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Au pays des Muses.

Les deux Manon. Nous avons conté l'autre jour l'aventure d'un artilleur qui, pour avoir chanté pendant la guerre dans une rue de Liancourt « Manon, voici le soleil », avait reçu force liqueurs et cigarettes de la fille de Massenet, qui l'avait entendu de sa fenêtre.

Cet innocent écho mit dans une grande colère aux Champs-Elysées les ombres de deux musiciens.

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Quoi s'écria Massenet, l'on prétend défendre ma mémoire contre ceux qui l'oublient, et l'on commence par me faire un titre de gloire d'une petite Manon qui n'est pas la mienne.

Et cependant Delmet allait déposer au dieu des enfers contre Massenet une plainte pour plagiat posthume.

Evidemment, ce n'était point le grand air de Delmet qu'avait chanté l'artilleur, mais bien: Adieu, chère petite table, ou tout autre air que vous voudrez; car vous connaissez certainement tous les airs de Manon. Et si vous ne les connaissez pas. vous n'êtes pas digne de vivre..

Confondre ainsi deux Manons
Vraiment c'est impardonnable.
Ah! mon Dieu ! qu'en dira-t-on ?...
Dites que c'est excusable:
Car Massenet et Delmet
Etaient deux noms qui rimaient.

Tous deux sont d'un temps aimable
Mais qui nous parait vieillot :

Leur musique vénérable

Dort dans un même tombeau.

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Charlie Chaplin vient de recevoir de l'Europe un accueil comme elle n'en réserve ni aux rois ni aux hommes de génie,

Ce héros, cependant, si l'on en croit un de ses anciens instituteurs, ne promettait pas grand'chose dans son enfance il avait bon caractère ; il était plein d'entrain; mais ce n'était pas du tout un garçon intelligent. Sa faiblesse en artihmétique était stupéfiante...

Aujourd'hui qu'il a tant de millions, il peut heureusement se payer un secrétaire pour les comptes.

Aujourd'hui que sa renonmée s'étend sur toute la surface du globe, Charlie Chaplin est un homme intelligent, et qui a des lettres. Depuis son arrivée, journalistes, photographes, opérateurs de cinémas se sont élancés sur lui, l'ont interrogé, photographié, tourné sans répit ; on l'a questionné sur ses projets, ses opinions, ses goûts. Et c'est ainsi que nous avons su que de tous les romanciers celui qu'il préfère est Anatole France.

Il partage cette préférence avec un homme illustre beaucoup moins illustre que le roi de l'écran, mais illus tre pourtant, M. Lloyd George lui-même. Le Premier anglais a emporté, paraît-il, à peu près toutes les œuvres du maître à Gairloch où il villégiature, et comme il pleut beaucoup, il passe une grande partie de ses journées à savourer, autant qu'on peut la savourer en langue anglaise, la philosophie de M. Bergeret.

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sea-front-go-with-the-times-girl », la demoiselle des plages « qui marche-avec-son-temps », celle qui « a encore moins en elle que sur elle. »>

Voilà qui nous rappelle les conférences de Mgr Bolo, et aussi les sermons du P. Ollivier lorsqu'il interpellait les dames qui arrivaient en retard à l'église. « De quoi avez-vous donc déjeuné pour arriver si tard ? » fulminait-il un jour au moment où l'une de ses pénitentes. gagnait sa chaise. Et celle-ci de lui répondre d'une voix claire, sans être intimidée par la majesté de Notre-Dame : « D'un croissant d'un sou et d'une tasse de lait, mon père... » Ceci se passait au temps où il y avant des croissants d'un sou...

Le retour des huîtres.

Voici les mois en 7. Les huîtres reparaissent en dépit de la maladie mortelle dont on dit leur race menacée. Il serait dommage qu'elle disparût; car cet animal n'est pas seulement le prélude heureux de toutes les ripailles; il a de tout temps fourni de bons mots, témoin celui d'une actrice que vous connaissez bien.

