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La Société des alliés s'organise

Les esprits timides ont toujours été pris en défaut au cours de cette guerre. Les événements ont justifié les audacieux. « Société des Alliés, Fédération des Alliés pures chimères ! » déclarent encore beaucoup de gens sages. Il ne leur manque que d'être renseignés.

gue dans l'histoire internationale, et constituent des nouveautés d'une hardiesse frappante. A considérer cette œuvre d'ensemble, qui n'était encore l'an dernier qu'ébauchée, mais qui s'est précisée au cours de ces derniers mois, la formule « Société des Alliés » vient naturellement à l'esprit.

Ce qui distingue une société, en effet, ce sont des organes communs de décision et d'exécution. Par là la société diffère de la simple coalition, de ces groupements éphémères que le passé a connus, agrégations momentanées d'armées, mais non pas fusion,coordination articulation de toutes les forces de plusieurs peuples. Or les comités interalliés poursuivent et réalisent déjà dans une grande mesure cette fusion et cette coordination économiques

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A mieux connaître l'histoire même de la guerre, et ce réseau de forces où sont liés plus étroitement chaque our les cobelligérants alliés, ils se convaincraient qu'une véritable Société des Alliés est née, qu'elle vit et respire, que loin d'être cette abstraction morte, cette vaine fumée d'idéologie qu'ils raillent, elle est une réalité qui se fait sous nos yeux, qui s'étend et se précise tous les jours. Inutile d'engager sur elle des discussions de principes. Il suffit de se pencher de bonne foi sur les faits; ils attestent que la nécessité a fait surgir de force, et en silence, les premiers rudiments viaces d'une organisation interalliée, presque d'un gouvernement interallié, qui n'est pas près de mourir... Laissons de côté l'aspect militaire de cette organisation. Là les conquêtes de l'esprit interallié (commandement unique, amalgame des troupes), très tardives, Unis, où, de la meilleure foi du monde, ils se firent une parce qu'elles ont eu à lutter contre des susceptibilités concurrence déplorable. L'Angleterre, la France, l'Italie, nationales graves, offrent sans doute une portée consi-négociant chacune de son côté, déchaînèrent une hausse si l'on envisage l'avenir, les plus importantes. Concesdérable; pourtant elles ne sont pas les seules, ni même, sions provisoires arrachées aux gouvernements sous la menace du désastre, elles n'auraient pas de raison de survivre à la victoire.

En revanche les créations de l'esprit interallié dans Pordre économique, tout comme des germes pleins d'avenir. Je fais allusion aux conseils économiques interalliés, qui n'ont pas d'analo

aussi décisives, s'affirment

Le doyen de ces comités, qu'il ne faut pas nommer sans respect, car il nous a sans doute sauvés de la famine, c'est le comité du blé, ou Wheat Executive. Vers la fin de 1915, dès qu'il parut évident que la guerre serait longue, les gouvernements des pays alliés songèrent à faire des approvisionnements. Ils se précipitèrent en foule sur les marchés neutres, notamment des Etats

V

excessive des prix. Les Etats-Unis souffraient eux-mêmes des répercussions de cette hausse. Ils firent savoir qu'ils ne voulaient qu'un acheteur unique. Les alliés s'entendirent alors pour créer un organisme commun d'achats qui siégerait à Londres.

Ce Wheat Executive, devait, d'une part calculer les ressources en céréales de chacun des pays alliés et leur déficit de production, d'autre part dénombrer les

stocks disponibles des pays exportateurs. Il opérait en

suite la répartition entre les alliés, et dirigeait les cargaisons des céréales vers les pays où la disette menaçait davantage.

