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les salons tout lambrissés, aux lourdes moulures dorées, aux colonnes imposantes, qui virent tant de banquets et entendirent s'épancher, avec le petit champagne des agapes démocratiques, d'inépuisables flots d'éloquence. Qui ne se souvient du grand salon de l'hôtel Contidental? C'est maintenant une ruche en rumeur. Des box grillagés ont été installés d'un bout à l'autre de l'imlenense pièce; la lumière des lampes à abat-jour vert

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claire les visages attentifs des petites employées qui ganient diligemment fiches et bordereaux, épinglent des aliasses, remplissent des imprimés et additionnent les éauvres! d'interminables colonnes de chiffres; des sper: ppels de numéros se croisent dans l'air : aucune chaleur laommunicative ne trouble plus les cervelles, ne délie red lus les langues, dans ce temple désaffecté d'où Mercure l'a chassé Bacchus, au bruit du canon, comme il avait me hassé, après l'autre guerre, Euterpe et Terpsichore de S te qui fut le théâtre des Italiens, place Ventadour.

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Au cœur même de la Ville, dans un palais illustre qui brite une importante administration, un autre grand ace slon, plus somptueux encore, a été dernièrement envahi rie. Star les bureaux.

le mal Le canon de Saint-Gobain fut bien pour quelque De to ose dans la migration de tout ce peuple d'employés quence i habitait les combles de la maison et que la sollides patude paternelle de leurs chefs dirigea vers des étages sident Voins exposés. Mais on peut croire qu'une certaine soif ce d'ap aventures, le goût du chaste, peut-être même l'amour arles l'art entrèrent pour une part dans l'entrain avec 'aller quel fut réalisée cette installation de fortune. Le moudraitiste auxiliaire, l'expéditionnaire chevronné, le commis

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anchi sous la poudre des dossiers ne sont pas peu ittés de travailler à la place même où furent reçus natout ère avec pompe d'augustes visiteurs, sous les ailes ela otectrices du Pégase de M. Bonhat. Ce cheval surestenant, maquillé comme une danseuse blanc gras, Sadre de riz, Rimmel et raisin électrique fait des tenant ces et des manières au centre du plafond. Ses gigots edouillards esquissent un pas de cirque : on cherche sa cstinctivement le traditionnel flot de rubans à la naisnce de la queue et sur la crinière bien peignée... Ce Ilygase-là ne risque pas de détourner de leur tâche uti01, aire les poètes réfugiés dans cette 'administration olitiqénienne, qui donna jadis aux lettres françaises Paul rlaine et Albert Samain.

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biena taxe sur les objets de luxe est accueillie avec quelDe mauvaise humeur. On s'accoutumera difficilement, l'a Paris, à considérer comme une dépense somptuaire chat d'un modeste flacon d'eau dentifrice. Mais de t temps et par tout pays, les impôts somptuaires ont

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mal reçus et le mouvement d'« évasion fiscale >> 'ils provoquent n'est pas leur inconvénient le moins ppart. Volontiers, chacun ferait sienne la réponse ucieuse et spirituelle de l'Asturien au péager, qui est Ssée en proverbe au delà des Pyrénées.

On sait que les Espagnols ont toujours mis un sinlier orgueil à posséder des noms interminables. Cerhoe gouverneur de Madrid, par exemple, s'appelait : vers José Angel Mena del Barco y Gayoso de los Cobos

une int

ando Tellez Giron Godinez de Paz, duc de Tamames. ussi, au temps où l'on payait encore des droits de age dans la péninsule ibérique, avait-on imaginé de clamer aux passants quatre maravédis pour chaque artie de leur nom. C'était une sorte de taxe de luxe, sinlièrement productive, et basée sur une connaissance ofonde du caractère espagnol. Pourtant un jour, un de la astillan, vaniteux et magnifique, et un Asturien, simple Parcimonieux, se présentent ensemble à l'entrée du

Stel vost

urieuseme

de ses s

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L'entrée des Allemands à Sébastopol rend quelque actualité à un épisode de la dernière révolution russe, épisode qui eut fait la joie d'un fournisseur du GrandGuignol -au temps où les atrocités réelles ne dépassaient pas chaque jour les plus sinistres imaginations. Les matelots bolcheviks avaient décidé de fusiller méthodiquement tous les habitants des deux rues les plus chic de Sébastopol. Après le massacre, les corps furent jetés à la mer. La veuve d'une victime ayant pu rentrer ensuite dans la ville relativement apaisée, demanda à un scaphandrier de rechercher le corps de était à peine au fond qu'il tira frénétiquement la corde son mari pour lui donner une tombe. Or, le plongeur d'alarme. On le remonta. Il était presque fou et ne pouvait dire rien de plus que : « Le meeting ! le meeting!» Enfin, après plusieurs heures, il fut en état le s'expliquer.

