes phénomènes que les autres êtres de la création.

C'est ainsi qu'il établit un parallélisme entre le spasme qui parcourt le corps de l'homme au moment de la mort et le spasme convulsif qui, chez la plante, a lieu au même moment et qui se traduit sur le diagramme enregistreur de son appareil par une ligne de lumière qui recule brusquement, puist s'interrompt.

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Il a observé, en outre, le sommeil de la plante car la plante dort, elle aussi et son sommeil, constate-t-il, comme celui des animaux, atteint des degrés variables. Enfin il a noté sur elle les effets de l'alcool, qui sont analogues à ceux qu'il produit sur l'homme.

De l'analogie du fonctionnement phy. siologique de la vie chez les plantes et chez les animaux, il déduit une unité de la matière inorganique, et dépassant

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L'Académie des inscriptions et belleslettres, au cours de sa dernière séance, s'est associée à l'unanimité au manifeste de M. Ernest Lavisse et de la C. T. I., pour la défense de la pensée française.

Elle a estimé intolérable le régime prohibitif douanier qui nous prive de papier dans le moment même où le prestige de la France, accru par la victoire, rendrait si puissant le rayonnement de sa pensée dans le monde, et où l'Al magne, au contraire, dispose pour ses publications et sa propagande, de stocks de papiers considérables, et en achète chaque jour davantage.

Le professeur Charles Richet, que l'on disait attentif aux exercices de Johnny Coulon et des athlètes impuissants à soulever ce petit homme, s'est amusé seulement de ce spectacle pour le quel il prêta un instant son laboratoire. Mais il s'occupait à d'autres travaux et observait surtout les microbes et l'action exercée sur eux par les antiseptiques.

Lundi dernier il soumettait à l'Académie des sciences les résultats et ces observations. Ils sont d'importance.

M. Richet a constaté, en effet, que les microbes, à la manière de Mithridate, s'accoutument aux toxiques, et même qu'ils transmettent cette accoutumance aux générations microbiennes qui les suivent, en sorte que tel antiseptique d'abord très actif, devient anodin à la longue.

La conclusion pratique est qu'il importe de faire alterner les antiseptiques, et que, comme l'a dit spirituellement M. Charles Richet, & quand un remède a réussi, il faut se hâter d'en adopter un

autre ».

Pour la pensée française M. Ernest Lavisse vient de lancer un appel, en faveur de la pensée française. Il y dénonce l'état inquiétant de notre librairie.

Tandis qu'en Angleterre, aux EtatsUnis, en Allemagne, les publications se multiplient, il devient presque impossible en France d'éditer un livre dont le prix soit abordable. Les Anglo-Saxons et les Allemands, outre qu'ils disposent de papiers en stocks, en achètent partout où il s'en trouve. A nous, une douane prohibitive l'interdit.

Conséquences des périodiques considérables interrompent leur publication; des suites d'ouvrages attendent ; on hésite à publier des livres sur des sujets graves, ils coûteraient trop cher; les académies acceptent des concurrents des copies dactylographiées, et bientôt, il faudra en arriver là avec les thèses.

« Voyez-vous, s'écrie M. Lavisse, la France intellectuelle obligée à chercher le moyen de se passer de l'imprimerie? »

D'autre part, la confédération des sociétés scientifiques françaises, annonce. la fondation d'une société d'impression et d'édition, « les presses universitaires de France » qui tâchera de publier ses ouvrages à meilleur compte qu'ailleurs. Le gain, déclare le manifeste, n'aurait plus pour but que de faciliter la production scientifique et de la répandre pour le plus grand bien du pays.

Nos livres sont tellement trop chers que l'Alsace-Lorraine en réclame de notre générosité par l'entreprise de la Ligue française qui a envoyé dans nos provinces reconquises près de cinquante mille volumes. La Pologne, de son côté, lance le même appel.

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La cité universitaire

Le Conseil municipal de Paris vient. d'accorder au ministre de l'instruction publique, les terrains des fortifications situés en face le Parc Montsouris, pour y créer une cité universitaire où les étudiants trouveraient à des prix modérés, des habitations hygiéniques, pourvues des installations nécessaires à leur vie matérielle et intellectuelle, en même temps que les espaces libres destinés à leurs délassements sportifs ».

M. Deutsch de la Meurthe a manifesté l'intention de consacrer à cette œuvre, une dotation de dix millions. M. Philippe Roy, commissaire général du Canada en France et le professeur suédois, Erik Staaff, ont annoncé au ministre, qu'ils créeraient également des installations destinées aux étudiants de leur nationalité. Plusieurs républiques sud-américaines, préoccupées de la crise du logement qui sévit en ce moment à Paris, et qui ont déjà projeté la location d'immeubles dans le quartier latin, pour héberger leurs étudiants, ne seraient pas opposées non plus, dès que la cité iniversitaire entrerait dans la voie des réalisations, à bâtir des pensions de famille sur le même emplacement.

L'ensemble de la cité universitaire aurait une surface de neuf hectares lont deux, généreusement offerts par la Ville au profit de l'oeuvre de M. Deutsch de la Meurthe.

On estime à trois mille, ce qui correspond actuellement aux besoins de la jeunesse des grandes écoles le nombre de places dont pourront disposer les étudiants.

L'affaire Himmel

La mode est aux romans d'aventures. Quelques auteurs dramatiques et scénaristes notoires viennent d'en vivre un très bref, mais merveilleux. Un jeune homme de vingt-deux ans, M. André

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