La méthode était excellente. Elle devait être appliquée par la suite, presque sans modification, aux comités de plus en plus nombreux, que la rareté croissante de presque toutes les matières premières obligea de créer. Ces comités (des munitions, des viandes et graisses, du coton, des métaux, des oléagineux, etc...) furent chargés d'élaborer, pour chaque matière, un programme général (joint-programme) des besoins des alliés, mis en regard d'un tableau général des ressources correspondantes. Leur besogne consiste en quelque sorte à mettre sur la table tous les besoins alliés, puis toutes les disponibilités et appliquer les disponibilités aux besoins les plus urgents. C'est la mise en commun des ressources, et leur distribution non plus suivant la liberté des échanges, et la volonté égoiste de chaque allié, mais suivant l'intérêt commun de tous, les plus riches, ou les mieux partagés, fournissant ainsi automatiquement leur aide aux plus faibles.

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Mais on s'aperçut vite qu'il ne servait à rien de répartir entre soi les marchandises disponibles, si l'on ne pouvait en assurer le transport. Le problème du tonnage domina vite le ravitaillement, et même la guerre. Vers la fin de 1917 fut donc créé le Conseil allié des transports maritimes, l'une des deux pièces maîtresses, avec le Conseil allié des achats et finances, de la Société économique des Alliés.

Ces deux conseils en effet détiennent les moyens derniers d'exécution: le tonnage pour le transport, le crédit pour le payement. C'est à ceux que les comités de programme ou les Executives dont nous venons de parler, remettent leur programme général de répartition, auquel ces conseils pourront faire subir les réductions nécessaires. Là encore la méthode est la même les alliés confondent leurs flottes, ainsi que leurs moyens de crédit dans un pays donné; puis ils comparent le fret disponible à tel moment avec l'ensemble des demandes formulées par les comités de programme, ou bien les moyens de crédit avec l'ensemble des achats à réaliser; ils opèrent enfin les compressions jugées utiles, et distribuent le fret et le crédit entre les alliés (1).

Il est clair que je schématise, mais à dessein, afin de dégager le sens, l'orientation de ces créations successives. Dans la pratique, le mécanisme ainsi sommairement décrit subit bien des à-coups. Comment en douter lorsqu'on songe aux immenses concessions que suppose la moindre des mesures prises par ces conseils interalliés? Ces concessions ont été consenties, il faut le dire, avec une générosité clairvoyante, notamment par la Grande-Bretagne qui, avec ses 19 millions de tonnes de fret (la France n'en possédant qu'un million et demi) supporte seule presque toute la charge des transports maritimes alliés.

Une telle organisation n'était possible, en tout cas, que si l'Etat mettait d'abord la main sur le commerce des céréales et celui des matières premières, ainsi que sur les flottes marchandes.

Les comités interalliés ne pouvaient établir de pro

gramme commun que si l'inventaire exact des besoins de chaque pays leur était fourni; pour cela, il fallait que les industriels de chaque catégorie fussent groupés, prêts à la fois à contrôler les demandes et à répartir

les contingents obtenus. D'où la nécessité des consor

(1) Cf. l'intéressant article de M. D. Serruys: La structure économique de la coalition (Revue de Paris, 15 juillet 1918).

tiums si discutés, créés en France par M. Clementel, et dont le principe nous paraît inattaquable, si le fonc tionnement n'en est pas toujours très heureux.

De même le Conseil allié des transports maritimes ne pouvait agir efficacement que si la réquisition préalable du tonnage par tous les Etats alliés lui donnait les moyens de distribuer le fret suivant les besoins. D'où les mesures gouvernementales prises en Angleterre et en France contre la liberté des transports maritimes.

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Ces décisions si considérables, et qui eussent paru intolérables en temps de paix, ne peuvent en effet justifier, si l'on se borne à envisager d'un point de vue strictement national les problèmes du ravitaillement et de la défense.

Elles se justifient au contraire, et s'éclairent du point de vue interallié, car, sans elles, cette organisation commune, qui nous a sauvés du désastre, eût été impossible.