Lorsqu'il avait touché le fond, le plongeur s'était trouvé au milieu des habitants des deux rues condam

nées, tout autour de lui, debout en foule serrée, les yeux ouverts, fixant le vide, les corps se balançant lentement, avec de petits soubresauts. L'explication était simple. Les cadavres, immergés avec des pierres attachées aux pieds, étaient restés debout et les vagues leur donnaient un mouvement étrange, non point tout à fait continu, ni régulier, une apparence de vie sutpide, fantomale, effroyable.

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Depuis l'offensive allemande, le nombre des engagements australiens croît de semaine en semaine. Parmi les derniers volontaires est un clown qui dirigea naguère une académie de boxe à Berlin. Un soir, le prince Eitel émit la prétention de faire assaut avec lui, et tout prince qu'il était, fut mis knock-out en un tour de main. Le pauvre clown paya cher son facile triomphe : le lendemain, le kaiser lui faisait signifier d'avoir à quitter l'Allemagne dans les vingt-quatre heures. «< Joe » Bannister ne pardonna jamais une conduite aussi peu sportive et il a saisi avec joie, en s'engageant dans l'armée australienne, la bonne chance qui s'offre à lui d'aider à mettre knock-out toute la tribu des Hohenzollern.

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Du Shakespeare en action.

Le directeur d'un music-hall londonien vient d'apposer sa signature jouxte celle d'un acteur qui sait faire emploi comique du volume énorme de son corps.

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Passer ce contrat sous silence serait regrettable : «M. le Directeur de l'Empire, J. L. Sacks, engage à raison de liv. st. : xx par semaine M. l'acteur Byford, à charge pour ledit de jouer en soirée et en matinée, un «gros » rôle du spectacle représenté aussitôt après l'actuel. >>

D'autre part :

«M. Byford s'engage à verser une amende d'une livre sterling par semaine et par livre de poids qu'il pourrait perdre en ce laps de temps; ceci à dater du jour de la signature. >>

En ce temps de restrictions alimentaires, le directeur nous paraît avoir fait là une affaire de premier ordre. Offrons-lui le titre de son prochain spectacle :

Le Marchand de Venise, ou bien L'Homme qui vaut son pesant d'or.

Capitole et roche Tarpéienne.

Le Daffodil (Narcisse) qui s'était couvert de gloire à Zeebrugge vient d'être condamné à une amende pour avoir abîmé un bateau irlandais, le Wicklow, au cours d'une collision dans la Mersey.

Il n'a pas été victime de ses exploits, mais bien de ceux d'un huissier.

En Pangermanie.

S'il était besoin d'une confirmation de l'écho que nous avons consacré récemment au prince Lichnowsky, ambassadeur « de façade » à Londres, nous la trouverions dans une lettre adressée l'autre semaine par M. Sidney Whitman à notre confrère The Spectator:

« J'ai souvent rencontré Lichnowsky, il y a une dizaine d'années, à la table du prince de Bulow. Il y était si effacé que je ne me rappelle pas une seule fois l'avoir entendu prendre part à la conversation durant la soirée. A l'Office impérial des affaires étrangères on le regardait comme inexistant. Mais il était riche, et l'empereur le considérait par suite comme assez bon pour figurer dans notre capitale snob, toujours à genoux devant le rang et la fortune. Un tel ambassadeur suffisait à jouer « lá montre », l'étalage dans la vitrine. Le. véritable deus ex machina était l'ardent petit Levantin Kühlmann... >>

L'Osnabrücker Volkszeitung a donné à la GrandeBretagne le surnom de « grand'mère de Satan ». Les Anglais ne s'en offusquent pas car il est, disent-ils,, de notoriété publique que la reine Victoria était la grandmère du kaiser.

