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JOURNAL DE LA SEMAINE

ONZIEME ANNÉE

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DE

e que les "poilus" pensent des Boches: CHARLES

Affaires Intérieures.

ET CHASSE

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D

qu'on dit.

411

Guerre.

4

mée et Marine.

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La situation militaire: J. DE G.

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Patrouilleurs américains: GEORGES CLAUDE

faltes Extérieures.

La réforme électorale en Prusse: D'ANDILLY

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SR

e que les "poilus" pensent des Boches tipathie ne sont pas les mêmes : quand des poilus en

Nos lecteurs nous approuveront de n'avoir pas voulu

la moindre correction atténuer la saveur de cet arle, écrit par un vrai « poilu » qui est un écrivain de ent. La censure en a jugé de même nous lui en primons notre gratitude.

Ce que les poilus pensent des Boches? D'abord, que sont des « salauds ». Les plus indulgents eux-mêmes at absolument de cet avis et quand quelqu'un, dans tranchée, prend, sur un point spécial, la défense des lemands, il commence sa déclaration par ce postulat temptoire : « Oh! bien sûr, je reconnais que ce sont salauds!» Si quelque prisonnier boche, admis à cuter, essaye de poser ses compatriotes en doux mars de la cupidité anglo-saxonne, tout de suite, on lui ue la bouche par cet argument qui, aux poilus franis, paraît irréfutable et sur lequel tous les sophismes mains viennent s'émousser «Si tes copains et toi, us désirez tellement la paix, pourquoi êtes-vous ves chez nous et pourquoi y restez-vous? Il faut que us vous embêtiez considérablement dans votre pays ur venir vous faire marmiter sans nécessité dans des cors aussi lamentables que ceux de la Champagne uilleuse. Commencez par retourner d'où vous venez; us pourrons peut-être alors prendre au sérieux vos pentirs et votre pacifisme ». Je suppose que les abeilles Divent ainsi grommeler, en haussant les épaules, quand frelon qui s'est glissé dans la ruche tente de leur exiquer qu'il est un honnête homme de frelon et qu'elles it bien tort de le traiter en étranger.

Voilà quatre ans que les poilus considèrent les Boes comme des salauds »; et les civils, d'ailleurs, me ront qu'ils nourrissent à l'égard des Boches des senents analogues. Mais les raisons sur lesquelles les rançais, suivant qu'ils sont de l'intérieur ou du front, ndent leur antipathie m'apparaissent comme fort fférentes; bien plus, la qualité, le timbre de cette an

permission causent avec des civils, il est rare qu'ils s'entendent au sujet des Boches et je n'en fais pas grief à l'homme de l'arrière car j'avoue qu'il lui est très difficile de se mettre au diapason de son interlocuteur. Si le civil fait l'éloge du Boche à certain point de vue, le poilu se fâche et affirme que « les Boches sont des salauds ». Si au contraire, le civil tape sur les Boches, alors le poilu déclare que « ce sont des hommes comme nous ». C'est que le poilu, pour s'être frotté de près au Boche, s'est rendu compte (quoique obscurément et c'est pour cela qu'il se fâche, comme tous les gens qui ne peuvent arriver à expliquer clairement ce qu'ils sentent pourtant avec force) qu'à certains points de vue le Boche est en effet un homme comme nous et qu'à d'autres, il est fondamentalement différent. L'ensemble de nos civils ne voit que ce qui nous sépare du Boche (sauf quelques sentimentaux qui ne voient que ce qui nous en rapproche). Le poilu voit à la fois ce qui nous en rapproche et ce qui nous en éloigne; il sait que, dans l'âme boche, il est des provinces assimilables et d'autres qui ne le sont point.

