Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[merged small][ocr errors]

dans un mess. Il était seul en vêtement civil, et toutes les tables étaient occupées. Pour se donner une contenance - et il lui fut encore très pénible de songer qu'il ferait bien de s'en donner une, il consulta son indicateur. Cette fois, il n'y avait pas une minute de retard, la marche du train était parfaitement régulière.

Il essaya d'expédier son repas pour s'échapper, retourner dans son wagon avant les autres, et y demeurer du moins quelques instants seul, se recueillir; mais il avait compté sans la discipline prussienne: on lui présentait les plats à son tour, il n'avançait rien, même d'en sauter un. Tout le monde se leva de table ensemble et la dislocation se fit après le café. Philippe eut alors le sentiment d'être tout de bon « au service de l'Allemagne », enrôlé de force par le sergent recruteur, comme Candide chez les Bulgares. Cette pensée bizarre lui causa une lassitude, un découragement, qui le conduisirent à la résignation d'abord, puis enfin au sommeil; mais il s'endormit préoccupé d'une idée fixe :

Comment cela est-il possible?

D'ailleurs, il ne pouvait déterminer cette chose dont la possibilité l'étonnait. Il avait, en dormant, une sensation cruelle d'étouffement, d'oppression, qui, s'il avait été chez lui, sur son lit, aurait suffi à le maintenir

nda éveillé

nouveau

Combien d'heures ou de minutes dura ce sommeil? Il en fut tiré par le sentiment que le train s'arrêtait, ou plutôt était arrêté depuis quelque temps, depuis un temps si long qu'il fut tenté de rouvrir les ve yeux. Il ne les ouvrit qu'un peu plus tard, quand il are songea que maintenant il devait être arrivé dans cette és partie de la Prusse orientale dont jadis la laideur Pus more, la pauvreté revêche avait rebuté même sa pitié, ék: - cette pitié, cette grande charité sauvée de son enche fance, toujours prête de pleurer sur les jouets meurtris, man sur les objets difformes, sur tous les souffre-douleur avermanimés auxquels il prêtait une âme consolable. N'était

ce pas le cas de profiter de cette station pour regarder utinenfin le paysage dont pas une fois depuis le matin il inqe s'était soucié, pour éprouver s'il reconnaissait, s'i! méprisait encore ce pays laid et pauvre, et si, comme rit autrefois, il jouissait de le mépriser ?

מחר

s st

fet

Enfin, il se tourna vers la vitre à côté de laquelle il était assis, et il observa une chose extraordinaire on avait baissé tous les stores. Il remarqua ce qu'il avait bien vu en ouvrant les yeux et avant de tourner la tête, ce, mais à quoi d'abord il n'avait pas attaché de significale tion, il remarqua que tous les officiers, sauf un seul, étaient sortis; sans doute pour aller regarder aux vitres des autres compartiments, dont les stores n'étaient pas baissés. Et pourquoi un seul était-il resté auprès de lui, sinon pour le surveiller, pour l'empêcher de regarder dehors? Cette insolente et hypothétique surveillance le révolta. Il leva brusquement le rideau. Il crut bien entendre grogner son garde du corps. Mais, après tout, quel droit avait-on de l'empêcher de regarder dehors? Et en effet, le garde se contenta de grogner. Il ne hasarda pas une remontrance, qui eût été mal reçue. Et Philippe put librement voir.

Il comprit que le train où il se trouvait était arrêté sur une voie de garage, et il vit, comme hier avant d'arriver à Berlin, passer à la file, à une allure très lente, trois, quatre convois qui allaient dans le sens opposé. Les wagons, peints en gris, semblaient des boîtes hermétiquement closes; les inscriptions, en noir, «< hommes »>, chevaux », après tout, ne prouvaient rien contenaientils réellement des hommes et des chevaux, ou des marchandises, du matériel »? se dit Philippe. Mais << un cinquième convoi qui suivit, après un intervalle de Celui-là transportait du matériel d'artillerie. Philippe temps assez long, ne pouvait lui laisser aucun doute. vit les gueules des canons dressées.

:

Presque aussitôt après, le train de voyageurs se remit

en marche, avec une morne lenteur. Philippe sentit que l'on passait sur une aiguille: évidemment, on quittait la voie de garage pour reprendre la voie principale ; mais le mouvement ne s'accélérait toujours pas, comme si l'arrêt précisément eût été à quelque cent mètres de la gare où maintenant on entrait; et il aperçut en effet l'extrémité d'un quai. Le train s'arrêta encore, et bien que les bâtiments de la gare parussent être assez loin, tous les officiers se mirent à retirer des filets leurs nombreux bagages à main pour descendre là.