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Dans cette société économique embryonnaire, il des pauvres et des riches. La Grande-Bretagne détient la plus grande flotte, les Etats-Unis la plus grande force financière; la plupart des matières premières sont monopolisées par ces deux Etats. Dans une telle société les uns donnent plus qu'ils ne reçoivent, mais chacun retire une force plus grande de l'ensemble. Cette inégalité d'avantages est du reste la loi de toute société

Pour la France spécialement, le concours économique qu'elle réclame n'est que la faible compensation des sacrifices énormes en hommes et en richesses qu'elle a consentis depuis quatre ans. La France est le champ de bataille des alliés. La fatalité tragique qui a porté la guerre sur son sol, sur ses régions industrielles et sur ses plaines, a aggravé sa situation relative parmi les alliés, sa situation financière notamment. La justice et l'intérêt commun exigeraient qu'il n'y eût qu'un seul crédit allié pour les besoins de la guerre. Ils exigeraient aussi que les pertes au change entre les pays alliés fussent compensées. L'Europe Nouvelle (27 juillet) a dé montré que les pertes au change, pour la France, attei gnaient, pendant la période qui va du 1er janvier 1917 au 31 mai 1918, la somme de un milliard et demi. Ces quinze cent millions ont profité à nos grands alliés plus heureux, ignorants des ruines de la guerre sur leur aux conséquences propre sol, et soustraits en outre financières de cette vocation déplorable.

lacunes

Ce simple exemple dit assez quelles graves. subsistent dans cette organisation économique des alliés, qui n'est encore qu'à son début. La justice ne sera satisfaite que lorsque l'unité des ressources, l'unité des flottes, l'unité du crédit et du change seront vraiment réalisées. Il conviendrait que ces organismes un peu épars, dont nous venons de parler, ces comités et conseils interalliés, fussent sous la dépendance d'un conseil économique suprême qui donnerait l'impulsion commune, prendrait les grandes décisions économiques qu'imposerait la politique interalliée.

Mais il faudrait d'abord, et avant toutes choses, qu'une convention interalliée édictât le statut, ou la loi économique commune, et donnât un caractère légal à une œuvre jusqu'ici un peu arbitraire et de hasard. Sans cela toutes les conquêtes interalliées seront bien fragiles, et ne différeront pas beaucoup de simples expédients. graisses.. etc.) ne sont pas, et ne peuvent pas être, malAinsi les Exécutive (du blé, du coton, des viandes et gré leur nom, de véritables organes juridiques d'exécution. En droit, ils ne pourraient tirer leur pouvoir d'exé cution que d'une convention ou d'une charte

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par les alliés. Ils se contentent donc de préparer les décisions qu'ils soumettent ensuite aux différents gouvernements de l'Entente. Ceux-ci se bornent en fait à entériner leurs décisions. Tout se passe comme si les comités interalliés étaient dotés d'un pouvoir juridique, mais l'absence de légalité change profondément leur caractère.

Comment ne pas voir l'immense transformation du monde qui s'accomplit ? L'ère américaine et fédéraliste du monde s'est ouverte. Washington devient le centre de la guerre. De l'Océan émerge déjà le bloc géant des nations libres occidentales dressées victorieusement en face d'un Mitteleuropa féodal. L'opinion, lente et réfractaire, se plie mal à ce brusque changement de l'histoire. Son strict nationalisme la rend défiante envers toute idée d'union ou d'alliance à forme fédérale, que les nécessités de la guerre cependant rendent chaque jour plus clairement nécessaire. Car ce serait perdre la guerre que de se séparer à la paix.

Notre supériorité militaire est encore discutée, mais notre supériorité économique est certaine, absolue; les alliés possèdent les trois quarts des richesses du monde Or, qu'avons-nous fait pour organiser cette supériorité réelle, pour la rendre sensible à nous-mêmes d'abord, à nos ennemis ensuite, pour démontrer que demain, si nous le voulons, nous pouvons arrêter la croissance de l'Allemagne, lui couper ses racines, son ravitaillement et ses débouchés, et pour lui faire sentir enfin cette force irrécusab le, devant laquelle elle cédera? L'unité des alliés est le grand instrument de la paix.Elle dépend de nous..

