Imágenes de páginas
PDF
EPUB

oujours eu, dans l'histoire, des sympathies nettement marquées pour l'Allemagne, et seuls les deux derniers tsars avaient penché en faveur de l'alliance avec la France.

En outre, la révolution.

russe a nettement prouvé que tous les peuples qui vivaient sous la domination des tsars aspiraient à se séparer de la Russie. Je ne parle pas seulement des Polonais, chez lesquels ce seniment ne peut surprendre personne, ni des Finlandais, qui ont toujours porté en eux la haine du Russe ; mais les Lettons, des Lithuaniens, des Géorgiens, des Cosaues ou même des peuples comme les Tartares et ies Kirghises. D'ailleurs, l'Entente ayant posé le grand rincipe des nationalités à la base de ses buts de uerre, comment pourrait-elle envisager la reconstituon de l'ancienne Russie?

Au point de vue purement politique, la Russie onstituait pour les Français, le contre-poids naturel la formidable puissance des Allemands vivant soit us le sceptre des Hohenzollern, soit sous celui des absbourg. Or, l'Empire russe n'existe plus. S'il est constitué, il sera inévitablement monarchique et à tenance progermanique. En aidant à cette reconstitution, pus nous plaçons devant le double danger d'agir conairement aux principes pour lesquels nous nous batns, et de créer un Etat devant naturellement s'apyer sur nos ennemis. Où devons-nous donc chercher un lié qui puisse neutraliser les empires du Centre à Est? C'est là où nous croyons fermement à l'avenir de Pologne.

son

Sans développer outre mesure le point de vue précént, qu'il suffise de dire que, par son histoire, par ses uffrances, par sa position géographique, par mmerce et son industrie, le Polonais se trouve être nnemi naturel de l'Allemand. Celui-ci le sait bien, ssi tous ses efforts ont-ils toujours été concentrés sur politique d'affaiblissement de la Pologne. Du jour la Russie s'est effondrée, l'Allemagne a mis en jeu ute sa diplomatie pour égarer l'opinion des alliés sur point.

Récemment, nous avons vu apparaître dans la presse revendications de la « Lithuanie ». Cette province ne fut quelque chose » dans l'histoire que du ar où elle se souda à la Pologne, n'a pas même de ture qui lui soit particulière, et seuls les Allemands t intérêt à créer en elle une sorte de personnalité litique qu'ils cherchent à dresser contre la Pologne. en est de même de l'Ukraine, nouvelle formation litique, sans histoire, qui sert admirablement les vies de l'Allemagne, aussi bien contre une Russie trop te que contre une Pologne trop envahissante. Enfin, ose étrange, les bolcheviks, soi-disant « champions >> droit des peuples à disposer d'eux-mêmes », ont ujours été les ennemis les plus acharnés de l'esprit lonais. Les agents de Wilhelm établis à Smolna ulent bien que le Turc prenne Batoum et Bakou, ais ils se déclarent contre les corps polonais que Kensky avait cependant laissé former.

N'a-t-on pas, dans ces quelques faits de la dernière fure, la preuve de l'importance que l'Allemagne donà la question de la Pologne?

Elle tremble en songeant aux revendications possiles des Polonais sur l'énorme bassin industriel de la ilésie; elle sait que la reconstitution d'une fédération olonaise comprenant une partie de la Lithuanie et e la Courlande lui porterait un coup terrible et lui alèverait pour toujours l'espoir de réaliser ses rêves e domination en Europe..

C'est cet Etat, comprenant de 25 à 30 millions de olonais, qui constitue le véritable contre-poids aux léments germaniques. Contenu par lui à l'Est, contenu

par les Français et les Belges à l'Ouest, l'Allemand sera obligé d'abandonner sa politique pangermanique et de ramener ses sentiments belliqueux à une échelle plus modeste, précisément celle de sa propre et légitime défense.

En prévoyant une carte d'Europe remaniée de cette manière, on ferait de la simple logique, tout en agissant strictement dans l'intérêt des Français; enfin la justice immanente y trouverait sa consécration.