[ocr errors]

Comme cette opération menaçait d'être assez longue, il fit réflexion que rien ne l'empêchait de descendre aussi, de se promener en liberté sur ce quai, à portée du marchepied de sa voiture, prêt à y remonter vivement au premier signal. Il descendit; mais, cette fois, dans le brouhaha, parmi les appels croisés, joyeux, les raides poignées de main, les étranges accolades, personne ne prit garde à lui.

La gare était loin, mais non pas hors de vue, et Lefebvre la reconnut du premier coup d'œil. Cet édifice vaste et mesquin, d'un style médiéval absurde, tout rouge, flanqué de tourelles et couronné de créneaux, ces larges quais, ces monte-charges et ces escaliers qui aboutissaient à des couloirs souterrains, tout cela, il le reconnut. C'était bien la gare colossale, militaire, de la petite ville pacifique, provinciale et somnolente où l'Ashley Bell Gesellschaft avait son siège, où vivait Lembach, où Bell avait séjourné, peut-être séjournait encore. C'est là qu'il avait débarqué un matin de jadis et avait été accueilli respectueusement par M. le secrétaire général, M. le Praeses, et M. le Cancellarius.

Mais ce matin-là, il s'en souvenait, il n'y avait qu'un vieux bourgeois, outre lui, dans le train, un gamin sur le quai et, dans l'immense vestibule de l'immense gare, M. le Praeses, M. le Cancellarius et M. le secrétaire général de l'A. B. G. Aujourd'hui tous ces vastes espaces étaient remplis d'une foule, et on comprenait pourquoi ils avaient été ménagés. Philippe ne l'avait-il pas compris dès son premier passage? Il se rappela ses anciennes présomptions.

Des régiments entiers avec armes et bagages étaient alignés, dans un ordre parfait, sur chacun des quais, et demeuraient, en silence, dans la position du garde à vous. Seuls remuaient et criaient, parmi les hommes, les officiers. Philippe vit approcher, pour ainsi dire : aborder, un train vide. Les diverses unités, préalablement rangées de manière à se trouver chacune exactement en face du wagon qui lui était assigné, embarquèrent, au commandement, avec une soudaineté qui le saisit. Il avait des souvenirs trop vifs, après trente ans, de son volontariat pour hésiter sur la nature du spectacle où il assistait. Il fit, malgré lui, une comparaison désobligeante de ces Allemands si graves, dupes d'un simulacre, qui, au besoin, auraient entonné le choral de Luther, et des soldats Français, du moins ceux de son temps, gouailleurs, incapables de prendre au sérieux une mobilisation qui n'est qu'un exercice, de croire que c'est arrivé.

Il songea, par une association d'idées bien naturelle, à l'alerte d'autrefois, qui l'avait fait si brusquement quitter Oxford. Il n'y pouvait songer sans penser à Lembach, et il eut alors une singulière illusion. Là-bas, il crut reconnaître son ancien camarade, son ennemi, en uniforme d'officier supérieur, allant, venant le long du quai, donnant des ordres. La suggestion n'était pas. douteuse et ne pouvait tromper celui même qui, tout en la subissant, en éventait le grossier artifice. Philippe, de si loin, ne distinguait pas les traits de l'officier, sa tournure à peine, et la tournure de Lembach devait avoir passablement changé depuis vingt ans. Au reste, Lembach était officier de réserve et maintenant, vu son âge, d'un grade supérieur. Mais, justement parce que

prie entre ses dents et gesticule, au moment qu'Anna Karénine va se jeter entre deux wagons.

Lefebvre n'était pas à portée de reconnaître quelqu'un | Philippe se rappela le vieux petit moujik qui se penche, même qu'il eût bien connu, le doute profitait à son imagination. Si, au lieu de lui résister, il l'eût seulement aidée un peu, c'est l'hallucination qu'il eût provoquée. Il regretta de n'avoir point de jumelles, puis songea : C'est alors qu'on me prendrait pour un espion.

Le train s'éloigna, le quai demeura vide et, après les mouvements de foule de tout à l'heure, le contraste fut frappant. Mais un autre convoi, peu d'instants plus tard, vint se ranger le long du même quai, en même temps que ceux qui devaient l'occuper s'alignaient, comme précédemment. L'aspect différent des wagons étonna Philippe, sans lui indiquer d'abord quelle sorte de train ce pouvait être ; mais le costume des figurants le lui révéla. Il y avait, cette fois, fort peu de militaires pour un nombre considérable de civils, surtout de femmes. Toutes portaient un uniforme, que l'on aurait pu d'abord prendre pour un habit religieux. Philippe devina qu'il voyait des infirmières et murmura :

Un train-hôpital !...

