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Mais les Parisiens n'ont jamais compris que leur préfet n'était que le chef des chefs de bureaux. Ils lui veulent une personnalité. Ils recueillent par ouï-dire des anecdotes de l'Hôtel de Ville qui, réunies, composent le visage du préfet. Certains, comme Frochot, sont arrivés ainsi à la célébrité et, comme la postérité ne revise jamais les jugements des contemporains, l'histoire garde leur renommée intacte. Il est à remarquer d'ailleurs que, dans ce dessin conventionnel, le premier trait est le seul qui compte. La première anecdote recueillie, qu'elle soit vraie ou fausse, constitue le point principal. On n'y ajoute plus que ce qui peut s'y marier sans dissonance.

De M. Delanney on dira qu'il était un grand travailleur. Ce fut le premier trait recueilli sur lui et tout ce qui pouvait être opposé a, depuis lors, été rejeté. Il est certain qu'il aimait le travail pour lui et les autres. Il allait jusqu'à exiger des fonctionnaires de la Ville la présence réelle à leur bureau. Il y veillait luimême et il fut un temps où personne n'osait s'absenter sans un solide prétexte. Un jour pourtant, par une matinée de printemps si belle qu'on n'y pouvait résister, quelques employés s'entendirent pour aller déjeûner à Joinville. A leur retour ils trouvèrent la fenêtre du bureau grande ouverte, une cage où vivait un oiseau familier était vide, sur le perchoir se tenait seulement la carte du préfet. Le geste était charmant et l'histoire fit le tour de Paris. Désormais M. Delanney aurait pu ne jamais reparaître à l'Hôtel de Ville sans perdre sa réputation de ponctualité.

M. Autrand lui nous arrive avec une réputation toute faite. Il passe pour être respectueux de ses droits et de ceux des autres.

Un jour il se rendait à Paris par le tramway. Il était tout simplement monté à l'impériale, quand le receveur vint lui demander le prix de sa place, il se borna à faire un geste de dénégation. Comme l'autre insistait, il lui tendit sa carte, en soulignant du doigt sa qualité. Le receveur, se souvenant que le préfet a droit au transport gratuit sur toutes les lignes de son département, n'insista pas. Mais, au pont de Sèvres on le vit reparaître. La limite de Seine-et-Oise était franchie, il revenait réclamer la place à M. Autrand. Celui-ci, heureux d'avoir trouvé un homme aussi respectueux que lui-même des règlements lui donna cent sous.

Cette anecdote n'est peut-être pas authentique, mais elle est suffisamment pittoresque pour être facilement retenue par la foule comme premier trait d'un portrait. En voici une autre qui pourrait faire le pendant. M. Autrand désirait avoir une police intelligente et instruite. Il avait chargé un conseiller de préfecture de donner aux agents des leçons de droit élémentaire. Celui-ci pour s'aider dans son enseignement s'était procuré le « manuel de police » de MM. Rault et Phélipot, excellent ouvrage écrit en collaboration par un conseiller d'Etat et un sergent de ville. M. Autrand le jugeait cependant un peu abscons et pour le prouver au professeur il fit un jour l'expérience suivante: A l'école des agents il dicta ce passage:

« Pour être véritable propriétaire d'une chose, on doit réunir sur elle trois conditions, savoir : 1° l'animus,

'cest-à-dire l'esprit qui s'obtient par le payement de la chose; 2° le corpus c'est-à-dire la chose elle-même ; 3° le fructus c'est-à-dire le fruit produit par l'usage de la chose. Exemple: Un citoyen qui achète un chapeau doit, avant d'entrer en possession de cet objet, en acquitter le prix chez le chapelier. Or, à l'instant qu'il le paye s'opère une mutation de l'animus, par le fait que le chapelier abandonne l'esprit qu'il avait sur son objet pour le porter sur la somme qu'il reçoit en échange. Inversement le citoyen abandonne l'animus

que

sur l'argent qu'il donne au chapelier, pour le porter sur le chapeau qu'il achète. Il résulte de cette mutation le citoyen n'a plus qu'à prendre possession du chapeau pour en conserver le corpus et à s'en couvrir la tête en avoir le fructus.

pour

Les trois conditions se trouvant ainsi réunies, le ci toyen est véritable propriétaire du chapeau... >>

Quand cette lecture fut terminée, M. Autrand de manda à un agent :

Si vous trouvez dans votre poste un képi que per sonne ne réclame, que devez-vous faire?

Il faut le porter à la fourrière, répondit l'agent Et M. Autrand dit, en fermant le livre : Le bon sens peut toujours suppléer à la science alors que la science ne remplace jamais le bon sens. PAUL BIRAULT.

La renaissance de la stratégie

L'offensive allemande aura du moins eu un résultat elle a fait refleurir la stratégie.

