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plement. Lorsqu'on dit cela à un député, ah ! regardez Sourire de pitié cet homme sérieux! Et il n'y a pas que les parlementaires et les diplomates combien d'ingénieurs, d'industriels, de financiers, considèrent la correction et la pureté du langage comme des futilités indignes de les préoccuper ! C'est qu'ils ne songent pas qu'on ne saurait bien raisonner dans une langue fâcheuse. Le merveilleux instrument de pensée que notre race a façonné pour nous de siècle en siècle, c'est le plus précieux de nos héritages. Les députés ou les ambassadeurs qui écrivent leurs lois ou leurs dépêches dans un prétentieux jargon, agissent contre la patrie. Et lorsque M. le préfet de police affiche dans tous les squares et les lieux publics des arrêtés qu'on ne peut entendre qu'au prix d'un travail attentif, il se livre à un petit attentat contre la société française eh bien, ce n'est pas là son rôle naturel.

« Il faut écrire comme on parle. » Sans doute. Mais il ne faut pas écrire comme on parle à la Chambre des députés il faut écrire comme on parle dans la conversation courante, et heureusement ce n'est pas encore tout à fait la même chose. Or, on ne cause jamais bien, chez nous, quand on manque trop cruellement d'esprit. Chacun sait que ce défaut n'est pas celui de M. Robert de Flers. Quel agrément il nous a donné, mardi, en nous lisant un plaidoyer en faveur du français qui, d'abord, fût spirituel et entièrement dénué de solennité! Ce n'est pas à dire qu'il manquât de sérieux. Dieu merci, en ce pays, le sérieux va très bien sans solennité partout ailleurs que dans les cercles officiels, du moins. Car le grand malheur, c'est bien cette confusion qu'ils font du sérieux et du solennel. C'est la solennité qui

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formé tous ces lieux-communs dont se drapent nos orateurs parlementaires, c'est elle qui a produit toutes ces ridicules et odieuses formules dont usent nos diplomates et nos administrateurs. C'est par goût de la solennité que les écrivains eux-mêmes, dès qu'ils ont à rédiger quoi que ce soit d'officiel et de collectif, «ordre du jour », un procès-verbal, un « communiqué », une « délibération » à la suite de quelque assemblée corporative ou autre se croient obligés d'adopter le plus horrible style administratif. Je ne sais qu'une publication qui soit écrite d'une façon aussi incorrecte, aussi laide, aussi lourde que le Journal officiel : c'est le Bulletin de la Société des gens de lettres.

JACQUES BOULENGER.

Pour une anthologie d'épitaphes.

Voici le temps, selon les rites, de relire quelques épitaphes. Mais pourquoi n'avons-nous pas une anthologie d'épitaphes? Les anthologies, certes, ne manquent

point. Nos actifs éditeurs en préparent une douzaine, paraît-il, et, déjà, ils nous en ont donné, avec un louable zèle, de catholiques, de juives, de protestantes, de poètes arrivés et qui arriveront, de demi-prosateurs et de prosateurs complets. On y trouve le clair de lune et le soleil mille fois célébrés par des gens célèbres, les plus belles lettres d'amour et les meilleures chansons à boire, le baiser en deux cents pages et les œuvres des poètes morts de faim, Paris et la province, la mer et les champs, les dames de lettres du passé, du présent et de l'avenir, les chefs d'école et leur groupe, les rénovateurs et les innovateurs, les schismatiques et les hérétiques du lyrisme, les dissidents et les récalcitrants de la littérature, et jusqu'à de malins jeunes gens qui, voulant être assurés du premier coup de l'immortalité, ont payé ce qu'il fallait afin de figurer ensemble dans un recueil embaumé de l'unique fleur de leur génie. Bref, nous avons toutes les anthologies que nous souhaitons, toutes

celles que nous ne souhaitons pas, et les meilleures sont d'un choix si habile, d'un tact si heureux, qu'elles évoquent irrésistiblement les célèbres, et peut-être trop célèbres, A la manière de...

Puisque les anthologies existent à la douzaine, pourquoi, je le répète, nous priver d'une anhologie d'épitaphes? Selon que l'on déciderait, ce pourrait être le chant le plus pathétique et le plus direct de la douleur humaine ou un si formidable sottisier que jamais Flaubert et Villiers de l'Isle-Adam n'auraient osé en imaginer de semblable. Mais il n'est ici question ni de l'une ni de l'autre de ces anthologies. Il s'agirait de choisir des textes pour le peuple qui sait pieusement honorer ses morts. La fortune serait acquise à l'éditeur qui publierait une anthologie d'épithaphes réelles ou imaginaires analogue, en son genre, au Langage des Fleurs, à la Clef des Songes ou au Secrétaire du parfait amant, si vous me passez la bizarrerie, l'inattendu et l'apparente incongruité de ces rapprochements. Le public - j'entends le public de ces livres-là ne trouverait nulle inconvenance, je vous le certifie, à voir figurer un recueil de ce genre dans la collection de ses auteurs anonymes et familiers. Au contraire.

