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Le plus cultivé de la terre, fut aussi le plus remarquable par ses athlètes. A présent que nous essayons d'offrir le même spectacle, vous nous donnez encore tort. Quelle bizarre manie d'auto-dénigrement !

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Au surplus, si l'on veut bien réfléchir, c'est la victoire de Carpentier qui aurait eu une importance capitale : a défaite n'en a aucune.

Le véritable vainqueur, a-t-on dit, c'est... la T. S. F. ! Soit! Eh bien! dans ce cas, que va-t-on faire pour Branly ?

On a prêté à Carpentier ce propos :

Si j'avais été vainqueur, j'aurais donné volontiers

la moitié de mon gain à des œuvres françaises ! Dempsey, entendant cela, aurait dit :

Bon, alors, c'est moi qui m'en charge !... Et il étudierait le moyen de nous donner un demimillion, qu'on pourrait parfaitement aiguiller, en effet, sur le laboratoire de la rue de Vaugirard.

Mme Curie, ayant besoin de radium, a dû accepter Laumône des Etats-Unis ; et certes elle a eu raison. Cependant, la République française ne pourrait-elle faire quelque chose, par elle-même, pour elle-même, attendre les charités hypothétiques de Dempsey ?

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sans

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Or, il ne s'agissait pas du boxeur, mais de M. Jules Carpentier, le savant ingénieur, qu'un hasard extrême it mourir, au moment même où son homonyme se faisait vaincre par Dempsey.

Rue de Magellan, au quatrième étage d'une maison moderne et très élégante, quelques journalistes étaient réunis, avides de recueillir les impressions de Mme Carpentier. On attendait en silence. Une grande lampe voilée d'un abat-jour de soie rose, éclairait discrètement. La sonnette ne cessait de retentir. Une soubrette allait, venait. Mme Carpentier paraissait, disparaissait. De temps en temps on entendait le timbre du téléphone, un bruit de voix, puis le silence se faisait à nouveau. On se serait cru à une veillée funèbre.

Tout à coup, quelqu'un sonne à la porte. On ouvre. On voit paraître une vieille dame, vêtue de noir, la figure cachée par une épaisse voilette. Derrière elle vient un monsieur qui tient dans une main son chapeau, dans l'autre un grand panier d'osier. Ils ont l'air très intimidés. La soubrette s'empresse, leur ouvre la porte du salon.

Ils passent, très gênés, saluent, s'excusent, appellent mademoiselle › la servante, et disparaissent dans le

salon...

Le père et la mère de Carpentier, eux aussi, sont venus aux nouvelles.

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Les leçons du mariage.

Comme elle ne pouvait plus dissimuler la crise, la Société Centrale des Banques de Province convoqua ses actionnaires en assemblée générale. Moins pauvre que la Banque Industrielle de Chine, la Société Centrale put obtenir des journaux de très beaux comptes rendus de cette séance ; à les en croire, le calme ne cessa de régner. On rendit hommage aux vains efforts des administrateurs ; bref, on se serait cru à la Chambre des députés le 31 juillet 1914.

Il y eut en réalité quelque tumulte. Un orateur véhément fit longuement le procès des directeurs et du conseil d'administration, et les accusa de n'avoir pris aucune précaution pour éviter la situation actuelle.

Une grosse voix s'éleva enfin du fond de la salle : « Des précautions ! Des précautions ! Dis donc un peu: t'es marié ?... T'as pris des précautions quand tu t'es marié, hein? Renseignements par-ci, renseignements par-là, et puis des promesses, et puis des contrats de mariage ? Eh bien ? après ?... Ça ne t'a pas empêché d'être c... ! »

Les comptes rendus officiels de la Société auraient bien dû rendre hommage à cet interrupteur dont le langage cru suspendit le discours accusateur et rétablit

le calme dans l'assemblée.

Secrets militaires.

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Nous contions l'autre jour comment, vers 1895-1896, il arrivait que l'on convoquât les attachés militaires étrangers à des expériences de canons que l'on cachait soigneusement aux officiers spécialistes de Bourges. Oyez encore ceci.

Aux grandes manœuvres du Poitou, vers la même époque, on sortit une batterie de 120 court Bacquet (c'est le fameux matériel du procès Dreyfus). Les pièces étaient cachées par des housses et un peloton de gendarmerie les accompagnait, avec mission d'em pêcher les curieux d'approcher lors de la mise en batterie.