Un vieux beau, qui manquait d'esprit, la courtisait assidûment, et quoiqu'il ne fût point payé de retour, elle ne pouvait le décourager. Un jour, excédée, elle s'enferma à double tour dans sa loge. frappe à la porte :

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L'amoureux

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Décidément, ces braves nègres sont pleins d'humour et n'ont pas d'idées noires. Ils ont tenu leur congrès, devinez où ? à Paris, rue Blanche !

Ce n'est pas tout. Au congrès, comme on discutait les théories d'un certain M. Marcus Garvey, qui prétend isoler la race noire et donner « l'Afrique aux Africains », M. Gratien Candace tint ce langage délicieux : « Si vous me demandiez de retourner en Afrique pour rester nègre, je préférerais rester Français >>.

En tous cas, les congressistes n'ont pas voulu être « rouges » et ils ont repoussé les propositions d'action extrémiste soumises à leurs délibérations.

Une dispute.

Depuis que l'Opinion a commencé de publier l'enquête de notre collaborateur Paul Heuzé sur l'état présent des sciences psychiques, les bureaux du journal sont assiégés par les curieux qui viennent compléter la collection par les premiers chapitres, qui leur manquent

L'autre jour, deux messieurs, en attendant qu'on les servît, engagèrent une conversation très courtoise :

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Amendes (Suite).

la place, la maison « A Jean Bart », a vu s'installer près d'elle « Au nouveau Jean Bart ».

Cela ne vaut pas encore cette modeste ville du Nord où, un tout petit hôtel du Lion d'Or s'étant établi dans une rue étroite, un café s'est ouvert en face sous l'enseigne : « A la belle vue du Lion d'Or ».

Choses de la foire.

On ne rencontre plus guère que sur les routes des villages la voiture bariolée du charlatan. Le char du légendaire Mangin devrait en être au musée Carnavalet le témoignage rétrospectif. Cependant, l'on voyait l'autre jour à la porte de Paris, un jeune camelot qui faisait son boniment en taxi découvert, le moteur au ralenti.

Regardez et écoutez. Il a certes la tradition du bagout enjôleur par la volubilité des mots. Et il joue en habile prestidigitateur des objets dont il veut exciter notre convoitise. Ce sont parures en or, un or évidemment relatif. Si c'était en fer-blanc, ce serait plus cher, affirme-t-il. L'argument n'est-il pas irrésistible?

Il faut qu'il le soit puisque déjà quelques mains

Donc l'amende de vingt sous qui vous est infligée s'érigent tortillant des billets dans les doigts crispés

pour avoir battu vos tapis après neuf heures se traduit par un compte de vingt et un francs trente.

Voici un nouvel exemple pour illustrer ce chapitre de la « justice gratuite »>.

Un monsieur, qui voulait acheter une trottinette, demande à l'essayer pendant vingt-quatre heures, sort sans s'être muni de la « plaque » réglementaire, se fait surprendre par un agent et se voit condamner par le tribunal de simple police à 2 francs d'amende.

Il reçoit un avertissement d'avoir à payer la somme de 18 fr. 30.

Ensuite, il reçoit la visite d'un commis des contributions indirectes, qui lui pose de nombreuses questions utiles à l'enquête dont son administration la chargé au sujet du délit qui lui demande, par exemple, s'il est marié et père de famille. S'il interroge ce courtois fonctionnaire, pour savoir où conduira cette enquête, attendu qu'il a été déjà jugé et condamné, ce brave homme lui répondra: « C'est sans doute en vue d'une seconde contravention... >>

Et l'affaire suit et resuit son cours, comme toutes les affaires...

La noce, la douche et les augures

Un char-à-bancs s'arrêtait la semaine dernière devant un restaurant des environs de Paris célèbre par ses repas pour noces et banquets. C'était précisément une noce qui venait festoyer.

Parmi les rires et le brouhaha qui sont de tradition, la mariée apparut sur le marchepied, sa robe et son long voile ramassés dans sa main gauche et s'aidant de sa main droite pour descendre.

Quel dieu malin voulut qu'elle posât le pied sur un tuyau qui traîtreusement la guettait ?

