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Je cause avec un des gendarmes français de la bri- dans leur pays on ne trouvait pas de livres français ; gade qui occupait Odessa. Il est là qui surveille avec je suis assuré que leurs sentiments (pas plus hélas! que bonhomie la tenue du camp pour assurer le dégagement la situation) n'ont changé. Et depuis nous avons eu ces des passages à travers les tentes. Lui aussi comprend doléances d'intellectuels yougoslaves, dénonçant les danmal les événements. D'instinct, il pressent ce qu'a de gers de l'importation allemande en leur pays ; les reprotragique la fin de cette armée où les soldats étaient tous ches des Roumains, dont M. Algazy se fit l'an dernier d'anciens officiers et qu'il doit ramener à l'observation l'interprète, et que dernièrement exprimaient en une des consignes. A ce signe, il mesure le désastre qu'est forme touchante ceux de leurs universitaires qui visiune révolution pour la civilisation universelle. Il observe taient la France; tant d'autres témoignages encore d'ar

' anxieusement toutefois que, comme ce sont là des dente sympathie et de sincère bonne volonté! Ce sont i gens de la haute i, toutes ces femmes se débrouil- ces gens-là que la crise de notre librairie, ajoutée à la lent bien à soigner et à alimenter d'abord les enfants, crise des changes, a livrés à l'influence allemande. tirant parti des moindres objets. Il me confie que, dans Comment celle-ci s'exerce-t-elle ? De deux façons égale Nord, en août 1914, les bourgeois se laissaient moins lement dangereuses. D'abord l'Allemagne écoule, comme accabler par les événements que les femmes du peuple. il est naturel, ses propres livres, et spécialement les

On fait sauter le pont de la voie ferrée, comme les ouvrages scolaires et techniques, à des prix contre lesderniers débris de l'armée des volontaires sont embar- quels nous ne pouvons lutter, même au pair. Mais, et ce qués sur les paquebots en partance pour Sulina et n'est pas là le moindre danger, elle s'est mise à éditer Constantinople. Bientôt les armes abandonnées et ras- des livres en langue française, et ceci grâce à l'emploi semblées en faisceaux ne forment plus qu'un brasier d'un outillage amorti et à des matières premières (papier actif sous la brise de mer.

et charbon) payées meilleur marché que chez nous, à des

, Dans la brume grise qui baigne les eaux plates, un prix encore dont nous ne pouvons approcher. J'ai cité à un les paquebots s'effacent rapidement. De la sainte déjà, d'après M. Max Leclerc, l'exemple de cette collecRussie mes pas n'auront foulé que le sable aride des tion « française » éditée à Sarrelouis et mise en vente à bords du Dniester, où Ovide a bien pu gémir sur sa 50 pfennigs, soit 12 centimes et demi le volume relié de misère. Sur ces bords d'exil, la pensée inquiète se con- 150 pages. centre sur le naufrage de tout un peuple et sur le des- Depuis deux ans, les collections d'ouvrages en langue tin de l'Occident menacé.

française - se sont multipliées en Allemagne. Il y a

d'abord eu ALBERT KÉRAGNEL.

« l'Internationale Bibliothek » de Berlin, dont le prospectus d'annonce, publié dans le Borsenblatt, journal des éditeurs allemands, expliquait ingé

nuement : « En raison du grand besoin de livres franL'Expansion du Livre Français çais en Allemagne et du prix énorme des livres importés

de France, notre collection constitue un re ersatz » de Pour nos amis de l'Europe centrale

valeur égale et cependant de prix considérablement plus

avantageux. » A 9 marks le volume broché et 12 marks Pourquoi faut-il qu'en Europe au moins tous les pays relié, il s'est publié là du Balzac, du Baudelaire, dr de culture latine ou française soient des pays à monnaie Vigny, du Mérimée. Les quatre premiers volumes de dépréciée ? On n'imagine pas le dommage que subit de cette - Bibliothèque française » ont été Eugénie Graxce chef notre commerce de librairie, partant notre expan- det, Manon Lescaut, les Fleurs du Mal, les Scènes de la sion intellectuelle.

Vie de Bohème, Colomba, le Père Goriot, Madame Nous avions, en librairie, après la victoire, un vaste Bovary, les Confessions, Atala ont dû paraître depuis. marché assuré, une clientèle toute faite, brûlant de sym