Méthodes bismarckiennes.

Le colonel Harvey, dans la North American Review, rapporte un incident peu connu de la vie de Bismarck. En 1867, le tsar Alexandre de Russie visitait Paris à l'occasion de l'exposition universelle. Bismarck, qui déjà complotait contre la France et se demandait quelle attitude prendrait la Russie en cas de guerre franco-allemande, redoutait qu'une intimité trop étroite se créât entre le tsar et Napoléon III.

Il apprit par un de ses espions, qu'un jeune Polonais préparait un attentat contre Alexandre. Au lieu d'informer de la nouvelle la police parisienne, Bismarck décida de laisser courir les choses, mais il chargea un espion prussien de ne pas quitter le tsar et de détourner le coup au moment critique. Bismarck espérait qu'ainsi le tsar en voudrait à Napoléon de ne l'avoir pas suffisamment protégé et, d'autre part, serait reconnaissant à la Prusse de ce qu'un Prussien l'avait sauvé.

Le lendemain, à Longchamp, tout se passa comme l'avait prévu Bismarck et la Russie demeura neutre pendant la guerre franco-allemande.

Le colonel Harvey insiste sur le danger que, délibé rément, Bismarck faisait ainsi courir au tsar. «Si la balle était arrivée à son but, dit-il, et si le tsar avait été tué, Bismarck aurait été complice de l'assassinat, aussi coupable que l'assassin lui-même. Nous doutons que l'histoire du monde moderne contienne un exemple aussi atroce de vilenie exécutée de sang-froid, à moins qu'il ne soit certain, comme beaucoup l'ont prétendu avec des arguments fort plausibles, que l'assassinat de l'héritier présomptif du trône autrichien ait été préparé et exé cuté, à l'instigation allemande, par la cour autrichienne afin de fournir un prétexte à la guerre actuelle. »>

La Guerre

La situation militaire NACH CALAIS! >>

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Le moment de la reprise des grandes actions mili taires ne semble pas éloigné. Les indices s'accumulent et se précisent du prochain déclenchement d'une puis sante offensive ennemie aussi formidable et meurtrière que celle du 21 mars. C'est seulement sur l'endroit o cette nouvelle attaque se produira que les avis encore qu'il soit aussi certain qu'heureux que notre état-major ne fasse de confidences à personne diffèrent. Les soldats allemands après s'être grisés du a « Nach Paris! », sont échauffés maintenant par cet an tre que nécessite la diminution progressive de l' tensité de la guerre sous-marine « Nach Calais! Mais beaucoup de chemins mènent à Calais, qui son tous aussi longs que celui qui conduit à Tipperary.

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Un formidable coup de bélier en direction de Sain Omer et visant la côte, allongerait le flanc gauche d l'agresseur et mettrait ce flanc à découvert tout am qu'à portée des réserves du général Foch.

N'oublions pas non plus que les terrains de la rég de l'Yser sont, par suite des pluies récentes, encore for peu praticables. Une telle tentative, surtout si l'on tie compte de la situation respective des forces en pr sence, serait une telle faute, qu'il est permis d'en éca ter l'idée. Reste la possibilité d'une poussée dans secteur Somme-Lys, c'est-à-dire contre le saillant glais dont la pointe est Arras. L'Allemand se trou dans cette région à portée de ses bases, et y dispos d'un terrain se prêtant remarquablement à des acti de masses compactes.

Si les Anglais ont raison de croire qu'une nouvell armée s'intercale entre les II et XVII (nord d'Alber il est plausible que von Hutier et Mackensen sont par Pour conclure l'offensive allemande affecterait saillant d'Arras et serait menée par la VI° armée (no d'Arras), commandée par von Quast, la XVII (Am et au sud) aux ordres de von Below, la x armée co duite par von Hutier, qui descendrait jusquà Alber enfin la II, dirigée par von Marwitz qui irait jusqu

la Somme.

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Affaires Intérieures

Le Parlement et les conseils de guerre

3

Le 3 octobre 1916, la Chambre adoptait une proposition de loi modifiant divers articles du code de justice militaire relatifs à l'organisation des conseils de à guerre.

