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dans le cas de lévitation, s'échappant du corps du medium, le plus souvent par la partie inférieure du tronc, se répand au loin, jusqu'à plusieurs mètres de distance, et va soulever l'objet (ou l'attirer ou le repousser). Si l'objet est trop lourd, l'espèce de tige de substance, ou « levier psychique »>, comme l'appelle Crawford, se courbe, prend un point d'appui sur le sol et se redresse pour s'élever verticalement. L'ectoplasme était généralement invisible, tout en étant pesant, capable d'influencer le sens du toucher et capable de marquer son empreinte dans une substance plastique (argile).

La démonstration du poids de la substance est peutêtre ce qu'il y a de plus frappant dans les expériences de Crawford. Le medium étant placé sur une balance, quand l'ectoplasme était sorti de lui le plus qu'il lui était possible, le dit medium perdait jusqu'à 24 kilos de son poids (1). Au toucher, l'ectoplasme donnait l'impression d'une masse froide et visqueuse comparable à celle que donne le contact d'un reptile. Quant à la vue, Crawford arriva peu à peu, dit-il, à percevoir avec ses yeux des sortes de filaments de couleur claire, se massant pour former comme une pâte, et il put en prendre quelques photographies, dont on voit des reproductions dans une plaquette posthume: The psychic structures at the Goligher circle. (Le medium était miss Goligher.) Le phénomène, ainsi décrit, durait plus ou moins longtemps; puis l'étrange matière rentrait dans le corps du medium, lequel était agité de violents frissons. « Mes conclusions, écrit Crawford, de qui la mort a interrompu les travaux, sont les suivantes : Les phénomènes sont causés par des tiges flexibles, semblables à des rayons sortant du corps du medium. Ces rayons sont la cause des manifestations : lévitation, mouvements de la table sur le sol, coups frappés, attouchements, ou toute autre modalité du phénomène ».

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Voilà, n'est-il pas vrai, des observations sensationnelles.

L'explication, proposée par les « non-spirites », de la télépathie avec apparitions était que ces apparitions pouvaient être des projections de celui qui les voit ou les entend, projections déclenchées par une onde, reçue d'une distance quelconque l'onde psychique était, dans ce cas, comparée à l'onde électrique qui, au poste où on la recueille, met en branle un appareil susceptible de reproduire les mouvements de l'appareil qui se trouve au poste de départ. Mais le point obscur était précisément de savoir comment (en dehors, bien entendu, de la pure hallucination) un individu pouvait projeter hors de lui-même une figure ayant une réalité objective.

Les expériences de Crawford et de ceux qui marchent sur les mêmes traces, ouvrent-elles la voie à une expli

cation définitive ?

La tentation est bien forte de franchir ce pas !... Je ne pense pas cependant que la Science l'ait osé franchir il ne faut pas aller si vite; nous sommes en pleins tâtonnements... Et c'est ce que va nous expliquer maintenant celui à qui j'ai fait allusion l'autre jour : le docteur Gustave Geley, directeur de l'Institut métapsychique international

Le docteur Geley m'a reçu fort aimablement, à plusieurs reprises, dans un des laboratoires de l'élégant hôtel qu'occupe l'Institut, avenue Niel (2) Ce qui m'a

(1) Il va sans dire que nous abordons ici un ordre de phénomènes pour lesquels il y a encore des négateurs. Je rapporte simplement ce que Crawford et ses collaborateurs ont affirmé.

<< un initiateur

(2) L'Institut métapsychique, fondé par éclairé et généreux » (M. Jean Meyer), est placé sous la

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frappé davantage, dans le visage, si caractéristique, du docteur Geley - et je pense qui quiconque l'a vu doit ce sont les yeux : conserver la même impression grands, saillants, ronds, sombres avec des éclats dorés. Le regard est d'une remarquable fixité, mais avec, cependant, une espèce de voile, quelque chose de nébuleux et de brouillé, comme si le reflet du mystère, si souvent contemplé, y demeurait fixé pour toujours. Regard insoutenable et attirant à la fois, disons le mot fascinant. Puis, dans la face extrêmement sévère, par instants, l'éclair.brusque d'un sourire absolument charmant La voix est nette et les termes précis.

Avec lui, nous allons entrer, tout de suite, dans le cœur même du débat.