Or, les gendarmes écartèrent soigneusement les offi ciers d'une batterie de 90 voisine. En revanche, un Anglais (dont il n'y a d'ailleurs pas lieu de suspecter les intentions) put examiner les pièces tout à loisir. Il est vrai qu'il accompagnait un parlementaire, membre de la Commission de l'armée.

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Nouvelles aventures d'Haroun-Al-Rachid.

Notre préfet de police a de la chance. L'une de ses premières rondes nocturnes lui a offert une noyade et un repêchage, sans compter le vol d'une paire de chaussures fait à sa barbe, tandis qu'il prodiguait ses encouragements au sauveteur.

Quand ils furent arrivés au commissariat, la jeune désespérée pleura sur son amour malheureux, puis le sauveteur sur la perte de ses bottines. Enfin, le commissaire interrogea le troisième personnage, qui déclara s'appeler Robert Leullier, et exercer la profession de préfet de police. Alors, dit la gazette, tous les agents du poste se levèrent et firent le salut militaire.

Ce que la gazette ne dit pas, c'est qu'avant de témoigner leur respect, le commissaire, les agents et les autres acteurs du drame témoignèrent quelque méfiance, et que le préfet dut prouver son identité par des papiers.

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Maintenant qu'un ministre artiste et lettré règne sur les Beaux-Arts et sur l'Instruction publique, on aime à raconter, dans la maison, toutes les aventures de M. Honnorat, ce brave homme à qui manquait un peu de compétence.

On rappelle ce discours prononcé après l'armistice où le ministre, pour employer un terme précieux, invita les convives « à sabrer le champagne à la gloire des armées ».

On rit aussi d'une bonne farce dont M. Honnorat fut l'innocente victime. Un jour, dans les couloirs de la Chambre, un député s'approcha de lui et lui confia, avec de grands airs mystérieux, qu'il y avait eu des vols importants à la bibliothèque d'Autun. Le soir même, le ministre appela M. Pol Neveu, et lui ordonna de faire immédiatement une enquête sur les vols d'Autun. M. Pol Neveu répondit qu'il partirait le surlendemain.

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M. de Lamarzelle ayant proposé de réglementer le plaisir et l'art, les étudiants se sont révoltés et, comme au bon vieux temps, ont cité le sénateur « à comparaître devant la Cour du Quatier Latin ».

L'inculpé faisant défaut, les étudiants lui désignè rent d'office un avocat qui dépensa des trésors d'éloquence en pure perte.

Le sénateur fut condamné ! A quoi ? A épouser l'éternelle beauté du plus national de nos théâtres, celle qui a prouvé qu'elle non plus ne comprenait pas la plaisanterie.

Et le mariage pour rire eut lieu, en effigie. M. de Lamarzelle en rira. Mais Elle ?...

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Ce que conserve le Conservatoire.

Les concours de cette année n'ont rien révélé de bien neuf ; et les défauts de nos jeunes artistes ressemblent

Non, pas après-demain, dit le ministre, mais demain. Il n'y a pas un moment à perdre. M. Pol Neveu partit pour Autun, trouva la bibliothèque dans une paix profonde, secoua l'archiviste qui dor-beaucoup à ceux qu'on déplore depuis vingt ans. On mait sur son bureau, et lui déclara l'objet de sa visite.

En effet, répondit l'archiviste en se frottant les yeux, il y a bien eu des vols ici. Ils sont célèbres dans l'histoire littéraire. Vous connaissez bien l'affaire Libri? elle date du milieu du dernier siècle!...

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Si M. Pierre Benoit a semé son Lac Salé de phrases qui ne sont pas de lui, il en est une qu'il n'y a même pas transcrite de sa main.

Dans l'un des premiers chapitres, le Père d'Exiles entre dans la chambre où Mrs. Lee prend son bain ; un paravent les sépare. Or ce paravent n'est point l'ouvrage de M. Pierre Benoit, mais bien de M. Marcel Prévost. Cet excellent élève des jésuites, en lisant les bonnes feuilles du roman, craignit qu'on ne fût choqué par l'excessive liberté du Père d'Exiles. Il suggéra l'idée d'un paravent. M. Pierre Benoit ne voulut rien entendre. Et comme Marcel Prévost insistait, il lui laissa le soin de corriger lui-même l'épreuve, afin qu'il pût placer à sa fantaisie le paravent qui lui semblait nécessaire.