De même que nous voyons la future Pologne assumer le rôle en Europe orientale de régulateur de l'équilibre européen, de même nous voyons un Etat grand russien, nouvelle monarchie russe, aller jusqu'à Vladivostok. Cette monarchie, par de puissantes traditions historiques, aussi bien que par sa forme gouvernementale, évoluera naturellement vers l'Allemagne impérialiste; mais, absorbée par son rôle en Extrême-Orient, occupée par les puissances qui se seront formées sur ses frontières, elle ne pourra être qu'un facteur d'équilibre mondial et non une hypertrophie de puissance, ce que n'aurait pas manqué de devenir la Russie des

[graphic]

tsars.

Comment donc concilier les actions dont nous venons de parler? Et sont-elles conciliables? Nous le croyons fermement.

La rétribution du Japon entrant dans la lice européenne et la formation d'une puissante Pologne seront, il est vrai, à la charge de la Russie des tsars. Mais le seul parti qui se montrera irréductible sur cette question sera précisément celui des impérialistes russes représentant l'ancienne bureaucratie dirigeante, habituée à asservir une quantité de peuples par la force. Peut-être aussi des représentants de l'intelligence russe, cadets ou autres, déploreront-ils la disparition de la Grande Russie des tsars où leur esprit se plaisait à rêver un avenir de justice et de paix réalisé par leurs soins. Cependant, par quels faits les uns ou les autres pourraient-ils justifier leur point de vue? Tout milite au contraire contre leur cause et l'effroyable désordre qui règne dans l'empire russe ne doit pas leur servir d'argument pour solliciter une intervention afin de rétablir précisément ce que la « vie » a jeté bas par ce que c'était un illogisme historique et ethnographique.

Les vrais Russes cherchent leur voie au milieu du chaos, c'est à eux de la trouver, et non pas aux alliés de la leur imposer, qu'il s'agisse, pour le futur, d'un Etat fédératif ou d'une quantité de petits Etats indépendants! Aidons donc les anciens sujets de notre alliée d'hier à recouvrer l'esprit et l'ordre et laissons-les décider eux-mêmes de leur sort. Si, dans un mouvement national, ils arrivent à se reconstituer dans des limites plus étroites mais correspondant aux conditions ethnologiques véritables et aux aspirations de leur race, ils en seront d'autant plus forts plus tard, car ils auront alors une nette perception de leur rôle politique et historique. Sachons donc les protéger contre l'envahisseur allemand; mais sachons éviter toutes mesures qui seraient provoquées par une sentimentalité déplacée en faveur de l'ancienne Russie impérialiste.

Le principe de la Pologne libre a été proclamé par le tsar. Il a été confirmé bien des fois par la révolution russe. Nous n'avons aucune raison d'être plus russe que les Russes, en allant contre nos intérêts.

Agissons donc sans perdre une minute auprès du peuple polonais; que ceux qui luttent pied à pied en Pologne sous la domination tcutonne sachent que les alliés sont derrière eux pour, à l'heure du règlement de comptes, exiger la rectification d'une des plus grandes iniquités de l'histoire.

[graphic]

En ce qui concerne le Japon, il est certain que ce peuple devra chercher un débouché, or ce débouché naturel est constitué par la Mandchourie d'abord, la Sibérie ensuite.

Est-il dangereux de demander au Japon de s'immiscer dans les affaires européennes et d'agir en Sibérie par la force? Le Japon, puissant et entreprenant, à côté d'un pays entièrement neuf et arriéré, devra fatalement y jouer le rôle prépondérant et aucune force ne paraît devoir aller contre cette tendance; les EtatsUnis eux-mêmes commencent à s'en rendre compte.

Pourquoi alors chercher à éviter l'inévitable? Si donc le Japon fixe un prix à son immixtion rapide et décisive dans les affaires de Russie, sachons discuter la proposition et ne nous laissons pas aveugler par des considérants d'ordre philosophique qui ne pas devant la vie et la réalité.

tiendront

FRANÇOIS NOËL.

CE QU'ON DIT...