On m'a montré à la Maison du Livre quelques-uns de pathie pour nos ceuvres et nos idées, et qui n'attendait ces volumes : nettement imprimés sur papier convenable, pas seulement nos livres, mais les réclamait : c'étaient ils se présentaient bien. tous les nouveaux Etats, d'accord dans leur amour pour A Vienne, on imitait l'exemple de Berlin. La « Rhomla France : Yougoslavie, Tchéco-Slovaquie, Pologne ; bus Bibliothèque » publiait le Colonel Chabert, Can

c'était aussi notre alliée malheureuse mais fidèle, la dide, l'Avare en juillet 1920 et annonçait pour paraitre Roumanie. Pour une question purement matérielle, nous ensuite du Gautier, du Racine et du Lamennais. Chaque avons été empêchés de les satisfaire et eux impuissants volume était facturé au prix de 16 couronnes. à contenter leurs désirs et leurs goûts. Le résultat ? C'est Enfin, un de nos confrères du soir ne reproduisait-il que l'Allemagne, leur voisine, a profité de la situation pas tout dernièrement le prospectus dans lequel la maiet qu'à défaut de livres français, ils se sont résignés à se son Tiedemann et Uzielli, de Francfort, annonçant me fournir de livres allemands. Il faut s'en attrister, certes, édition illustrée de l'Armance, de Stendhal, proclamais les blâmer ?

mait : « Editeurs allemands, nous offrons une autre Allez donc, quand le mark est au pair ou à peu près, française aux lecteurs européens. » acheter des livres français à leurs prix d'après-guerre Précisément, c'est ce qu'il ne faut pas. J'entends bien

avec une monnaie qui perd 75 à 80 010 sur le franc! l'objection : qu'importe la nationalité de l'éditeur, si le Avec les 1.500 lei de traitement mensuel d'un professeur volume est imprimé en français, et vaut-il pas mieux que

de faculté roumain payer 150 lei un Traité de droit qui nos amis lisent des livres français publiés en Allemagne vaut 30 francs chez nous, 25 ou 30 lei un roman de que de n'en pas lire du tout ? L'argument a sa valeur. 7 francs! Non, n'est-ce pas ?

Tout de même, on sent bien qu'il serait mille fois préEt n'allez pas croire que ces hommes nourris de notre férable que ce fussent des éditions françaises qui répanculture, que la jeunesse de ces nations avide d'écouter dissent les oeuvres de chez nous ; que la pensée française nos maîtres aient accepté de gaîté de coeur et sans rébel- enrichisse des étrangers, voire des ennemis, personne lion la cruelle nécessité de rester ou, pis, de se mettre à nie saurait trouver que c'est là une situation nomale l'école allemande. Ils n'ont cessé de protester, de nous D'ailleurs, les éditions allemandes sont souvent déferdemander d'exaucer leur veu le plus cher. Je disais ici tueuses, tronquées et abrégées pour des nécessités de même il y a un an (1) la révolte de ces Tchèques franco mises en pages, avec de grossières fautes d'impression philes obligés de lire des livres allemands parce que et de langage. Et puis ce n'est pas seulement le renom de

notre littérature qu'il nous faut soutenir, mais encore (1). Cf. l'Opinion du 9 octobre 1920.

celui de notre typographie et de notre édition. Pense

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à l'opinion de ces étrangers, même nos meilleurs amis, qui Væu chimériqué, sans doute, souhait irréalisable, puisne peuvent se procurer de livres français à des prix abor- que jusqu'à présent rien n'avait été tenté en ce sens ? dables qu'édités en Allemagne. Ne craindriez-vous pas Que non pas, il n'est jamais trop tard pour bien faire : qu'ils en conçoivent quelque admiration pour le génie cette inertie lamentable va beureusement cesser, et il faut commercial de notre rivale et que tôt ou tard cette admi- saluer avec reconnaissance l'initiative féconde d'une de ration porte ses fruits ? J'exagère ? Dans son dernier nos grandes maisons d'édition, que nous ne nommons numéro, le journal La Librairie publie une lettre de son

pas pour n'être pas suspectés de combinaisons intérescorrespondant en Roumanie d'où j'extrais ces lignes : « Je sées. me borne à vous dire

que,

dans toutes les villes où je suis Cette maison a placé à Vienne ses ateliers de fabricapassé, j'ai trouvé des livres français mais pas d'édi- tion destinés à produire pour les nations à change déprétions venues de France, hélas ! Il y en a de Berlin, il y cié. Elle n'y a pas créé une organisation nouvelle, mais en a de Vienne et puis de Leipzig, à très bon marché et s'intéressant financièrement à une entreprise déjà exisde très bons auteurs, submergeant chez les libraires ce tante, celle de la maison Manz, elle s'est assuré l'utilisa-qui subsiste de nos éditions nationales qu'on voit dispa- tion immédiate d'un matériel disponible. La maison raître les unes après les autres de leurs vitrines et de Manz était de celles qui publiaient des auteurs franleurs rayons."