Qu'est-ce, en effet, que cette fédération économique de l'Occident que nous demandons (1) ? C'est l'organisation d'une sanction efficace qui seule rendra possible la Société future des Nations. Car l'éternelle, et il faut bien l'avouer, la décisive objection contre la Société des Nations, c'est l'absence de sanction. L'Union économique des alliés au contraire, dès qu'elle est solidement fondée, trouve en ses mains une arme toute forgée d'une efficacité certaine : le boycottage, ou ce que M. Walter Berry appelle l'embouteillage économique, du pays félon. Cette sanction, prise aujourd'hui à l'égard de l'Allemagne pour la forcer à accepter les principes de liberté du droit moderne, jouera demain préventivement, si l'on veut, contre l'allié défaillant.

Songez au formidable pouvoir de ces Exécutive ou conseils alliés, s'ils devenaient un jour les Exécutives de la Ligue des Nations !... Ils tiendraient en leur pouvoir, réellement et sans réserve, par la répartition souveraine des matières indispensables et le contrôle de la production de toutes les puissances, ils tiendraient en leur pouvoir la paix du monde. L'Exécutive refusant de sanctionner un programme exorbitant d'importations demandé par une nation qui veut s'outiller pour la guerre, fait avorter tout dessein agressif. Refus d'importation, refus de crédit, refus de tonnage même, par là l'Etat au mauvais dessein est garrotté, lié par avance. C'est une terrible atteinte à la souveraineté des Etats, soit, mais comment concevoir, sans cela aucun remède à guerre éternelle?

la

ALFRED DE TARDE.

(1) Voyez dans ce sens les articles d'Albert Milhaud (le Parlement et l'Opinion), d'André Lebey (le Petit Parisien), de Pierre Albin (l'Eclair), de Marie Leneru ('Intransigeant), et sur le pacte économique des alliés, Georges Hersent (Le Correspondant).

A

CE QU'ON DIT...

CCUSÉ de trahison et de complicité de trahison M. Malvy vient d'être acquitté de ce double chef par le Sénat, constitué en Haute-Cour de Justice. Nous avons donc, depuis lundi, un traître de moins. Il se trouvera quelques bons Français pour le regretter. Nous ne serons pas du nombre.

S'en trouvera-t-il beaucoup plus indulgents que les sénateurs pour absoudre M. Malvy, ministre, de toutes ses actions et de toutes ses omissions? Il est permis d'en douter.

M. Malvy, ministre, a eu à résoudre de graves problèmes. Il les a résolus à sa manière qui n'était pas celle. de M. Guizot. Mais si M. Malvy eût ressemblé à M. Guizot, il n'aurait pas été le délégué à l'Intérieur du Parti Radical et Radical-Socialiste. Au Palmarium de Pau, combien de voix aurait eu M. Guizot? La manière de M. Malvy se caractérisait par de multiples complaisances et par un relâchement systématique. M. Barrès, qui devient bien doctrinaire, reproche sérieusement au député de Souillac de n'avoir pas pratiqué la morale de Saint-Cyran. Il est très certain que l'arrondissement de Souillac n'avait pas envoyé M. Malvy à la Chambre pour être janséniste.

Certes, les débats du Luxembourg ont révélé au public les détails d'une assez vilaine cuisine. Mais le public votait volontiers, naguère, et en connaissance de cause, pour ceux qui la faisaient ainsi. Et d'aucuns la vomissent aujourd'hui qui en ont mangé, qui en ont vécu pendant trente ans. Leur délicatesse d'estomac est tardive. Elle sent l'indigestion. Nous n'avions pas attendu si longtemps pour juger le régime et le condamner.

Il ne suffit pas de le juger et de le condamner. Il faudra le changer. Il ne suffit pas d'expulser une brebis galeuse. Il faut soigner le troupeau. Mais d'abord il faut lui donner d'autres bergers ou lui apprendre à en choisir d'autres puisque le troupeau choisit les bergers.