LE D' GUSTAVE GELEY
Directeur de l'Institut Métapsychique

« Il n'est pas question ici, n'est-ce pas, me dit-il, de faire une étude historique ou critique des matérialisa tions. J'apporte simplement ma contribution à l'analyse et à la synthèse d'un phénomène qui, selon moi, bouleverse de fond en comble les fondements de la physiologie.

Le processus des matérialisations peut se résumer ainsi 1° Du corps du médium sort une substance d'abord amorphe ou polymorphe; 2° Cette substance se constitue en représentations diverses, généralement représentations d'organes plus ou moins complexes.

La substance s'extériorise du medium, soit sous la forme gazeuse ou vaporeuse, soit sous la forme liquide ou solide.

La forme vaporeuse est la plus fréquente et la plu connue. Auprès du médium s'agglomère une sorte vapeur visible, de brouillard, souvent relié à lui pa lien ténu de la même substance. Puis il se pro comme une condensation, en divers points de ce brou lard. Ces points de condensation prennent enfin l'appa rence d'organes, dont le développement s'achève très rapidement.

Sous sa forme liquide ou solide, la substance est plus accessible pour nous. Son organisation est en effet plus lente, je veux dire qu'elle reste plus longtemps à l'état amorphe, ce qui permet un examen plus attentif. Elle a été observée sous cette forme chez plusieurs médiums, et particulièrement par Schrenck-Notzing et Crawford, ainsi que vous l'avez rappelé précédemment; mais c'est chez le médium Eva (1) que la genèse de la substance solide se produit surtout avec une intensité extraordinaire. J'ai eu l'occasion, grâce à l'amabilité de Mme Bisson, d'étudier avec elle Eva pendant dix-huit mois, soit chez elle, soit dans mon propre laboratoire. Après Eva, j'ai pu étudier quelques autres sujets, qui m'ont donné des phénomènes analogues. Pour le mo ment, je poursuis des expériences sur M. Franek Kluski en collaboration avec le professeur Ch. Richet et M. A de Gramont les premiers résultats seront publiés incessamment. Les matérialisations dont je vous parle, j'ai donc pu les voir, les toucher, les photographier maintes fois, j'ai suivi le phénomène depuis son origine jusqu'à sa terminaison: je n'ai pas le droit d'émettre un doute sur sa réalité.

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Le mode opératoire pour obtenir des matérialisations est très simple.

Quand il s'agit d'Eva, par exemple, le médium est mis soit en état d'hypnose artificielle (état superficiel, direction d'une élite de personnalités compétentes président personnalité), soit en état de transe spontanée, après mais comportant néanmoins quelquefois l'oubli de la

d'honneur: Ch. Richet; président : professeur Santoliquido : membres MM. A. de Gramont, Camille Flammarion, méde cin inspecteur Calmette, Teissier, Gabriel Delanne, Jules Roche, Saurel; directeur: Dr G. Geley.

qu'on l'a fait asseoir, quelquefois, dans un cabinet noir.

(1) Mlle Eva Carrière.

Ce cabinet noir n'a d'autre but que de soustraire d'abord |
le médium aux influences perturbatrices ambiantes et
spécialement à l'action de la lumière : il permet de gar-
der dans le reste de la pièce un éclairage suffisant. Tou-
tes les précautions sont prises, d'ailleurs, bien entendu,
contre la fraude: en entrant dans le laboratoire, le mé-
dium est entièrement déshabillé et revêtu d'un maillot
que l'on coud dans le dos et aux poignets. La chevelure,
la cavité buccale, sont visitées avant et après les séan-
ces. Les mains restent toujours visibles et tenues ; une
lumière très suffisante éclaire constamment la salle ; en
un mot, il n'y a pas possibilité de fraude. Pour Kluski,
nous n'avons pas adopté de costume spécial; mais les
moyens de contrôle, exposés dans le rapport que je pu-
blierai bientôt (1), ont été encore plus sévères. Du reste,
je le répète, dans un cas comme dans l'autre, presque
tonjours les matérialisations se sont faites sous mes

yeux.

Voici comment se déroule généralement le phénomène. On perçoit tout d'abord une forte odeur d'ozone. Cette odeur, analogue à celle des salles de radioscopie, se dégage au début des phénomènes, et avant tout phénomène, souvent au moment de commencer la séance. Ce symptôme n'a jamais manqué dans nos expériences. L'odeur survenait brusquement et s'évanouissait de même.