çais : elle n'en publiera plus désormais pour le compte Voici la situation. Le remède ? Il n'y en a qu'un et il des étrangers. Elle éditera une collection d'auteurs franest bien simple : puisque, dans les conditions économi-çais, propriété absolue d'une maison française, qui les ques actuelles, il nous est en fait interdit d'exporter nos publiera sous sa firme. livres faits en France dans les pays à monnaie dépréciée, Celle-ci ne donnera pas des auteurs classiques ou des notre devoir est d'en fabriquer nous-mêmes dans, ces écrivains tombés dans le domaine public, mais seulement pays où, grâce au bon marché des matières premières, des oeuvres que les Allemands ne peuvent reproduire. Sa du papier et de la main-d'oeuvre, nous pouvons les collection sera une collections de romans contemporains.

mettre en vente à des prix acceptables. Il n'y a pas de On y trouvera du Capus, du Rosny, du Huysmans, du e comparaison possible, en effet, entre les prix de revient : Donnay,.du Claudel, du Lichtenberger, du Vaudoyer,

des auteurs, des candidats au doctorat qui ne pouvaient du Jaloux, du Mauriac, du Mac-Orlan, etc. L'autorisa

sans doute supporter les frais énormes d'une édition tion de reproduction de tous ces ouvrages n'a été solli2 chez nous ont tenté de se faire imprimer au dehors et citée que pour un chiffre donné d'exemplaires. Il est ! s'en sont tirés à bon compte... en Autriche. Un des pre- vrai que les tirages prévus sont d'un nombre de « mille >>

un ancien combattant, M. Henri Davoust, singulièrement important. * poilu authentique, ancien directeur d'un journal du front, Ajoutons que, pour ne pas concurrencer nos livres

ie Tord-Boyau, et dont un volume de vers, l'Habit d'Ar- fabriqués en France, la vente de cette collection sera iz lequin, parut en 1920 avec oet avertissement : « En raison interdite en France, en Belgique et dans les colonies.

de la crise de la librairie française, cet ouvrage, composé françaises. Mesure utile à notre industrie, puisqu'en en partie sous les 148 autrichiens de Skoda, a été im- francs chaque volume coûtera environ moitié du prix primé à Vienne (Autriche) par les anciens ennemis de français. Qui verra, comme moi, un exemplaire de ces la France, avec le gracieux concours de la mission mili- volumes ne pourra s'empêcher d'envier Tchèques, Polo taire française. »

nais ou Roumains et de comparer, sous leur élégante Pour pouvoir nous lire, nos clients étrangers nous de- couverture en deux couleurs, la bonne mine de ces livres mandaient eux-mêmes de fabriquer nos livres chez eux et bien imprimés sur papier d'avant-guerre ou presque: - soit dit en passant - il y a longtemps que notre aussi beau, aux piètres éditions dont nous sommes grajournal a préconisé cette solution (1). Dans un très inté- tifiés. ressant article que nos lecteurs n'ont certainement pas Cette entreprise, qui nécessite une grosse mise de; oublié (2), Mlle Marie-Antoinette Chaix ne disait-elle fonds, comportera certainement un bénéfice financier. pas le désir de Polonais notoires de nous voir installer C'est une affaire commerciale, naturellement. Mais elle des imprimeries en leur pays, pour qu'en dépit des diffi- aura aussi un bénéfice moral, et c'est pour cette raison cultés de l'heure n'y disparaisse pas toute culture fran- que ce journal a tenu à la signaler, comme il s'appliçaise

quera à signaler ici tous les efforts qui seront faits dans

cet ordre d'idées en faveur de l'expansion du livre et (1) Cf. l'Opinion du 14 août 1920 (Feuillets de la Semaine).

par conséquent de la pensée française. (2) Opinion, 9 avril 1921.

GEORGES GIRARD.

į miers fut

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L2

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XVI

« Ne désire pas que les choses qui aviennent avien-

nent comme tu veux, mais veuille qu'elles aviennent LA FLAMME ÉTERNELLE

comme elles aviennent, et ta vie conlera bien. » La volonté, plus même que l'intelligence, était l'or- Le cours de son existence n'était peut-être pas aussi gueil de Philippe Lefebvre. Quand il avait une fois aisé qu'Epictète le lui avait promis ; mais le commerce pris sa décision, il ne se permettait plus de douter qu'elle qu'il avait noué dès l'âge de raison avec l'ordre nécesne s'accomplît tôt ou tard; souvent très tard ; c'est au

i

saire était si intime qu'il aurait cru se révolter contre point qu'il semblait l'avoir oubliée, parce qu'il savait lui-même s'il s'était révolté contre le destin. Il avait une. attendre, rare vertu parmi les hommes. Il croyait aper- sorte de fatalisme, non point passif et stupide comme cevoir aussi, entre l'ordre des choses et sa volonté, une celui du vulgaire, mais actif au contraire et personnel, harmonie qui finissait toujours par rendre la nature parce qu'il était l'un des points de conscience de cette complice de ses desseins. N'était-ce pas la récompense fatalité avec laquelle il s'identifiait, au lieu de se mettre due à son stoïcisme ? La formule de sa vie était la à part et de simplement la subir, ne pouvant pas faire maxime de l'Enchiridion :

