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EPITAPHE POUR GASTON BOISSIER

Un des derniers survivants de l'espèce des gramCi-gît Boissier, le vieux raseur,

mairiens épingla sa carte sous l'écriteau. Comme elle Plus connu comme confiseur.

portait un quatrain, nous l'avons dérobée. Voici le qua.
train du puriste, probablement déçu :

Franchement, Franck, est-ce un faux pas ?
Entre marionnettes.

Epargnez-nous ce chagrin, please.

Pour que nul ne s'en scandalise, Une révolution au cinéma.

Invites, mais n'évitez pas. On avait coutume de croire que le cinéma adoucissait les moeurs. Il était rare du moins qu'on y manifestât bruyamment.

Sur une candidature. Mais les temps sont changés. L'autre semaine, c'était

Nonobstant l'exemple d'Antoine à la Russie rouge une bataille de sifflets et d'applau- Dont l'échec eut tant de renom, dissements,

Ma femme me déclare idoine La semaine dernière, on jouait El Dorado, un curieux

A gouverner en Odéon. mélodrame de Marcel Lherbier,

Je crains que ma candidature, L'auteur, voulant rendre une impression de confusion

Malgré l'appui d'un président, d'où se dégage la vue précise d'une scène, avait troublé Soit le début d'une aventure à dessein la photographie qui semblait ainsi s'éclaircir,

Dont le terme pour nioi n'aura rien de brillant. peu à peu, s'équilibrer, se réaliser. C'était une intention

Mais j'ai beau me crier : Gare ! un peu subtile pour le public.

Quand elle insiste à sa façon Quelques spectateurs siffèrent. Etait-ce une cabale?

Je ne peux résister à ses suggestions : Un enthousiaste interrogea, son voisin mécontent.

MORALITÉ Hé bien quoi, si je siffle, c'est pour avertir l'homme de la projection que sa machine n'est pas au point! La

Andrée m'égare ! preuve, monsieur, c'est qu'il vient de la remettre : main

muina tenant, on voit clair.

Un peu partout.

Le théâtre français à Berlin. On projetait l'autre jour un film sur la vie et la mort du Gallito, qui fût un toreador célèbre en Espagne de

Faut-il voir là un signe de rapprochement franco 1914 à 1920. On s'émut encore.

allemand ? Alors que l'année dernière, c'était le théâtre Les adversaires des courses de taureaux témoignèrent anglais qui avait la vogue à Berlin, neuf théâtres de leur horreur par des protestations véhémentes... D'autres

Berlin donnent maintenant des pièces françaises. Il se spectateurs, silencieux, n'en pensaient pas moins que,

produisit même à l'une de ces représentations un petit si des us et des coutumes il ne fallait point discuter,

incident dont plusieurs critiques berlinois se sont monen vérité de tels honneurs et un enterrement triomphal trés choqués. Pour la première fois dans l'histoire du dépassaient notre mentalité française : ils ne pouvaient

théâtre allemand, on a fait une ovation à un costume : s'empêcher de songer aux dates, et qu'en ce temps-là, celui que portait l'héroïne de l'Eternel masculin, de chez nous...

Coolus, une robe composée de brocart d'argent et de Et pourtant, ne s'est-il pas trouvé des gens, et de plumes d'autruche: ceux que la course révoltait, qui applaudirent l'horrible

Un jeune auteur allemand a donné une adaptation scène de la mort du toreador?

très moderne de Manon Lescaut. C'est d'ailleurs la

mode à Berlin que d'adapter des pièces anciennes au mummi

lieu d'en créer de nouvelles. De qui est-ce?

Mais cette mode-là ne vient-elle pas aussi de Paris? Cet auteur a contume de faire rire, en prêtant à ses

minin personnages une conduite, un métier, une situation qui Le roi d'Angleterre et le Pape. sont tout l'opposé de la conduite, du métier ou de la situation qui leur seraient naturelles. Il eut l'autre jour

Peu de gens ont été surpris en Angleterre de cons

tater que le roi Georges, en répondant au Pape, l'eût un bon mot, qui est bien dans cette manière et dont il fit lui-même les frais.

appelé « Votre Sainteté » da son télégramme.

son Le succès, qui ne l'a jamais quitté sur la scène, ne

Il y a soixante-dix ans, la chose ne paraissait point lui a guère servi dans son ménage. Ses malheurs ne se

aussi simple, et il fallut de bien longues consultations comptent plus...

pour que la reine Victoria fût autorisée à écrire ; « Très Rencontrant dans un salon trois amis qu'il savait