Un deuil imprévu vient de frapper l'Opinion. M. Jacques Drake del Castillo, un ami de la première heure, qui fut à la fondation du journal et présidait notre conseil d'administration, est mort cette semaine, enlevé prématurément à l'affection des siens et de ses amis. Ancien député, conseiller général d'Indre-et-Loire, ce gentilhomme terrien fut toujours de ceux qui surent allier dans une heureuse activité, le souci des grandes questions du jour, le sens du progrès, le respect de la tradition.

www

Le capitaine-aviateur Marcel Doumer est tombé, cette semaine, mortellement frappé dans un combat aérien. C'est le troisième fils que M. Paul Doumer donne ainsi à la France. Au père si cruellement frappé, qui fut un des fondateurs de l'Opinion, qui en est resté un des plus fidèles et sûrs amis, nous tenons à apporter ici, notre témoignage de profonde sympathie.

çà et là.

L'exposition du Livre au musée Galliera. Un des personnages qui resteront le plus vexés de la guerre porte le nom de Leipzig. Cette ville bouffie d'orgueil, en se grossissant à force de battage et à coups de discipline, en arrivait à laisser douter de soimême les pays des Estienne et des Didot, des Alde, des Elzévir ou des Plantin.

:

Et

Mais le canon nous fait réfléchir et prendre mesure de nos moyens, bien plus qu'il nous fait peur. c'est au son du canon que le musée Galliera vient d'ouvrir une exposition du Livre, où s'affirment toutes nos maîtrises, en dépit des émotions qui font se fermer quelques volets dans Paris. Toutes les beautés, que rien ne déroute, s'y sont donné rendez-vous beauté du papier et beauté de l'écriture, où préexcelle ce titre, suggestif en chacun de ses mots et de ses chiffres : "Georges Clemenceau - Vouloir ou mourir chez Pichon 1913 » et qui se continue jusqu'en 1918. Beauté de l'illustration avec le charme, la vigueur ou la fantaisie des Dulac, des Daragnès, des Brunelleschi, des Bertier ou des Carré. Beauté de la reliure, qui est la grande dame de ce palais et s'y montre en cent de ses atours, sortis de chez des faiseurs de choix et qu'ont prêtés quelques amoureux des livres pris dans la politique, la finance et jusque dans les lettres.

:

Il y a les reliures qui sont voulues pour le livre et celles qui sont imaginées pour le plaisir, et qui, domi nant le livre, peuvent arriver à le faire oublier. Mai l'on reste libre ici de se réjouir les yeux des unes et des autres liber libro. Alors on regarde les Gueules noires de Prouvé, avec le mineur sur fond d'or, la squameux et sombre, et la Vie de N. S. Jésus-Chris de Séguy, poème des épis et de la vigne, et le Livr pour toi à l'extérieur de maroquin tout uni, dont Mm Waldeck-Rousseau incisa précieusement les intérieur pour M. Barthou. Et, pour M. Beraldi, cette Mer d Lepère avec son beau raccourci de femme portée su les vagues. Et l'Hamlet de Mlle Germain, en sa rob presque noire effleurée d'or et d'argent. Et Rédem tion dans les douceurs azurées d'un vieux cuir vénitien et le Fantôme d'Orient avec ses gris et ses rouges do on ne sait si c'est du soleil qui se couche ou du san qui coule. Et Daphnis et Chloé dans l'innocence de so parchemin et avec le médaillon ironique du faun avertisseur. Et les Erynnies de luxe et de deuil... Voilà au moins un sujet à méditer pour Leipzig!

[graphic]

wwww

Les dangers du provisoire.

Nulle part le provisoire ne peut être aussi dangereu qu'en France, car c'est ce qui dure le plus longtemps. en sera peut-être ainsi pour la politique de consortiums. On sait que ce mot pédant et rébarbati désigne, en somme, une société anonyme. L'Etat étan devenu, à cause de la guerre, seul acheteur et seul trans porteur, a dit aux fabricants : constituez un conso tium, une société anonyme, dont vous serez actionnair dans la proportion de l'importance de vos usines. Vou fabriquerez, et vous vendrez mais à un prix taxé ! Parfait. Mais n'y aura-t-il pas des écueils à éviter?

nière

[ocr errors]
[ocr errors]

Prenons l'huile, si vous le voulez bien. L'année de avant Saint-Consortium les arachides va laient fr. le kilo; les huiles logées se vendaient 40 francs; les tourteaux de 45 à 50 fr. Et les fabricant ayant le droit d'acheter et de transporter, arrivaient alimenter leurs usines.