autrement. Il sentait perpétuellement at accord et cette

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conformité, dans les petites comme dans les grandes fois, il voulait écrire; mais il tarda un peu plus, il rêva choses ; mais en est-il donc de petites, quand on les quelques instants. Des souvenirs d'une minutieuse précienvisage de ce point de vue ? Et n'était-ce pas, en effet, sion lui revenaient. Après avoir tracé ces quelques lignes, pour lui une très grande chose, une des harmonies de il avait songé non sans amertume que Tintagel, l'année sa vie, aussi indispensable à sa raison que la résolution précédente, lui avait aussi annoncé la naissance d'un fils, d'une dissonance peut l'être à l'oreille d'un musicien, ajoutant : « Nous l'avons baptisé Philippe », et se garcette nécessité qui lui était apparue, dès qu'il avait revu dant bien d'ajouter : « C'est pour le nommer comme Lembach son ennemi, de revoir Rex Tintagel, son ami ? vous. » Cette même imperceptible amertume, il la res

Après cette première évidence, une autre s'était im- sentit encore, comme l'avant-goût d'une désillusion qu'il posée à lui : de même qu'il avait revu Lembach dans était presque certain d'éprouver lorsque après de si lonce décor de Sils-Maria où l'auteur de Zarathustra a rêvé gues années il reverrait Tintagel ; mais il s'interdit de le retour éternel, de même il ne pouvait revoir Tintagel la ressentir, et il écrivit à son ami pour lui donner renque dans le décor d'Oxford; où il avait connu par lui dez-vous le mois prochain, aussi naturellement que s'il l'amitié des camarades, et par Ashley Bell la guerre,

lui eût écrit l'autre semaine. Pourtant, leur corresponqui seule engendre l'amour parmi les hommes. Il était dance, toujours très rare, avait complètement cessé donc maintenant décidé à faire ce pèlerinage qui l'avait depuis la guerre, sauf un échange de billets, après l'arà peine deux ou trois fois tenté, toujours effrayé, que mistice, pour se donner mutuellement l'assurance que jamais il n'avait osé refaire depuis les temps de son leurs fils et eux-mêmes étaient encore en vie. Philippe aube ardente. Il ne pouvait l'entreprendre avant la fin savait bien que, sous la froideur de ce nouveau billet, des hostilités ; mais il avait la certitude intime que, le Tintagel devinerait la douce et profonde joie dont il moment venu, les choses s'arrangeraient comme d'elles- était ému à la pensée de le revoir; et il devina lui-même mêmes et le plus simplment du monde. L'événement une joie pareille dans la froide réponse de Tintagel, ne le démentit pas.

qu'il reçut par le retour du courrier. Au printemps de 1919, cinq mois après la signature Il eut, à dater de ce jour, des impatiences d'écolier de l'armistice, le président de l'un des clubs d'Oxford qui compte les jours jusqu'aux vacances. Il ne pouvait, lui écrivit pour

lui demander une « lecture » à la rentrée pour les tromper, se feindre de préparer un voyage si des vacances de Pâques, qui tombait cette année-là le simple, et qu'il avait fait, du moins de Paris à Londres, 20 avril. Philippe répondit aussitôt, avant même de tant de fois. Heureusement, il avait à préparer sa communiquer la nouvelle à Madeleine et à Rex; et pour férence. Il fut dès lors incapable d'aucune autre besogne; accepter l'offre qui lui était faite, ia date qu'on lui pro- mais jamais peut-être il n'avait fait aucun devoir, depuis posait, environ le 20 mai, il retrouva des expressions de ceux du lycée, avec tant de verve naive et de conscience. cette sensibilité anglaise qui était souvent la sienne, Jamais, lui qui était pour soi-même d'une clairvoyance qui, sous les dehors d'une froide correction, laisse trans- et d'un jugement infaillible, il n'avait été ŝi content de paraître si naïvement, mais pour les seuls initiés, une ce qu'il faisait. Il avait de l'indulgence, un faible pour joie tendre et ingénue. Il faisait vraiment plaisir à voir cette modeste allocution. Sous prétexte de bien l'apprenlorsque, à table, au déjeuner, il annonça la bonne nou- dre, pour n'être pas obligé de baisser la vue sur sa copie, velle à Madeleine et à Rex. En le voyant si gaiement pour avoir l'air de parler tout de bon, il la relisait consheureux, Rex ne put se défendre de sourire et de penser tamment : il ne l'avait lue qu'une fois à Madeleine et son habituel refrain (mais il le retint sur ses lèvres) : à Rex, mais il la relisait seul, à haute voix; et il en --- Tu es si jeune, père ! Comme tu es jeune !