Eminent Monsieur (Most Eminent Sir) » à Pie IX qui, avoir été aussi ceux de sa femme, il leur déclara avec

cependant, lui avait écrit en ces termes : « Sérénissime le flegme qui le caractérise :

et irès puissante Souveraine Victoria, Illustre reine d'An

gleterre ». Mes amis, j'ai une grande nouvelle à vous annon

Peut-être Léon XIII se souvenait-il de cela quand, cer : vous l' êtes tous : j'ai couché avec ma femme cette nuit.

recevant au Vatican l'évêque anglican de Gibraltar, i lui dit avec un sourire ironique : « Je crois, Monseigneur,

que je suis ici dans votre diocèse. » Soyez bons pour la langue française.

muun Pour éconduire ceux qu'une certaine presse appelle les « ayants droit », gent fâcheuse qui désespère les di

Effets de lumière. recteurs un soir de répétition générale, M. Alphonse Un pasteur de New-York, M. William Duthrie, Franck avait fait afficher l'avis suivant au bas de l'es

s'avise que les couleurs, si elles peuvent ramener les cricalier qui mène à son bureau du théâtre Edouard-VII: minels sur le droit chemin, peuvent tout aussi bien diri

ger les âmes vers la beatitude éternelle. a Il ne reste plus aucune place pour la répétition

l'église de St Mark'snérale de Jacqueline. Evitez à M. Franck le chagrin de in-the-Bowery, dont il est le recteur, des lampes électri

. ne pouvoir accueillir votre demande. »

ques roses, bleues, vertes et jaunes.

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Il a donc fait installer dan

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Au fur et à mesure que se déroule le service, des lam- ; thique, en dépit de tout le tact du monde et des mains pes s'allument, d'autres s'éteignent, l'éclairage est tantôt légères et souples de l'administration française ? vif, tantôt doux.

Je le veux bien et je l'ai reconnu. Lorsque les déparLe bleu et le vert doivent procurer la paix spirituelle. tements d'avant 1870 seront reconstitués, comme ils

Le jaune et le rose provoquent une élévation morale auraient dû l'être depuis longtemps, après une courte parfaite.

transition, il faudra quelque tempérament dans l'appliVoilà de la liturgie moderne !

cation de la législation. Metz et Strasbourg n'ont pas connu, dans des conditions politiques différentes, les mêmes luttes religieuses que le reste du pays, et ne sont

pas prêtes peut-être à donner immédiatement à ces lutAffaires Intérieures

tes la même sloution, du moins sous la même forme et

dans le même esprit ; les événements récents du parti Les affaires d'Alsace et de Lorraine,

populaire républicain nous montrent quelle est là-bas la

bonne volonté et le large esprit des chefs, mais aussi et le Commissariat général avec quelle prudence il faut toucher à ces questions

.

Le régime fiscal demande aussi peut-être quelque Incessamment, une interpellation sur les affaires aménagement et surtout quelque transition. Enfin, chad'Alsace-Lorraine mettra le gouvernement en demeure cun sait que là-bas une législation économique et sociale de présenter une solution.

beaucoup plus avancée et plus complète que la nôtre, est La situation d'une Alsace-Lorraine séparée du reste

depuis longtemps entrée dans les habitudes et les de la France, n'ayant pas la même organisation adminis

moeurs, et que loin d'en retirer, même provisoirement les trative et judiciaire, et constituant une sorte de gouver- bénéfices, il convient d'y voir un exemple sur lequel il nement général à la manière d'une colonie, ne saurait faut nous modeler, se perpétuer.. Non seulement les Alsaciens et les Lor

Cela justifie-t-il le maintien d'un commissariat général rains ont fait connaître leurs sentiments sur ce point, à Strasbourg ? Je ne le crois pas, et personne ne le mais la plupart des conseils généraux de France, au

croit. Juger de l'opportunité de l'application immédiate cours de leur dernière session, ont émis des væux for

de certaines mesures législatives ou réglementaires, ce mels en faveur du retour au droit commun de nos dépar- n'est point administrer. tements recouvrés, en ce qui concerne l'administration

Les Alsaciens et les Lorrains ne sont de nouveaux et les chemins de fer.

venus dans la nationalité française. Ce sont des FranC'est le bon sens même : si des tempéraments peuvent çais d'hier, de toujours, qui nous reviennent d'exil, et être apportés dans l'application aux départemerits dont qui ne veulent connaître de gouvernement et d'admiil s'agit, de la législation française de ces dernières

nistration que le gouvernement et l'administration de années en ce qui concerne notamment les cultes, le leur pays. S'il est nécessaire de maintenir pour quelque régime fiscal et les institutions économiques et d'assis

temps encore une sorte d'office ou de bureau d'études, tance, il n'y a aucune raison pour maintenir la double est-il nécessaire pour cela de perpétuer la lourde maanomalie d'une division géographique arbitraire, issue chine administrative d'un commissariat j'ailais dire de la seule force du traité de Francfort, et de la lourde,

d'un gouverneur général ? Est-il nécessaire surtout très lourde administration que constitue le commissariat et ceci importe - que le siège de cet organisme soit général.