Aujourd'hui, les usines françaises ne sont approw sionnées que pour un quart de leur production normal La graine d'arachides vaut 1 fr. 40; l'huile est taxe 595 fr.; les tourteaux valent 73 fr. Fabricants consommateurs se regardent, avec un rire jaune.

Il y a, d'ailleurs, des différences entre les alliés. U vapeur a un chargement de graine des Indes, p exemple, moitié pour Marseille, moitié pour Liverpoo Le fret pour la part française est de 1.400 fr., pour part anglaise de 450 fr. En général on paye plus che pour aller plus loin...

[ocr errors]

En tous cas c'est cette politique des consortiums q a été approuvée, acclamée à la Chambre, cette semain M. Clementel, notre éminent ministre du commerce, déclaré solennellement : « Nous marchons vers un r gime économique nouveau ». Plutôt... M. André Ta dieu, avec une compétence parfaite, a montré l'exemp des Etats-Unis, qu'il approuve, qu'il admire. « Cett grande œuvre d'organisation n'a tué, a-t-il dit, en Ame rique, qu'une industrie, celle des intermédiaires..."

Parfaitement. Mais, encore une fois, cette politique des consortiums est un régime de guerre, nécessité par la guerre. Certaines gens disent qu'il y a des maux nécessaires, des médicaments pour malades, qui sont mauvais pour gens bien portants. Le danger c'est d'en

[graphic]

ager l'avenir. Or, comme le remarquait un judicieux, filet de notre confrère la Liberté, il semble résulter a discours de l'honorable M. Clémentel que la poliique des consortiums n'est pas un expédient de guerre phémère, mais qu'il entrevoit sous cette forme un orgaisme de paix. Notre ministre du commerce l'a dit en ropres termes « L'instrument de guerre peut être emain un puissant instrument économique de paix ». Souhaitons-le, et que le provisoire, s'il devient éfitif, devienne parfait.

L'Independence day nous aura valu un baptême : lui de l'avenue du Président-Wilson. L'avenue du ocadéro est allée rejoindre, dans les limbes des chospérimées, les souvenirs de l'exposition de 1900, la grande »...

Ce changement de nom est de tout point parfait. Il ut mieux que les « débaptisations » représailles, de guerre rue Jean-Jaurès pour rue d'Allemagne, de ege pour Berlin, et «< tutti quanti ». (L'avenue de Soa échappé au zèle patriotique de nos édiles, tout mme la rue de Presbourg...) Surtout, il est meilleur, e certains demi-calembours de jadis la rue d'Enmuée en rue Denfert-Rochereau, par exemple. Chose curieuse Aux temps combien lointains! farouche anticléricalisme, on avait laissé la rue eu, elle existe toujours, mais n'a sans doute rien de nmun avec « le vieux ». Et nous avons aussi une passe des Prêtres...

On veut tenir.

[ocr errors]
[ocr errors]

Dans la salle de la Bibliothèque du conseil munici, à l'Hôtel de Ville, on peut voir, collée à l'intérieur ane vitrine, bien apparente, une affiche ainsi libellée :

DÉFENSE EXPRESSE

de prononcer ici aucune parole de découragement de lassitude, de critique

ou de tenir des propos de nature à affaiblir l'énergie patriotique et la confiance absolue dans nos chefs et dans nos alliés.

En un tel lieu. fréquenté à peu près exclusivement par s vigilants édiles, cette défense était-elle donc nécesre? Personne ne pourrait nous le faire croire. Et st pourquoi, sans doute, la vue de ce papier fait soue les garçons de bureau.

Chose vue.

Derrière son comptoir, la buraliste trône. On vient retirer de la vitre l'écriteau désespérant comme l'insption de la porte infernale : « Ni tabac, ni cigaretS». Le docile troupeau des fumeurs piétine humbleent du comptoir au ruisseau. Un paquet jaune, c'est pas de difficultés. Mais un paquet bleu de 5 sous fait de l'amateur de caporal un misérable à la erci de la buraliste.

sous

[ocr errors]

[ocr errors]