était attendri de même que la première fois qu'il avait Puis l'on se réjouit avec lui de ce qui lui causait un lu un livre de Rex, certaines phrases lui faisaient venir si grand plaisir, sans faire un instant mine de supposer les larmes aux yeux. Il se grondait un peu de cette vaqu'il pût emmener Rex et Madeleine. Rien n'eût été nité, mais pas bien fort; et puis il se la pardonnait en plus simple ni plus naturel, et ne leur eût fait plus de souriant. plaisir, à eux aussi ; maintenant ils vivaient tous trois Lorsque ce fut enfin le jour du départ, il s'étudia à dans une si douce intimité que la moindre séparation reproduire les moindres détails de son premier départ leur était pénible ; mais ils sentaient que ce voyage aux pour Oxford, dont il avait une exacte mémoire après lieux de sa jeunesse et pour la retrouver, Philippe ne tant d'événements et plus de trente-sept années. Il ne le pouvait faire que tout seul, comme il était, seul la cessait pas de s'étonner, avec une joie ingénue, qu'une première fois qu'il avait visité la terre promise.

durée si considérable, supérieure à la moyenne d'une vie Ce jour-là, il se retira un peu plus tôt que de cou- humaine, eût si peu changé toute chose. Ce qui avait tume dans la bibliothèque, pour méditer déjà sa confé- changé le moins, c'était lui-même. Il avait l'orgueil de rence. Il se disait :

vérifier une fois de plus, et par son propre témoignage, Que vais-je raconter à ces jeunes gens ?

une doctrine qui lui était singulièrement chère, savoir La réponse lui vint tout aussitôt :

que l'âge n'est qu'un trait du caractère et que les mêmes Je leur parlerai d'eux-mêmes et des jeunes gens hommes ont le même âge toute leur vie. Cette chimère de Platon.

lui plaisait d'autant plus que l'âge de son caractère Il s'était assis devant le bureau de chêne, dont la n'avait aucun rapport avec celui de son état civil. Mais façade était un panneau de coffre ancien sculpté en en particulier ce matin, il n'osait s'avouer le chiffre de haut-relief, où grimaçaient des sortes de nains à la l'âge qu'il aurait dû s'attribuer, car, ainsi que le jour que Téniers, que Louis XIV eût appelé magots. Il repoussa, jadis il était parti pour Oxford, il retrouvait cette sen

. d'une main brusque, l'in-folio des oeuvres de Platon avec sation sublime de la première adolescence pour qui chale commentaire de Marsile Ficin, qui était toujours sur que réveil est le réveil du monde, chaque matin est le sa table. Il prit une feuille de papier à lettres... C'était matin des matins.

. ses gestes de tous les jours : pourquoi lui rappelèrent- Rex et Madeleine comprenaient si bien cette illusion ils un seul d'entre les jours qu'il les avait faits, celui de d’

d'adolescence et ce besoin de solitude qu'ils ne lui prola nativité ? le matin qu'il avait écrit sur la feuille, posèrent même pas par innocente taquinerie de l'accompareille à celle-ci :

pagner jusqu'à la gare. Il partit comme jadis le jeune « Un fils vient de me naître, Rex, il y a une heure. orphelin libre et maître de lui. Il n'avait, de propos déliVotre nom m'est monté aux lèvres quand je l'ai vu dans béré, voulu emporter que le petit bagage qui lui suffi. son berceau, et j'ai décidé qu'il s'appellerait comme sait en ce temps-là, et dans son sac le même volume di vous : Rex. »

cher Platon, le Phèdre, dont il assimilait pieux men C'est en effet à Tintagel que cette fois, comme l'autre songe - les paysages aux paysages d'Oxford. « Détour

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nons-nous de ce côté, suivons le cours de l'Iissus... » et

passage entre le lit et la fenêtre, qui donnait sur une c'est le Cherwell qu'il revoyait.

ruelle, vis-à-vis une vieille petite église entourée de son Il y eut bien quelques différences entre ce voyage et cimetière. A mi-hauteur était une planche, destinée à celui d'autrefois, notamment la corvée des passeports; recevoir les malles, d'où pendait une étoffe, pour dissimais Philippe n'eut pas la fâcheuse surprise, alors trop muler les portemanteaux; et sur la table était posée la fréquente, de trouver à Londres occupée la chambre même bible reliée de noir, encore plus écornée qu'auqu'on lui avait promise, et d'errer par les rues passe trefois. onze heures du soir, à la recherche d'un gîte. Il n'en

La table d'hôte était toujours à six heures et demie! résolut pas moins, dès qu'il fut bien installé dans son

Philippe descendit exactement, bien que, si tôt, il n'eût lit, au Savoy, de quitter dès le lendemain Londres, que selon son programme il ne devait quitter que quarante- | était court

, et quand il eut fini de dîner, la nuit

tombait

pas grand faim. Il commanda un cyder-cup. Le menu huit heures plus tard, et de se rendre à Oxford sans délai. Ce qui d'abord l'y fit résoudre fut qu'il avait agi il ne voulait faire que les gestes habituels, dont l'ha

à peine. Il sortit. Dehors, il ne délibéra point où il irait. de même la première fois qu'il était venu ici, sous pré- bitude était depuis si longtemps perdue, mais renaistexte qu'Oxford et non pas Londres était le but de son voyage; mais il avait d'autres raisons plus raisonnables.