à Strasbourg et non à Paris ? Qui donc songerait à insD'une part, 10 « Alsace-Lorraine » est une expression taurer à Laon, à Reims ou à Lille un commissariat des géographique qui ne signifie rien. Les arrondissements régions libérées, et à retrancher pendant des années nos brutalement arrachés à la patrie en 1871 avaient été départements libérés, parqués à l'écart sous une admiconstitués par l'Allemagne en territoire d'Empire, mais, nistration d'exception ?

nistration d'exception ? L'Alsace et la Lorraine ont depuis le retour à la France, on se demande si le main- moins de ruinės à relever que Lille, Arras, Soissons ou tien de cette circonscription arbitraire est plus absurde Reims. Elles n'ont besoin de personne, à Strasbourg, qu'injuste ou plus injuste qu'absurde. Les Alsaciens- ni à Metz, surtout si de Strasbourg on prétend gouverLorrains ne constituent pas un peuple. Il y a des Alsa

ner Metz

ou vice versa. ciens et il y a des Lorrains, qui n'ont pas plus de raison Le bureau, très sommaire, dont l'utilité peut, en effet, d'être confondus dans une appellation unique que les se concevoir quelque temps, doit être à Paris. Et pourNormands et les Bretons, par exemple, qui ont chacun quoi ne pas le confier à un membre du gouvernement, leur tradition et leur culture propres, des intérêts divers, par exemple à un sous-secrétaire d'Etat ? Qui ne voit contradictoires parfois, et dont le principal lien commun combien la solution d'affaires, d'ailleurs peu nombreuest d'avoir souffert ensemble de l'exil, et vibré d'une ses, serait hâtée et simplifiée par cette procédure supmême joie au retour dans l'unité française. Cette raison primant un intermédiaire lent, inutile et coûteux. Dispaseule, que le commissariat général perpétue une expres- rition d'une union personnelle dont le nom même est sion géographique illogique, née de la force de l'ennemi, fâcheux et rappelle les plus cruels souvenir. Disparition et qu'il faut arracher au plus vite du souvenir des hom- de bureaux encombrants qui donnent là l'apparence mes, suffit à condamner un commissariat qui règne à toujours un peu vexatoire d'un régime d'exception. Altkirch et à Thionville.

Solution aisée et rapide des affaires par un homme qui, Qui ne sait, ensuite, combien l'administration alle- lui-même membre du gouvernement, pourrait les résoumande a pesé lourdement sur le territoire d'Empire !dre sans intermédiaire et avec le minimum de paperasQui ignore combien ces Alsaciens et ces Lorrains, si series. Harmonie de ces régimes tenant compte de tous jaloux de leurs traditions et de leurs libertés, ont souf- les intérêts et de toutes les nécessités et donnant satisfert sous la tutelle insupportable de tant de fonction- faction aux légitimes désirs de ces populations très paDaires, et se sont impatiemment débattus entre tant de triotes et trs généreuses, mais très réalistes aussi, et rouages administratifs superposés et compliqués ? Faut- toujours soucieuses de solutions pratiques. il donc leur donner, à leur retour dans le sein de la Que mettre en regard de ces raisons, pour contreba. patrie ancienne, en seul don de joyeux avènement, ce lancer le voeu si clairement, si nettement, si formellement seul cadeau de fonctionnaires supplémentaires, et, cir-exprimé des Alsaciens-Lorrains et de tous les Franconstance aggravante, de fonctionnaires d'exception.çais ? Que mettre, sinon ce seul et déplorable argument Faut-il se hâter d'organiser solidement chez eux ce qui de la difficulté, de l'effroyable difficulté, de l'inévitable leur est précisément le plus agaçant et le plus antipa- | difficulté qu'éprouve toujours ce pays à se débarrasser