C'est seulement le 29 mars 1918 que le Sénat a délitébéré sur cette proposition. Après un court débat, il a atifié le texte qui lui était soumis par sa commission, texte qui ne rappelle que d'assez loin celui que la Chambre avait consacré par son vote.

de

Envisagé dans ses dispositions essentielles, le projet la Chambre tend à un double objet: 1° assurer plus l'indépendance aux juges militaires; 2° augmenter les aranties dont jouissent les accusés, spécialement deant les conseils de guerre aux armées.

Sur le premier point, la Chambre n'a apporté qu'une eule modification au code de justice militaire. Elle a lécidé que, désormais, les délibérations des conseils de 2 uerre auraient lieu au scrutin secret. Chacun sait, en ffet, qu'actuellement les juges militaires votent oralenent dans la salle des délibérations: le juge du grade e moins élevé vote le premier et l'on remonte ainsi de rade en grade jusqu'au président qui émet son opinion e dernier. A ce système la Chambre a substitué le vote u scrutin secret.

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Sur le second point, le projet de la Chambre est eaucoup plus complexe. En négligeant diverses dispoitions accessoires, d'un mérite d'ailleurs discutable, il omporte deux 'innovations importantes dans le foncionnement des conseils de guerre aux armées : l'introluction de la minorité de faveur et l'extension du droit our les condamnés de se pourvoir en révision.

On sait que, dans les conseils de guerre de l'intéeur, qui sont composés de sept juges, l'accusé est acuitté lorsque trois juges le déclarent non coupable. 'est la minorité de faveur. Aux armées, rien de sem

lable. Les conseils de guerre ne comprennent que cinq ges. Lorsqu'une majorité de trois voix se forme cone l'accusé, la condamnation s'impose. C'est ce système ue la Chambre a condamné en décidant qu'à l'avenir, ux armées comme à l'intérieur, les conseils de guerre raient composés de sept membres et que, dans tous 2 s cas, l'accusé bénéficierait de la minorité de faveur. D'autre part, le projet de la Chambre supprime toute striction du droit pour les condamnés de se pourvoir n révision contre les jugements des conseils de guerre ux armées. Tandis qu'actuellement, ce droit n'apparlent qu'aux condamnés ayant encouru soit la peine caitale, soit une peine criminelle perpétuelle, la Chambre étend à tous les condamnés sans ême voie de recours, est ainsi accordée au soldat ondamné à deux mois de prison pour ivresse et au miliuité pour abandon de poste ou pour refus d'obéisaire condamné à mort ou aux travaux forcés à perpé

mord

ance en présence de l'ennemi.

distinction. La

treinte. Mais il a repoussé les dispositions essentielles du texte qui lui était soumis. Pas de minorité de faveur dans les conseils de guerre aux armées; pas d'extension du droit de recours en revision: voilà ce que le Sénat a décidé le 29 mars dernier.

En période d'opérations, il est souvent difficile, dans une division, de distraire de leur service deux officiers supérieurs, deux officiers subalternes et un sous-officier pour constituer un conseil de guerre. A quoi bon compliquer la tâche du commandement en élevant de cinq à sept le nombre des juges? Pourquoi cet accroissement du nombre des juges militaires alors que, dans les tribunaux ordinaires, tout le monde paraît d'accord pour réduire le nombre des magistrats? La minorité de faveur n'existe pas devant la cour d'assises. Cependant, nul ne prétend qu'aux assises les droits de l'accusé ne soient pas suffisamment sauvegardés.

L'inconvénient pratique est beaucoup plus grave encore en ce qui concerne l'extension du droit de recours en révision. Autoriser tous les condamnés à se pourvoir en révision contre les jugements des conseils de guerre aux armées, c'est « favoriser les calculs de la lâcheté », suivant l'expression du rapporteur au Sénat. En signant son recours en révision, le condamné aura la certitude de prolonger d'un mois environ son séjour à la prison prévôtale. Est-il moral de permettre aux mauvais soldats d'user d'un artifice de procédure pour se tenir éloignés de la ligne de feu pendant que les bons soldats versent courageusement leur sang pour la défense du pays? En tout cas, est-il admissible que le législateur suscite lui-même d'aussi viles et d'aussi funestes tentations?