sait spontanément. Déjà, cependant qu'il dînait dans Naturellement, sa réception ayant un caractère quasi point séparer de la rue, il avait reconnu, sur le trottoir

,

la salle que les larges vitres sans rideaux ne semblent officiel, il craignait qu'on ne vînt le prendre à la gare et

le mouvement, la flânerie active d'Oxford par les beaux que dès lors on ne le lâchât plus; et il voulait deux

soirs du printemps ou de l'été. Ce qui changeait l'aschoses, faute desquelles tout son plaisir serait gâté :

pect de la rue, c'était les uniformes, jadis si rares, si demeurer seul et incognito au moins une soirée, rôder à

nombreux aujourd'hui. Il voyait des soldats en conval'aventure ainsi qu'autrefois; puis avoir matinée , toute une après-midi de tête-à-tête avec Tinta | lescence, et il n'avait plus ce sentiment de magnifique

santé qu'il avait toujours emporté d'ici. Il voyait des gel; ensuite, on ferait de lui ce qu'on voudrait. Son ren

mutilés, plus qu'à Paris, mêlés à ceux « qui sont comme dez-vous avec Tintagel était à la Mitre, la veille, et non

tout le monde », et qui semblaient n'avoir eux-mêmes pas l'avant-veille du jour fixé pour la conférence : il se

aucun soupçon d'être si tristement différents. faisait une joie de le surprendre un jour plus tôt. Rex descendait chez un ami, professeur, qui avait une

Il lui parut mieux reconnaître Oxford et la foule charmante maison dans Iffey road, qui prolonge High point séparé même par un obstacle de verre. Il s'en alla

dont le souvenir lui était familier, lorsqu'il n'en fut street, assez loin du centre de la ville ; et même il y

. devait être depuis une semaine : Philippe n'avait pas à

jusqu'à Carfax, où il retrouva le merveilleux, le séduie craindre de se hâter pour rien. Cependant il ne partit fourni que jadis de tant d'objets désirables. Il put tou

sant étalage du marchand de tabac, — un peu moins 7 pas de Londres d'aussi bon matin que l'autre fois. Il - voulait arriver seulement vers la fin de la journée, au

tefois s'y procurer une « Varsity pipe »; et quand il

l'eut bourrée et allumée, il voulut refaire la première crépuscule. Par exemple, il tenait par-dessus tout à

promenade qu'il avait faite, le soir de son arrivée. occuper la même affreuse et incommode petite chambre où il avait dormi seulement deux nuits. Avant de par

Il tourna dans l'obscur et désert Market street, il - tir, il téléphona, en donnant de telles précisions qu'il

poussa jusqu'à Brasenose lane; mais il y parvint trop,

vite. Il n'allait plus à l'aventure, il connaissait trop n'y eût pas d'erreur possible. La chambre était libre!

bien le chemin; et de même, il fut presque tout de suite 2. Il eut le sentiment de la jeunesse éternelle; car depuis le Savoy jusqu'à Paddington, et ensuite durant tout le

dans le jardin privé, mystérieux, où jadis il avait rêvé trajet, toutes ses émotions anciennes ressuscitèrent, et il

le premier soir au seuil de la terre promise. Mais il les reconnut. Il avait les mêmes impatiences. Il tressaillit

entendait s'épargner toute désillusion, et il trouva un de la même puérile fierté lorsque, en arrivant à la sta

prétexte à ses yeux fort bon pour écourter sa prometion, le train ralentissant déjà, la noble cité lui apparut, Tintagel, de l'avertir qu'il avait fait cet enfantillage

nade : ne devait-il pas rentrer à l'hôtel afin d'écrire à avec ses créneaux et ses tours, ses coupoles et ses clo- |

de quitter Londres un jour plus tôt pour le surprendre, chers, et qu'il put se dire, comme s'il l'avait quittée

et qu'il souhaitait le voir dès demain matin? seulement hier :

Rentré en hâte, Philippe monta tout droit au salon Ici est la cathédrale, ici Magdalen, ici la belle ro

de l'hôtel, et là du moins il ne remarqua pas le plus tonde de la Radchiffe camera...

Mais il ne voulait pas encore et avant la nuit tombée léger changement. C'était toujours, et exactement aux renouer connaissance avec Oxford. Il fut content de

mêmes places, les meubles de palissandre d'un Louis

Philippe si contourné que le pire Louis XV ne saurait voir qu'ici ce n'était pas comme à Londres où l'on ne

être plus extravagant. Il n'eut point la peine de chertrouve plus que des motor-cars, et qu'on n'y trouvait

cher le papier à lettres : il aurait pu étendre la main justement que de vieux hansoms. Il en prit un et se fit conduire à l'hôtel de la Mitre directement. Il ne voulait

en fermant les yeux. Il se rappela, d'abord qu'il fut rien regarder, il ferma les yeux, pour ne les rouvrir

assis, la première lettre qu'il avait écrite à Rex Tina que lorsqu'il fut devant la façade rustique et ancienne, tagel, esq., et qu'il n'avait pas eu l'audace d'envoyer. perdue sous les fleurs. Alors, d'un ton d'habitué, il