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J'assistai, certain jour, chez un marbrier voisin d'un cimetière parisien, à une petite scène qui justifie au mieux ce que l'on pourrait croire un paradoxe. Il y avait là une chétive créature pétrissant ses mains embarrassées de gants de filoselle, toute rapetissée sous le grand voile de crêpe, si touchante ! Elle avait désigné, entourage » de la tombe, une couronne, de pauvres

choses...

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Elle pleurait presque.

Je vous épargne la fin de la scène et sa vilaine rudesse. Quand la malheureuse fut partie, l'homme roux se tourna vers moi.

Vous m'excuserez, n'est-ce pas ? Tous les jours la même histoire se répète. Elles sont là à me lanterner, à me faire perdre mon temps, à solliciter mon avis. Estce que c'est mon affaire ? je vous demande un peu ! Il faudrait je ne sais pas, moi. il faudrait une nomenclature à leur soumettre. D'ailleurs, beaucoup comme la cliente que vous venez de voir, la réclament. Oui, évidemment, c'est une lacune dans notre com

merce.

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Si étrange que la chose paraisse, la lacune existe, je ne prétends pas autre chose et je confesse sans peine que je dois à l'homme roux l'idée de cet article. Vite que l'on donne aux pauvres gens une anthologie d'épi taphes, et, surtout, qu'un médiocre n'en soit pas chargé

A. DE BERSAUCOURT.

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Les deux cents ans des "Lettres Persanes". Depuis le printemps dernier, j'attendais qu'un écrivain français nous rappelât que les Letires Persanes parurent en 1721, et je ne voyais pas sans un certain contentement passer les semaines l'une après l'autre, et disais-je, serons-nous assez ingrats, ou assez journaux et revues demeurer muets. « Quoi ! me ignorants, pour ne pas honorer de quelques chroniques les deux ans d'un excellent petit ouvrage auquel nous devons un peu ou beaucoup d'être aujourd'hui chez nous en république ? >> Et j'admirais tant de zèle à célé

cents

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brer le centenaire de maints écrivains sans intérêt, et Les Idées
par contre tant d'indifférence pour un homme dont
Faguet affirma que « c'est un des plus grands penseurs
et des plus grands écrivains de la France. »>

Octobre allait toucher à sa fin. Nous n'avions plus que deux mois à épuiser pour arriver à 1922. Nul ne songerait donc aux deux cents ans des Lettres Persanes? Mais j'ai poussé un soupir de satisfaction quand j'ai lu, ces jours-ci, dans le Temps, la nouvelle suivante : « Le Conseil général de la Gironde a décidé de célébrer le bi-centenaire de la publication des Lettres Persanes, de Montesquieu, dont la première édition est de 1721. M. Léon Bérard, ministre de l'Instruction publique, doit présider à cette célébration, qui sera entourée, à Bordeaux, d'un grand éclat. » Désormais, n'ayant plus de raison de me taire, je veux demander la permission de ne pas laisser à la ville de Bordeaux le privilège de célébrer une fête qui mérite d'être célébrée ailleurs aussi. Mieux vaut tard que jamais.

Je sais bien que certains bibliophiles m'objecteront qu'il était difficile peut-être de commémorer plus tôt un tel événement, car l'histoire de la littérature est une science si précise que nous ignorons la date exacte de la mise en vente du premier exemplaire des Lettres Persanes. Elles parurent en 1721, voilà qui doit nous suffire. A trop se hâter, on eût risqué d'en célébrer trop tôt les deux cents ans. Mais, cette concession faite aux bibliophiles, nous pourrions riposter qu'il y eut en 1721 pluasieurs éditions des Lettres Persanes, et qu'il n'est donc se, t pas probable que l'originale, la précieuse originale, soit sortie des presses de Pierre Marteau, de Cologne, le 28 décembre 1721. Un peu plus de hâte de notre part eût été pardonnable.

L'éditeur Pierre Marteau, de Cologne, on connaît le 2ombre prodigieux d'ouvrages qu'il a marqués de sa irme. Comme il n'a jamais existé qu'en nom, on ne lui lèvera pas de statue. Mais son nom a rendu de réels services à la littérature. C'est grâce à son existence fictive que

Jacques Desbordes, d'Amsterdam, put imprimer ranquillement les deux volumes in-12 des 150 Lettres Persanes, qui se présentèrent au public sans nom d'aueur et avec un faux nom d'imprimeur. M. Henri Barckausen, dernier éditeur, a donné sur cette question tous Tas renseignements nécessaires. Il a restitué sa part de àloire à Jacques Desbordes, imprimeur des Lettres Permanes et des Considérations sur la grandeur des andomains. Il convient de ne pas oublier un éditeur qui uyait la gloire sous l'anonymat.