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espère toujours une réforme. Mais la maison est dure à la détente. Elle semble avoir à cœur de « conserver >>> toutes les mauvaises méthodes.

Le titre de « conservatoire » ne veut cependant pas dire maison de la routine, mais maison « qui conserve l'art ». Que ne le conserve-t-elle dans une éternelle jeunesse ?...

Le mot a d'ailleurs un sens plus ancien, et qui ne manque pas de piquant aujourd'hui. On entendait par ‹‹ conservatoire >> une maison où l'on retirait des orphelins, des filles et des femmes, pour les préserver de la débauche...

Que les temps sont changés !...

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La loi anglaise exige, tout comme en France, que, lors du recensement, chaque habitant désigne, dans une case spéciale, les gens qui ont couché sous son toit dans la nuit.

A Bristol, le lendemain du recensement, un conseiller municipal vit avec surprise pénétrer dans son bureau un jeune homme qui lui remit une cuiller en argent et lui tint ce discours :

Faites-moi arrêter, Monsieur! Hier soir, je suis entré chez vous pour voler. J'ai pris cette cuiller; puis-je me suis endormi sous un canapé. Mais je me suis réveillé assez tôt pour déguerpir sans avoir été aperçu. J'ai eu un remords: je suis revenu. Reprenez votre bien et livrezmoi à la justice!

Le conseiller municipal ému, répondit par un sermon sur l'honnêteté, offrit à déjeuner au cambrioleur repentant, lui remit 5 shillings et le renvoya.

Mais l'histoire ne se termine pas là. Des fonctionnaires ont eu vent de l'affaire et prétendent que le conseiller

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municipal est passible d'une amende: Il n'a pas porté sur la feuille de recensement le nom d'une personne qui, à sa connaissance, avait passé la nuit sous son toit.

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Il n'y a pas si longtemps que les recensements sont autorisés en Angleterre. Lorsque, en 1753, il fut proposé d'établir une statistique des habitants du Royaume-Uni, le Parlement rejeta cette proposition comme blasphématoire. N'était-il pas écrit dans la Bible que David fut cruellement puni par Dieu pour ce crime-là?

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Or Satan... incita David à faire le dénombrement d'Israël... Cette affaire déplut à Dieu qui frappa Israël. Et David dit à Dieu : « J'ai commis un grand péché en faisant cela! » Et l'Eternel dit à David : « Accepte ou trois années de famine ou trois mois de défaites devant tes adversaires... ou pendant trois jours, l'épée de l'Eternel et la peste dans le pays. » (Ce fut la dernière solution que préféra David.) « Alors l'Eternel envoya la peste sur Israël e til tomba soixante et dix mille hommes d'Israël. »

En. 1800, le Parlement anglais qui redoutait moins, sans doute, une vengeance de l'Eternel, accepta l'idée d'un recensement qui eut lieu l'année suivante.

Puisse le ciel clément se garder encore d'envoyer à nos voisins la famine, la défaite ou la peste!

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Un député américain vient de proposer à la Chambre des représentants une loi interdisant aux femmes de fumer. Celles qui seraient surprises pour la première fois paieraient une amende de vingt dollars; si elles récidivaient, l'amende serait de 100 dollars par cigarette.

Si par hasard cette loi passait, elle s'ajouterait à une liste déjà longue de lois puritaines : lois contre le baiser, contre le port de la poudre de riz et du rouge, lois contre les boucles d'oreilles, lois fixant la longueur des jupes de femmes et la hauteur de leurs talons..

Il est juste d'ajouter que la plupart de ces lois sont rarement appliquées. De temps en temps, la police rappelle par un exemple leur existence: c'est ainsi qu'un même dimanche on arrêta, il n'y a pas bien longtemps, deux cents personnes qui avaient pris part à des jeux, deux commerçants qui mettaient à jour leurs livres de compte, un camelot qui avait vendu un morceau de chewing-gum, et un rentier qui peignait la barrière de sa

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de hâte fébrile dans les débats, c'est la question des vacances. Quand part-on ?