(Quoique les hôpitaux ambulants fussent ignorés en France à cette époque.)

Il songea que l'exercice de mobilisation, dont le hasard le rendait spectateur, avait décidément un caractère bien sérieux, puisque l'on poussait la mise en scène et le soin de la vraisemblance jusqu'à faire suivre d'un train-hôpital des troupes en manoeuvres. C'est ce détail étrange, la vue de ces wagons destinés à des soldats blessés, qui soudain précisa l'angoisse qui, depuis le début de son voyage, à son insu, d'heure en heure, montait en lui. Mais il en fut diverti aussitôt par une autre vision, celle-ci fantastique.

De loin, il vit errer sur le quai d'embarquement, parmi les groupes, un petit vieillard, à longs cheveux blancs, à longue barbe blanche, - enfin, l'idée que l'on se fait d'un centenaire. Petit? Non. Grand. Très grand peut-être. Mais si voûté qu'il semblait à peine atteindre à l'épaule même des femmes. Une femme, vieille aussi -moins vieille, mais toute blanche - grande et droite, suivait, d'un air inquiet, ses évolutions parmi la foule, comme on surveille, par derrière, à deux ou trois pas de distance, un fou qui ne se laisse pas accompagner.

LETTRES

Feuillets

Le "Casa" devant les syndicalistes Le Casa n'est autre que le Cercle des Amis du Septième Art. Ce septième art vous l'avez deviné c'est le Cinéma, l'art de l'avenir, celui qui synthétise tous les autres, celui qui nous apparaît vraiment comme une langue internationale. Je me souviens avoir vu na. guère, à plusieurs reprises, dans une salle de la place Saint-Michel, un homme dont, je suppose, nul ne méconnaît la haute culture: Rémy de Gourmont. Oui, l'auteur du Château singulier et des Lettres à l'Amazone se tenait, au premier rang, modeste, effacé et il regardait, indulgent même aux extravagances de Max Linder ou du jeune Bout de Zan.

M. Ricciotto Canudo, au retour de Salonique (où il avait eu, devant l'écran. l'impression que cet art muet, ce choix d'images animées, avait une force de suggestion extraordinaire) groupa quelques bonnes volontés. Et ce poète, avec

L'évocation de ce souvenir lui causa un émoi inexplicable, si violent que brusquement il se retourna vers le train d'où il était descendu et auquel il restait adossé, il regarda l'intervalle entre deux wagons avec une terreur stupide - et une tentation vertigineuse de se précipiter.

Pour rompre cette espèce d'enchantement, il ferma les yeux et ne les rouvrit qu'après s'être de nouveau retourné vers l'autre quai, où le train d'ambulance était maintenant comme pris d'assaut. Il vit encore le singulier vieillard, et son Antigone dissimulée, le moujik de Tolstoï; et la littérature appelle la littérature il se rappela un poème d'entre les poèmes des Voix de la Mer, de la Ville et de la Forêt, où Ashley Bell conte comment, pendant la guerre de Sécession, il rôdait autour des blessés et des mourants, appelé vers euxpar sa fraternité insatiable, attiré aussi par l'odeur du champ de bataille et de l'hôpital.

Il n'en fallut pas davantage pour provoquer l'imagination troublée de Philippe à un nouvel égarement; et comme tout à l'heure il avait cru que cet officier de réserve inconnu était Lembach, il crut voir, il vit posi tivement Ashley Bell et sa fille Florence: cette vieille qui l'escortait.

A la fin, il fut excédé de toutes ces bizarreries, de Ices fausses réminiscences, de ces fausses reconnais sances. Pour y couper court, il décida de remonter dans son compartiment, où au fait il allait peut-être avoir l'agrément d'être maintenant seul. Il était temps. Comme il sautait sur le marchepied, avec une récidive de peur de choir entre deux essieux, d'être broyé comme Anna Karénine, sans un coup de sifflet ou de cloche, sans un signal, le train se remettait en marche. Quand Philippe se fut hissé, à l'entrée du couloir il s'arrê Il se sentait en sûreté ; et avant de refermer la port se retenant d'une main à la barre de cuivre, comme vieux petit moujik de Tolstoi, il se pencha. (A suivre.)

de la Semaine

la foi des illuminés, combattit pour le
beau cinéma, contre les mercantis sans
vergogne.