La buraliste a placé auprès d'elle une grande sébille lein de monnaie d'une monnaie qui n'est pas pour Es clients. Avez-vous 16 sous ? >>> <<< Non. >> Alors donnez 26 sous, je vous rendrai 50 centimes. >> - «Je n'ai pas de monnaie. » « Alors voilà du haryland. >> «Mais je n'en veux pas, vous avez là ent francs de billon, vous pouvez bien me rendre Pas même de réponse. La buraliste trône, e troupeau de ceux à qui elle raflera leur monnaie tout l'heure murmure; il murmure contre le fâcheux qui a l'audace de prétendre que les espèces sont faites pour être utilisées et non pour s'entasser dans les caves des regrattiers, âpres et insolents.

sous. >>>

Alors le pauvre homme paye 20 sous du tabac oni ne lui convient pas, et s'en va sous les regards désappro

bateurs des courtisans du comptoir. Dans la rue il conte sa mésaventure à un agent qui lui dit d'aller voir le commissaire. Et comme il ne peut pas perdre une heure à s'engager dans une obscure poursuite qui, au fond lui cause la frayeur de l'inconnu, il file avec son paquet jaune.

Au comptoir la buraliste trône comme une idole orientale, avec sur son autel la sébille aux offrandes de tous ces gens soumis qui, demain, reprocheront au gouvernement de ne pas mettre de monnaie à la disposition du public..

Vieux textes, toujours neufs.

« Il (Bayard) a esté en plusieurs guerres où il y avait des Almans qui au desloger mectent voulentiers le feu en leurs logis; le bon chevalier ne partit jamais du sien qu'il ne sceust que tout feust passé, et qu'il ne laissast gardes, affin qu'on n'y mist point le feu »>.

La Très Joyeuse, Plaisante et Récréative Histoire du Bon Chevalier sans Paour et sans Reprouche.

(Collection complète des mémoires relatifs à l'histoire de France, par M. Petitot, tome XVI, page 135.)

[ocr errors]

« Ceci se réduit à cette question vaut-il mieux que le peuple périsse ou que le prince rompe son traité? Quel est l'imbécile qui balancerait pour décider cette question? » (FRÉDÉRIC II. Histoire de mon temps).

L'observation de tous les traités par les grandes puissances n'est que relative, dès qu'elle est mise à l'épreuve de la lutte pour l'existence. Aucune grande nation ne sacrifiera son existence sur l'autel de la fidélité aux traités si elle est mise en demeure d'opter. L'ultra posse nemo obligatur ne peut être abrogé par aucune clause conventionnelle et un traité ne peut garantir la mesure de sérieux et d'énergie nécessaire à son exécution consciencieuse, lorsque l'intérêt de l'un des deux contractants ne répond plus au texte convenu et à són interprétation première ». BISMARCK.

[merged small][ocr errors]

ex

Les concours de 1918 viennent de prendre fin. Ceux qui les ont suivis avec assiduité garderont la vision touchante d'une toute petite femme, presque une enfant aux boucles brunes, au visage ardent, aux yeux pressifs, portant sur les bras un joli poupon de deux mois, qu'elle allaitait parfois dans un coin du vestibule, pendant les entr'actes. Cette jeune mère est une élève de M. Georges Berr, Mme Samuel, nature très personnelle, un peu étrange, que nous retrouverons au concours de l'an prochain. Elle aime Shakespeare et Claudel et fit partie, avant la guerre, de la troupe d'avant-garde du Vieux-Colombier. Son fils, dont elle ne veut à aucun prix se séparer, est le plus jeune des auditeurs qui assistent aux cours du Conservatoire. Il vit, rêve et dort, suçant sa tétine. avec une placidité merveilleuse, parmi les ronflements de contrebasses, les clameurs des tragédiens, les roulades des pianos, les vocalises des chanteuses, les éclats des trombones, les borborygmes des bassons... Rien de tout cela ne l'effraye. Il n'y a qu'un seul bruit auquel il n'arrive à s'habituer. C'est la voix de M. Paul Mounet. Dès que ce maître ouvre la bouche, le marmot hurle avec terreur. Et le bon tragédien, assez flatté de cet émoi, sourit dans sa moustache de grognard.

pas

Chez nos Alliés.

Les « Amex » envahissent après l'ouest de la France, la région du sud-ouest, qui paraît leur plaire infiniment. Dans un joli pays de vignobles, on a remarqué que les premiers mots français que sait prononcer un soldat américain sont textuellement ceux-ci :

[graphic]

Vin blanc !