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Le succès des Lettres Persanes fut tout de suite extrardinaire. Le livre était habilement mêlé de galantees et de rudes vérités, celles-là faisant passer celleA l'époque du Régent, on ne pouvait pas ne pas s'en ivertir. L'auteur, une fois dévoilé, et parce qu'il était n grave président à mortier au Parlement de Boreaux, ce fut de la fureur. Il vint à Paris. Moins de sept as après, il entrait à l'Académie française. Eut-on onscience des destinées des Lettres Persanes, et qu'elles réludaient par plus d'une page à cet Esprit des Lois ont s'inspireraient plus tard les réformateurs de 1789, - ceux qui se succédèrent de 1815 à 1848, et jusqu'aux lus récents? Il est permis d'en douter. Montesquieu it beau écrire lui-même : « Il ne s'agit pas de faire re, mais de faire penser. » Ses contemporains ont sans 'oute lui beaucoup plus que pensé, en lisant les Lettres ersanes. Et le ferment qu'elles apportaient, sans en voir l'air, on n'en devina peut-être pas tout de suite puissance. Voltaire fit plus de bruit que Montesquieu. Iontesquieu fit cependant plus de besogne. Mais on e s'en aperçoit qu'aujourd'hui. Il fallait le dire. Nous le isons.

THIERRY SANDRE.

"Le grand secret"

Il y a, en philosophie comine en histoire, de singuliers retours et de brusques ou insensibles changements de front. Le siècle passé, inventant ou découvrant la théorie de l'évolution, s'était hâté de l'appliquer à toutes les disciplines humaines et avait voulu voir, de la physiologie à la morale, une marche lente, souvent contrariée, parfois bien servie, vers des formes moins imparfaites et des temps meilleurs. On croyait alors que de l'amibe au vertébré la vie s'était plue à se compliquer en une ordonnance savante, que de Tamerlan à Napoléon les mœurs s'étaient adoucies, et qu'après des millénaires de batailles on entrevoyait enfin la voie autrement glorieuse d'une éternelle paix. On démontrait aussi que les religions avaient commencé par le fétichisme, la magie, le polythéisme pour se hausser péniblement à l'idée d'un Dieu unique, et que l'âge d'or de la pensée, lui aussi, devait être placé au terme et non à l'origine. de nos périssables jours.

C'est de cette dernière et flatteuse hypothèse qu'on semble revenir. Nous montrions récemment, ici même, comment le P. Mainage, par des supputations ingénieuses, trouvait des restes de monothéisme chez les chasseurs de la préhistoire, et avec quel enthousiasme discret et compétent M. Guénon fixait dans l'Inde primitive la source de toute sagesse (1). Aujourd'hui, M. Maeterlinck nous parle d'un «< grand secret » (2) qui serait le secret du monde, que nos pères auraient connu, et dont la frivolité des races n'aurait laissé subsister que des traces à peine visibles, que nous nous efforçons maladroitement. de rassembler.

Au dire d'auteurs prétendant savoir au moins que jadis on a su quelque chose, nous ressemblerions aux profanes qui, exclus du sanctuaire, devraient se contenter des apparences superficielles et extérieures des doctrines. Non seulement nous n'imaginons rien en dehors du sens littéral et vulgaire et Zeus ou Héra restent pour nous ce qu'ils étaient pour le paysan d'un dème rural de l'Attique, mais nous oublions qu'il y eut une initiation, des mystes, des mystères, et les savants, dit M. Saint-Yves, << tout en reconnaissant formellement l'existence d'un enseignement ésotérique, raisonnent constamment comme si de fait il n'existait pas ». (3) Or, c'est dans cet enseignement que d'aucuns se flattent de reconnaître que se trouve la clef de l'énigme qu'on a une fois déchiffrée.

Disons le mot, en forçant peut-être une pensée dont nous soupçonnons l'origine : le paradis terrestre fut un paradis philosophique et la faute initiale un péché contre l'esprit. L'homme, d'abord, posséda la connaissance soit qu'il l'eût reçue directement du Créateur, soit qu'il l'eût déduite du jeu naturel de ses facultés intellectuelles, encore intactes et saines. Plus tard, à la suite de

quelle transgression, de quelles erreurs, de quelles catastrophes, nous l'ignorons, plus tard son œil s'obscurcit et il cessa d'apprécier même la valeur des mots où il avait exprimé ses premières conquêtes. Le texte sacré se ferma au commun et parmi les prêtres une élite seule, de plus en plus rare, en conserva l'intelligence. Les siècles passèrent, la déviation s'accentua et, refaisant à tâtons la même route en sens inverse, les générations se mirent en quête, dans les rares loisirs que leur laissaient des luttes ou des difficultés continuelles, de la science qu'elles avaient perdue.