Le Sénat ne l'a pas pensé et il a « mutilé » le projet de la Chambre.

En temps de guerre il faut, plus que jamais, se défier du mirage des mots et de la fascination qu'exercent certaines formules. Droits sacrés de la défense garances formules ties intangibles des accusés, c'est avec que l'on fait voter d'imprudentes innovations législatives. Certes, il faut que partout, aux armées comme à l'intérieur, les accusés jouissent de toutes les garanties nécessaires à une bonne administration de la justice. Mais il faut aussi que l'organisation de la justice militaire aux armées soit compatible avec les exigences de la vie en campagne.

Les conseils de guerre aux armées sont les gardiens de la discipline. En pleine tourmente, il ne faut pas toucher trop facilement à une institution, dont il importe de maintenir le crédit et qui, malgré ses imperfections, a rendu et rend encore chaque jour de réels services.

Pendant la période troublée de mai-juin 1917, les conseils de guerre aux armées ont, grâce à la souplesse de leur organisation, puissamment contribué au rétablissement de la discipline en rendant des décisions ra

pides et rapidement exécutées. Le Parlement a le devoir de ne pas l'oublier. Sans doute, des améliorations

comme le

sont nécessaires; mais il faut considérer
contraire d'une amélioration tout ce qui tend à rendre la

grandes lignes, le projet de la justice militaire aux armées plus lente, plus compliquée,

Tel est, dans ses grandes

Chambre.

La commission du Sénat a estimé qu'avant d'appor

nent de la justice militaire, il convenait de consulter

er des modifications aussi graves dans le fonctionne

plus procédurière.

La Chambre avait voté son projet en octobre 1916. Instruit par les événements, le Sénat a très judicieusement corrigé ce projet. La Chambre commettrait une

commandants des grandes unités et les officiers pla- grave erreur si, négligeant les leçons de l'expérience,

tés à la tête des parquets des conseils de guerre. Sur a demande, une vaste enquête a été ordonnée par le

gouvernement.

Au vu des résultats de cette enquête, le Sénat a ef. le projet de la Chambre. Il a

fectivement,

mutilé

ratifié sans hésitation le vote au scrutin secret et quelques dispositions accessoires d'une portée pratique res

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Affaires Extérieures

La paix allemande de Bucarest

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Pour mesurer l'étendue du désastre roumain, rappelons-nous la situation au mois d'août 1916, et nos illusions. Nos illusions sur la Russie, bien entendu. Une offensive générale devait acompagner l'entrée en campagne de l'armée roumaine.Sarrail lui-même, avec le corps expéditionnaire réduit qu'il commandait réduit par le paludisme —— devait attaquer dix jours avant nos nouveaux alliés, a peu près en même temps que Broussiloff. Le ravitaillement de l'armée roumaine s'opèrerait ensuite par les soins de la Rsusie chargée d'amener à sa frontière, tous les jours, un train d'armes et de munitions. Le succès paraissait acquis, et à Paris, dans certains milieux qu'il est inutile de préciser, on annonçait la fin de la guerre européenne pour la fin de l'année.

A Pétrograd cependant, on souriait mystérieusement. On sait le reste la trahison de Sturmer, les manœuvres de l'entourage du tsar, la Roumanie peu à peu abandonnée à elle-même, puis complètement encerclée par l'ennemi après un dernier effort du gouvernement de Kerensky. Le 6 février 1918, le maréchal Mackensen mettait le cabinet de Jassy en demeure d'entrer dans les quatre jours en pourparlers de paix. Le 9, le cabinet Bratiano formé en juillet 1917, remettait sa démission au roi. Enfin, le 19 mars, après un timide essai du général Averesco, M. Marghiloman assumait le pouvoir et la charge de muer en un traité de paix définitif l'armistice deux fois prolongé qui avait arrêté les hostilités. Quelques jours à peine plus tard, le 26, à Bucarest, le comte Czernin et M. de Kühlmann paraphaient, avec le président du conseil roumain et M. Arion, ministre des affaires étrangères, les préliminaires du traité qui ne devait être publié qu'après mise au point appropriée.