Nos nouveaux hôtes disent beaucoup plus difficilement « vin rouge ». Question d'euphonie, peut-être. Tel n'est pas l'avis des gens du cru, qui affirment, d'après cette simple remarque, que les Américains sont de fins connaisseurs. En effet, dans ces parages fortunés, si le vin rouge est simplement honnête, le vin blanc est incomparable et jouit dans le monde entier d'une renommée bien méritée.

Ce qu'on lit...

La vitalité économique de la France, par F. SAUVAIRE-JOURDAN.

«<leçon ». Puisse son enseignement nous éviter des erreurs pareilles! Et il y a encore profit à méditer, dans un sens contraire, certains passages des notes fameuses de Castlereagh, lors de la conférence d'Aix-la-Chapelle, en 1818, alors que le tsar Alexandre pensait inaugurer une ère d'or en fondant la Sainte-Alliance, sous le couvert de laquelle il n'eût pas été fâché de subordonner l'Europe à une police internationale dont l'armée russe alors! eût été le plus puissant élément. « Une alliance limitée pour des objets définis est une chose; une union universelle devant agir pour une action commune, dans des circonstances qui ne peuvent être prévues, est une tout autre chose ». Et encore, et de même, en 1820, lors du protocole de Tropau, quand on recherchait à qui dévoluer le rôle d'un «< directoire supérieur », Castlereagh faisait une opposition formelle à ce principe fondamental du protocole. Il se méfiait de cette espèce de « gouvernement général en Europe » Noblement, il déclarait que la Grande-Bretagne ne pouvait consentir « à prendre la responsabilité morale d'administrer une telle police, générale de l'Europe

et

La future Ligue des Nations devra avoir sa gen darmerie. Or le rôle de gendarme est toujours le plus difficile à attribuer. Demandez plutôt aux « gos sergots ». Et puis, dans les meilleurs ménages, mani e ses » de Poulbot, quand ils jouent aux « voleurs et aux.. femme ne sont point toujours d'accord. Aussi, M. Yves Guyot, en intrépide champion du libre-échange estil d'avis que les alliances ne sont viables que quand leurs objets sont strictement définis et limités, toute cause de querelle se trouvant éliminée par avance, d'un commun

Le distingué économiste et professeur de la Faculté de droit de Bordeaux nous donne, rassemblé en un volume, le texte de plusieurs conférences sur le passé et le présent économique de la France. Tout appareil d'érudition est banni de ces simples causeries qui savent exposer avec une saisissante clarté quelques questions d'une importance vitale pour notre pays le pays le déclin commercial de la France d'avant-guerre, dû à la dépopulation, à l'inconcevable préjugé de la bourgeoisie qui ne recherchait pour ses fils que les professions dites « libérales », au traditionnel esprit individualiste qui nous empêchait de nous grouper et de nous soutenir en vue d'une action nationale commune, à la peur de voir grand, de faire grand, de courir des risques, qui amenait la stagnation de nos énergies et de nos capitaux préférant aux vastes entreprises d'avenir la médiocrité assurée pour le présent et les placements de père de famille. Mais la guerre est venue réveiller ces énergies endormies; nous avons su mettre en valeur les admirables ressources de notre sol; des usines à l'outillage moderne se sont multipliées par tout le territoire; des con sortiums ont groupé pour l'exportation des maisons ja- La Guerre dis rivales. Malgré toutes les ruines que la guerre a accumulées, malgré les lourdes charges financières qu'elle fera peser sur la France, M. Sauvaire-Jourdan entrevoit pour notre pays un avenir économique qui corrobore les espérances que nous ne cessons ici d'encourager.

Les Garanties de la paix, par YVES GUYOT.