C'est l'histoire de ce pénible retour que M. Maeterlinck

(1) Opinion des 1er et 15 octobre.
(2) Le Grand Secret (Fasquelle).

(3) PORPHYRE. L'Astre des Nymphes, suivi d'un essai sur la grotte, etc. (trad. J. Trabucco, éd. Noury.)

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a voulu conter. Il a tracé un tableau grandiose de la sagesse humaine depuis l'Inde et l'Egypte jusqu'aux métapsychistes et aux occultistes modernes, il a étudié l'enseignement de la gnose, de la kabbale et de la philosophie hermétique, il s'est ingénié à retrouver le sens de doctrines trop bien dissimulées sous les voiles éclatants et décevants de la poésie et des symboles. Il a montré les disciplines modernes confirmant ou développant des recherches et des découvertes anciennes ; il a imaginé jusqu'où ont pu aller jadis « un renoncement et une concentration spirituelle dont nous avons perdu la pratique et même la notion », et c'est avec bienveillance qu'il examine les droits des occultistes contemporains à l'héritage des vérités perdues.

Spectateur impartial, comme l'a montré sa réponse à M. Paul Heuzé dans l'enquête de l'Opinion, M. Maeterlinck a su atteindre par delà le spiritisme un point d'où il aperçoit un horizon philosophique. Il déduit judicieusement de l'agnosticisme radical des origines un anthropomorphisme capable de donner quelque forme à ce déconcertant inconnu et il suppose ainsi, ce qui est fort vraisemblable, que les Dieux ne figurent qu'un aspect de notre ignorance. Il aboutit à l'hypothèse d'un fluide universel, analogue à l'Od de Reichenbach et source de la vie comme des phénomènes de la vie que nous n'expliquons pas encore. Et surtout il se retrouve, il donne un fonds plus précis à ce système si proche du bergsonisme qu'il lustraient le Trésor des Humbles et la Sagesse et la Destinée, à cette doctrine où il suggérait que l'excessive netteté de la parole et le langage trop précis des gestes ne traduisaient qu'imparfaitement quand ils ne la déformaient point la réalité immanente et inexprimable d'un tragique intime et quotidien.

Et pourquoi, séduit peut-être par le secret désir d'un mystère favorable, ne s'avise-t-il point d'une autre réponse? « D'où venaient, dit-il, à nos ancêtres préhistoriques, dans une nuit et dans une déréliction qu'on s'imaginait épouvantables, ces intuitions extraordinaires, ces connaissances, et ces certitudes que nous conquérons à peine ?... » Hélas! il l'avoue lui-même, à propos des premiers penseurs : « Ils savaient que l'homme ne pourrait jamais connaître Dieu et c'est pourquoi, ne cherchant plus du côté où tout espoir était forclos, ils vont droit à l'homme qui est la seule chose qu'ils connaissent...» Et, sous prétexte que c'est Dieu qui les a faits, ils le font à leur tour et ils se construisent à leur seul compte les autels devant quoi, aussitôt, ils tombent à

genoux.

N'insistons point sur cette contradiction initiale et ce véritable péché originel qui consiste à conclure du relatif à l'absolu et, sous prétexte qu'on se connaît comme effet, à retrouver en soi une cause qui, elle, n'en suppose aucune autre c'est une entreprise criminelle, peut-être, que de prétendre contraindre ainsi Celui qui a voulu rester caché. Examinons simplement avec quelque sang-froid cette idée d'une vérité première que nous aurions perdue et que s'efforceraient de nous rendre, par des moyens suspects, les esprits les plus hasardeux.

Il arrive que, dans notre admiration des Anciens, nous leur prêtons un peu et c'est la tendance de tout commentateur que d'enrichir de son fond le texte qu'il glose. Nous n'oublions pas assez, quand nous lisons des livres vieux de quelques milliers d'années, qui si une part nous en échappe, nous sommes tentés d'expliquer à notre manière ce que nous ne saisissons pas et qu'il y a une façon de se tromper qui consiste à trop bien comprendre. Certes je n'irai point contester aux indianistes la version qu'ils donnent du Rig-Véda, mais comme cette littérature s'exprime par images, je me permettrai de n'entrer qu'avec prudence dans l'interprétation à laquelle il faut bien se résigner à la soumettre Les mythes solaires, enfin, quelque abus qu'on en ait fait, ne me sem

blent pas chose si vaine. Et sans voir dans l'histoire des vaches d'Indra ou de la passion d'Attis de simples contes de nourrice, j'accorde difficilement que ces agréa bles symboles aient contenu et contiennent encore la science et la sagesse les plus hautes où puisse atteindre l'humanité. Je croirais plus volontiers qu'en ces âges lointains une imagination puissante et un esprit qui la servait au lieu de la diminuer ou contredire se sont accordés pour construire, avec les éléments dont ils disposaient, une figure acceptable du monde, et que c'est après la critique et non avant que doit intervenir la connaissance, après Kant, ou, si l'on veut, Aristote et non dès Homère ou Hériode. A moins, évidemment, que Dieu n'ait parlé.