Ausitôt, un jet d'eau s'éleva, entourant la mariée, cependant que les invités regardaient avec stupeur ce spectacle imprévu.

On emmena la mariée et, tandis que sa robe blanche séchait, enveloppée dans un grand manteau, elle s'enfuit chez un coiffeur voisin, laissant les gens de la noce tirer les augures du fâcheux accident d'une douche froide le jour des noces...

Notes de voyage.

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Sur la place Jean-Bart, à Dunkerque, trois cafés voisins étalent des enseignes rivales: Café du Soleil, Café de la Lune, puis Café de l'Eclipse. De l'autre côté de

du désir de tenir la merveilleuse et reluisante marchandise promise en échange. Cependant le camelot n'a pas encore énoncé le prix.

Or, si vous ne songez pas précisément en ce moment à la vie chère, si vous êtes en proie à des souvenirs monétaires de votre enfance, ne serez-vous pas stupéfait d'entendre: cinq francs; un simple billet de cinq francs? Et vous murmurerez: il n'en vendra pas une seule...

Cependant constatez qu'aussitôt beaucoup d'autres mains se sont levées...

L'impôt sur le revenu à Vienne.

Les policiers de Vienne semblent être devenus tout à coup féroces. De temps en temps, ils se livrent à des raids énergiques sur les cafés que fréquentent les profiteurs aux environs de la Bourse. C'est ce qu'on nomme des razzias. Toutes les issues sont soudain gardées par des agents qui forcent les consommateurs à vider leurs poches. Quiconque possède sur lui de grosses sommes et ne peut en indiquer immédiatement la provenance est conduit au poste où l'on s'empresse de corser sa feuille d'impôt sur le revenu. Aussi, pendant les razzias, les consommateurs s'emploient de leur mieux à jeter sous les tables ou à dissimuler derrière les rideaux d'épaisses liasses de billets de banque.

L'énergie de la police ne se borne d'ailleurs pas là. menacés d'une Les propriétaires de dancings sont amende de 200.000 couronnes ou de six mois d'emprisonnement s'ils permettent à leurs visiteurs, venus pour assister aux entrechats de danseurs professionnels, de participer à la danse. Dans les cabarets, les couplets sont plus sévèrement censurés que sous l'ancienne monarchie, et les robes même des artistes y sont mesurées par la police.

Vienne va-t-elle devenir la ville austère de l'Europe?

CORRESPONDANCE

Nous avons reçu la lettre suivante :

Mon cher confrère,

L'Opinion a publié, dans son numéro du 3 septembre, un écho où je suis mis assez perfidement en cause. L'échotier qui l'a rédigé commet pour le moins trois erreurs.

Il n'est pas question dans la Captive de Français et d'Allemands. Les pays où l'action de la pièce se passe sont indéterminés, à dessein. La Captive n'est pas une pièce sur la

guerre de 1914-1920, mais une pièce sur la guerre, simplement. Et l'on n'a pas plus le droit de dire qu'elle met en scène les Français et les Allemands que les Anglais et les Boers, les Russes et les Japonais, les Bulgares et les Turcs., D'autre part, « la thèse » primaire et simpliste que l'échotier me prête n'est pas celle qui est exposée dans la Captive, si toutefois il est permis d'appeler thèse le développement pathétique d'un conflit de tragédie. L'échotier ne connaît pas la Captive; il en dénature le texte.

Il n'hésite pas, également, à dénaturer les faits, en ce qui concerne l'affaire cinématographique dont il parle. Je n'ai jamais été en rapports avec une maison cinématographique allemande. Aucune maison allemande ne m'a commandé de film. J'ai cédé à M. Camille Gorde le droit de mettre en scène et d'exploiter un scénario dont je suis l'auteur. M. Gorde m'a demandé si je voyais un inconvénient à ce que le film fût tourné en Allemagne, où les frais de fabrication sont moins élevés qu'ici. La France apporterait le film, le metteur en scène et les artistes; l'Allemand mettrait à notre disposition son outillage. J'ai donné mon approbation à cette tentative. Je n'ai pas la sottise de suspecter le patriotisme de nos commerçants ou de nos industriels qui cherchent Cactuellement à concurrencer sur le marché allemand les Anglais ou les Américains, plus pratiques que nous et qui