Il semble au premier abord à juger sur l'apparence

que, si la décision appartenait à la Chambre ellemême, nous risquerions fort de ne pas aller en vacances cette année. Mais clore la session est une attribution gouvernementale, et il faudra bon gré mal gré que, le décret lu, les députés, comme dit notre ami Bellet. << aillent

aux champs ».

Certains manifestent, de cette éventualité inéluctable, une grande fureur réelle ou feinte.

Les uns ne veulent pas se séparer sans avoir dit au ministère des choses désagréables, et, qui sait, sans l'avoir peut-être renversé.

D'autres, sachant que l'affaire ne dépend point d'eux, veulent se donner l'allure d'un stoïcisme facile, et prétendent qu'on ne les arrachera à leur labeur que par la violence: peut-être ceux-là seraient-ils moins héroïques dans leurs déclarations si on ne prétendait pas leur forcer la main.

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Certains, qui sont de bonne foi, prétendent liquider tout le travail qui leur incombe, et recréer le monde en huit jours.

Certains, enfin, plus philosophes, bouclent leurs malles sans rien dire. Et on ne les revoit plus. Ceux-là, ce sont les sages.

« Sus aux vacances ! » est un mot d'ordre. « Les vacances, dit un agité, passeront-elles avant la chose publique ? » Et un héros ajoute : « Les bains de mer atten

dront. >>>

C'est vite dit. Il ne s'agit pas de vacances, n'en déplaise aux héros. Evidemment, un homme qui se prive volontairement de vacances est un homme que l'électeur peut considérer avec respect et reconnaissance. Mais il n'y a point de vacances. Il y a une session à clore. Si le besoin s'en fait sentir, on convoquera, en octobre une seconde session, dite « extraordinaire ». Mais la session ordinaire doit être close par décret. Et ceux qui ne veulent pas prendre de vacances doivent renoncer à ce vocable inexact et dire simplement qu'ils veulent instaurer la « permanence de la session ». Session permanente ! Est-ce tant souhaitable?

C'était la méthode des grands ancêtres. La Convention ne connaissait pas les vacances, ni le dimanche. On siégeait ferme, de l'aube au crépuscule, et l'on s'en allait, après un dîner sur le pouce, prendre une tournée supplémentaire d'éloquence patriotique aux Jacobins. Le pays s'en trouvait-il mieux ? Peut-être, étant données les circonstances. Mais on ne saurait dire qu'il travaillait dans le calme. L'agitation de la Convention et des Jacobins passait sur la place publique, et la France n'eût pas supporté longtemps ce régime dangereux pour les nerfs et la raison. Je ne crois pas que personne songe à le

rétablir.

Faire beaucoup de travail, — en gros, du travail qui se voit et s'entend, c'est de la plus mauvaise démagogie. La Chambre n'est pas une usine, où les travailleurs sont payés à l'heure ou aux pièces. Le char de l'Etat a besoin

comme tous les chars d'être remisé quelquefois et la chaudière du vaisseau a besoin, comme toutes les chaudières, de ne point être surchauffée sans trève.

Non seulement il est utile que les législateurs se rafraîchissent << aux champs » et échappent un peu à la trépidation des séances et à la fièvre des couloirs, mais le pays, lui aussi, veut respirer un peu, et ne pas attendre sans cesse la réalisation d'une législation sans cesse en travail, pleine de promesses... et de déception. Et le gouvernement même, à qui il n'est pas mauvais de demander, de temps en temps, son bilan, doit pouvoir parfois travailler dans le calme et le sang-froid sans être, pendant quelques semaines, sous le coup de ques tions improvisées ou insidieuses.

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Sanctions alliées et politique allemande

Les Compagnons de l'Intelligence ont bien raison de restaurer notre culte pour la Déesse qui porte dans ses yeux mauves le reflet des eaux méditerranéennes. Nous l'avons trop oubliée, -- cette Minerve tutélaire. Jamais, les dons qu'elle accorde à ses fidèles, l'invention et la précision, l'ordre et la lumière, l'abstraction et la sérénité n'ont été plus nécessaires. Il ne faut pas que la France, moins riche en souvenirs, soit plus pauvre en idées. Elle doit, aujourd'hui, pour gagner la paix, dépenser autant d'intelligence qu'elle a, jadis, versé de sang pour ne point perdre la guerre. Aussi, je voudrais que des méthodes nouvelles permissent à tous ceux qui, de près ou de loin, touchent à l'exécutif de boucler leur téléphone et leur porte, d'oublier les fumées de l'encens et celles de l'éloquence —- de s'isoler pour penser. Quel est aujourd'hui le titulaire d'une portefeuille ou le chef d'un service qui peut trouver, tous les jours, une heure pour réfléchir dans la solitude et en silence ? Pas un. Cette impossibilité explique bien des impuissances.