Malgré mon peu de goût pour la science officielle, d'autre part, je trouve peu utile de lui préférer les pseudo-sciences occultes, et je me demande pourquoi l'avenir de la pensée serait dans les procès-verbaux de la Société des Recherches psychiques plutôt que dans les laboratoires de M. Branly ou de Mme Curie. Je n'insisterai guère sur ce point après l'enquête qui a été menée ici même. Il y a des terres inconnues de la psychologie qu'il sera indispensable d'explorer. Ceux qui se mêlent aujourd'hui de ce travail ne paraissent y apporter ni la minutie ni l'indépendance nécessaires. Ils songent plutôt à illustrer des théories précaires qu'à recueillir les données d'où se déduisent naturellement les lois, et ils ne tournent le dos aux grandes églises que pour se renfermer dans leurs petites chapelles. Comment croire que c'est en eux que repose le secret de la sagesse antique et se confier aux médiums après avoir renvoyé le SaintEsprit ?

Ayant traité avec une indulgence parfois bien généreuse de ces nouveautés ou de ces vieilleries, M. Maeterlinck conclut ainsi : « Apprenons... à l'école de nos mys térieux ancêtres à faire, comme ils l'avaient fait, la part de l'inconnaissable et à n'y chercher que ce qui s'y trouve, c'est-à-dire la certitude que tout est Dieu, que tout est en lui et y doit aboutir dans le bonheur, et que la seule divinité que nous puissions espérer de connaître, c'est au plus profond de nous-mêmes qu'il la faut dé couvrir... » C'est interpréter comme il convient l'oracle de Delphes et reprendre à moindres frais le pari de Pascal. GONZAGUE TRUC.

Le Théâtre

"La Gloire"

M. Maurice Rostand a de la chance. Il a rencontré Deux merveilleux acteurs, un sujet presque neuf. Mme Sarah-Bernhardt et M. Yvonnel, ont prêté à ses vers la beauté de leur voix et l'excellence de leur diction. A une enquête récente ouverte par les Annales politiques et littéraires, M. Maurice Rostand répondait : « Je n'aime que la littérature personnelle, tout livre m'ennuie qui ne révèle rien des sentiments de son auteur. » C'est là une belle vérité de La Palisse : un livre qui ne révèlerait pas les sentiments de son auteur, que serait-ce? L'Indicateur des chemins de fer, peut-être...

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passe en

En écoutant la Gloire, on ne peut s'empêcher de penser sans cesse à celui qui l'écrivit; cette pièce est un curieux cas de narcissisme. L'action se d'autres temps que les nôtres. La peinture remplace la poésie, mais il est évident que les péripéties sentimentales du jeune Wisburn ne sont point tout à fait du domaine de la fiction. Elles ne sont pas non plus du domaine de l'observation. L'auteur a fait de la littérature personnelle mais avec beaucoup de sens du théâtre. Il a amplié, exagéré, sans doute à dessein, les traits essentiels du caractère de son héros.

A-t-il cru l'embellir ? Grandir l'âme torturée de Clarence Wisburn? S'est-il bien rendu compte qu'il faisait de ce jeune homme un monstre d'égoïsme et d'impuissance sans grande beauté littéraire?

Par une confusion singulière, les honneurs tapageurs, les succès mondains de l'homme « arrivé » qu'ambitionne Clarence Wisburn, semblent présentés ici comme de nobles buts. Ce désir enfantin, ce culte de la gloire, nous le montrent si loin de l'art pour l'art, si puérilement avide de cet amas d'opinions négligeables, qu'une parole audacieuse disperse ou rassemble selon le vent du jour ! Sa vanité prodigieuse souffre impatiemment la visite du prince de Galles à son père, et sans doute, à ce moment, songe-t-il beaucoup plus à la joie qu'il éprouverait en voyant un roi ramasser son pinceau, qu'à la satisfaction intime et désintéressée d'avoir produit une belle œuvre. Cette beauté, que le père a rencontrée et servie peut-être sans songer à la renommée, le fils n'y pense guère.

Croit-on jamais l'avoir atteinte lorsqu'on l'aime profondément? Croire la tenir, n'est-ce pas s'en faire une image rapetissée, inexacte, imaginer que l'on a capturé le soleil parce qu'on a mis le feu avec une lentille à quelques feuilles sèches?