Il n'était plus si enfant, maintenant. Au fait, ne l'était

il plus?... donna ses ordres pour le paiement du hansom et le transport de la malle; et après un coup d'oeil à la salle Enfant ou non, il ne pouvait être question de ne pas à manger, qui est à droite, à la petite cour plantée, envoyer cette lettre; il était urgent, au contraire, de la humide et sombre comme un puits, qui est au bout du

faire parvenir Iffley road, et Philippe s'en occupa ausvestibule étroit, obscur, il monta l'escalier propre et

sitôt l'enveloppe fermée. Cela ne fut pas si facile, modeste, orné de naives estampes, il alla droit à la

l'hôtel de la Mitre ne possédant qu'un seul et unique chambre qu'il avait retenue. Peu de choses en sa vie chasseur, lequel, en conséquence, ne pouvait s'absenter l'avaient rendu si heureux et si fier que d'en retrouver

ni faire aucune course. Enfin, on dénicha un commissans hésitation le chemin.

sionnaire qui voulut bien aller si loin, si tard, et Phi

mettre au lit. Il La porte n'était pas fermée à clef, il put librement lippe put regagner sa cellule et pénétrer dans cet humble réduit qu'il avait désiré pour n'était pas, ainsi que ce fameux soir ancien, tourmenté logement : véritable cellule, qu'obstruait toute le lit pour. de puérils scrupules; il était dans un état de calme, de deux personnes. Rien n'y avait été dérangé depuis sérénité, qui lui faisait présager avec certitude pour le trente-sept ans. La table à écrire barrait toujours le lendemain un de ces moments de bonheur parfait qui

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souvent lui avaient été accordés ici : depuis, quelque- | tion, à laquelle Lefebvre ne répondit pas davantage. fois, à Paris même, ou au cours de ses voyages, il lui Ils se donnèrent brusquement la main; personne, à était arrivé de s'avouer parfaitement heureux; mais les voir, n'eût soupçonné que ces deux êtres glacés iet alors, son esprit se reportait toujours vers le paradis corrects étaient bouleversés jusqu'au fond du coeur par perdu, — vers le paradis perdu que ce soir il venait de une joie vraiment divine, ni qu'ils étaient les mêmes, retrouver:

oui les mêmes adolescents, qui près de quarante années Il dormit dans une paix et comme dans une candeur auparavant se disaient avec le plus grand sérieux, du. délicieuse; il se réveilla précisément à l'heure où il avait ton qu'ils auraient parlé des choses les plus actuelles : coutume de se réveiller quand il demeurait à Pauma- Rex, croyez-vous qu'après notre mort nos âmes nock house., Sa première pensée fut, après avoir regardé auront encore des ailes, qui nous emporteront vers les sa montre :

régions supérieures où habite la race des dieux? « Quelle chance que je me sois réveillé si tôt! Rex me Certainement, Philippe, je le crois, puisque nous fera certainement tenir sa réponse de très bonne heure, sommes ordonnés et sages, maîtres de nous, et que nous voyez-vous que j'eusse été encore couché? »

avons réduit le vice en servitude, et que nous avons Il en aurait été honteux. Il se leva, fit sans tarder sa remporté le prix des trois combats.que l'on peut appeler toilette, et comme il l'achevait, voulant absolument être vraiment olympiques. Philippe, qui mériterait des ailes, prêt pour l'arrivée de la lettre, craignant de ne pas l'être sinon moi et vous? et s'impatientant déjà qu'elle n'arrivât point, on frappa. Et à cette minute, à cette minute précisément, PhiIl demanda ce que c'était. Une voix un peu enrouée et lippe Lefebvre comprit que sa jeunesse, intacte, était qu'il lui sembla que l'on déguisait, répondit : .

destinée à durer autant que sa vie ,et que ce privilège Une lettre.

sublime ne lui avait pas été octroyé sans dessein, mais Il eut un battement de coeur et d'abord entr'ouvrit la expressément pour qu'il fût digne de ramasser le fiamporte; puis, songeant que ce n'était pas comme autre- beau échappé des mains de son fils. fois quand la lettre était venue avant qu'il fat habillé, Il ne lui suffit pas de le comprendre : il voulut le et qu'il était présentable, il ouvrit la porte toute grande; | sentir et l'éprouver jusqu'à satiété, rechercher partout et il eut alors une vision si merveilleuse qu'il ne put ici les témcignages et les traces de sa jeunesse éter