Jadis une certaine supériorité d'esprit et d'âme paraissait indispensable pour l'exercice de certaines fonctions que des hommes un peu graves regardaient comme des sacerdoces. Ces hommes-là croyaient que «< c'était arrivé ». M. Malvy croyait, lui, qu'il était arrivéIl n'était que parvenu, trop vite, trop haut. Possible qu'il ait manqué de scrupules. Mais surtout il manquait de qualité. Circonstance atténuante il n'était pas le seul. Il y aura toujours un moyen de défendre sa mé moire qui sera de dire: Et les autres ?

Extrait du Larousse pour tous.

O.

çà et là.

«Ostracisme. Jugement du peuple d'Athènes par lequel il bannissait pour dix ans un citoyen suspect. L'ostracisme était une mesure de précaution prise exceptionnellement contre un homme dont on redoutait l'excessive popularité. La mesure n'avait rien d'in famant et le banni conservait la propriété de ses biens. A Athènes où il fut introduit par Clisthènes, l'ostracisme fut appliqué notamment à Thémistocle, à Aristide, à Cimon, à Mégaclès, enfin au démagogue Hyperbolos. Ce dernier verdict déconsidéra l'ostracisme qui ne fut plus appliqué depuis. >>

La victoire.

Nous copions ces quelques lignes, vécues, d'une lettre adressée à un de nos collaborateurs par un combattant de la dernière offensive :

«...Les événements ont été rapides, émouvants et

sans entr'acte. J'y ai assisté en spectateur, nous appelons cela observateur, depuis que l'uniforme nous a sevrés de toute prétention à la psychologie, et j'ai vu de près le mécanisme de l'échec allemand. Le 15 juillet a été, vraiment, une grande journée, une journée où le hasard n'a point joué, -mais où l'esprit allemand a payé la peine de ses défauts les plus marquants. Un mauvais arbre a porté de mauvais fruits. Ce sont des gens qui ont péché par orgueil.

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« Il fallait voir cette vérité inscrite dans chaque détail du combat, dans chaque pli du terrain, dans chaque minute de l'action, comme dans la conception d'ensemble. Il me souvient d'avoir connu, autrefois, une impression semblable: c'était Litvinne qui chantait, et l'on jouait la Tétralogie.

« Contre cette bataille wagnérienne, nous avons réagi, nous aussi, avec le meilleur de nous-mêmes, avec un esprit avisé, clairvoyant et si l'on peut parler ainsi de choses aussi graves, nous avons joué un bon tour aux Boches.

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« En somme, voici enfin une victoire du commandement, non plus un miracle de la troupe. Les actes les plus sublimes, dans ce grand tableau composé avec art,paraissaient naturels, bien à leur place on sentait qu'ils devaient obtenir leur plein succès; chaque combattant avait les mains pleines et pouvait donner au pays sans compter, donner autre chose qu'un sacrifice perdu... >>

A Notre-Dame.

Dans la grande basilique aimée, veuve pour des mois de ses roses du Nord et du Sud, et trop éclairée d'un jour inattendu, les deux cardinaux de Paris et de Reims, l'un en face de l'autre, debout sur le trône pontifical dans le rougeoiment de leur pourpre, sous les drapeaux de toutes races et de toutes couleurs qui frissonnent pour la liberté du monde, chantent ensemble, syllabe à sylabe, le Benedicat, qu'ils étendent de leur double Voix sur la foule venue prier pour la patrie.

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Des nefs aux tribunes la multitude a envahi l'église Aux places d'honneur, en habits bleus ou blonds, des soldats d'Europe et d'Amérique sont massés pour la lutte, attentifs. Le grand orgue joue une pièce héroïque de César Franck. Les ambassadeurs des peuples alliés sont là. Le Conseil des ministres après une délibération animée, a préféré s'abstenir pour des causes juridiques. Mais il reste, pour représenter la pensée française, des savants, des artistes et des philosophes.

Sur la place, les portails emmurés ressemblent à des entrées de citadelle.