Wisburn est un grand peintre anglais, ses contemporains sont Chateaubriand et Brummell; c'est vous dire que M. Maurice Rostand a situé son drame à cette époque romantique, où l'âme se portait sombre et le costume clair. Nous avons le plaisir de voir, animés, les délicieux portraits de M. de Seriziat et de Mme Récamier, et, déshabitués que nous sommes d'entendre sur la scène une âme tourmentée s'exprimer avec fougue et lyrisme, nous pouvons prendre un instant cette exhumation pour une nouveauté. Clarence Wisburn ne nous émeut pas, mais nous intéresse au moins pendant deux actes aux tortures que lui cause sa folle vanité.

Obsédé par la gloire de son père, Clarence, dévoré d'ambition, le jalouse tout en l'adorant. Il rêve de le dépasser. Ce nom de Wisburn lui semble trop lourd à porter s'il n'y ajoute son prénom et une renommée personnelle. Il veut lui aussi devenir un grand peintre, recevoir de grands seigneurs dans son atelier, et même des rois! Malheureusement, ses premiers essais ne décèlent aucun génie. Le génie n'est point héréditaire. Wisburn est un père excellent, mais il ne peut léguer à son fils ses dons exceptionnels, il redoute de douloureuses déceptions d'artiste pour cet enfant.

D'aucun défaut jamais on ne te fera grâce ;
Tu ne m'égaleras que si tu me dépasses.
Clarence insiste et supplie son père de le guider, de
lui révéler les secrets de son métier.

Wisburn se défie de son propre jugement et soumet à ses meilleurs élèves un tableau de Clarence; leur opinion est nette, l'esquisse ne vaut rien. Wisburn ne dissimule dpoint à son fils le peu de valeur de ses essais. Clarence au désespoir va se tuer, lorsque la gloire, qui paraît sous des traits de Mme Sarah-Bernhardt, lui ordonne de vivre, de travailler et lui promet le génie et le succès.

Au second acte, Clarence est chez lui; il ne voit plus son père, il s'est passé de ses conseils, il a beaucoup travaillé et ne s'est privé, cependant, d'aucune distraction. Nous le retrouvons affaibli, exalté, fiévreux mais en bonne compagnie. Brummel est là, qui inspire ce vers à M. Maurice Rostand:

Même ivre, sa cravate a toujours du génie!

Le prince de Galles est là aussi, le jeune Wisburn s'est créé quelques relations qui pourront lancer sa peinture lorsqu'il daignera la faire connaître. Mais personne, jusqu'à présent, n'a obtenu la faveur d'en apercevoir le moindre échantillon; c'est à son père d'abord, que Clarence veut montrer les tableaux qu'il croit splendides, auxquels il travaille depuis si longtemps. C'est seulement

lorsque le grand Wisburn les aura vus et admirés, que Clarence sera sûr d'avoir atteint le succès qu'il confond avec le mérite et qui lui semble un but éblouissant. La première place parmi les hommes est encore si petite dans l'univers, qu'elle ne semble pas valoir tant de souffrance, tant d'amertume, tant de cris et, il faut bien lè dire, tant de chichis!

L'orgueil de Clarence reçoit une égratignure nouvelle. Mme Récamier vient chez lui, parle de sa beauté avec une délicieuse simplicité et lui demande s'il veut faire son portrait. C'est au grand Wisburn qu'elle croit s'adresser; lorsqu'elle apprend son erreur, elle s'en va sans insister, bien qu'elle ait affirmé qu'elle adore de poser. Nous en restons convaincus. Cette scène a l'air ajoutée après coup, et bien inutilement.

Wisburn arrive, Clarence lui parle de son labeur, de ses efforts, affirme avoir atteint enfin le génie; il s'exalte et, brusquement, découvre ses toiles, les décrit, les analyse dans une tirade pleine de mouvement qui sonne à la façon de l'autre Rostand. Cependant Wisburn considère, atterré, les toiles blanches... vides! Clarence parle toujours, Clarence est fou! Cette fin d'acte est très théâtrale et obtient un grand succès.

Au troisième acte, tandis que Clarence est resté privé de raison, le père a peint les tableaux que le fils a rêvés. Ils sont merveilleux! Cette fois-ci c'est bien la gloire. Wisburn l'offre à son fils. Comme un dernier bienfait, il lui laisse croire, comme à tout le monde, qu'il est l'auteur de ces prodigieuses peintures.

Clarence va mourir et mourir heureux, lorsqu'une lueur de raison traverse sa pauvre cervelle, éveille ses soupçons. Il interroge vainement son père, son vieux domestique, son amie Radiana; celle-ci se trouble et répond: « Je t'aime!» à toutes ses questions. Clarence comprend la vérité. La gloire reparaît et le console.