Le Casa comprend des peintres, des
musiciens, des écrivains (J.-J. Frappa,
Rainaldy), des techniciens -metteurs en
scène, auteurs de scénarios (comme
Pouctal, Le Somptier, Abel Gance), des
hommes politiques (M. Bokanowski),
des interprètes, comme Le Bargy, Mmes
Andreyor, Melchior - qui a tourné
Saint-Avit dans l'Atlantide. A ses réu-
nions, on a vu M. Painlevé, Rosny aîné,
Rachilde, Champsaur, etc.

Pour la première fois, l'autre soir,
ce cercle est allé au peuple » comme
on disait jadis. Le fougueux Colomer,
secrétaire de la Fédération du spectacle,
a servi d'agent de liaison. Et la Bourse
du Travail a donné sa plus belle salle,
la salle Ferrer, pour un grand meeting

sur le Cinéma. Les milieux socialistes
étaient assez peu sympathiques au sep.
tième art. On le considérait en général,
comme une amusette d'enfants, un suc-
cédané du music-hall ou du café-con-

cert.

Néanmoins une salle vibrante a accla

ABEL HERMANT.

1

[blocks in formation]
[ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Les Académies

La liste des candidats au fauteuil de Jean Aicard s'allonge chaque jour. Elle porte aujourd'hui huit nom qui sont alphabétiquement, ceux de MM. Du Plessys-Flandre-Noblesse, Charles Grandmougin, Gustave Guiches, Abel Hermant, Camille Le Senne, Louis Madelin, Georges de Porto-Riche et André Rivoire.

Il n'y aura pas de scrutin cette année. On veut recevoir M. Joseph Bédier avant d'élire le successeur de Jean Aicard, et M. Joseph Bédier ne sera reçu qu'au cours du premier trimestre de 1922, par M. Emile Boutroux. Cela remet l'élection à avril ou mai.

[ocr errors][merged small][merged small][ocr errors]

Mgr Duchesne, directeur de l'Ecole efrançaise de Rome,et M. Denys Puech, oyé directeur de l'Académie de France à de Rome, sont à Paris.

ne

- la:

Com

[ocr errors]

Mgr Duchesne aurait, dit-on, quitte le palais Farmèse pour n'y plus retourner. Il prendrait sa retraite. On espère à l'Institut faire revenir l'éminent prélat sur une pareille détermination.

X

M. Denys Puech a été accueilli par ses confrères de l'Académie des BeauxArts presque triomphalement.

A la villa Médicis, il a repris la tradition de l'exposition annuelle des œuvres des pensionnaires, interrompue depuis 1914; mais il a repris la tradition sans la routine, c'est-à-dire qu'au lieu des éternelles et froides copies d'antiques, que les pensionnaires faisaient d'ailleurs exécuter par des photographes et des praticiens, il a présenté des ceuvres originales. Les pensionnaires en ont été ravis, l'Académie lui en a su gré, les visiteurs notamment le roi et la reine d'Italie l'en ont félicité. Il a ensuite usé de toutes les libertés que le règlement de la Villa Médicis permettait et il en est résulté toute une série de petites réformes heureuses.

[ocr errors][merged small]

Le fabuliste et le fabuliste Paris-Noticias raconte l'amusante histoire suivante :

En 1802 un excellent homme publiait un volume de fables qu'il faisait précé der de cette singulière préface.

« Au moment où je livre ces fables à l'impression, j'apprends qu'un M. de La Fontaine a traité quelques-uns des sujets sur lesquels je me suis essayé. J'affirme que jusqu'à ce jour, j'ignorais qu'il existât un M. de La Fontaine et je prie le public de croire que s'il se trouvait quelques ressemblances entre les fables de ce M. de La Fontaine et les miennes, ce n'est pas moi qui suis le plagiaire. D

L'anecdote est jolie, elle est même trop jolie.

Les amis de François Coppée

La mode est aujourd'hui aux socié tés d'amis. En voici une nouvelle « Les Amis de François Coppée qui a pour but de servir la mémoire et l'œuvre du poète par des manifestations commémoratives, des représentations, des conférences.

M. Auguste Dorchain est le président de cette nouvelle société. Le vice-président est M. Henry Céard de l'Académie Goncourt et une actrice Mme Weber.

Le manuscrit refusé

M. Emile Ripert, académicien de Marseille où il a succédé à Frédéric Mistral vient de recevoir de l'académie française le prix Saint-Cricq pour un d'Assise qu'il poème inédit, Poème

écrivit, il y a quatorze ans dans la ville même de François.

Avant et après la guerre, il avait présenté son manuscrit à des éditeurs qui le refusaient. Il l'envoya sans espoir à l'Académie. Sa surprise et sa joie furent donc grande de se voir attribuer un prix de 3.000 francs, un des plus importants de ceux que distribue « l'illustre compagnie ».