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il n'y

22

du moindre organisme parasitaire, à réaliser la moin- M. Hughes vient de le prouver. « Le pape baptiste »; : dre réforme touchant à la benoite possession des situa- censeur véhément des scandales financiers, magistrat tions acquises. Et trouverons-nous là encore une dé- d'une autorité incontestée, arrivé par son caractère aumonstration nouvelle, au prix des plus graves consé- tant que par son intelligence aux premiers rangs du quences, de ce fait, plaisant pour les seuls humoristes, barreau et de l'Etat, a démontré qu'il était un habile qu'en France, il n'y a que le provisoire qui dure, et que manouvrier. Il a su profiter de cette atmosphère morale les abus, seuls, sont éternels?

et d'une révélation dramatique pour dicter sa volonté TRYGÉE.

américaine.

Cette volonté est redoutable. Elle exige l'égalité entre

les deux flottes britannique et américaine. Elle condamne Affaires Extérieures

la marine japonaise à ne pas franchir un niveau infé

rieur. Elle prétend fixer, pour les trois catégories d'uniLe problème de Washington (1) tés navales, grands cuirassés, vaisseaux auxiliaires et II

sous-marins, le tonnage qu'aucun des pays, dans un dé

lai de trois mois, ne pourra plus dépasser. La durée Votre civilisation matérielle n'cst pas une civilisation :

d'existence et l'importance du tonnage, prévue pour les a d'autre civilisation, que celle des sentimeuts ». ,

cuirassés, sont rigoureusement déterminées. Les effecAinsi s'exprimait, tout récemment, un lettré japonais, tifs de remplacement sont prévus et réduits. Pendant interrogé par M. Hovelaque, dont les deux volumes sur

dix ans, la concurrence maritime est ligotée, avec la les Peuples d'Extrême-Orient (2) font, par leur péné- rigueur qu'autorise la législation et qu'approuve la tration psychologique, leur intelligente sympathie, et magistrature américaine. leur clarté ordonnée, singulièrement honneur à la science Quelques chiffres permettront d'apprécier la vigueur française. Si le philosophe nippon pense que les sen- de ce tour de vis. liments ne jouent aucun rôle dans la vie occidentale,

Tonnage ayiorisé

Grande Bretagne Etals Unis la première séance de la Conférence de Washington a

Japon dù lui causer quelque surprise.

Capital ships: Depuis plusieurs jours, dans toutes les églises et dans Nombre

18

10 tous les collèges, des voix se sont élevées pour démon

Tonnage
... Tonnes 604.450

500.650

299.700

Tonnage de remplacement. trer l'importance historique qui s'attache à la journée

500.000 600.000 500.000 du samedi 12 novembre 1921, pour éveiller l'attention, 20 Navires auxiliaires croiémouvoir les sentiments et dicter des prières. L'enseve

seurs légers et destroyers.. 450.000 450.000 270.000 Jissement du soldat inconnu qui restera le symbole re- 3° Sous-marins

90.000 90.000 40.000 ligieux de la guerre mondiale, est apparu comme la 4° Porte-avions

80.000

80.000 48.000 dramatique préface du premier Congrès qui se soit Téuni sur le sol américain. Il ne s'est pas réuni dans

Or, voici quels devaient être, dans un avenir prochain, une salle écartée et silencieuse, mais en contact direct en 1924, pour la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, en avec la foule américaine. Et c'est dans une atmosphère 1926 pour le Japon, les effectifs de leur Rotte de guerre : vibrante que le président Harding s'est levé pour parler.

Grande Bretagne

Japon Sa religieuse éloquence est animée du même frémisse- 1° Capital ships : ment qui, lentement, sous l'action de facteurs multiples, Cuirassés avec canons de finit par ébranler des milliers d'êtres humains.

350 m/m et au-dessus ..T. 366.250

722.000 252.000 Cuirassés

calibres al ... L'appel, qui a cié lancé, n'est pas seulement l'appel

plus petits

305.540 de la

167.650 59.950 des Etats-Unis, mais bien plutôt celui du monde las

Croiseurs, avec pièces de guerre, qui lutte pour la reconstitution d'une terre, qui a faim

350 m/m et au dessus

261.000 186.000 et soif de meilleures relations réciproques, c'est l'appel de

Croiscurs

avec calibres l'humanité, qui demande à grands cris à être soulagée et qui

plus petits

90.300 est dévorée du désir de posséder enfin une paix durable... Qu'ils l'aient exprimé ou non, des centaines, des milliers

Tonnes 883.290 1.159.650 497.950 d'Américains ont évoqué la cause inexcusable de la guerre, les dépenses incalculables, les inexprimables sacrifices et les 20 Croiscurs légers : indescriptibles chagrins qu'elle a causés, et cette question