J'en veux pour preuve les indications que le quai d'Orsay a données à la presse officieuse, sur l'attitude que prendra la France au cours du prochain débat sur le maintien des sanctions alliées.

Les députés, membres de la Commission des Affaires étrangères, en avaient conseillé une différente.

Le 3 mars dernier, les Alliés décidèrent de frapper les exportations allemandes d'un prélèvement fiscal, d'établir sur le Rhin un cordon douanier et d'occuper les ports fluviaux de la Rühr, comme sanction du fait que

le gouvernement allemand avait manqué plusieurs fois à l'exécution des stipulations les plus importantes du Traité de Versailles: le jugement des coupables, le désarmement, le paiement en espèces ou en nature de 20 milliards de marks-or

au milieu des ovations des étudiants de Leipzig. Les | celier de la soumission à plat ventre », écrit un ex-courti

députés français, cinglés par ćet odieux arrêt, refusent de croire à la rénovation immédiate de la mentalité allemande.

Ce sentiment est partagé par la Commission bolcheviste de Berlin. Dans un rapport secret destiné à Moscou et qu'a publié le Vorwaerts (21 juin), les commissaires prévoient la faillite du mouvement révolutionnaire et la « restauration de l'ancien régime ». « L'Allemagne retourne définitivement à l'ornière de la vie quotidienne... Si quelque événement extérieur ne vient pas modifier la situation, elle sera bientôt soumise à une poigne nationaliste, qui tiendra en esclavage le prolétariat et, tout comme auparavant menacera la liberté de l'univers. » Lisez plutôt les discours prononcés le 20 juin à Dresde et à Leipzig par le comte Westarp, leader du parti national allemand.

Et la Commission des affaires extérieures, lorsqu'elle subordonne la levée même partielle des sanctions alliées à l'exécution totale des conditions posées, fait preuve de logique et acte de prudence.

san, le comte Westarp, dans la Kreuzzeitung. « Un irresponsable, un jongleur dépourvu de toute sincérité. », proclame la Deutsche Tageszeitung, qui s'y connaît (20 juin). Une tutelle déshonorante », conclut le Tag, qui a le

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sens de l'honneur.

Non. Le vrai péril pour cet honnête homme consiste dans le fait qu'il n'a jamais eu de majorité et que sa coalition craque déjà. Le centre est tiraillé entre deux tendances, droite et gauche. Cette divergence revêt la forme d'un conflit personnel entre le Dr Wirth et M. Stegerwald, le président du cabinet prussien. Il cause l'espoir des modérés, partisans d'un bloc bourgeois. Ses récentes déclarations à la Germania, son attitude vis-àvis du remaniement ministériel, une note menaçante insérée sous son inspiration, dans Der Deutsche (23 juin)

sont là pour en témoigner. Les démocrates radicaux sont aussi divisés que les centristes catholiques. Dans l'Acht-Uhr Abendblatt du 22 juin, un député démocrate, Gothein, déclare que le problème de la HauteSilésie et la durée du cabinet Wirth sont solidaires. Si l'espoir d'un succès allemand s'évanouissait, le ministère s'évanouirait également. Le bloc bourgeois s'est constitue le 27 juin sur la question du rétablissement du pouvoir Il va sans dire que cette politique, dont l'énergie monarchique. Nationalistes, Populistes, Centristes et

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prévoyante risquerait de surprendre doublement la mansuétude anglaise, n'est pas celle que le quai d'Orsay a confiée à son interprète officieux, mon vieil ami Philippe Millet. Il a, du mieux qu'il a pu, justifié une transaction, dont l'ingéniosité n'apparaît point avec une clarté saisissante.

:

Maintenir provisoirement les sanctions militaires l'occupation des ports fluviaux de la Ruhr. Pourquoi ? Elle coûte cher. Elle ne rapporte rien. Elle excite les esprits. Si, dans un avenir prochain, une imprudence allemande rendait nécessaire cette réoccupation, l'opération ne serait pas plus déplorable qu'elle n'a été en mars dernier. Un coup de téléphone du maréchal Foch suffira pour alerter des troupes qui doivent rester sur le « qui vive » et déployer une mobilité croissante.