On voyait alors (la lumière étant très faible) des vapeurs légèrement phosphorescentes, une sorte de brouillard flotter autour du médium, surtout au-dessus de sa tête. En même temps, apparaissent des lueurs, semblant des foyers de condensation. Ces lueurs étaient généralement nombreuses et éphémères; parfois elles étaient plus durables et, dans ce cas, elles donnaient l'impression d'être comme des régions lumineuses d'organes invisibles ar ailleurs, par exemple, des extrémités de doigts. nfin, quand la matérialisation s'achevait, on voyait des ains ou des visages - parfaitement formés... Mais anticipons pas.

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Les lueurs ont constitué le phénomène prédominant de os expériences avec Kluski. Elles n'ont jamais manqué omplétement, même dans les séances nulles. Leur aspect tait souvent celui d'une traînée de vapeur blanchâtre tvaguement lumineuse, dont la dimension et la forme changeaient constamment, comme celle d'un brouillard : çà et là, dans la traînée lumineuse, se constituaient peu Peu des points plus brillants, d'un éclat comparable à

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celui des vers luisants.

Les « phénomènes » se

produisent

produisent - au bout d'un temps variable, parfois très quand ils se court, parfois très long, une i par des sensations douloureuses du médium. Eva pousse une heure et plus. Ils débutent des soupirs, des plaintes intermittentes rappelant tout à fait celles d'une femme en couches. Ces plaintes attei

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expériences, pour satisfaire aux curiosités même les plus légitimes.

L'apparition de la substance est annoncée généralement par la présence de taches blanches, de la dimensión d'un pois à celle d'une pièce de cinq francs, disséminées çà et là sur le vêtement du médium, plutôt du côté gauche. La substance proprement dite, ensuite, se dégage de tout le corps du médium, mais spécialement des orifices naturels et des extrémités du corps: sommet de la tête, doigts, bouche.

La substance se présente sous un aspect variable. Tantôt c'est celui d'une pâte malléable, tantôt celui de fils nombreux et menus, tantôt celui de cordons de grosseurs diverses, de rayons étroits et rigides, tantôt celui d'une bande large et étalée, tantôt celui d'une membrane, tantôt celui d'une étoffe mince, aux contours indéfinis et irréguliers.

L'abondance de la substance varie également parfois infime, parfois considérable : dans certains cas, elle recouvre entièrement le médium comme d'un manteau. La visibilité peut s'accentuer ou diminuer dans le cours de l'expérience; la couleur blanche est la plus fréquente, substance donne des impressions en rapport avec la forme bien qu'il y ait du noir et du gris. Quant au contact, la momentanée qu'elle revêt : elle semble molle et un peu élastique quand elle s'étale, dure et noueuse quand elle forme des cordons. Parfois, elle donne la sensation d'une toile d'araignée frôlant la main de l'observateur (1).

La substance est mobile: tantôt elle évolue lentement, épaules, sa poitrine, ses genoux, par une sorte de glissemonte, descend, se promène sur le médium, sur ses ment qui rappelle celui d'un reptile; tantôt ses évolutions sont brusques et rapides : elle apparaît et disparaît comme un éclair.

En résumé, la substance primordiale se présente sous deux aspects principaux: substance solide ou liquide et substance gazeuse. Dans nos expériences avec Eva, nous avons noté que la substance solide est prédominante, c'est l'inverse que l'on constate : la substance se dégage presque exclusive; chez la plupart des médiums connus, presque toujours sous l'apparence de vapeur, et la substance solide ne s'observe que par exception.

Ce que tous les expérimentateurs ont remarqué, c'est que la substance, ainsi extériorisée du corps du médium, confond avec celle du médium. Tout attouchement retennon seulement est sensible, mais que sa sensibilité se

tit douloureusement sur ce dernier. Si l'attouchement est tant soit peu brutal et prolongé, le médium accuse une

douleur qu'il compare à celle que produirait un choc sur

sa chair mise à vif (2).