nous ont devancé outre-Rhin. Voilà de la bonne et fructueuse guerre J'ai pensé que M. Gorde allait servir utilement làbas les intérêts du film français et ceux de la France. Je ne me trompais pas. A Berlin, l'appui officieux français n'a pas manqué à M. Gorde. Il s'est heurté, par contre, à l'hostilité des milieux officiels allemands. Le gouvernement allemand, qui a barre sur toutes les entreprises industrielles ou financières du Reich, a fait pression sur la Decla-Bioscop (c'est le nom de la firme allemande) pour que le projet contraire à l'intérêt allemand fût écarté. Après un mois de pourparlers, la Decla a fait savoir télégraphiquement à M. Gorde que « l'état des relations entre les deux pays ne permettait pas encore cette collaboration >>.

Mon rôle dans cette affaire s'est borné à celui d'un specta

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Nous avions dit : « Français, Allemands, vous avez combattu cinq ans ». Supprimons « Français, Allemands » comme M. Méré le souhaite. Donc « Vous avez combattu cinq ans. Que votre cause fût juste ou injuste, que votre guerre fût de conquête ou de défense, qu'importe ? Il n'existe plus que deux peuples frères parce qu'ils ont également souffert... » M. Méré nous dit que ce n'est point là la thèse de sa pièce, attendu qu'il n'y soutient pas de thèse. Mais avons-nous parlé de thèse? Pas une fois ce mot n'est imprimé dans notre écho. Nous prétendions donner le sens de la pièce de M. Méré. Ceux qui l'ont vue (et il y a tout de même quelques personnes) pourront attester que nous ne nous sommes pas trompés. Nous ajoutions : « Aussi l'on ne s'étonne guère qu'une maison cinématographique allemande ait commandé à M. Charles Méré le livret d'un film qui sera tourné à Nenbalaberg, et que M. Camille Gorde doit mettre en scène. »

M. Méré nous accuse de « ne pas hésiter à dénaturer les faits ». En quoi ? Aucune maison allemande ne lui a commandé de film, paraît-il. C'est fort vraisemblable. M. Méré, en effet, n'est pas de ces auteurs à qui les maisons soucieuses de leurs intérêts commandent des films. Reconnaissons donc ici notre erreur. Aucune maison allemande n'a commandé de film à M. Méré. Seulement il a « cédé à M. C. Gorde le droit de mettre en scène et d'exploiter un film dont il est l'auteur »>. M. Gorde a demandé à M. Méré la permission de tourner ce film en Allemagne. M. Méré a dit à M. Gorde: bravo! Corrigeons donc la fin de notre écho comme nous en avons corrigé le début, conformément aux explications de M. Méré et

nous aurons :

« Aussi l'on ne s'étonne guère que M. Charles Méré ait accordé à M. Camille Gorde la permission de tourner à Neubalaberg un livret de film dont il est l'auteur. Malheureuse

ment, les Allemands ont infligé à M. Méré ce camouflet : ils lui ont, comme il dit, « fait savoir télégraphiquement que l'état des relations entre les deux pays ne permettait pas encore cette collaboration. »

Nous maintenons ce texte rectifié.

Affaires Extérieures

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La négociation financière: Son triple péril J'aime mieux ne pas avoir été à la place de M. Paul Doumer, lorsque le vendredi 9 septembre, il est venu frapper à la porte du chancelier de l'Echiquier. Je sais bien l'agence Havas nous l'a appris et le correspondant diplomatique du Daily Telegraph nous l'a confirmé que sir Robert Horne accueillit son confrère argentier avec une parfaite courtoisie et fit ajouter, dans le communiqué, le mot « amitié », qui avait disparu. Cette affabilité n'a pas dû laisser beaucoup d'espoir à M. Paul Doumer, s'il en avait encore. Un Anglais de bonne souche est toujours aimable, quand il a conclu une bonne affaire et lorsqu'il est résolu à en sauvegarder les bénéfices. Le collaborateur du Foreign Office, qui écrit dans le Daily Telegraph, a bien soin d'écarter, sur ce point, toute illusion:

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«Si les conversations ultérieures entre ces deux pays et leurs alliés italiens et belges aucune conférence formelle soit de premiers ministres, soit même de ministre des finances, n'est actuellement envisagée sont dirigées dans le même esprit où l'ont été les débats d'hier, il se peut qu'on arrive éventuellement à retoucher l'accord si discuté sur des points de moindre importance et à satisfaire, ou plutôt à mécontenter, dans une proportion égale, toutes les parties en cause. Mais on aurait tort de supposer qu'une pareille cordialité, quelque bienvenue qu'elle soit, et bien qu'elle puisse être de quelque secours, puisse impliquer que des résultats concrets ont été obtenus à la suite des discussions d'hier. »

Voici une note, dont la précision ne laisse rien à désirer. L'engrenage dans lequel la France s'est laissée prendre, ne sera point desserré d'un cran. Cette négo ciation financière pèse d'un poids qui croît avec la régularité du pressoir solidement vissé la France ne peut en sortir qu'appauvrie, affaiblie et isolée.

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Si le cabinet a été unanime à croire qu'il était possible, après des semaines de réflexion, d'obtenir la révision totale d'un accord signé, le 13 août, par le ministre des finances, avec l'approbation du président du conseil, cet espoir révèle, chez les divers membres de notre Exécutif, une ignorance dangereuse des réalités diplomatiques. Une signature, même sous réserve d'une approbation, lie jusqu'à un certain point. Elle équivaut à l'engagement partiel. Elle restreint la liberté d'action. J'entends bien qu'il sera toujours difficile pour des parlementaires de répondre par un non sec, précis, définitif : instinctivement, inconsciemment, par habitude autant que par conviction, ils chercheront toujours à concilier et à transiger. Et c'est précisément la raison pour laquelle ils sont moins préparés que d'autres à négocier directement une affaire diplomatique, surtout avec des partenaires anglais. Nos voisins sont moins irrités par une réserve silencieuse et un non brutal, que par de longues explications et des oui hypothétiques. Et avec raison. Une parole n'a de valeur que si elle est rare. L'homme qui sait refuser, est aussi celui qui sait tenir.

Certes, je comprends l'émoi avec lequel des patriotes et des juristes ont appris qu'il serait possible de compenser, partiellement, des paiements en espèces par la

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livraison d'un gage minier, dont la valeur exacte n'est point connue et dont la réalisation totale est impossible. Mais les textes sont formels. Il convient de les rappeler. L'article 243 du traité réservait expressément certains soldes définitifs, « les sommes dues à l'Allemagne du chef des cessions visées à la section III (bassin de la Sarre) de la partie III », pour « être portées au crédit » du Reich, « au titre de ses obligations de réparer ». Le projet d'accord, rédigé à Boulogne le 2 juillet 1920, a porté une première atteinte au texte du traité :

« Il sera fait un compte, tant de toutes les prestations en nature qui ont été ou seront fournies jusqu'au 1er mai 1921, à l'exception des restitutions effectuées en vertu de Kart. 238, que des sommes qui doivent être portées au crédit de l'Allemagne, en conformité de l'art. 243. Au débit de ce compte seront portés les frais des armées d'occupation jusqu'au 7 mai 1921. Le solde créditeur..... constituera une réserve éventuelle (art. 2 a). »

L'article 4 de l'accord de Spa (16 juillet 1920) a aggravé cet amendement au traité. Il a exclu du compte occupation, certains soldes, maintenu les « sommes à porter au crédit de l'Allemagne en exécution de l'article 243 ». J'indique qu'en cas d'absence de chiffres définitifs, la commission des réparations « fera une estimation provisoire ».

même manière et ne comprennent pas les mêmes élé

ments.