M. Yves Guyot est avant tout un esprit positif. Il part toujours des faits; d'eux seuls il veut tirer des. conclusions logiques. Les formules a priori le mettent en défiance; les idées toutes faites lui paraissent suspectes et excitent volontiers sa verve combative, ses remarques piquantes et parfois caustiques. Rien d'étonnant, par suite, à ce que la résurrection « d'un vieux mythe»- la Ligue des Nations - lui semble un bloc enfariné et ne lui dise rien qui vaille. La réalité formidable de cette guerre mondiale, M. Yves Guyot l'a étudiée dans son précédent ouvrage : Les causes et les conséquences de la guerre. Aujourd'hui, il aborde l'examen des garanties qui peuvent assurer, à l'issue du conflit, une paix durable. Pour cela, en bon logicien, il nous rappelle, dans cette première partie, les Leçons du passé. C'est un siècle de diplomatie qu'il passe en revue, dans cet exposé objectif des efforts faits pour constituer la Société des nations européennes, depuis le projet de paix perpétuelle du bon abbé de Saint-Pierre. La terrible ironie de l'histoire montre à nu la contradiction presque constante entre les buts qui furent poursuivis et les résultats obtenus.

Mais « les leçons du passé »> ne sont point vaines! La «gaffe » de Talleyrand, lors des traités de 1815 attribuer à la Prusse les provinces rhénanes, au lieu de

[ocr errors]

la Saxe qu'elle convoitait se 'trouva être une rude

accord. Une alliance est la conclusion d'un marché. Ce
donnant.
lui-ci est toujours régi par l'inéluctable loi du donnant-

Le canon d'accompagnement

Nous recevons la lettre suivante dont l'intérêt n'échap pera pas à nos lecteurs:

Monsieur le Directeur,

3 juillet 1918.

Voulez-vous permettre à un officier, lecteur assidu de votre journal, de donner son avis dans la question du ca non d'accompagnement pour lequel la presse franaise est animée d'un bien beau zèle depuis quelques jours L'Opinion ne s'étonnera pas sans doute de voir un mili taire que les circonstances ont mis à même d'être ren seigné réclamer sa part dans un débat qui intéresse quelque peu l'armée, bien que la compétence en cette matière semble plutôt réservée aux civils ou aux mili taires en inactivité.

Si j'ai bien compris le sens des articles publiés depuis quelques jours, le problème se pose de la façon sui

vante :

Un homme de génie, M. Archer ayant inventé un canon d'un modèle spécial dit canon d'accompagnement, appelé à rendre les plus grands services, sa découverte fut étouffée par les bureaux, ennemis, comme chacun sait, de toute innovation.

Tout d'abord, si le nom de M. Archer a été une révé lation pour la presse et pour le public, il n'en a pas été de même pour les combattants. M. Archer, loin d'être un génie ignoré, nous est aussi connu que les pastilles Ge raudel ou les pilules Pink. Sans doute, cette popularité ne lui est-elle pas venue toute seule. Il a pris, pour quérir, une peine infinie. J'ai pour ma part reçu des cir

Pac

[graphic]
[merged small][ocr errors][merged small]

recommandant son produit en termes excelque ne désavoueraient pas nos plus ingénieux de publicité. A ces circulaires, se sont ajoutés $ des papillons destinés à être collés sur les baraents et qui disaient en substance: «Employez le Archer et vous aurez la victoire. » Ne croyez pas, fons eur le Directeur, que je raille le moins du monde, s choses se sont passées ainsi à peu de chose près.

teme non

[ocr errors]

En quoi consiste donc cette infériorité? C'est, vous comprenez bien, le point essentiel qu'il faut éclaircir, une pareille malchance pourrait être imputable à mauvaise volonté des commissions, décidées à brier coûte que coûte le canon Archer. Et je ne suis pas n de croire que pour certains défenseurs déterminés. cet engin cette mauvaise volonté ne soit devenue arle de foi.

C'est de quoi il sera difficile de persuader les fanssins qui ont été à même de voir de près le canon

cher, soit en secteur, soit dans les commissions d'exdiences dont ils ont fait partie. 1 a comme principal donvénient son poids. Le modè e de lele M. Archer présenté pèse

3=

[ocr errors]

kucs et il ne faut.

s moins de hommes pour le transporter. Un des ments de ce canon démonté pèse, kilos. Il est vrai e eest élément le plus lourd. Les bombes utilisées kilos.

sent

Il est susceptible d'utiliser également un obus de os destiné à mettre hors de combat le personnel adtse. Mais il est difficile d'admettre qu'un fantassin plus de sa charge normale puisse porter plus d'une mbe à la fois ou plus de obus à personnel, encore faudra-t-il pas lui demander d'aller bien loin. Dans conditions, on voit à quelles difficultés se heurte ravitaillement de cet engin en admettant -ce qui improbable que les difficultés du transport de la ce elle-même soient résolues. Ajoutez qu'à ce poids cessif correspond une portée maxima peu considéHe

Le fantassin est certes partisan du canon d'accomgnement, mais seulement sous condition que l'instruent soit maniable.