Tonnage ......Tonnés 359.000

60.847 restait à jamais posée : « Comment l'humanité peut-elle se justifier, et comment Dieu peut-il pardonner ? » La haine

3o Destroyers : humaine de demande pas le paicment d'un tel impôt... »

Unités

190 317

99 Cette société puritaine a dû surprendre quelque 4° Sous-marins : peu les diplomates européens, leur réalisme laique et Unités

166

13 leur sécheresse distinguée. Ils auraient tort, cependant, de sourire et de railler. Si Harding reprend exactement M. Hughes déclara sans sourciller, que ces trois Etats les formules de Wilson, c'est qu'il comprend la force auront à détruire en trois mois 66 cuirassés, soit I milagissante de cet idéalisme sentimental. Les peuples sont lion 877.000 tonnes. Les 618.000 tonnes de dreadnoughts infiniment las, las de souffrir et las de lutter. Leur rési- américains, qui doivent être réduits en poussière, reprégnation, cependant infinie, est à bout. Les masses ont sentent la bagatelle de 380 millions de dollars, 4.503 milsoif de paix, non pas d'une paix précaire et partielle, lions de francs ! Et ce en comptant pour cinq millions mais d'une paix durable et totale. L'homme d'Etat,

15 cuirassés anciens, jaugeant 227.000 tonnes. qu'elles entoureront de leurs acclamations et soutien- On voit bien que les Américains voient grand. Et je dront de leurs volontés, est celui qui paraîtra vibrer au comprends que les diplomates européens soumis à souvenir de ces souffrances et au contact de oes aspira- plus de prudence, plus de discrétion, plus de parcimotions. Celui-là pourra se retourner vers ses alliés, ré

nie aient eu un petit frisson d'épouvante, en entenclamer leur concours et imposer des concessions avec

dant parler M. Hughes. l'autorité que donne l'approbation passionnée d'un Le peuple français, du moins, ne partagera pas ieurs peuple unanime.

angoisses. Même si cette rivalité navale n'eut pas eu,

comme la précédente, pour conséquence inévitable ane (1) Voir l:Opinion du 5 novembre,

nouvelle guerre, elle ne pouvait, en tout cas, que rendre (2) La Chine, Le Japon. E. Flammarion, 1921.

la paix précaire. Or, une paix durable reste un intérêt

Etats Unis

avec

121,200

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82.250

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français. Cette concurrence avait pour résultat de désar- met à la portée des petits Etats. Elle compense la quanmer surtout les petits Etats : l'accord restitue à leurs tité par la qualité. Elle réduit la marge des supériorités,

. marines une valeur d'appoint. L'égalité des deux flottes sans pour cela interdire de contrebalancer les infériorités britannique et américaine, assure l'équilibre mondial et numériques par la perfection du détail matériel et la vaempêche toute hégémonie. Les économies, ainsi réalisées leur des forces morales. Elle ajourne une guerre fatale. sur le budget des constructions nelives, accroîtront les Elle ne saurait suffire pour assurer une paix durable. disponibilités en capitaux, dont l'Europe ne peut se pas Elle régle.nente le port d'armes. Elle ne l'interdit pas. ser. L'entente, enfin, si elle se réalise, ne permettrait-elle Pourquoi la délégation japonaise avait-elle, avant la pas de constituer, sous une forme plus ou moins souple, séance inaugurale, dès son débarquement, exprimé puune véritable Ligue de la Paix ?

bliquement le désir de voir la conférence aborder Si MM. Harding et Hughes ont été, pour des raisons d'abord le problème du désarmement? Sinon parce d'ordre sentimental et politique, pour donner satisfac- qu'elle espérait acheter au prix de cette victoire de

prix de tion à l'opinion publique et réaliser le bloc américain, l'idéalisme américain des concessions de l'utilitarisme violents et audacieux sur la question du désarmement, américain. Troquer les fragiles avantages de réalités ils ont été, au contraire, prudents et presque conciliants, militaires contre les durables certitudes des réalités écodès qu'ils ont abordé les questions asiatiques. Certaines nomiques, lâcher la chimère d'une supériorité navale formules, dont ils se sont servis et qui ont passé presque dans le Pacifique mais garder les avantages d'une péinaperçues du public français, mais non des auditeurs nétration progressive en Chine. japonais, méritent d'être relevées.