Le 7 mai, cette mise au point achevée, la «< Paix de Bucarest fut signée ». La séance solennelle de clôture où les signatures ont été échangées, dit la note Ides coalisés qui annonce l'événement, a eu lieu sous la présidence du secrétaire d'Etat von Kühi mann, au château de Cotroceni, dans la même salle où avait été décidée l'entrée de la Roumanie dans la guerre universelle ». Au dîner qu'il avait donné la veille au soir, ajoute le communiqué, le maréchal Mackensen avait souligné que cet acte « mettait fin à la guerre dans l'Est».

Observation caractéristique et à retenir.

La « Paix du Bucarest » atteste en effet la préoccupation de l'Allemagne et de l'Autriche d'en finir avec le front oriental, en mettant l'armée roumaine hors d'état de compter désormais et les facultés de la Roumanie à la discrétion de l'armée allemande en vue de ses interventions éventuelles dans la Russie du Sud. Contrairement à l'usage, les dispositions relatives à la démobilisation viennent en tête du traité, immédiatement après le préambule. Elles sont minutieuses et sévères. Elles ne se contentent même pas d'énumérer les mesures stipulées pour empêcher toute reprise des opérations. Elles font de l'armée roumaine la collaboratrice des armées de la Quadruplice pour assurer le triomphe d'une politique que l'on connaît aujourd'hui en Ukraine. Les chemins de fer roumains, entre autres, demeurent jusqu'à la paix générale sous le contrôle austro-allemand.

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Les autres stipulations apportent une idée exacte de ce que les Allemands entendent par une paix allemande de conciliation, sans annexion ni indemnité. Le démem

brement territorial de la Roumanie prend le nom de

rectification de frontières sans cesser d'être un démem. brement. A l'Est, la Roumanie abandonne la Do broudja, que le traité de 1913 lui avait attribuée. Mais cet abandon) n'est qu'une « restitution ». Au demeurant il n'est pas consenti seulement en faveur de la Bulga rie. A cet Etat, il ne revient qu'un morceau de la Do broudja, à délimiter ultérieurement; l'autre morcea celui du nord, compris entre le sommet du delta d Danube et la mer Noire jusqu'au bras de Saint-Georges reste à la disposition de la Quadruplice... pour les trac tations ultérieures. Malgré l'engagement d'assurer ure route commerciale vers la mer Noire, c'est pratiquement la Roumanie privée d'accès à la mer, ou à la merci des Centraux. A l'Autriche-Hongrie spécialement et immé diatement, un « glacis » militaire taillé à vif dans le territoire roumain est attribué. En d'autres termes, mi

litairement, la Roumanie reste à la discrétion de ses ad

versaires.

Elle l'est bien davantage économiquement.

L'article XIII a beau déclarer généreusement que chaque Etat renonce à toute indemnité pour ses dépe ses de guerre, les avantages que les empires du Centr se sont assurés mettent leur proie dans une dépendan fructueuse pour eux seulement, et naturellement l'Alle magne s'est taillé la part du lion.

D'abord la Roumanie renonce à tout indemnisation pour les amendes, contributions, réquisitions dont so territoire occupé a été accablé depuis un an. n. Mais n'est pas tout. Ce n'est même rien. La plus grande chesse de la Roumanie, le pétrole, est purement et sin plement livrée à l'Allemagne. A une société fermier constituée ad hoc, dont le capital est austro-alleman dans la proportion des trois quarts, le monopole d l'exploitation de tous les puits de pétrole est conce pour 99 ans. Et pour qu'il n'y ait pas d'équivoque s un des buts principaux de cette clause, l'accord pré que le monpole comprendra toutes les concessions a cordées jusqu'au 1er août 1914. En outre, pour ac tuer la mainmise allemande, les contestations nées l'accord devront généralement être jugées par des ja dictions allemandes. Bref, c'est un fait, les alliés, Fra çais, Anglais, Belges, Italiens et Américains dépouill de leurs propriétés, en même temps que les Roumains Il n'est pas inutile de rappeler à ce propos que po 'année 1913, la production totale du pétrole rouma s'est élevée à 1.885.225 tonnes et que la part des all dans le capital des sociétés concessionnaires atteigna environ 20 0/0.

cen

Les autres stipulations d'ordre économique s connues. Elles font de la Roumanie, obligée de liv l'excédent de ses céréales, le grenier des puissances trales. Elles obligent enfin l'Etat roumain à inde ser les sujets ennemis lésés par la guerre en Rouman ou ailleurs.