La substance est sensible même aux rayons lumineux. Une lumière, surtout brusque et inattendue, provoque un ébranlement douloureux du médium. Cependant cet

gnent leur paroxysme au moment où commence le phé- effet est très variable: dans certains cas, la lumière du

nomene; elles diminent ou cessent quand il est entièrement formé. Franek Kluski, lui, ne se plaint pas, ne pousse ni soupirs, ni gémissements; ses mains restent

jour est tolérée. L'éclair du magnésium provoque un soubresaut du médium, mais il est supporté et permet les photographies. La substance paraît, en un mot, avoir

sensibles et chaudes; seuls, la respiration et le pouls toute la méfiance d'un animal sans défense: elle craint

s'accélèrent quelque peu. Bref, Franek ne présente à peu près aucune des manifestations sensibles, motrices, vasopart des autres médiums. Mais, par contre, la réaction motrices immédiates constatées chez Eva et chez la plu consécutive aux séances est très forte. Le système nerreux marque alors longtemps des signes d'épuisement et, en même temps, de surrexcitation. L'insomnie est la regle. Parfois, des vomissements de sang répétés imposent de longues interruptions dans la pratique de sa médiumnité ce qui vous explique suffisamment, n'estce pas, que nous ne puissions pas multiplier avec lui les Bulletin de P'Institut Métapsychique, n° 5.

les contacts, toujours prête à se dérober et à se résorber dans le corps d'où elle est sortie.

J'arrive maintenant aux représentations.

Elles sont des plus diverses. Quelquefois, ce sont des formations inorganiques indéterminées; mais, le plus

(1) Notons que, dans toutes les relations d'apparitions, les « fantômes » offrent, au toucher, cette même consistance un peu flasque, ce frôlement, qui donne l'impression d'un léger tissu.

(2) Franek s'intéresse aux phénomènes ; il les observe, gar'dant, non toujours, mais assez souvent, sa connaissance pendant que se déroulent les matérialisations.

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souvent, ce sont des formations organiques, variables comme complexité et comme perfection.

Vous savez que divers observateurs, entre autres Crookes et Richet, ont décrit des matérialisations complètes. il s'agissait, non de fantômes, mais d'êtres ayant momentanément toutes les particularités vitales des vivants, dont le cœur battait, dont le poumon respirait, etc. Je n'ai jamais, hélas! observé pareil phénomène.

Par contre, j'ai vu, fréquemment, des représentations complètes d'un organe, par exemple d'un doigt, d'une main, d'un visage. Dans les cas les plus parfaits, l'organe matérialisé a toutes les apparences et les propriétés biologiques d'un organe vivant. J'ai vu des doigts admirablement modelés avec leurs ongles; j'ai vu des mains complètes, avec os et articulations, un crâne vivant dont je palpais les os sous une épaisse chevelure, des visages humains parfaitement formés. Dans la plupart des cas, ces représentations se sont faites, développées entièrement sous mes yeux, du commencement à la fin au milieu des franges et des rayons échappés du médium apparaissaient, par une formation progressive, des doigts, une main, un visage.

Avec Eva, nous avons obtenu une série de documents du plus grand intérêt. Nous avons vu, touché, photographié des représentations qui se sont faites sous nos yeux, provenant tantôt, ainsi que vous pouvez le constater sur ces épreuves, d'un cordon de substance issu du médium, tantôt d'un brouillard condensé aux côtés d'Eva. Dans le premier cas, on voyait fréquemment, sur la matérialisation terminée,, des rudiments plus ou moins importants du cordon originel de substance. J'appelle l'atten-" tion sur l'intérêt que présentent ces rudiments: comme dans l'embryologie, ils sont les témoins de l'origine et de la genèse des formations.

Quant aux dimensions des formations, ainsi que vous pouvez aussi le voir sur cette photographie, qui représente une belle tête, bien formée, à la hauteur de l'épaule du médium Eva, elles sont souvent beaucoup plus petites que nature: ce sont alors, comme ici, de véritables miniatures.

Avec Franek, les dimensions étaient aussi plus petites que nature. Il prétend que cette espèce de réduction est due à un état de fatigue ou de mauvaise santé du médium: quand il est bien portant, dit-il, les matérialisations ont des dimensions normales. Effectivement, tout récemment, à Varsovie, où il est retourné, j'ai obtenu avec lui deux moules de grandeur naturelle: Franek était en bonne santé, reposé et plein de force. Rappelons-nous, à ce propos, que, pendant tout le temps que dure le phénomène, la formation est en rapports physiologique et psychologique évidents avec le médium. Toute impression reçue par la substance (l'ectoplasme) se répercute sur le médium: l'ectoplasme, en somme, est le médium -même, partiellement extériorisé.