La Chine n'est pas une nation, mais une civilisation. Le président Harding, au cours de son discours inau- Comme le démontre M. Hovelaque, dans des pages gural, s'est exprimé comme suit :

d'une fine et lumineuse psychologie (1), le fait que l'or

ganisation familiale, la vie corporative, les habitudes i Le monde demande qu'il soit médité sagement sur l'état de choses existant et qu'on se rende compte qu'il ne saurait

ancestrales, les usages administratifs persistent à tray avoir de remède sans sacrifice... de la part de tous. Je ne

vers les pires soulèvements et l'anarchie générale, ne veux pas parler ici de l'abandon des droits, de la restriction

saurait suffire pour démontrer l'unité de la Chine il de la liberté, de la contestation des aspirations, ni du refus

prouve simplement l'existence d'une civilisation comde reconnaître les nécessités nationales. La République des mune. L'identité de l'écriture ne saurait suffire pour Etats-Unis ne demanderait pas cela, 12012 plus qu'elle voudrait établir l'homogénéité d'un Etat. le donner. Il n'est besoin qu'aucune fierté soit humiliée, qu'aucune nationalité soit engloutie... Il n'est que juste de recon

Géographiquement, la Chine n'a pas plus d'unité que n'en naitre les besoins différents et les situations particulières.

avait l'Empire romain. » Et c'est presque la formule de l'accord Lodéi-Lansing,

Entre ses différentes régions nuls liens naturels, nuls qui reconnaissait et les besoins spéciaux du Japon et ses

caractères communs. Si la Chine est isolée, derrière une intérêts particuliers en Chine.

barrière de montagnes, de déserts et d'océans, elle est M. Hughes a fait un pas de plus et a donné comme

divisée, par le climat, le sol et la production, en une

série de pays essentiellement différents. Ils sont séparés objectif à la Conférence

par des obstacles tels que partout, sauf dans des plaines 11 de profiter de l'union pour essayer d'aboutir à line entente d'alluvions, les communications sont précaires. L'abCoinmune en ce qui concerne les principes de la politique à sence de relations régulières entretient la diversité des suivre en Extrême-Orient et, par ce moyen, diminuer coilsi

milieux ethniques. dérablement, et, si c'est possible, faire disparaître entièrement

« Physiquement, les Chinois diffèrent entre eux autant que toutes les causes de conflit, qui pourraient être discernées. »

lc Hollandais du Napolitain, l'Allemand du Grcc, et comme

originc probablement plus fortement encore. Les langues Une entente sur les principes : elle est inhniment moins difficile à réaliser, remarquèrent, en souriant, les mêmes qu'ils parlent sont différentes. » (Op. cit., p. 116.) commentateurs japonais, qu'une entente sur des cas

Pas d'unité historique. C'est tantôt une race, tantôt concrets. D'ailleurs, désireux de faciliter cet accord,

une province, tantôt un chef qui domine. Aucun régime M. Hughes a proposé de ne point ajourner l'examen des

ne peut durer. Le centre du pays se déplace constamquestions asiatiques, de les aborder en même temps que

ment. Les capitales succèdent aux capitales. Pas d'unité le problème du désarmement, mais de les confier à « plu- politique. La Chine n'a jamais été un Etat, pas plus sieurs commissions ». Il morcelle les débats dangereux, qu'elle n'a

été une nation. « Elle n'est qu'une fédéraafin d'atténuer le confit éventuel.

tion très lâche d'innombrables petites démocraties auToutes ces précautions, toutes ces atténuations témoi

tonomes, les familles -, soumises à un empereur autognent d'un effort très net pour éviter, en ce qui touche la

crate, mais sans pouvoir effectif sur elles, pontife ou pape Chine, toute intransigeance et trouver une transaction.

plutôt que souverain ». Et ce n'est point la disparition Si le Japon accepte, à quelques amendements près dictés

de cette autorité qui arrêtera les progrès de la dissopar la prudente Angleterre, le programme américain de

ciation, qui caractérise la vie chinoise, la vie relidésarmement naval, il peut espérer, au prix de déclara

gieuse comme la vie politique. tions de principe, sur l'intégrité territoriale et la porte

« La disparition du grand cadre traditionnel, qui, malgré ouverte, sauvegarder l'oeuvre accomplie et consolider la

sa vétusté vermoulue et ses insuffisances innées, maintenait pénétration réalisée. Or, les Nippons sont trop fins

quand même l'unité relative du pays et à l'intérieur duquel pour être incapables de mesurer à leur juste valeur les

s'inscrivaient tous les autres cadres de sa vie, devait entrairéalités militaires et les réalités économiques.