Cette récompense l'aidera sans doute à trouver enfin un éditeur. Il serait piquant que ce soit justement l'un des deux, parmi les plus grands, qui se montrèrent si méfiants envers le poète.

Une opinion de Claude Farrère Un de nos confrères a demandé à quelques écrivains ce qu'ils pensaient du roman populaire.

M. Claude Farrère lui a adressé la singulière réponse suivante :

« Les romanciers populaires portent souvent les plus grands noms. Mais les romans de Ponson du Terrail, de Richebourg, de Dickens, de Wells sont excellents. Cela est écrit, cela est construit. »

Il va là de curieux voisinages. L'auteur des Civilisés ne fait-il vraiment aucune différence entre le père de David Copperfield et le père de Rocambol I

Et puis M. Claude Farrère a-t-il lu beaucoup d'œuvre de Richebourg ?

Une autre école de poésie Nous parlions dernièrement ici d'une école de poésie qui nous avait paru sur

133

tout d'une invention assez divertissante. L'idée était dans l'air.

A la rentrée nous aurons une vraie école de ce genre.

M. Jules Romains a en effet l'intention d'ouvrir, à cette époque un cours de technique poétique. Il y aura aussi des travaux pratiques. M. Georges Chennevière a accepté d'aider son confrère dans cette tâche difficile.

Les curieux ne manqueront pas à la leçon d'ouverture.

Prix tunisiens

Le gouvernement de l'Algérie avait fondé ces derniers temps un prix annuel de cinq mille francs. Le bev de Tunis a voulu également venir en aide aux écrivains de l'Afrique du Nord en créant un prix bi-annuel qui prendra le nom de Prix de Carthage.

Il sera réservé à des ouvrages inédits, écrits en français, en prose ou en vers. Le sujet devra être seulement d'inspiration nord africaine.

Les coupons-livres

La Sirène désire augmenter son capital. Elle vient donc d'émettre des obligations. Mais celles-ci sont d'un type fort curieux. Elles comprennent en effet deux sortes de coupons, des coupons-espèces procurant un revenu mensuel fixe et des coupons-livres.

Ces coupons-livres donnent droit à tous les ouvrages édités dans la maison y compris les éditions de luxe. Et ce n'est pas tout, chaque année, la Sirène publiera spécialement pour ses obligataires une édition qui ne sera pas mise dans le commerce.

Il y a là une idée fort originale. Les éditeurs en question ne manquent pas de psychologie. Ils se sont dit que si tous les spéculateurs n'étaient pas des bibliophiles capables de s'intéresser à une affaire d'un genre aussi particulier; beaucoup de bibliophiles n'étaient que des spéculateurs déguisés et et quelquefois d'ailleurs doublés de gens de goût et qu'il fallait en faire des souscripteurs. Ces coupons-livres sont une trouvaille.

ARTS

Le concours de sculpture Dans Paris qui mijote et somnole sous la canicule, toute activité d'art s'est endormie; seuls donnent les concours pour le prix de Rome. L'autre semaine c'étaient les peintres qui fonctionnaient. Par une rencontre assez étrange et qui m'alarme, voilà que mes pronostics ont été ratifiés par le vote du jury. MM. Font et Beaume, que nous mettions en tête, s'en vont couronnés d'un même laurier.

Le sujet contre lequel se sont débattus les sculpteurs est terriblement décevant Deux amoureux échangent des serments devant leurs parents attendris. A l'encontre de mon très éminent confrère Tabarant, je ne pense point qu'il y ait là matière à composition sé vère et gracieuse, fleurie d'émouvants détails. J'ai parlé naguère de salles de

mariage pour mairie de banlieue. Je ne me dédis point. C'est là bien de ces sujets faussement anacréontiques, hypocritement vertueux; cela sent ces éologues que des primaires n'ont lus que dans des traductions. Ce style « vertus civiques et domestiques » fleure à vingt pas les fastes de 1880. Il est hybride et sans tradition. Il fait penser aux romans que faisaient les naturalistes quand ils voulaient jouer aux poètes. Certes, je connais une image délicieuse que ce thème a suggérée, mais ce fut en 1830. Elle représente un jeune officier comme on en voit sur les tableaux d'Horace Vernet. Il est rose et ses joues poupines s'encadrent de pattes de lapins légères comme des frisettes; à peine posé. de côté, sur un canapé, il va glisser bientôt et se mettre à genoux. Sa main droite a pris la main d'une jeune fille qui baisse les yeux et fait une moue chaste. Tous deux ont mis sur leur poitrine tumultueuse leur main gauche, gantée.