Ces tableaux où son père s'est surpassé lui-même, il en fut l'inspirateur sans les merveilleuses visions qu'il a décrites, Wisburn n'aurait pu les exécuter; de plus Clarence a tant souffert qu'il a le droit de penser que ces tableaux sont de lui! Toute cette fin est simplement absurde, elle est sauvée par l'immense talent de Mme Sarah-Bernhardt et de M. Yonnel. Ce dernier possède une voix souple, admirablement timbrée, dont il sait jouer à merveille. Sa diction est juste, son articulation nette, il joue avec chaleur, sans emphase. Tous les vers sont admirables dans sa bouche et si MM. Decœur et Grétillat ne nous laissaient voir qu'il en est de fort plats, nous aurions pu nous illusionner sur la valeur d'une œuvre qui n'est point sans mérite, mais à laquelle l'originalité et la profondeur font totalement défaut.

La Musique

CLAUDE ISAMBERT.

A propos de
de musique arabe

Beyrouth, octobre 1921.

A qui aime la musique, le voyage d'Orient ouvre une double perspective. Il est d'abord évident que la musique russe, toute pénétrée de musique orientale, en a imprégné à son tour nos musiciens, de telle sorte qu'on peut aller chercher en Egypte, en Syrie ou dans le désert, quelques origines de notre art présent, et peutêtre quelques formes nouvelles pour notre art à venir. D'autre part, on se trouve en présence, dans les pays arabes, d'une musique spécifiquement différente de la nôtre ; j'entends qu'elle en diffère par ce qui est l'essence même de la musique, par les intervalles, de telle sorte qu'une mélodie arabe ne peut être notée dans notre système d'écriture. Il y a, autrement dit, une aptitude de l'oreille, différente de la nôtre, mais tout aussi légitime. Or, il est bien certain que toute théorie générale

.

peu

de la musique doit s'adapter et à l'un et à l'autre. Voici donc deux ordres de recherches, les unes historiques, les autres esthétiques, qui seraient d'un grand intérêt. Malheureusement, on rencontre aussitôt d'extrêmes difficultés. Il paraît que pour entendre de la musique arabe à peu près pure, il faut aller en Algérie et au Maroc. Ce qu'on entend en Orient, ou du moins le que j'ai entendu, est un mélange sans nom de musique arabe, de musique turque, de musique grecque et de musique occidentale importée. Il est très délicat de retrouver à travers ce qu'on entend, une mélodie populaire authentique. Une chanson qui fait fureur au Caire, Cocaïne, avec l'accent à contre-temps, a visiblement traversé la Méditerranée et peut-être l'Atlantique.

On m'a chanté, au fond du Liban, des mélodies, dont l'une était une chanson bédouine. Il était aisé d'y retrouver l'inspiration et les formules que nous connaissons par Boudine ou par Rimsky: par exemple les cascades de triolets descendants. Surtout l'espèce de rêverie imprécise de la mélodie, nostalgique comme le paysage sans arbres, continue comme la ligne de l'horizon, chatoyante comme l'air chaud, à la fois ardente et molle, avait un caractère singulier.

Dès qu'on essaie de noter cette mélodie, on la défigure. Non seulement, elle se chante d'une façon très particulière, dans le nez et d'une voix de tête, mais les intervalles sont franchement faux pour nos oreilles. Ce n'est pas là une défaillance d'exécution. D'abord cette fausseté est universelle; ensuite les mêmes jeunes filles que j'avais entendues ont ensuite chanté en français des mélodies françaises non seulement avec une justesse irréprochable, mais avec la même émission de voix qui est en usage chez nous. Enfin, quand vous essayez d'écrire dans le système de nos tons et de nos demi-tons la mélodie qui vous a paru la plus émouvante, il n'en reste qu'une ressemblance approchée, banale et L'émotion et l'art même ont disparu.

commune.

Ce que sont ces intervalles arabes, que le lecteur se rassure, je n'essaierai pas de le lui expliquer. Rappelons, si vous voulez, que les Arabes définissent les intervalles par le rapport des longueurs entre les cordes donnant les deux notes finales de l'intervalle, de sorte que l'octave est représentée par 2, la quinte par 3/2. Rappelons qu'ils divisent cette octave non pas en douze intervalles comme nous le faisons, mais en dix-sept, en admettant des tiers de ton. Et ajoutons enfin que de ces dix-sept intervalles, ils font huit gammes, qui peuvent, me dit-on, par certaines modifications, en engendrer au total soixantequatre. Je regrette vivement de n'avoir pu voir un piano que fait construire à Beyrouth un compositeur nommé M. Sabra, et qui donne, paraît-il, ces intervalles. Je n'en saurais parler que par oui-dire. Quant à M. Sabra luimême, que j'ai eu le plaisir de rencontrer, il a été longtemps organiste à Paris; et il a bien voulu interpréter devant moi des fragments de son opéra de Joseph, où j'ai cru reconnaître les plus belles qualités, mais qui est d'un style franchement occidental, avec un peu de la couleur de l'Orient.