Je serais prêt à oublier l'une et l'autre. Je serais même disposé à croire que, en décidant que le charbon allemand importé via Rotterdam et Anvers sera payé au prix du marché intérieur et non au prix des exportations f. o. b., l'accord du 13 août fait à la France une importante concession, alors qu'il se borne à retoucher la convention de Spa et à rétablir le texte du traité (art. 244, annexe § V a). Je serais enclin à atmettre que les concessions faites par nos alliés au point de vue de l'évaluation de la dette de guerre et du jeu du droit de priorité belge, constituent les éléments d'une transaction. Il serait possible de l'élargir, en portant au crédit de l'Allemagne, non pas la valeur des mines, mais celle du charbon extrait de la Sarre. J'irais même jusqu'à oublier que la convention du 13 août, continuant l'erreur de Spa, renonce à créer une caisse de réserve, que les experts de Boulogne avaient constituée à l'aide de participations dans le capital de l'industrie allemande, si cette « Peau de chagrin » ne renfermait pas pour la France d'autres menaces et d'autres périls. Mais j'en devine deux autres, plus graves encore que cet affaiblissement de la créance et cet accroissement du passif national.

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Mais, dira-t-on, l'article 243 indique que la commission peut porter au crédit de l'Allemagne « toutes sommes à valoir sur tous autres transferts de propriétés... prévus par le présent traité ». Le compte de l'Angleterre peut et doit être débité d'une valeur égale à celle des annexions coloniales. Erreur! Il n'y a jamais eu d'annexions coloniales, mais des mandats coloniaux. Et comme nous l'apprend M. Lansing, dans son intéressant mémoire (p. 140 et 143) si cette formule a été inventée, c'est précisément pour éviter d'avoir à inscrire la valeur de ces confiscations au crédit de l'Alle-pation. Ils devront donc être prélevés sur les annuités

magne dans le compte des réparations. « Cette avarice sordide» est un des arguments que Lansing invoque pour se justifier d'avoir refusé au président Wilson son appui et au traité de Versailles son approbation.

Le traité a donc amorcé l'engrenage dans lequel la France se trouve aujourd'hui prise. A Boulogne et à Spa un tour de vis a été donné. Le dernier l'a été, le 13 août 1921. Et trois jours plus tard, sir Robert Horne s'exprimait comme suit, devant les Communes. Il faut peser tous les termes :

«Je veux faire encore une autre communication dont la nature est fort encourageante. Nous toucherons, pendant l'année financière courante, au titre des réparations allemandes (sic), une somme dont le montant est assez considérable. J'espère que la Chambre me pardonnera de ne pas mentionner de chiffre exact. Bien que les ministres des finances soient parvenus la semaine dernière à un arrangement et bien que le ministre français des finances ait finalement signé ce document, sous réserve de l'approbation de son cabinet, cette confirmation n'est pas encore arrivée à Londres. Je ne suis donc pas en mesure d'entrer dans le détail de la question. Mais la Chambre peut être certaine que, quoi qu'il arrive, le revenu anglais recevra l'appoint d'une somme qu'on peut définir comme fort importante. Cette somme ne sera pas payée en marks, mais en or. Et, en conséquence, je ne veux pas envisager la situation, au cours de l'année courante, sous un jour aussi sombre que quelques-uns de mes honorables collègues sont portés à le faire. »

Iniquité scandaleuse, dira-t-on. La nation qui a le plus souffert, celle dont l'effort militaire a assuré l'exécution de l'ultimatum, ne touchera pas un louis d'or sur le premier milliard versé par l'ennemi, sur la partic laissée disponible par la Belgique. Inégalité scandaleuse, dira-t-on les comptes des camarades de combat, qui furent égaux devant la mort, ne sont pas dressés de la

L'accord de Spa dans l'article 5, insiste par deux fois, au début et dans le § b, sur le fait que la priorité du coût de l'armée d'occupation prime la priorité belge, avant comme après le 1er mai 1921. Le 5 mai 1921, les alliés ont invité la commission des réparations à «< notifier, sans délai, au Reich les époques et les modalités de l'acquittement de l'intégralité de la dette ». Dans l'état des paiments, dressé le 6 mai, rien n'est prévu par la commission pour le remboursement des frais d'occu

fixes et variables versées par Berlin, pour le paiement des réparations, évaluées au chiffre forfaitaire 132 milliards de marks or.

de

Conclusion: la dette allemande sera diminuée, la créance française, déjà amputée, sera diminuée d'un chiffre égal à ce que coûteront les armées d'occupation... Plus la France renforcera ou prolongera sa garde sur le Rhin, moins elle touchera d'écus sonnants. Evacuez et vous toucherez tout. Restez et vous toucherez moins.