Derrière le canapé, le père digne, noble et gras comme M. Laffitte, et la mère, costumée comme la reine Amélie, au bras l'un de l'autre, les contemplent avec un sourire ému; cependant qu'une servante joint les mains et lève au ciel des yeux ravis.

[ocr errors]
[ocr errors]

Cette petite litho, peinte de couleurs vives, comporte une longue lettre expliquant au spectateur que « Roger revenant de la guerre déclare sa flamme à la jeune Augusta. Les parents de la candide jeune fille voient d'un œil favorable une union qui promet tant de bonheur. La nourrice d'Augusta ne peut retenir ses larmes. Voilà de la vraie peinture sentiou gravure mentale. Il ne faut rien faire à moitié. Mais notre temps, il me semble, acquit dans les malheurs une pudeur plus inquiète et, dans les épreuves du concours qui nous occupe, les candidats se sont donnés un mal touchant et ridicule pour fournir aux parents l'expression d'attendrissement qu'on leur avaii commandée. Pas un n'eut le courage de placer la scène en des temps où toute la littérature qui la bourre cût été en harmonie avec les mœurs; d'habiller ses personnages à la Greuze ou à la Scheffer. Plusieurs, par contre, ont eu celui de les vêtir comme fait le tailleur qui habille mieux. Et cette audace pose une fois encore un problème jamais résolu. D'où vient que nous ne pouvons plus utiliser le costume civil contemporain, dans les œuvres sculptées ? Je voudrais savoir ce que donnerait une bonne sta tue de M. de Fouquières en jaquette. Mais je touche aux élégances; Ne sutor... et nous voici si loin du prix de Rome de sculpture que je n'ose y revenir.

[merged small][ocr errors][merged small]

fique qu'elle a créée à Paris-Ivry. Les 24 chambres froides du vaste cube de béton peuvent loger 5 à 6.000 tonnes de produits frigorifiés ou congelés. Le cube utilisable est de 17.000 mètres cubes, et les voies peuvent recevoir 13 wagons en chargement ou déchargement, et 12 en

attente.

L'initiative est heureuse, car nos installations frigorifiques se comptent, et ne peuvent faire figure à côté des installations américaines. Au 15 mars, nos 19 entrepôts accusaient une capacité totale de 119.000 mètres cubes, et une capacité employée de 96.000. Il suffit de comparer ces chiffres insignifiants aux 13 millions et demi de mètres cubes de capacité frigorifique disponible accusée en décembre dernier par les entrepôts officiels et les abattoirs des Etats-Unis, susceptibles de recevoir 45 millions de quintaux de denrées, pour toucher du doigt notre infériorité. La viande et le poisson frigorifiés sont cependant des ressources précieuses, et l'on peut se demander si une campagne en faveur de la consommation des produits frigorifiés ne produirait pas plus d'effet que la lutte à coups de barêmes entreprise contre les bouchers par M. Paisant.

:

Notre flotte frigorifique, née de la guerre, ne compte encore que de faibles effectifs 16 unités en 1920, d'une capacité totale de transport de 30.000 ton. nes, alors que l'Angleterre possédait 229 bateaux, pouvant transporter 370.000 tonnes. Au plus fort de la guerre, elle a compté jusqu'à 323 unités.

Ajoutons pour notre honneur, qu'un spécialiste français croit avoir découvert un procédé de congélation directe de l'eau de mer sans séparation de sel qui permettra de développer l'expédition l'intérieur, de la sardine et du maquereau, et de remédier à la crise dont souffrent les pêcheurs bretons.

La capitalisation en France depuis

le l' janvier 1921

L'atonie chronique du marché, depuis six mois, fait le désespoir des boursiers. Est-ce à dire que l'argent soit rare, ou se cache ? Le phénomène doit plutôt être attribué au goût pour les valeurs à revenus fixes du public écœuré par une longue période baisse sans paliers, après une campagne de hausse spécula tive ininterrompue.

La statistique de la capitalisation en France pendant le premier semestre de l'année courante montre en effet que la campagne de placement de 1921 ne paraît pas devoir être inférieure à celle le 1920. Elle présente les résultats suivants :

Bons et obligations de la D. N. : 12.5 milliards.

Bons 6 0/0 à 2 ans : 5 milliards. Emprunts coloniaux : 0,3 milliard. Chemins de fer: 1,7 milliards. Sociétés françaises 5.8 milliards Société étrangères: 0,07 milliard. Les capitaux disponibles sont toujours importants, mais les placements sont surtout nombreux sous forme d'obligations, et l'on constate que l'argent suit la pente la plus file, celle des valeurs d'Etat.