Les expériences faites ici cet hiver avec Franek Kluski confirment entièrement les résultats obtenus avec Eva et nous ont appris des faits nouveaux. Le contrôle était encore plus rigoureux, en ce sens que le médium n'entrait pas dans le cabinet noir, mais restait au milieu de nous. Nous avons eu des représentations de visages et de membres, que nous avons pu mouler. Malheureusement, Franek est tombé assez malade pour nous forcer à interrompre nos travaux avant d'avoir pu obtenir des photographies.

>>

Le docteur Geley me donne alors quelques détails qu'il préfère ne point voir encore divulgués. Puis il me montre les moulages en plâtre, ainsi que les creux en paraffine obtenus sur les matérialisations de petites mains fort bien formées, des pieds, un bas de visage avec les lèvres entr'ouvertes. Il faut reconnaître qu'il y a là quelque chose de véritablement ahurissant.

Tels sont les faits, reprend mon interlocuteur. Y a-t-il déjà quelque interprétation à en tirer ? J'ai essayé de le faire dans mon ouvrage De l'Inconscient au Conscient, et ce n'est pas ici le lieu de s'étendre sur ce sujet. Disons seulement qu'il est deux enseignements qui se dégagent, pour moi, de ces observations:

Le premier est relatif à la constitution psycho-physiologique de l'individu. Il me semble ressortir des faits métapsychiques que les conceptions biologiques classiques sont erronées. L'être. n'apparaît plus comme un simple complexus cellulaire (complexus des éléments constitutifs de l'organisme), mais semble conditionné par un dynamisme supérieur. Les molécules constitutives n'ont pas de spécificité absolue; leur spécificité est relative et leur vient du moule dynamique qui les conditionne (qui en fait de la substance viscérale, nerveuse, musculaire, etc.), et qui leur attribue une forme, une situation, une fonction. La conscience ne peut plus être ramenée au fonctionnement du cerveau: l'être vivant est un dynamo-psychisme: le complexus cellulaire n'apparaît que comme un produit idéo plastique (1) de ce dynamo-psychisme. Tout se passe, en un mot, comme si l'organisme, au lieu d'être le générateur de l'idée, n'était qu'une objectivation de l'idée, une représentation, un produit idéo-plastique du dynamo psychisme essentiel de l'être.

Le second enseignement est relatif à l'évolution... Mais ici nous sortirions, n'est-il pas vrai, du domaine que vous m'avez vous-même tracé.

Vous voyez l'importance sans égale des problèmes. que pose la métapsychique: elle donne déjà les pre miers éléments d'une grandiose démonstration. Il n'y a pas d'inconnaissable, il n'y a que de l'inconnu. Les phénomènes météorologiques les plus simples étaient attribués, par nos ancêtres, à des puissances surnaturelles ils sont aujourd'hui du domaine de la science. Il e sera de même, un jour ou l'autre, pour les grandes lois de la vie et de la destinée, de l'univers et de l'individu.

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véritable épidémie de matérialisations: je me fais un devoir d'en signaler le danger. Ces pseudo-phénomènes ne sont que des imitations, plus ou moins grossières, faites par un sujet hypnotisé ou prétendu tel, des phénomènes réels que je viens de vous décrire. La scène est toujours la même un cercle d'assistants réunis dans la plus complète obscurité; au centre, l'hypnotiseur; dans un coin de la pièce, sur un fauteuil, toujours.à une certaine distance des assistants, un sujet hypnotisé, absolument libre de ses mouvements et sans aucun contrôle. Aux côtés du sujet, des bouquets de fleurs, du papier et des crayons, des écrans phosphorescents (la face lumineuse posée sur le sol). Une musique douce berce les assistants, des parfums subtils flottent... L'hypnotiseur endort le sujet. Quand la transe est suffisamment profonde, les phénomènes commencent. Des fleurs sont jetées sur les assistants, le papier blanc du guéridon se couvre d'écriture; enfin, parfois, les écrans se soulèvent, ils éclairent, très vaguement, quelque chose d'indistinct, qui semble être couvert de mcusseline avec un peu de bonne volonté, on distingue parfois une face humaine. Quand le niveau général de confiance naïve de l'assistance le permet, le « fantôme » s'approche, serre des mains parle, laise entrevoir une «< matérialisation » parfaite et complète..., trop parfaite et trop complète !