Voilà le second engrenage dans lequel nos négociateurs ont laissé prendre leurs mains. Il est plus grave que le premier. La France est plus directement atteinte dans sa liberté et dans sa sécurité. Le Foreign Office, par ces textes successifs, habilement enchaînés, s'est as suré une garantie décisive et définitive contre le péril d'une occupation prolongée des terres rhénanes. Il est prodigieux que personne, à ma connaissance, ni à la tribune, ni dans la presse, n'ait signalé ce péril, ni avant l'accord de Paris (29 janvier 1921), ni avant l'accord de Londres (6 mai 1921), ni avant la conférence des argentiers (13 août 1921), alors qu'il était encore possible de briser l'étau.

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Mais il y a mieux. Le chiffre des 132 milliards de marks or subira de nouvelles réductions.

L'état des paiements, en date du 6 mai 1921, art. 1, § 6,

prévoit que l'on pourra déduire de cette somme :

<<< Toutes sommes reçues d'autres puissances ennemies ou ex-cnnemies, qui pourront être portées, par décision de la Commission, au crédit de l'Allemagne. » Sugia

Et faisant application de cette décision de principe, -si singulièrement imprudente, l'accord financier di 13 août, évaluant à un chiffre forfaitaire le montait

des réparations dues par l'Autriche-Hongrie, a accordé à l'Italie, sous la forme d'une attribution des bons allemands de la dernière série, une participation dans les 132 milliards allemands supérieure aux 10 o/o, qui lui avaient été alloués à Spa

Voici les explications que donne le Secolo du 13 août : « La Commission pour les Réparations avait fixé un chiffre unique de 132 milliards devant être payés par l'Allemagne. Il fut donc facile au ministre Soléri de protéger nos intérêts vitaux et de démontrer que si dans la distribution des 132 milliards qui constituent l'ensemble de toutes les réparations de tous les ennemis, on ne tenait pas compte du plus grand pourcentage qui nous est reconnu pour les réparations autrichiennes, non seulement la compensation spéciale qui nous a été accordée à Spa disparaîtrait:

Art. 9. Toujours l'engrenage

mais les autres pays encaisseraient sur la totalité de la somme des réparations le plus haut pourcentage, qui, cependant, ne devait leur être réservé que sur l'ensemble de l'indemnité allemande. Aussi le ministre italien a-t-il demandé que l'Italie reçût, outre ces 10 0/0 (13 miliards de marks-or), 5 milliards de bons allemands. Le chancelier de l'Echiquier britannique a vivement appuyé la thèse du ministre italien ainsi que le ministre belge des finances. »

Malgré « l'opposition persistante des techniciens français », ajoute le Corriere della Sera du 14 août, « opposition irréductible », reprend le Daily Telegraph, dans la note officieuse du 10 septembre, où il rend compte de l'entrevue de sir Robert Horne et de M. Paul Doumer.

Opposition singulièrement opportune, ajouteront tout bas d'autres collaborateurs du Foreign Office, puisqu'elle vient resceller, contre la France, l'accord anglo-italo-belge, esquissé à Paris, au mois d'août, et ce à la veille de la conférence de Washington.

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Et c'est là, en effet, le dernier péril qui caractérise ce document du 13 août. Il enregistre, quelques semaines avant la réunion de leur conférence qui marquera dans l'histoire diplomatique, l'isolement total de la France victorieuse. Deux ans d'efforts au sein des conseils suprêmes ont enfin abouti au résultat cherché. Un vide savant a été patiemment creusé autour du Quaid'Orsay. Les efforts ont redoublé d'intensité, au fur et à mesure qu'approchait la date fatidique du 21 vembre 1921.