Au moment où la vaillante petite nation qui défen en Orient la culture latine, se trouve contrainte às gner une pareille capitulation, il importe d'abor qu'elle ait la conviction que l'un des buts les plus crés de l'Entente sera sa délivrance. La compensatio que lui ont apportée les empires du Centre en lui fa sant attribuer la Bessarabie ne suffit pas. La Bessar bie, au moins pour la plus grande partie de son tem toire, est terre roumaine, et la générosité des Austr Allemands n'est qu'une hypocrisie. Le seul moyen réparer la monstrueuse paix de Bucarest, c'est, ap l'avoir remise en question, de réaliser cette grande Ro manie qui réunira la Transylvanie à la monarchie d

roi Ferdinand.

De cela d'ailleurs, tous les alliés sont d'accord d'affirmer leur devoir avec la sincérité de leurs inter tions, c'est presque devenu pour eux une banalité. Ma

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de

202

comment remplir ce devoir ? La victoire n'est pas une chose mystique, un verbe qui ait sa puissance de réalisation en lui-même. Il ne faut pas seulement vouloir, faut se mettre en disposition de pouvoir,

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Pour atteindre ce but, pour donner au peuple roumain l'impression nette qu'il n'est pas abandonné, il faut donher aux empires du Centre l'impression profonde-qu'ils Pont pas que leur œuvre en Russie n'est pas une Sam euvre définitive. Avoir une politique russe active, telle Est donc la première condition pour conserver une polidique roumaine.

L'Entente agira-t-elle ?.

a nouvelle investiture de M. Lloyd George 11 tres y a une logique des situations qui domine non pas ética ulement les volontés des hommes, mais la stratégie es partis .M. Asquith, malgré son autorité personnelle l'influence pratique dont il dispose aux Communes, ent d'en faire l'expérience. Par 293 voix contre 106, la

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hambre a reconnu la nécessité de maintenir M. Lloyd pour eorge au pouvoir. N'est-ce pas l'occasion de rééditer le mpira eux dicton on ne change pas de monture au milieu Sune gué? Et, au fond, la portée précise du vote n'estle pas ainsi résumée ?

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Il y a cependant, dans les origines de la discussion out aboutit à ce vote, quelques enseignements à tirer ur nos amis Anglais d'abord, pour nous Français enite, pour tous les alliés enfin.

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a pis Que les Communes aient eu raison de donner à M. pure loyd George une nouvelle investiture, car ce n'est pas SOC autre chose qu'il s'agit, personne ne le contestera. Un néral, comme sir Frédérick Maurice, qui fait état, pour lementer une polémique, d'informations qu'il n'a conroles es que par ses fonctions, voilà bien en effet, pour une position, le plus fâcheux des champions. D'autant us fâcheux que le général, par définition, ne connaît ess problèmes que l'aspect purement technique, et que les outre Festions même d'ordre militaire ne sont pas inséparatestes des questions d'ordre politique. Il n'en est pas ges Fins vrai qu'une opposition, même systématique, n'a it, mais tout à fait tort, et un gouvernement, dont la conericaine nce est la plus justifiée qu'on peut imaginer, jamais lest à fait raison. On est ainsi autorisé à croire, et il seprot puéril de nier que l'opinion française n'a pas inspectivement pensé, que si le général Maurice se troma part en accusant le « Premier » anglais de mauvaise foi, nai allégations devaient tout de même contenir quelque t de vérité, qu'il serait bon de connaître. oral serait donc inutile de cacher plus longtemps qu'on bigen France une impression très nette: si les immenses rifices de l'Angleterre n'apportent pas toujours les ultats attendus, c'est qu'il y a, chez nos alliés, un ti dont l'influence a les plus fâcheuses répercussions les méthodes et sur les décisions. En un mot, comme dix, il y a des Français pour penser et pour dire que côté anglais on n'a pas toujours la vision nette de nécessité qui s'impose de subordonner, d'harmoniser point de vue anglais au point de vue allié. C'est sur champs de bataille de l'Europe que se jouent les stinées de tous, de l'Angleterre comme de la France. front de France est donc le front le plus important, ur tous les alliés. Les autres fronts, Mésopotamie, erie, Afrique, sont accessoires, et la défense même du territoire anglais ne justifie peut-être pas de trop nomeuses immobilisations à l'arrière.