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Comment cette morne comédie, d'ailleurs d'une déconcertante monotonie, est-elle possible? Pour deux raisons l'incompétence (ou la fourberie) des organisateurs, l'absence d'esprit critique de l'assistance. La scène suivante, que j'ai déjà racontée, montre jusqu'où peut aller cette naïveté du public. Une dame qui avait perdu son fils, tué à la guerre, voyant l'écran venir près d'elle, s'écrie: « Est-ce toi, Emile ? » L'écran s'incline de haut en bas, ce qui veut dire oui dans le langage des écrans ! La dame pleure et l'assistance est émue. Le manétiseur prend la parole: « Si c'est toi, Emile, offre les fleurs à ta mère, embrasse-là et montre-toi ! » Et écran se penche en touchant à plusieurs reprises la tête de la vieille dame; puis des fleurs lui sont jetées. Enfin, ont voit les deux écrans se soulever éclairant entre eux une sorte de colonne blanche, indéfinie. La pauvre mère éclate en sanglots... Mais quand, après la séance, je lui demandai si elle avait reconnu son fils : « Oh! non, Monsieur, me répondit-elle naïvement, il n'était pas

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assez matérialisé !

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Mémoires & Documents

207

Les débuts de la Société des Nations (1) et son avenir

III

Quant à l'action politique, n'est-elle pas un des objets essentiels de la Société des Nations? Un réseau de liens juridiques, économiques et sociaux aurait étroitement uni les nations du monde. Et, seul serait en dehors de cette entente un ordre de questions dites vitales, parce qu'elles touchent à l'honneur national, aux grands desseins des dirigeants et aux convictions sentimentales du peuple. Seuls ces problèmes ne pourraient recevoir de solution que par le procédé violent de ce duel politique qu'est la guerre, par l'application hasardeuse de la loi du plus fort!

La politique des démocraties ne saurait-elle, sans renoncer à l'indépendance qui est le premier droit de tout pays, affirmer sa loyauté et son respect du droit égal d'autrui devant les représentants de toutes les au

tres nations ?

Nous pensons au contraire que le seul fait pour une nation d'adhérer à la Société des Nations c'est tantôt de sa part reconnaître que, ses intérêts vitaux étant satisfaits, elle n'en demande que la consolidation et la protection, sans arrière-pensée ; tantôt c'est former un appel à la puissance et à la justice des grands Etats qu'avec l'intention de faire droit, autant qu'il est huqui ne peuvent diriger en commun une telle Société sociés. mainement possible, aux vœux légitimes de tous les as

Et cette définition de l'association politique des nations me dispense presque de démontrer qu'elle ne srait être, comme l'ont dit quelques adversaires, ou cru quelques témoins encore mal renseignés, à défaut d'une chimère, qu'un super-gouvernement.

d'un

Un super-gouvernement c'est l'impérialisme seul Etat, tant de fois voulu, tant de fois manqué. La Société des Nations c'est la coopération de tous, dans la volonté de ménager ou de contenter les droits de chacun, en conciliant les droits de tous.

Et le jour où une politique de bonne foi s'égare ou s'irrite, le jour où l'amour-propre national est engagé à tort par l'erreur des dirigeants ou blessé par la violence et l'erreur d'autrui; le jour où le pays offensé réclame une justice que l'offenseur ne veut pas lui ren

Les vraies matérialisations ne ressemblent en rien à ces scènes pitoyables qui dénotent autant d'ignorance dre de peur de s'humilier devant son adversaire ou que d'impudence. La matérialisation, qui constitue, à nos yeux, le phénomène à la important du métapsychisme et le plus sûrement établi, est aussi le plus rare et le plus difficile

fois

de

?à obtenir. Mais il est,
faux que l'obscurité complète soit nécessaire ;
en tout cas, absolument
très belles manifestations sont obtenues à la lumière
atténuée; et il est également absolument faux que le
contrôle gêne la production du phénomène. Les procé-

des Nations, anonyme, impersonnelle, parle au nom du droit et distribue impartialement une justice qui peut être acceptée des parties puisqu'elle est prononcée au nom de la conscience universelle par une autorité ́universelle.

