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Les assurances sociales et le système de précompte : 550 551 541 Arts : GEORGES PIERREDON 553 541 Economique : ROBERT FABRE 553 542 Ce qu'on lit. 554 Los faits de la semaine. 555 543 La Bourse. J. DESPRÉAUX 555 Notes et Figures. M. Hughes : JACQUES CARLES La Littérature. A propos de Rabelais : JACQUES BOULENGER. La situation de la langue française le 1 XVIII° siècle l'universalité de la langue française. On y trouve un choix abondant de textes qui nous montrent d'abord que les avis là-dessus étaient aussi divergents 1 Quand le Huron de Voltaire arrive en France, on lui qu'aujourd'hui , et ensuite que, comme aujourd'hui, ils , , demande laquelle des trois langues lui plaît davantage, étaient dictés moins par l'observation des faits que par la huronne, l'anglaise ou la française. quelque passion politique et nationale. La huronne, répond-il. Et Mlle de Kerkabon Déjà en 1689, une dame d'Albi, qui vient d'être noms'écrie: « Est-il possible! J'avais toujours cru que mée membre d'une Académie de Padoue, écrit en franÜfrançais était la plus belle de toutes les langues après le çais sa lettre de remerciements sous ce prétexte : « Quel bas-breton. >> moyen, quand on a le bonheur d'être sujette de Louis Les plaidoyers en faveur d'une langue ressemblent au le Grand, de préférer un autre langage à celui qui règne portrait que le hibou fait de ses petits... Les lieux com dans ses Etats, et duquel il se sert pour nous donner de muns sur la clarté du français se transmettent depuis si justes et de si douces lois? Tandis que toutes les Rivarol, mais si ce qui n'est pas clair n'était pas fran- nations du monde qui aiment ses vertus, ou qui craignent çais, ces lieux communs seraient eux-mêmes peu fran- sa puissance, apprennent à parler comme nous, je ne çais, car ils ne manquent pas d'équivoques : « L'obscu puis m'attacher qu'à une langue qui va devenir univerrité, répondait à Rivarol un de ses contemporains, peut selle. » Et au XVIII° siècle, c'est un sujet de dispute que être dans l'écrivain, elle n'est jamais dans la langue. Ce de savoir si la langue française doit son rayonnement à n'est donc pas à sa clarté que la langue française devra ses vertus propres, à la puissance du roi ou au mérite la conservation de sa prérogative. » Et Descartes avait des grands écrivains. Cette dernière opinion est natudít, dans le Discours de la Méthode, quelque chose de rellement la plus générale parmi les gens qui écrivent. semblable. Voltaire, signàlant les lacunes ou les défauts du franOn serait dès lors mal venu, pour maintenir aujour-çais, ajoute : « On n'en finirait pas d'exposer nos d’hui cette prérogative menacée, d'alléguer une vertu besoins; cependant notre langue se parle à Vienne, à intrinsèque de la langue française. Nous attendrons Berlin, à Stockholm, à Copenhague, à Moscou; elle est pour instituer un débat là-dessus l'avis du Mezzofanti la langue de l'Europe; mais c'est grâce à nos bons livres qui posséderait toutes les finesses d'une demi-douzaine de et non à la régularité de notre idiome. Nos excellents langues. Ce que nous pouvons faire, c'est de reconnaître artistes ont fait prendre notre pierre pour de l'albâtre. » es causes de la grandeur et de la décadence d'un privi Ce sont là des enchères sur lesquelles on affirme ège de fait qui a duré depuis Louis XIV jusqu'à la fin de 1918 d'autant plus intrépidement qu'on peut moins savoir. La vérité, c'est que trois sortes d'événements se sont produits M. Baldensperger a publié dans ses Etudes d'histoire à la fois : les progrès politiques de la France, l'attention littéraire un article intitulé : Comment on expliquait au donnée dans toute la société palie à l'art de bien parler X et de bien écrire, l'abondance des grands écrivains. Les thèques circulantes ont une importance et une clientèl trois causes ont agi à la fois, elles se sont aidées sans comparaison avec les nôtres. l'autre, chacune aurait été moins efficace si les con Telles sont les analogies entre la situation du français autres n'eussent existé : c'est donc faire un singulier au XVII° siècle et celle de l'anglais aujourd'hui, Le pre contre-sens que de croire qu'en en contestant une on mier s'imposait comme la langue de la société la plu mettra d'autant mieux les autres en valeur. civilisée. Le second s'impose comme la langue de la Il est vrai qu'au XVIII° siècle, c'est avec une période de société civilisée la plus nombreuse. recul ou de déchéance politique que coïncide la plus Faut-il en conclure que la prospérité du français es grande expansion et la souveraineté la plus large de la chose du passé, la prospérité de l'anglais chose du pré langue française. Mais notons d'abord que malgré ses sent, nous résigner au rétrécissement relatif du domain défaites militaires, qui n'atteignaient point ses auvres de notre langue ? Il nous faut surtout comprendre le vives, la France restait un Etat aussi solide que sous situation actuelle et en tirer le meilleur parti. Louis XIV, et plus riche. Observons ensuite que les Etats qui arrivent alors à une puissance et à une prospérité presque égales à la sienne, l'Angleterre et la Prusse, se forment déjà les éléments d'une culture qui, Comparons d'abord le point où notre inférioritées au XIX® siècle, pourra équilibrer sur bien des points celle irrémédiable . Le nombre d'hommes blancs, civilisés, don de la France. Au xviro siècle, la France a eu la puis- le français est la langue maternelle, atteindra peut-êtr sance politique et la puissance littéraire; au XVIII° siècle, un jour, en des circonstances