Ainsi, quand on l'analyse, la musique qu'on entend en Orient est quelque chose de singulièrement complexe. Tous les éléments dont nous venons de parler sont plus ou moins fondus et confondus, ayant au cours des temps, agi les uns sur les autres.. Songez que, dès le quatorzième siècle, les théoriciens arabes ont connu notre système occidental de l'octave divisé en douze intervalles, et y ont plus ou moins accommodé leur propre système musical. Songez qu'inversement notre plain-chant est vraisemblablement d'origine byzantine, de telle sorte que nos oreilles sont accoutumées dès l'enfance aux modes asiatiques. Il s'est produit d'étranges interversions. Un muezzin qui loue Allah sur le minaret d'une mosquée et dont la prière est tout imprégnée encore

de

du

style byzantin, semble célébrer, l'heure moghreb, je ne sait quel office de ténèbres. On note aisément sinon ses vocalises, au moins la mélodie qui leur sert de support, et qui est toute en notes qu'on reconnaît. Au contraire, un prêtre syrien chante la messe sur une mélopée arabe glissante et insaisissable, de sorte que le catholique use de la même musique que les pâtres du désert, et le musulman de la même musique qu'un chantre belge ou auvergnat. Quant à la musique turque, ce que j'ai vu ou entendu était fort peu de chose : c'étaient quelques chansons, dites par des jeunes filles, à bord d'un bateau, et accompagnées sur une sorte de monstrueuse guitare. Au contraire de la flottante et fuyante musique arabe, celle-ci m'a paru très rythmée Quelle n'a pas été ma surprise, comme je priais ces enfants de me dire de vieux airs chantés par les nourrices, de les entendre chanter un thème qui rappelait la Marche turque de Mozart ! Et je fais avec respect amende honorable à l'ombre du maître de Salzbourg, dont la turquerie m'avait paru jusqu'ici sujette à caution.

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Tout ce que je puis dire de la musique d'Asie se borne donc à quelques impressions surprises, et je n'ai pas la moindre prétention à en connaître davantage. Mais ces impressions même ne laissent pas d'être, pour un Occidental qui se promène en Syrie, un sujet de réflexion, ou, si le mot paraît trop fort, de rêverie.

Ce qui frappe d'abord, c'est que ces intervalles nouveaux ne font pas à une oreille occidentale l'effet d'intervalles autonomes, mais au contraire d'intervalles altérés. Au fond, ce sont bien nos intervalles, mais un peu plus élargis, ou un peu rétrécis, comme si le feu d'une passion plus ardente avait boursouflé ou affaissé le mince métal de la note. Il se peut d'ailleurs que j'aie été là le jouet d'une illusion; accoutumé à la musique d'Occident, j'y ai peut-être ramené malgré moi la musique d'Orient. Je ne garantis donc que l'impression, mais elle est très nette. C'est la même que donnent nos .intervalles augmentés ou diminués ; c'est le même élan et la même défaillance, mais avec je ne sais quoi de plus aigu, de plus douloureux et de plus triste, qui est la note à la fois juste et fausse, et qui vous prend aux nerfs. Et cette façon d'être éternellement au-dessous ou au-dessus d'un but qu'elle n'atteint pas donne à la musique je ne sais quel charme décevant, quelle mélancolie faite de découragement et de désir.

Et je pensais La musique ne vit que des altérations que l'émotion apporte à la ligne du chant. Quant Riemann considère tous les accords comme des altérations d'accords consonnants, il exprime une vérité profonde. Mais cette altération est contrainte, par la loi des temps, de devenir de plus en plus compliquée. A l'époque de Lulli, il suffisait d'un dièse ou d'un bémol introduit dans la tonalité pour marquer les plus fortes impressions de l'horreur et de l'épouvante. Les générations suivantes étant devenues moins sensibles, il a fallu pour les émouvoir des accidents plus forts, et la musique en est venue progressivement à sortir de toute tonalité, et même de nos jours à accepter la superposition de tons différents. Serons-nous contraints d'aller plus loin, et blasés sur les accords les plus faux, en viendrons-nous à chercher des notes fausses en elles-mêmes, à admettre le tiers de ton arabe, et à faire subir aux intervalles classiques des élargissements ou des rétrécissements qui n'ont pas encore de nom ?

Il n'y a aucune difficulté théorique à cela. Bien mieux : dans la pratique la plus courante, il existe déjà quelque chose d'analogue. Je ne parle pas seulement des chanteurs allemands qui prennent systématiquement la note un peu au-dessous; mais les violonistes qui jouent le plus juste sont loin de donner une note mathématiquement

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