Toute la politique anglaise, au dedans comme au dehors, depuis des semaines, à Dublin comme à Genève, ne s'explique que par cette idée fixe. Si D. Lloyd George fait au Sinn Fein des offres libératrices, dont la générosité dépasse les espoirs des Irlandais sensés, c'est qu'il veut restaurer le prestige moral de la GrandeBretagne et apaiser les dangereuses colères des Irlandais américains. Si les représentants du Foreign Office, auprès de la Société des nations, essaient de réserver à la Triplice anglo-nippo-américaine l'examen du problème du désarmement naval et proposent d'atténuer la rigidité de la garantie territoriale formulée par l'article 10, c'est que lord Curzon prépare ses cartes pour la partie de poker qui se jouera à Washington. En tout cas l'Angleterre ne se présentera pas seule autour du tapis vert. Elle était sûre du Japon. Elle vient d'acheter aux dépens de la France, c'est-à-dire gratis le concours de la Belgique et de l'Italie.

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Et comme, d'autre part, Washington, en effaçant du traité conclu avec l'Allemagne les clauses territoriales signées à Versailles par les mandataires de la nation américaine, court le risque de froisser aussi gravement les sentiments que les intérêts du peuple français et de rendre plus difficile une coopération étroite des deux

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Permettez-moi comme à la raquette la plus distinguée de l'équipe japonaise qui, après avoir triomphé du reste du monde, vient de succomber devant les EtatsUnis dans la Coupe internationale de lawn-tennis -- de vous adresser mes plus sincères félicitations à l'occasion de la remarquable performance sportive que vous venez d'accomplir.

Je crois être à même de l'apprécier, ayant été il y a un nombre d'années que j'aime autant ne pas préciser l'un des importateurs en France du jeu du « boyau encerclé ». Aux âges héroïques, je disputai les premiers championnats qui déroulèrent leurs péripéties sur des courts continentaux encore singulièrement primitifs. Je me souviens de l'orgueil que me causa une victoire remportée sur un clergyman retors (à cette époque un Anglais nous apparaissait un surhomme). Derrière Schoepfer (qui depuis s'appela Claude Anet), je fis quelques années plus tard partie de la première équipe française qui fût opposée à une équipe insulaire et d'ailleurs totalement écrasée par celle-ci. Jusqu'en 1914, date qui marque pour beaucoup d'hommes un sensible bouleversement de leurs habitudes, je continuais à taquiner la petite balle blanche et à suivre avec intérêt ses bonds de plus en plus étendus à travers les deux hémisphères.

C'est vous dire, Monsieur, que mes félicitations ne sont pas celles d'un profane. Il n'est pas très difficile de jeter une sphère de caoutchouc par-dessus un filet. Arriver à exceller dans un sport, à y battre une série de nations qui, depuis des années, y ont spécialisé des élites est une réussite qui témoigne de singulières qualités d'adresse, d'adaptation et de ténacité.

Je sais bien, Monsieur Shimidzu, que le Japon, dans ce dernier demi-siècle, a témoigné par des réalisations autrement retentissantes à quel point il est arrivé à s'approprier les techniques les plus raffinées des civilisations occidentales. A ce titre, le spectacle qu'il offre dans l'histoire du monde est unique et je ne me résigne pas encore, bien que je touche à un âge où il convient de restreindre ses horizons, à renoncer à rassasier un jour mes yeux et mon esprit du spectacle de son prodigieux essort aux confins de l'Asie et du Pacifique.

Si profonde soit mon admiration pour votre tradition nationale et pour la manière dont votre nation a su acquérir et mettre au service de son idéal permanent tout l'appareil scientifique et industriel que la race blanche a été si fière de palper et que d'ailleurs vos savants et vos ingénieurs ont déjà enrichi, je n'hésite pas à avouer, Monsieur Shimidzu, que les performances que vous et vos camarades venez d'accomplir y ajoutent quelque

chose.

Certes la civilisation d'un peuple consiste jusqu'à nou vel ordre pour une large part dans ses universités, ses laboratoires, ses usines, ses cuirassés et ses métropoli

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