Le loyer de l'argent a d'ailleurs une tendance à croître. De 6,66 ojo net en mars, le taux moyen des obligations placées ressortait à 6,77 0/0 en juin : c'est que les capitalistes sont sollicités par une demande dont ils connaissent la nécessité et le développement forcé pour les régions libérées. L'absolu besoin d'argent supprime la concurrence.

La tendance à prêter à l'Etai, à cause de l'intérêt avantageux et vraiment prohibitif pour les sociétés privées qu'il offre, persistera-t-elle ? M. Desseilligny, syndic des agents de change, s'attend à une évolution, et annonce l'heure des actions ». Car les valeurs à revenus fixes procurent aussi des déboires, à cause du décalage du taux de capitalisation.

Puisque la confiance reste entière, il faudra que le mouvement de reprise dans l'ordre industriel et commercial, la suppression du budget extraordinaire, et, dans le cadre plus restreint de la Bourse, la hausse persistante de quel ques valeurs favorites, surviennent en fait pour redonner au marché du ton, et du nerf.

Le commerce anglais en juin 1921

Les effets de la grève noire sur l'ac tivité économique de la Grande-Bretagne se révèlent fragmentairement. Le ta bleau d'ensemble des pertes sera diffi cile à dresser et nécessairement incomplet.

Les chiffres du commerce extérieur anglais pour le mois dernier apportent une nouvelle preuve de la gravité du coup porté non seulement à l'industri minière, mais encore à la vie du pa tout entier. 88 millions de livres d'in portations, 38 millions d'exportations 7 de réexportations, contre 86 million aux importations et 43 millions aux ex portations pendant le mois de mai; dé ficit de 43 millions de livres dans la ba lance commerciale. Nulles en juin de l'année dernière, et faibles pendant le premier trimestre de 1921, les importa tions de charbon ont atteint une valeur de 5 millions de livres sterling. C'est un chiffre unique dans les annales du commerce anglais.

CE QU'ON LIT

ROBERT FABRE.

[blocks in formation]
[ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors]

ie c

[ocr errors]

e

[ocr errors]
[ocr errors]
[blocks in formation]
[ocr errors]

Les finances de la France, par Georges BONNET, en collaboration avec Roger AUBOIN. Après avoir magistralement exposé la théorie de notre mécanisme financier, M. Roger Auboin, particulièrement qualifié pour collaborer, sur ce sujet, avec M. Georges Bonnet, suggère de concert avec lui les solutions hardies qui nous permettront de faire face aux charges de notre budget et de notre dette. Cet ouvrage qui s'adresse à tous les Français désireux d'être mis en face des réalités, est d'une puissance et 'd'une utilité incontestables.

Les Rustiques, par Louis PERGAUD, qui obtint le prix Concou. en 1910 pour son ouvrage De Goupil à Margot, est un agréable recueil de nouvelles paysannes, posthume malheureusement, car Louis Pergaud a disparu durant l'attaque de Fresne-en-Woèvre.

LES FAITS DE LA SEMAINE

n'est

LE 21 JUILLET. - L'ambassadeur de France à Londres remet au gouverneonment anglais une nouvelle note, en réponse à celle de M. Lloyd George: La réunion du Conseil suprême est impossible tant que la situation militaire pas renforcée en Haute-Silésie. On attend toujours la réponse de l'Allemagne à la note française. L'Académie française reçoit M. Murray Butler, membre délégué de l'Académie américaine des arts et lettres, venu en France pour poser la première pierre de la Bibliothèque de Reims, pour la reconstruction de laquelle la Dotation Carnegie a donné trois millions. Front gréco-turc Les Turcs reculent ; Eski

La Bourse

Cheir est aux mains des Grecs. Enthousiasme à Athènes. A Londres les entretiens entre MM. Lloyd George et de Valera sont, jusqu'à présent, négatifs

LE 22 JUILLET. — De graves événements se déroulent au Maroc, où les Espagnols subissent une importante défaite. La position d'Annual, attaquée par une armée de plus de 10.000 Maures, est emportée. La garnison, commandée par le général Sylvestre, se replie sur Melilla, en essuyant des pertes considérables. Le général demeuré le dernier, ayant assuré le salut de ce qui lui restait d'hommes, mais cerné par les ennemis, se suicide, ainsi que les officiers de son état-major. L'émotion est grande en Espagne. Après un dernier entretien, où l'accord définitif n'a pu se faire, M. de Valera quitte Londres pour rentrer à Dublin. Là va être discutée la proposition anglaise, qui offre à l'Irlande une Constitution de « dominion semblable à celle de l'Afrique du Sud. A Metz, funérailles du général de Maud'huy. Très émouvante cérémonie. De Russie on annonce que Maxime Gorki va être envoyé à Berlin, pour solliciter le secours de la CroixRouge en faveur des victimes de la famine et du choléra.