[merged small][merged small][merged small][ocr errors]

Armée et Marine

Le fléchissement de la guerre sous-marine

Les pertes dues à la guerre sous-marine sont en cécroissance marquée. Pour le deuxième trimestre de 1918, elles atteignent à peine chaque mois la moitié de ia moyenne mensuelle de 1917. Et ce résultat est obtenu au moment où la navigation est plus intense qu'elle re l'a jamais été, où débarquent tous les jours dans les ports de France des milliers d'Américains accompagnés du matériel et des approvisionnements correspondant à leur nombre. En même temps les constructions navales s'accélèrent dans tous les pays sauf chez nous, hélas! pour remplacer le tonnage disparu. Il n'est pas permis de dire que la guerre sous-marine soit devenue un facteur négligeable de la grande lutte, mais elle n'est plus inquiétante actuellement et l'on peut espérer que son rendement baissera encore, tout au moins qu'il n'augmentera plus.

Les Allemands ont pourtant fait tout ce qui dépendait d'eux pour atteindre leur but. Ils ont agrandi la zone dite de guerre où ils s'arrogent le droit de couler sans avertissement tout navire rencontré, continué leurs attaques contre les neutres par les procédés les plus révoltants, construit de nouveaux sous-marins par dou-. zaines et pourvu cette flotte nouvelle de tous les organismes (navires-écoles, chantiers de réparations) qu'elle exigeait. Après le sous-marin de haute mer et le sousmarin mouilleur de mines, ils ont créé le croiseur submersible capable de vivre plusieurs mois loin de sa base

d'opérer dans les zones les plus éloignées. Ce n'est pas leur faute s'ils n'ont pas réussi, comme ils l'espéraient, à affamer l'Angleterre et à empêcher l'intervention militaire des Etats-Unis. La menace n'a été écartée que par la réaction des marines alliées.

Sur les formes de cette réaction, le public, dans les nations de l'Entente, est assez peu renseigné. Il n'est du reste pas utile de divulguer ce que l'ennemi peut encore ignorer des moyens que nous employons pour le combattre. Mais nous avons eu d'intéressants renseignements sur ce qu'en pensent les sous-marins allemands eux-mêmes, par le compte rendu qu'ont publié tous les journaux, d'une conférence faite à Munich par un commandant de sous-marin. Il semble bien que l'objet de cette conférence ait été d'expliquer aux masses crédules, à qui l'on avait promis que l'usage sans restrictions de cette arme produirait des résultats foudroyants, pourl'avait cru quoi la tâche est plus difficile qu'on ne d'abord. L'officier allemand énumère tous les moyens de défense ou d'attaque qu'il connaît par expérience, et les décrit tels qu'il les a vus en discutant leur efficacité relative. L'impression générale qui ressort de son exposé est celle d'un grand progrès dû surtout au développement des méthodes offensives: les filets d'arrêt, les barrages matériels employés dès 1915, lui semblent des obstacles de peu de valeur; il s'inquiète assez peu du canon des patrouilleurs auquel le sous-marin ne présente qu'une cible très réduite, mais davantage des grenades à forte charge d'explosif que l'on jette sur l'endroit où il a plongé; il constate que la formation des navires de commerce en convois escortés rend les attaques plus hasardeuses, et que le nombre des patrouilleurs à grande vitesse, beaucoup plus redoutables que les chalutiers trop lents, s'accroît d'une manière gênante; il avoue mais sans leur reconnaître leur valeur véritable attestée par de nombreux faits récents - les dangers que l'aviation alliée fait courir aux sous-marins allemands, et enfin reconnaît que leurs ennemis les plus dangereux sont les sous-marins de l'Entente. Sans discuter ces appréciations, nous pouvons y voir,

[graphic]
« AnteriorContinuar »