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rest Le vote des Communes n'aura peut-être pas été inute s'il donne à M. Lloyd George une autorité et une rce nouvelles pour assurer l'exécution de ses volontés de sa volonté de vaincre. Félicitons M. Lloyd George M. Asquith.

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PIERRE ALBIN.

NOTES ET FIGURES

M. Barthou, académicien.

La pièce où nous sommes entrés donne sur une large avenue plantée de marronniers. La masse grise qui s'élève à trente mètres est un grand palais que la République éleva voici bientôt vingt ans à la gloire de l'art français, et que la guerre a transformé en hôpital. On est dans ce quartier étrange qui est au centre de la ville et paraît vide d'habitants et peuplé d'arbres, et qui n'est cependant pas la campagne puisqu'à des intervalles qui s'efforcent d'être réguliers de lourds trams électriques passent en faisant trembler les vitres.

J'entends une porte s'ouvrir dans l'antichambre; deux voix se répondent, l'une un peu sourde, l'autre chaude et vibrante encore que contenue; voici ouverte la porte de l'escalier; je perçois un «< au revoir » et le bruit sec du pène qui claque dans la serrure, et presque instantanément du mouvement pénètre dans la pièce où j'attends, me prend la main et m'entraîne. Je dis bien du mouvement, car c'est là l'impression dominante, et tandis que je suis M. Barthou dans son cabinet, et tandis que je m'assieds, cette impression se précise en moi que je suis devant du mouvement qui aurait une voix charmante.

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Et en écoutant cette voix, je comprends bien des «< choses ».... M. Barthou fut député à vingt-sept ans; — c'est bien jeune; mais comment des électeurs auraient-ils pu résister à l'ardeur de ses « exposés de programme »? M. Barthou fut ministre à trente-deux ans ; c'est un record que ne battit même pas M. le président de la République...; mais comment ses collègues eussent-ils lutté contre la vigueur et le maniement de ses discours? M. Barthou fut président du conseil et fit voter la loi de trois ans, et cela n'alla pas tout seul, mais il triompha cependant. M. Barthou est académicien, mais il ne sait pas le nombre de voix que lui valut sa seule parole!

Et puisque nous parlons politique, sachez que M. Barthou débuta comme ministre dans un cabinet vraiment «< très bien », puisqu'il comptait au moins deux présidents de la République « en puissance ». C'était le 30 mai 1894, sous le principat de M. Casimir-Perier. M. Charles Dupuy avait pris comme ministre des finances M. Raymond Poincaré et M. Félix Faure comme ministre de la marine; M. Georges Leygues était à l'instruction publique, M. Hanotaux aux affaires étrangères, M. Delcassé aux colonies.

Le ministère « chuta » le 26 janvier 1895, sur je ne sais quelle pelure d'orange; mais, dès le 29 avril 1896, M.-Barthou recevait des mains de M. Méliné le portefeuille de l'intérieur. Il le garda deux années. Ce fut ce que l'on appelle un long ministère; le ministère Sarrien, mis sur pied le 14 mars 1906, chancela au contraire dès le 25 octobre. M. Barthou y régnait sur les travaux publics et les P. T. T. Il y avait d'illustres collègues : MM. Poincaré (toujours) et M. Clemenceau, et M. Bourgeois, et M. Briand, qui jouait les grands maîtres de l'Université. Le 25 octobre, Clemenceau remplaçait Sarrien, mais conservait M. Barthou aux travaux publics. Le 24 juillet 1909, Briand remplaçait Clemenceau, mais plaçait M. Barthou à la justice. Dans trois cabinets successifs, M. Barthou avait « tenu bon la rampe »>, comme on ne dit pas à l'Académie.

Les parlementaires qui deviennent historiens, le deviennent en général assez tard, comme les coquettes sur le retour font retraite. Tel n'est pas le cas de M. Barthou, qui a mené de front la politique et l'histoire. J'allais écrire l'éloquence et l'histoire, mais je m'arrête,

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