Le poilu n'est pas venu immédiatement à cet état d'esprit; et même aujourd'hui il existe une grande différence entre la conception que le fantassin se fait du Boche et celle que s'en forme l'artilleur dont les relations avec l'ennemi sont moins intimes. Mme Aurel a traité de « bœufs de la critique» ceux qui se permettent de trouver un caractère « précieux» à la Flamme au poing de M. Henry Malherbe. Tout en reconnaissant de fort bon gré que ce livre contient des pages d'un style admirable, je me vois contraint de confesser, aut risque d'être, moi aussi, envoyé paître parmi ces chastes ruminants, que l'ouvrage non seulement me paraît précieux mais encore m'a semblé par endroits déceler un état d'âme très « artilleur » et je péñse en particulier au passage où, nous montrant un groupe de prisonniers allemands, M. Henry Malherbe en parle avec dédain. comme d'une « humanité inachevée, mal équarrie, pous

sée d'une bourrade hâtive jusqu'à notre siècle ». Voilà qui est un peu sommaire comme appréciation et qui nous rappelle les phrases qu'on lisait dans les livres de fantassins, en 1914.

Les poilus, en 1914 et pendant une partie de 1915, se sont davantage occupés en effet à s'étudier eux-mêmes et à découvrir le bouleversement qui s'était opéré en leur for intérieur, plutôt qu'à observer l'adversaire; les occasions de s'observer d'un camp à l'autre étaient rares, d'ailleurs, à cette époque et en supposant que nous eussions vu les Allemands, nous les aurions sans doute mal regardés. Notre mentalité d'alors était encore civile. On les jugeait d'après les livres et d'après les journaux. Ils étaient pour nous la masse grise, sans cesse reconstituée qu'on avait vue déferler et s'étendre comme une marée à travers la Belgique et ensuite sur tout le Nord de la France. Et puis soudain toute cette masse s'était engloutie dans les entrailles de la terre où elle vivait d'une vie mystérieuse. Cet ennemi invisible et abstrait, on le haïssait collectivement sans que la haine s'attachât à une physionomie particulière; à moins que ce ne fût celle du kaiser en qui nous trouvions commode d'individualiser notre haine. Cette haine collective, il est intéressant de le noter, se rencontre encore très souvent chez nos amis anglais. Ils disent les Français; mais l'Allemand ou le Hun comme nous disions l'Anglais aux temps lointains de la marine en bois. Lorsqu'il y a très peu de temps, je demandais, à la sortie de Nesle, aux blessés anglais qui retournaient vers l'arrière : « A combien de distance sontils? j'ai été frappé de les entendre invariablement employer le singulier dans leurs réponses : « Il est tout près... Il est très nombreux... Nous lui avons tué beaucoup de monde »>.

Vint l'offensive de Champagne qui restera pour tous ceux de la guerre l'offensive par excellence, l'offensive à laquelle tous se sont donnés sans arrière-pensée. Ceux qui ont vécu ces heures-là sauront ce que veulent dire ces mots si souvent employés à tort et à travers : «< une troupe animée d'un véritable esprit offensif » et l'enet l'enthousiasme se mêlait jusqu'à ce piment du désir d'aventure qui rehausse la saveur de toutes les grandes entreprises. Une curiosité d'enfant étreignait toutes les intelligences; enfin on allait voir ce qu'il y avait dans la tranchée d'en face; on allait voir des Boches, on allait savoir comment ils vivaient, comment ils passaient leurs journées; on allait les relever dans leurs cantonnements, se coucher dans leurs cagnas; nos poux eux-mêmes (car Dieu sait si nous en avions, en Champagne pouilleuse !), nos poux relèveraient les leurs ! Je crois sincèrement que pour bien peu la nuit qui précéda l'attaque a été une nuit angoissante; ce fut bien plutôt quelque chose comme ces nuits de première communion telles qu'on les décrit dans les missels. Au matin, ce fut une ruée frénétique et je me demande encore comment il n'a pas été permis à un pareil enthousiasme de donner de meilleurs résultats. Ce qu'il y eut alors d'Allemands de tués -non pas par l'artillerie, mais par l'infanterie dépasse l'imagination. C'était l'Allemagne tout entière, tout le militarisme teuton que les soldats français croyaient détruire chaque fois qu'ils abattaient un Fritz. Celui-là, ils le tenaient pour responsable de toutes les atrocités commises, de toutes les souffrances infligées depuis le début de la guerre.