ncr progressivement leur ruine. La tâche, qui attendait les Les armements de tout ordre restent une force éphé- idéologues révolutionnaires, dépassait infiniment celle de dos mère : ils sont à la merci d'un déficit, d'une majorité, révolutionnaires de 1789. Ils partaient de plus loin, d'une déd'une découverte. L'équilibre économique est une force composition infiniment plus profonde... » (Op. cit., p. 231.) féconde : il assure la discipline intérieure, il facilite le L'anarchie gagne. Les impôts ne rentrent plus. Les labeur inventif ; il permet les ooûteuses improvisations. Etats vassaux repoussent le tribut. Le Yunnan s'agite. L'effort militaire n'est point un but, mais un moyen. Le Tibet se révolte. Le Sud guerroie contre le Nord. A quoi servirait-il de lancer, sans relâche, de nouvelles Et cette scission, entre le Sud et le Nord, correspond « à unités, avec l'espoir d'acheter, à ce.prix, le droit de pour- des différences de races, d'esprit, d'intérêts, profondes, suivre l'infiltration en Chine, si ce droit ne se heurte à peut-être inconciliables ». Mais cette anarchie croissante aucune interdiction ? La limitation des armements, d'ailleurs, loin de les supprimer, les consolide. Elle la

(1) La Chine, op. cit., pp. 115, 121, 123, 163, 266, etc.

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et ces guerres civiles « ne sont que de superficiels remous son blanche, aux gestes précis. De naissance samourai, à la surface du grand océan immobile. » L'écume blan- Keï Hara n'embrasse pas, parvenu à l'âge d'homme, la chit. La vie continue. Et quatre cent millions d'êtres carrière administrative ou celle des armes. A l'étonnehumains continuent leur existence coutumière, dans le ment un peu scandalisé de ses pairs, il se lance dans la cadre des mêmes habitudes.

presse, alors naissante au Japon, très vite, il s'y taille Parfois, comme en mai 1918, des émeutes populaires une place. Il ne peut cependant échapper complètement viennent protester contre l'infiltration japonaise, qui aux fonctions publiques. On en fait un diplomate. Et exploite l'anarchie et utilise le morcellement, subven- certains Parisiens se rappellent encore avoir vu parmi tionne, prête et achète. Puis le flot se calme, L'engourdis- eux ce jeune Japonais têtu et énergique. De retour dans sement vient. La vie reprend.

sa patrie, il y devient sous-secrétaire d'Etat aux affaires Mais voici que là-haut, dans le Nord, se forme une étrangères. Mais le journaliste l'emporte chez lui.Il quitte armée de 300.000 hommes, munie de mitrailleuses et la carrière, prend la direction du grand périodique Maid'avions dernier cri. Son chef, Chang-Tso-Lin, désigne nichi et s'attache en même temps à organiser un vérita

les ministres de Pékin et surveille les délégués de ble parti politique, chose jusque-là inconnue au Japon. Washington. Il est le maître de l'heure, et le vicomte Avec le prince Ito, il fonde le parti Seyou-Kai dont il Northcliffe n'a pas manqué d'aller le saluer à Mouk- devient l'âme. En 1902, iļ entre au Parlement. A trois den (1). Or le gouverneur de la Mandchourie, un ex- reprises, il est appelé à la direction du ministère de l'inbrigand de quarante-deux ans à peine, n'a pu organiser. térieur. Enfin, il y a trois ans de cela, il est nommé son royaume et son armée qu'avec le concours de l'ar- premier ministre. Jamais auparavant cette charge n'avait gent et des cadres japonais. Il en est de même aujour- été confiée à un homme non titré. d'hui chez les Sudistes. Indirectement, sans recourir Hara, négligeant les impérieux conseils jusqu'alors à la force, tout en respectant les principes de l'intégrité toujours écoutés — des Anciens, forme un cabinet homo territoriale et de la porte ouverte, le Japon dissocie; gène et s'assure, au Parlement, une compacte majorité pénètre, exploite.

Puis il se met à l'oeuvre. A l'intérieur, sa politique est Il peut bien lâcher quelques dreadnoughts : il tient

netternent libérale. A l'extérieur, elle se révèle modérée la Chine. Cette frégate-là rapporte plus et coûte moins.

et conciliante : A la Conférence de Paris, les délégués

japonais s'attachent, il est vrai, à obtenir pour leur pays (A suivre.)