de porter la main sur ses yeux : Rex était nelle. Il sortit avec Rex. Philip, pour ne pas les impordevant lui! Le même Rex qu'au temps de son aube tuner, marchait à quelques pas devant eux, tournant la ardente, avec cette beauté un peu compassée, cette grâce tête seulement, de temps à autre, pour voir quel chemin un peu gauche, ces grands cheveux blonds rejetés, ce ils allaient prendre et pour les y précéder. sérieux imperturbable, ces yeux timides, étonnés et spi- Ils ne parlaient guère et semblaient aller au hasard; rituels. Il comprit, – mais non pas tout de suite : il mais, sans s'être concertés, ils refaisaient toute la prose laissa, volontairement peut-être, le temps d'être dupe, menade qu'ils avaient faite ensemble, le jour que le de croire à cette résurrection et de s'enivrer du miracle, febvre, au moment de perdre son paradis, avait voulu

il comprit que c'était Philip Tintagel qu'il voyait, le visiter une dernière fois. Ils traversèrent d'abord la que Rex, pour lui procurer une charmante illusion, avait ville, et Philippe remarqua une chose qui l'eût peiné s'il confié la lettre à son fils. Il reconnut la délicatesse du n'avait eu la raison de se dire que cela était mieux ainsi : camarade, cette sensibilité pour tous secrète, mais non on avait soigneusement restauré -oh! sans la moindre pour lui. Il fut si attendri qu'il para cette fois encore altération des nobles lignes - les façades des collèges; le choc trop rude de la joie.

les pierres autrefois délitées, qui semblaient les feuil- . Vous êtes Philip? dit-il en souriant.

lets d'un livre trop souvent manié, étaient maintenant Oui, je suis, répondit le jeune homme, mis à son unies, nettes et, par places, trop blanches, sous les vignes aise et en gaîté par l'expression gaie de Lefebvre. Com- | vierges et les lierres. ment allez-vous ?

Ils allèrent ensuite vers le parc, ils passèrent devant Très bien, merci. Comment allez-vous ?

Paumanock house ; et ils ne se dirent rien, seulement ils Très bien, merci.

se regardèrent en souriant. Ils allèrent entre les haies, Et votre cher père?

le long des terrains de jeux, vers le Parsons'pleasure. Il est en bas, dit Philip Tintagel, avec la malice Ils poussèrent la porte de planches, et Philippe eut la d'un enfant qui vient de jouer un bon tour.

vision de celui de ses paradis qu'il avait aimé le plus Ils descendirent aussitôt. Lefebvre voulut que Philip chèrement. La rive était courbée de sorte qu'une faible passât le premier; et soudain il s'avisa que ce splen- partie de la rivière était seulement visible, et presque dide garçon, auquel, à première vue, il eût donné les tout de suite, à droite, à gauche, elle se dérobait à la vingt ans qu'avait le père lors de leur rencontre au vue. Le sol était revêtu de gazon, et la berge, abrupte, Parsons'pleasure, avait bien douze ans de plus. Mais avec des marches taillées.cà et là qui permettaient de qu'importe ? Ce qui e

était vrai, ce n'était pas cet âge descendre dans l'eau, à moins que l'on ne préférât s'y réel, qu'il ne pouvait croire réel que par un effort de jeter du bord ou de l'un des arbres qui, planté obliquecalcul, c'était la radieuse apparence de l'adolescent viril ment, pouvait servir de tremplin. Et Philippe regardait, qui venait de lui donner l'hallucination de son ami res- sur ce gazon et dans l'eau trouble, de jeunes dieux pasuscité.

reils à ceux que jadis il y avait yus, et d'autres qui, La vue du véritable Rex, qui, en l'attendant, allait après avoir traversé le fleuve à la nage, s'ébattaient sur et venait dans l'étroit vestibule au pied de l'escailer, ne l'autre bord; mais ce qu'il regardait surtout, avec un l'eût pas moins saisi et ne l'eût pas moins fait crier au attendrissement presque religieux, c'était ce tronc de miracle, si l'effet n'en avait pas été d'abord atténué saule oblique, où il se souvenait de s'être suspendu, bapar cette ingénieuse substitution; car le père lui-même lancé, tantôt se laissant aller au courant et tantôt у

ré. avait si peu changé que pas un de ceux qui l'avaient sistant, vis-à-vis de Rex, suspendu de même et qui se connu adolescent n'eût hésité à le reconnaître. Philippe balançait, au moment qu'ils avaient échangé les premiers songea :

mots de leur amitié. Et c'est un peu après que Tintagel On dirait qu'il a seulement un peu neigé sur les

avait révélé à Lefebvre son nom de féerie. sommets d'Olympie et sur l'Hermès de Praxitele... Puis, ils quittèrent le Parsons'pleasure, et suivant les

Naturellement, il ne fit point à Rex un compliment si sentiers couverts, ils allèrent vers la rive qui est en face poétique et si gênant à recevoir. Il lui dit simplement : de la Mésopotamie ; et ils s'arrêtèrent juste au lieu de Bonjour, Rex, comment allez-vous ?

la vocacion. Philippe crut revoir le simple et majestueux Et Tintagel, sans répondre, lui posa la même ques- tableau : Ashley Bell assis sur l'herbe, entre Tintagel

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