[merged small][merged small][merged small][ocr errors]

LE 23 JUILLET. Le gouvernement allemand fait enfin remettre à l'ambassadeur de France sa réponse à la note française du '16 juillet. Če document, de forme impudente, réfute toutes les allégations françaises, et rejette toutes les fautes sur les Polonais, dont il réclame le châtiment. La conférence du désarmement » à Washington est fixée au 11 novembre. Ouverture, à Paris, de l'Exposition canine ». Nouvelles contradictoires du front grécoturc. Les Turcs paraissent continuer leur recul, en infligeant il est vrai, de lourdes pertes au Grecs. Ismid est menacée.

[ocr errors][merged small][merged small][merged small]

La Bourse demeure très irrégulière et la reprise que beaucoup escomptaient ne se produit pas. C'est que la question de la Haute-Silésie indispose les rares spéculateurs encore présents. Les transactions sont extrêmement réduites et les offres, quoique peu importantes, provoquent des mouvements de cours assez étendus.

La situation de place est cependant favorable à un mouvement de reprise; les positions sont insignifiantes et il existerait même un découvert vendeur qu'il serait très facile d'exploiter.

Le marché des change est sans intérêt. Les affaires, en l'absence de besoins pressants, sont nulles et les variations des diverses devises sont, par suite, insignifantes

Le marché des rentes françaises est toujours dénué d'intérêt et l'attention se concentre sur les Bons dụ Trésor 6 olo qui ont été introduits à 500 francs.

[ocr errors][merged small]

mières aux anglais); 2° catégorie par Alcyon, française ; 3° catégorie par Yvels, anglaise. Dernière étape et arrivée du « Tour de France cycliste: Scieur, belge, est vainqueur, sur machine française La Sportive (5.500 kilomètres en 221 heures 48 minutes). LE 25 JUILLET. Sports Deuxiè me journée du « Circuit de la Sarthe > : Le Grand Prix des voitures est gagné par Murphy sur Duesenberg, américaine (517 kilomètres 850 en 4 h. 7 m. soit à une moyenne de 120 k. 600 m.). Journée d'ouverture du Congrès socialiste, à Lille. Les premières séances sont marquées par une véritable bataille, entre majoritaires et communistes; trente blessés. Faits divers : Des bandits masqués attaquent, révolver au poing, un wagon de première du rapide Paris-Marseille ; ils dévalisent les voyageurs, en tuent un qui tentait de résister, sautent du train, et disparaissent.

LE 26 JUILLET. Comme suite au débat et à la décision du Parlement d'il y a deux semaines, la Banque Industrielle de Chine obtient du Tribunal de Commerce le réglement transactionnel.

[ocr errors][merged small][ocr errors]

LE 21 JUILLET. La comte de SaintAulaire, ambassadeur de France à Londres a eu un entretien avec lord Curzon au sujet de la question de Haute-Silésie. Il lui a représenté que le devoir de la France était d'envoyer des renforts en Haute-Silésie pour défendre ses représentants qui se trouvent dans une position précaire. Lord Curzon n'a pas encore fait connaître sa réponse. A l'Elysée le Conseil des ministres doit s'assembler pour étudier la question. M. Millerand, accompagné par le ministre des travaux publics a visité les ports de Rouen et de Dieppe. En Russie la famine provoque des émeutes et des mutineries. L'Etat de siège aurait été proclamé à Moscou.

Les actions de nos grandes banques sont l'objet d'offres provoquées par des bruits ridicules et qui ne sont même pas dignes d'un démenti.

Au compartiment industriel, les valeurs de sucre sont toujours très fermes. Les valeurs de navigation sont plus résistantes et, en dernière heure, on remarque des demandes en valeurs de transports en commun et surtout en Métropolitain. Le Rio Tinto est plus lourd, les avis des Etats-Unis concernant le cuivre étant moins satisfaisants.

Au marché en banque, le Mexican Eagle a été affecté par l'annonce d'un incendie dans la région pétrolifère d'Amatlan mais, aux dernières nouvelles, les puits de la Compagnie ne se trouvent pas atteints.

La De Beers est très résistante, de même que les mines sud-africaines, tandis que les valeurs de caoutchouc redeviennent offertes. I.es valeurs russes sont irrégulières.

J. DESPRÉAUX.

« AnteriorContinuar »