Et on s'installa dans leurs tranchées; on s'assit là où depuis des mois ils avaient l'habitude de s'asseoir; on mit son tabac dans leurs blagues, on inspecta leurs gourbis et on affirma, en connaisseurs, qu'ils étaient « rudement bien foutus » Dorénavant, les Allemands ne furent plus tout à fait pour nous des étrangers. Le voile mystérieux qui les dérobait à nos regards était

en partie tombé. Pour nous, ils n'étaient plus une mas collective et amorphe. Un peu de notre prédécesse était resté attaché aux parois de l'abri qu'il avait, ma gré lui, aménagé pour nous. On lui était reconnaissa d'avoir pensé à mettre ici un clou et là une étagère devenait, pour ainsi dire, notre ennemi intime.

On comprit alors que notre voisin d'en face av souvent des ennuis bien semblables aux nôtres, qu avait les mêmes peurs et les mêmes distractions, qu jouait, lui aussi, de l'accordéon ou de la mandoli le soir, pour chasser son cafard, qu'il avait, lui aus tous les soirs, ses corvées de rondins et de fil de fer, br qu'il menait, à quelques mètres de nous, de la mer a Vosges, une vie absolument parallèle à la nôtre. poilu éprouva pour le poilu boche un sentiment nous appellerons, si vous le voulez bien, de la sympathi mais au sens strictement étymologique du mot: mêm souffrance simultanément éprouvée. Sympathie qu d'ailleurs, selon nous, un civil n'a pas le droit de re sentir (et qui nous répugne, chez lui) parce que le a ne sait pas ce que c'est que ravitailler en première lig par une nuit noire sous un tir de barrage Comme aviateurs des deux armées se sentent solidaires to justement parce qu'ils se mènent rude guerre, des fa tassins des deux tranchées ont l'impression qu'ils a partiennent à une même corporation et ils se respect ront d'autant plus les uns les autres que chacun au consciencieusement accompli son travail. Il ne sa pas là de fraternisation (nos poilus l'ont bien mont et ils n'ont à recevoir de personne à l'arrière des leg de patriotisme) mais d'un sentiment tout spécial front et que je ne saurais mieux expliquer que par c anecdote empruntée aux Mémoires d'un Rat de Chaîne. Un poilu, dans ce livre, tient au bout de s fusil un Boche qui ne se doute de rien et au mome où celui-ci va très prosaïquement poser culotte da une feuillée. Il va tirer et puis il se ravise: « Ah! no moi, ça me déplairait d'être tué dans ces conditions Je vais tout au moins attendre qu'il se soit reculotte Et il ne tire qu'après. Voilà ce qu'on appelait de chevalerie, au moyen âge

Pas d'attendrissement, d'ailleurs; pas de trace démoralisation dans cette pudeur d'âme que notre lignité trouve même moyen d'exploiter à son proft y a quelque chose de réconfortant à sentir que l'on n pas seul à souffrir. Le poilu, qui a les pieds dans le est tout ragaillardi par cette pensée à la fois sadique saine que, dans la tranchée en contrebas, les Boc doivent avoir de l'eau jusqu'au ventre. Il s'en am comme d'une bonne farce, maintenant qu'il sait que Boches sont de chair et d'os comme lui et comme vulnérables.

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réce

Comme êtres humains, il ne les hait pas; ce qu'il en eux, c'est toute leur mentalité dont il tient d'aille leur veulerie et leurs dirigeants comme responsables sont des êtres, dit le poilu, qui ont été élevés com ça; on leur a bourré le crâne tout petits. » Il les garde sans haine, avec une sorte de curiosité indi rente, comme on regarde un insecte nuisible. Une re anglaise notait, il y a peu de temps, chez les tomm la même indifférence exempte de haine. J'ai pu ment prendre sur le vif cette indifférence du poilu fr çais à l'égard du Boche, indifférence plus blessante fond que la haine du civil, dans laquelle entre une taine dose d'admiration. Te me suis trouvé dans même pièce que des poilus français et deux prisonnie boches qu'ils venaient de ramener à la suite d'un c de main. Une demi-heure plus tôt, les Français lança avec acharnement des grenades à ces deux Boches c'est tout à fait par hasard qu'ils ne les avaient fait passer de vie à trépas. Maintenant, ils agissal absolument comme si les prisonniers eussent été

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