N'est-ce pas cette impartialité nécessaire, essentielle à la Société des nations qui lui a valu de recevoir du

dés d'enregistrement, spécialement les photographies, traité de Paris, des missions singulièrement délicates.

les pesées, les empreintes, doivent toujours être em

ployés.

Que l'on me

comprenne bien nous n'avons pas la

comme l'administration de la Sarre, le contrôle de Dantzig ou les mandats.

prétention d'avoir, dans nos laboratoires, le monopole l'esprit de justice et l'impartialité dont le traité pré

La Société a-t-elle montré dans ces tâches imprévues qui lui furent confiées presque avant sa constitution.

de ces expériences. Quiconque aurait la bonne fortune

très rare hélas !

de

ment doué et sincère, aurait le droit strict d'en profiter

rencontrer un médium véritable

jugeait?

pour s'instruire. Mais ces séances d'amateurs, dénuées chargé d'une hypothèque économique française,

Le bassin de la Sarre, territoire politique allemand

ble et très dangereuses à tous les points de vue des

est

hommes de science, des chercheurs de bonne foi, ont été de la Société. Or, malgré des tentatives de grèves des

placé pendant quinze années sous le contrôle de la Société des nations. Il est gouverné par une commission internationale de cinq membres nommés par le conseil

une seule fois à l'une de ces regrettables parodies. >>

(A suivre.)

PAUL HEUZÉ.

fonctionnaires allemands et de grèves minières, malgré des complications dans l'administration des chemins

(1) Voir l'Opinion du 13 août.

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de fer et d'autres graves difficultés, un président français de la commission, M. Rault, dont on ne saurait trop faire l'éloge, un Sarrois, un Belge, un Danois et un Canadien, n'ont cessé de montrer tant de calme et de fermeté que la Sarre vit sous ce gouvernement contrôlé par la Société des nations, dans la paix la plus grande, dans une prospérité croissante.

A Dantzig, ville indépendante où la Pologne jouit d'un privilège de transit commercial et maritime, la Société des nations garantit la constitution de la ville libre et protège « le corridor polonais » dont elle organise la défense. La constitution est enfin votée et appliquée, la liberté commerciale existe et la méthode de défense, organisée théoriquement, sera sans doute acceptée de tous et pratiquement préparée lorsque la Société des nations aura reçu les moyens d'action correspondant aux pouvoirs qui lui ont été donnés.

Les mandats? La Société des nations est chargée, par un article complexe et obscur du pacte, de désigner les puissances à qui reviendra entre autres l'adminis

tration de certains territoires des anciennes colonies allemandes et de l'empire ottoman. Elle interviendra uniquement pour répartir des pouvoirs que les puissances n'ont pas cru devoir s'attribuer directement. Mais là encore elle ne conservera aucune souveraineté, son rôle de déléguée des puissances terminé elle se contentera de veiller à la paix des territoires à mandats comme elle fait pour les pays associés.

L'incident récemment soulevé par le gouvernement américain à propos de la répartition de ces mandats et l'attitude même du conseil de la Société invitant les Etats-Unis d'Amérique, bien que non adhérents au pacte, à venir présenter leurs observations et décidant ensuite l'attendre pour statuer que les Etats-Unis aient présenté leur point de vue, témoignent mieux que tout commentaire, à quel point la Société loin d'être un supergouvernement, ne peut et ne veut être que l'organisation qui facilite l'entente des gouvernements nationaux, l'accord des intérêts légitimes et l'harmonie des volontés indépendantes.

Et c'est si bien là la seule fonction possible et nécessaire de la Société, qu'un amendement à l'article 21 du pacte, déposé par M. Benès, ministre des affaires étrangères tchéco-slovaque, vient de préciser que non seulement le conseil et l'assemblée ne veulent pas, ne doivent pas s'opposer aux traités particuliers, aux ententes régionales comme la doctrine de Monroë, mais que sa mission est de les encourager et de les faire négocier sous ses auspices. Et M. Benès écrit très justement : « Le danger pour le monde serait de voir se créer des groupements indépendants et même adverses. Au contraire la paix du monde a tout à gagner à voir se grouper ensemble pour une collaboration plus intime et plus réelle, les pays qui ont à faire face à des problèmes communs qui ont entre eux des aspirations et des intérêts semblables. Mais à condition que ces ententes se fassent toujours avec l'appui de la Société et d'une façon conforme à ses principes, à condition également que le contact entre l'ensemble des Etats soit maintenu d'une façon constante afin d'établir la collaboration entre tous, chaque fois que l'intérêt général sera en jeu ».