Supprimer immédiatement les sanctions économiques : la perception des douanes occidentales et la barrière des douanes rhénanes. Pourquoi ? Les mesures économiques, que M. Paul Tirard a su faire approuver par le quai d'Orsay et accepter par les commissaires alliés, ne coûtent rien aux Alliés. Elles rapportent un revenu intéressant. Elles rétablissent un courant d'échanges. Elles allègent une odieuse servitude. Pour les réaliser, il fallut prendre du temps et trouver un personnel. Si, après avoir restitué au Reich le double gage, les Alliés voulaient le reprendre, l'opération serait moins facile et plus longue que la réoccupation de Dusseldorf et de Duisbourg. J'entends bien et M. Ph. Millet insiste sur le fait que des licences d'importation, accordées avec plus de facilité par l'administration interalliée que par le commissariat allemand, risqueraient, en diminuant la valeur du mark, de réduire la valeur des taxes dont M. Wirth affecte le rendement au paiement des annuités fixes.

Admettons que ce risque soit justifié et que cette baisse du mark ne puisse constituer une barrière contre les importations. En tout cas les impôts draconiens ne sont point encore votés et la stabilité ministérielle n'est pas encore assurée.

Ce n'est pas tant la grande colère des nationalistes qui abrégera l'existence du chancelier Wirth. Dieu sait cependant si le courage dont il a fait preuve en flétrissant, le 17 juin, devant le Reichstag, la propagande pangermaniste et en proclamant, le 19, à Essen, devant les ouvriers de la Ligue allemande des Syndicats et des Organisations chrétiennes, que l'Allemagne peut et doit exécuter les clauses militaires et financières de l'ultimatum, lui a valu d'injures et de grossièretés. « Le chan

Démocrates se sont trouvés d'accord pour trouver que les couleurs de Barberousse ne valaient pas celles des Hohenzollern. Ils n'ont été battus que par 126 voix contre 120 et 5 abstentions; bien que le chancelier et plusieurs ministres assistassent à la séance, aucun d'entre eux n'osa défendre ce timide symbole d'une république très impériale.

Légitimement inquiet, le Dr Wirth se retourne vers les Alliés et, par l'intermédiaire de la Neue Freie Presse (25 juin), leur rappelle que « l'Allemagne démocratique a besoin d'une impulsion », certes, mande de donner cette impulsion. »

et leur d

La République française, si elle veut avoir une politique allemande, se doit de répondre à cet appel.

A dire vrai, elle l'a déjà fait. Et je regrette quie le gouvernement n'ait pas indiqué, dans une note au Reich et aux Alliés, la signification qu'il importe d'a ttacher à la démobilisation de la classe 1919. La France a établi ainsi que, quoi qu'en aient dit les ennemis du dedans et du dehors, l'occupation de la Ruhr n'était pas un but, mais un moyen. Mais puisque le Quai d'Orsay n'a pas su souligner le sens diplomatique de ce geste pacifiique, il doit, pour consolider porairement le cabinet Wirth, se trouver un centre.

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Il prendra l'initiative de proposer aux Alliés le retrait des sanctions militaires. Mais l'évacuation restera subordonnée à l'existence d'un ministère démocratique. Et la note alliée indiquera que si il est renversé, les ports fluviaux de la Reich seront automatiquement réoccupés.

Dans le même document, la levée des sanctions économiques sera promise. Le contrôle des douanes occiden tales sera automatiquement supprimé le jour où auront été votés, par le Reichstag, les impôts nécessaires pour assurer le rétablissement de l'équilibre budgétaire et le paiement des annuités fixes. La suppression des douanes rhénanes restera subordonnée à l'ouverture des négociations germano-franco-belges et à la reprise de l'œuvre commencée le 22 août 1919, au châtiment des coupables et au rétablissement des transactions, à la détente des esprits et à l'affranchissement des Rhénans.

Cette politique allemande est-elle réalisable? La République allemande veut-elle vivre et peut-elle durer? Pour répondre, il faut aller écouter les rumeurs qui viennent des profondeurs de la Germanie jusqu'aux rives du Rhin. JACQUES BARDOUX.

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