JACQUES BARDOUX.

le maximum d'avantages. Mais lorsque, plus tard, les Etats-Unis contestent au Japon le bénéfice de quelquesuns des articles du traité de Versailles, Hara sait se

montrer traitable. En gage de ses dispositions pacifiques, NOTES ET FIGURES

il fait évacuer par les troupes japonaises presque toute

la Sibérie orientale et propose à la Chine un règlement M. Hara. / de la question du Chantoung qui, s'il paraît leonin à

Washington, semble à Tokio à peine compatible avec les Vue d'Europe, la scène politique du Japon parait intérêts du Japon. avoir été, pendant ces trente dernières années, assez On se doute que les ennemis de Hara, les grands féosemblable à celles où s'agitent les grandes démocraties daux de l'armée et de la marine, ne se sont pas fait occidentales. Même figuration : un chef d'Etat irrespon- faute de vouer à l'exécration publique une politique marsable, un cabinet, une Chambre haute, une Chambre quée, selon eux, au coin de la lâcheté. basse, des partis, une masse électorale de plus en plus Cependant le premier ministre tenait bon, assuré qu'il nombreuse. Même scénario : des campagnes électorales était d'avoir derrière lui, la grande majorité du peuple où l'on s'injurie, des interpellations virulentes, des dis- japonais. cours du trône pompeux et vides, des groupes politiques Mais un geste qu'il fit lui aliéna,-dans son propre jouant à la bascule avec le pouvoir.

parti, de nombreuses sympathies : ce fut lorsque, au prinSeulement, là-bas, tcut oela n'est, le plus souvent, que temps dernier, il envoya en Europe, en voyage d'étude, trompe l'oeil. L'antique Japon a, depuis 1866, moins le prince Hirohito, l'héritier du trône, l'arrière-petit-fils évolué, qu'on ne le pense. Et il demeure encore, par bien du Soleil, le futur Dieu vivant. des traits, le pays théocratique et féodal de jadis : l'em- On a peine à se représenter quelle fut à l'annonce de pereur constitutionnel est toujours un Dieu ; les partis

ce voyage, l'émotion qui secoua le Japon. Il semblait à ont pris, sous un autre nom, la suite des vieux clans ; les

beaucoup de patriotes qu'on leur enlevât un palladium chefs de ces clans peuplent de leurs créatures ministères

et que, privées du successeur des Divins Ancêtres, les et assemblées ; les électeurs sont leurs vassaux ou leurs îles du Soleil Levant, semblables à un navire démâté, vilains. Et derrière le classique décor de la comédie par- dûssent être entraînées yers les profondeurs du Pacifilementaire, tenant en main les fils des marionnettes, se que. Des étudiants menacèrent de se jeter sous le train dissimulent, mystérieux et puissants, les gardiens jaloux qui emmènerait de Tokio l'Auguste Personne. Le prince des traditions militaires, aristocratiques et impérialistes partit/cependant. Mais la popularité de Hara en fut de l'Empire du Soleil Levant, les vieux chefs de l'ar

atteinte. Lorsque Hirohito fut de retour, le scandale mée et du peuple, les Anciens.

redoubla : l'héritier du Trône avait, en Occident, conVoilà le véritable ressort de la politique japonaise. tracté d'étranges habitudes ; il parlait en public, s'adres Ou plutôt, voilà quel il était jusqu'à ces toutes dernières sait à son peuple, permettait, réclamait même qu'on le

regardât en face, lui dont la seule vue devait, d'après Mais, en 1918, un ministre arriva au pouvoir qui vou- l'antique croyance, frapper de cécité l'imprudent assez lut changer l'antique ordre de choses et faire, au Japon, hardi pour oser lever les yeux en sa présence « Abomidu gouvernement parlementaire, voire de la démocratie, nation ! », disaient les vieux Japonais. Et le clan miliune réalité : ce ministre audacieux, c'était Keï Hara. Il taire faisait remonter à Hara la responsabilité de la est tombé poignardé, le 5 novembre dernier, sur le quai colère des Ancêtres, colère dont témoignait, assurait-on, de la gare de Tokio, victime de ces forces du passé dont la maladie du Divin Empereur. il avait tenté d'ébranler le pouvoir.

La masse du peuple japonais était loin d'ajouter foi Curieuse figure que celle de ce petit homme à la face à ces billevesées. Mais dans quelques esprits, elles faipleine, aux yeux malins, au menton volontaire, à la toi- saient des ravages. Et c'est là, semble-t-il, qu'il faille

chercher l'origine du drame dont la gare de Tokio a été (i) Voir le Daily Mail du 14 novembre.

le théâtre...

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