Ce souci de n'être que l'organisateur de l'intérêt universel et le régulateur des intérêts nationaux est déjà si bien affirmé et connu qu'il a valu au conseil d'être invoqué par les intéressés eux-mêmes dans deux conflits particuliers qu'il a réussi à apaiser dans leur période aiguë et qu'il parviendra peut-être à résoudre définitivement

La contestation survenue entre la Suède et la Finlande au sujet de la possession des îles d'Aaland, créait, il y a un an, entre ces deux pays, une tension

telle qu'il en pouvait surgir une guerre dont les répercussions. se seraient aggravées du voisinage des soviets. Le conseil de la Société des Nations, saisi par les deux parties, décida de les entendre l'une et l'autre bien que la Finlande ne fût pas membre de la Société. Ce dernier Etat souleva une question préju dicielle, alléguant que les îles étant sous sa souverai neté actuelle, tout litige les concernant était un point de politique intérieure échappant à la Société des Nations. tions. Bien qu'une commission de jurisconsultes ait tranché cette question de principe contre la thèse finlandaise, la procédure ne fut point rompue. Une commission d'enquête fut alors envoyée sur place pour étudier le problème au fond. Partout bien accueillie, elle est revenue et elle a présenté un rapport dont les conclusions ont été adoptées par le conseil et signifiées, par lui, dans sa 13° session, à Genève, aux deux intéressés. La Suède a élevé une protestation de principe landaise, en assurant la protection des nationaux sue contre cette décision qui maintient la souveraineté findois, mais malgré cette protestation platonique, il semble que ce premier arbitrage peut être considéré comme la loi réelle qu'observent les parties.

En septembre 1920 la Pologne demanda au conseil de la Société des Nations d'intervenir au sujet des territoires contestés entre elle et la Lithuanie. Les re

présentants des deux Etats, dont l'un, la Lithuanie, n'est pas membre de la Société, furent entendus avec des garanties égales et la cessation des hostilités ainsi perts militaires furent acceptés. L'état de paix était que la ligne provisoire de démarcation fixée par les exdonc maintenu entre deux pays qui allaient en venir aux mains avec peut-être d'un côté l'appui des Soviets Malgré l'occupation soudaine de Vilna par le général polonais Zeligowski, les hostilités ne furent pas repri ses. La procédure compliquée, par cet événement com tinue. Les parties la rendent difficile par l'ingéniosit même qu'elles mettent à se défendre, mais elles ne prennent ni l'une ni l'autre la responsabilité de la rompre. Une commission militaire et civile opère sur place Il a fallu renoncer au plébiscite qui était décidé. Mais une autre procédure, par négociations directes devant un arbitre belge, M. Hymans, a abouti à un avant-projet accepté d'abord par les deux parties, depuis vivement repoussés par l'une d'elles. Le temps et les patients efforts du conseil aidant, une solution définitive interviendra sans doute.

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IV

Ces deux actions politiques particulières sont les premiers exemples bien modestes encore de la méthode du conseil. Elles prouvent à la fois l'incontestable autorité morale de la Société des nations, les avantages déjà acquis de son organisation politique, mais aussi les imperfections et les insuffisances de cette organisation.

des îles

L'intervention du conseil, dans l'affaire d'Aaland et dans le conflit polono-lithuanien, a été provoquée par les parties ou l'une des parties. Mais il ne faut pas oublier, qu'en présence d'un désaccord ou d'une menace de conflit quelconque, le secrétariat général est tenu de convoquer le conseil, à la demande d'un membre quelconque de la Société, même si celui-ci n'est en rien intéressé dans l'incident en question. C'est là un mode de déclanchement presque automatique de la tentative de conciliation qui rend l'intervention du conseil à peu près certaine dans tous les cas et lui permet de se produire à temps comme une manifestation immédiate et formelle de la solidarité universelle des nations. Et si l'on ajoute que la nation qui recourt à la guerre contrairement aux engagements du pacte est par le fait même considérée comme ayant commis un acte de guerre contre tous les autres membres de la Société qui se sont engagés à rompre avec lui, on voit

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