exceptionnellement favora elle n'a eu que la puissance littéraire; sous la Révolution bles, en y comprenant le Canada et la France africain et l'Empire, elle n'a eu que la puissance politique. Et du Nord, cinquante millions d'hommes. A ce moment cependant elle a, dans ces trois périodes, constitué, le bloc anglais en aura atteint deux cents millions, et dè accru, maintenu la prépondérance de sa langue. Et il va aujourd'hui le bloc allemand en compte soixante-dix mil lions. Nous ne pouvons donc pas espérer l'emporter pas de soi que dans les deux dernières périodes, cette prépondérance eût été plus grande si la France eût réuni, le nombre de civilisés blancs parlant le français comme comme au XVII° siècle, ces deux puissances au lieu de les langue maternelle. avoir l'une sans l'autre. Les jaunes, les noirs, les Arabes de nos possessionsAu XIX° et au XX° siècle, dans une Europe composée quand ils auront joint à leurs langues maternelles un de nations ardentes qui ont pris conscience d'elles peu de français, n'entreront guère plus en compte qu'au jourd'hui. Et dans ce domaine, ses colonies offrent mêmes, ni la politique française, ni la littérature française ne sont prépondérantes. Ou plutôt une grande révo- l'Angleterre un champ infiniment plus yaşte que le nôtre. lution s'est accomplie : il n'y a plus d'Europe, il y a la Mais considérons que le français, au XVI° et de planète entière. Et la place que la France et la langue française occupaient dans l'Europe du XVII° siècle, XVIIIe siècle, ne s'est pas développé, ainsi qu'au XIX° l'a l'Angleterre, la race anglo-saxonne et la langue anglaise fait l'anglais en Amérique, en se propageant comme lar l'occupent aujourd'hui sur la planète. C'est la situation gue maternelle. Son pouvoir d'expansion en ce sens dalt que nous devons regarder en face. même assez faible, et la langue d'Oc, le breton, l'alsacien se défendaient fort bien. Le français s'est propagé sutout comme seconde langue des gens cultivés. Cette car rière lui est-elle aujourd'hui moins facile qu'autrefois i Le français s'est imposé au XVII° siècle comme la Moins facile, oui. Dans tous les petits Etats de l'Evlangue de la nation la plus puissante, la langue des cours rope, on ne participe à la culture que si on sait trois on et la langue des écrivains ? Qu'en est-il de l'anglais? quatre langues, parmi lesquelles le français fait figure Tout ce qu'on pourrait dire sur la puissance politique d'autres langues fait qu'on le sait mal Depuis la guerra Mais la nécessité de le savoir conjointement avec tant ou économique de l'Angletere et des Etats-Unis me paraît, du point de vue qui nous occupe, moins important il a cessé d'être la seule langue des relations internatioque ceci : la langue anglaise est la langue de cent cin nales. Il n'y a pas de pays où l'anglais soit plus répanda quante millions d'hommes qui savent presque tous lire qu'en Norvège, et avec cette langue on y est compris paret ne travaillent généralement que huit heures par jour. tout. Or, en 1911, il y eut à Christiania, de grandes fêtes internationales à l'occasion du centenaire de l'Université La masse qui la parle réunit donc à la quantité d'une Les orateurs norvégiens ne s'adressèrent aux étrangers Chine ou d'une Russie la qualité d'une France et d'une Allemagne. Elle occupe les régions les plus riches du qu'en français. Les conférences faites par les professeurs norvégiens furent faites en français. Aujourd'hui, il n'en globe, et sa quantité comme sa qualité s'accroissent con serait certainement pas ainsi, et l'anglais remplacerait à tinuellement. presque toutes ces occasions le français. Le français Le français était devenu au XVII° siècle et était resté n'ayant plus pour l'imposer le protocole des cours, n'a jusqu'au 11 novembre 1918 le langage des cours et de la qu'à compter sur des forces de libre consentement. Il est politique. Or, il n'y a plus de cours. A Berlin, à Vienne, cependant quatre points sur la terre où il dépend de nous . à Petrograd, c'est aussi des lambeaux de l'héritage de de rendre ce consentement plus facile et plus naturel. Louis XIV que la Révolution a emportés. Et les intérêts Ce sont d'abord les nouveaux Etats de l'Europe cende la politique le cèdent de plus en plus aux intérêts économiques. Si le français était la langue de la poli trale, où l'allemand était jusqu'ici la langue de culture Il le restera toujours dans une certaine mesure, mais tique européenne, l'anglais est aujourd'hui la langue du nous pouvons espérer que le français y partagera cette commerce mondial. place. Ce sera là une des meilleures pierres de touche de Le français était au XVII° et au XVIII° siècles la langue notre force d'expansion des écrivains. La littérature française était alors la litté C'est ensuite l'Orient, où le français est à peine entamé rature. Elle est aujourd'hui une littérature entre plusieurs. En matièré littéraire, la médiocrité générale ne et fait montre d'une singulière résistance dans des pays nous permet guère ici que des considérations de quantité. situation difficile, comme l’Egypte. où les changements politiques auraient pu rendres Or l'homme parlant anglais est aujourd'hui celui qui En Extrême-Orient, l'anglais tient, à vrai dire, la absorbe la plus grande proportion individuelle de papier place que le français a tenu en Orieni depuis la guerre imprimé; les journaux qu'il lit ont seize pages, les romans se déversent sur lui en production torrentielle, ses biblio- monde se déplace un jour vers le Pacifique, l'anglais sera de Crimée. Il est la langue du Pacifique, et si l'axe de X |