En marge de la Haute-Cour (fin sans suite.)

Le Sénat vient de terminer le cours de ses représentations de justice au rythme réapparu du canon, qui a fait hausser les épaules de Paris devant la niaiserie teutonnante des Boches.

L'intensité dramatique avait faibli pendant les monologues du Procureur et de l'Avocat, bien que l'habi

ne

leté calme du bâtonnier Bourdillon n'eût pas manqué de présence d'esprit. Au reste l'installation matérielle de son éloquence fut difficile, car il s'agissait de tourner le dos à personne, ce qui est compliqué quand on a du monde tout autour de soi. Pour comble de peine, lorsque la petite chaire eut été mise en place, on vit, inquiètes, les mains du bâtonnier passer sur elle, et d'autres mains et d'autres encore, qui toutes se retiraient indignées et grises de poussière il y a partout des questions de ménage.

:

Le maître de la maison, au long de ces vingt audiences, ne s'en est pas moins efforcé d'être un président impartial, et il y a réussi, encore que le timbre mécon

tent de sa voix ne parût guère s'y prêter. La sempiternité hallucinante de son costume, qui fait croire par instants qu'il est né dans un habit noir, l'opprimait au surplus, et, quand il ne pouvait plus contenir ses élèves, c'était d'un geste désespéré qu'il offrait sa place à qui voulait la prendre. Cependant que le grave M. Ribot, trottinant et courbé, s'en allait acheter son journal.

L'intérêt a rebondi dès que le huis clos a commencé.. Le mur derrière lequel il se disait quelque chose ne gardait que peu de secrets, et même, comme pour attiser l'émotion, dans un va-et-vient qui faisait de ce drame une pièce à tiroirs, les portes se rouvraient. Le public, qui comporte en soi l'accusation et la défense, réadmis, était renvoyé ensuite pour être appelé à nouveau. Le dénouement approchait. M. Malvy y a assisté debout, les bras croisés. « Accusé, vous n'avez rien à ajouter? Absolument rien, Monsieur le président ».

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On a remué toutes sortes de vieux souvenirs d'atten tats à propos des deux assassinats politiques qui ont eu lieu coup sur coup en Russie. L'un des plus discutés, comme attentats, de ceux qui firent le moins de mal et le moins de bruit, fut celui dont Napoléon III fut victime au moment où il se rendait aux Italiens. Il ne fut pas atteint, fit son entrée d'un air tranquille et prit place dans la loge impériale. A ce moment, on annonça que la représentation ne pouvait commencer tout de suite parce que la Ristori venait de s'évanouir en apprenant le dramatique incident. L'Empereur envoya Conneau prendre des nouvelles :

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Chez nos Allies.

Sait-on que les descendants des Algonquins, des Hurons, des Miamis, des Shawnees, des Cherokees,des Chippewas, des Ojibwas, des Choctaws, des Creeks, des Apaches (les vrais), nous ne disons pas : des Mohicans, car chacun se souvient que Fenimore Cooper a immortalisé dans un roman célèbre le dernier représentant de cette tribu indienne combattent dans les rangs américains? Oui, les Peaux-Rouges eux-mêmes ont traversé l'Océan pour entrer dans le sentier de la guerre et alder leurs anciens conquérants les Visages-Pâles, dans la lutte contre l'Esprit Mauvais. Qu'on se rassure du reste ces précieux alliés ne sont pas armés de lances et de flèches, mais bien d'excellents fusils à tir rapide et de mitrailleuses dernier modèle; ils ne font pas voler au vent de la bataille les plumes multicolores de leurs coiffures traditionnelles, mais ils portent fièrement le prosaïque et protecteur casque d'acier. Cepenqui distinguaient les héros de Mayne-Reid et de Fe dant les qualités de bravoure folle et de ruse patiente nimore Cooper n'ont pas dégénéré chez leurs petitsneveux; elles trouvent du reste à s'employer utilement sur les champs de bataille de l'Ile-de-France et de Champagne.

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