Certes, elle n'était pas en péril. Depuis quelques mil liers d'années qu'il y a des hommes, et qui se battent il y a eu d'autres hommes, qui écrivent, pour apprendre aux premiers ce qu'ils auraient dû faire et ce qu'ils n'eus sent pas manqué, eux-mêmes, de faire si, par heureus fortune, ils se fussent trouvés à leur place. La stratég existait bien avant Polybe, l'Ancien. Elle survivra Polybe, le Moderne.

On prête à l'un de nos plus grands chefs un mot pro fond. Comme quelqu'un se plaignait, en sa présence, de articles du lieutenant-colonel Rousset, il intervint, des voix la plus douce :

De quoi vous plaignez-vous ? S'il n'était pas jour naliste, il aurait un régiment!

De fait, il est souvent moins dangereux de vair général commandant une colonne de journal qu'une d

lonne d'infanterie.

Depuis quelque temps, cependant, nos strateg s'épuisaient. La guerre durait depuis trop longtemps ils étaient au bout de leur faconde. On les voyait réd à disserter sur les rations d'avoine des chevaux ou couchage des auxiliaires. Si, d'aventure, on leur offra de faire un petit voyage au front, pour rafraich leur expérience, ils levaient les bras au ciel comme même lieutenant-colonel Rousset, qui répondait un jo à un officier bienveillant qui l'invitait à se documenter Me documenter? Est-ce que j'ai le temps? Il fa que j'écrive mes articles!

Le bon vieux Dieu allemand, qui est aussi la Pro dence des stratèges, est enfin intervenu. Ouvrez l feuilles quotidiennes : elles regorgent maintenant de lit térature militaire, il y a des commandants, des colonels des généraux. Chacun en prend pour son grade; ily des Z..., des N..., des X..., des XX..., des XXX... Les doivent être aux stratèges en chambre ce que les brisque sont pour les combattants

Tel a déjoué les plans d'Hindenburg, tel autre a batt Ludendorff, à plates coutures. Celui-ci refait la bataill des Flandres, celui-là déclenche notre contre-offensi La critique des opérations a repris, dans les préoccup tions publiques, le rôle que jouait autrefois la critiqu dramatique. Le théâtre de la guerre a remplacé le théât tout court. Seul, le personnel n'a pas toujours chang Demandez à M. Henry Bidou...

Cette science, à la vérité, n'est point vaine. Elle a mente les conversations de l'arrière. Elle fait marche sinon le commerce,du moins le café du Commerce. C la seule denrée qui n'ait pas encore connu de rest

tions.

Les combattants, eux aussi, sont bien contents, d'a prendre des nouvelles de la guerre. A force de la fai

qui

pils l'avaient oubliée. Nos stratèges la leur rappellent à point. Combien d'entre eux ouvrent, chaque matin, Echo de Paris avec un petit frisson, pour lire l'arti le de M. Marcel Hutin. Ils y lisent, dans un enchevêrement impressionnant d'italiques, de « romain de 9 >> d'égyptiennes : « Cela m'étonnerait beaucoup que les Allemands n'attaquent point demain dans la région Amiens. » Et le lendemain, M. Marcel Hutin réitère : Je ne me suis pas trompé : les Allemands ont attaqué der au sud d'Ypres. >>

On disait autrefois « Le Français est un monsieur écoré, qui redemande du pain à table et qui ne sait as la géographie.» La guerre a changé tout cela. Il ly a plus de palmes académiques. On ne redemande lus de pain à table depuis M. Victor Boret. Mais peronne n'ignore que la Luce est un affluent de l'Avre, ni ue les hauteurs des Flandres se composent du mont ouge, du mont Noir et du mont des Cats.

Ce résultat, c'est à nos stratèges que nous le devons. ui donc oserait prétendre qu'ils soient inutiles?

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ARGUS.

Le théâtre est, dit-on, la représentation de la vie. Pas ujours. Et il ne l'est même point nécessairement lors'il s'applique tout particulièrement à l'être. Il protte la vie sur la scène en couleurs trop sombres ou op roses. Il est trop pessimiste ou il est trop optimiste. est trop réel et l'on signifie par là qu'il ne distingue ère de la réalité que ce qu'elle a de brutal et de douureux, ou bien il est trop romanesque. Il mène au déût de vivre et d'agir, ou bien il éveille en nous de Op vives et de trop plaisantes espérances.

Le théâtre n'est donc, pas toujours, quoi qu'on dise, représentation de la vie. Mais si le cinématographe le prolongement, le développement et un peu la atrefaçon du théâtre, il y a lieu de penser par insnts que dans le monde du cinématographe se mafestent par instants toutes les impuissances dont on fflige à certaines heures graves, pour la vie franise... On annonce pour l'industrie du cinématograe, et pourquoi n'ajouterait-on pas, oui, pourquoi n'auterait-on pas pour l'art du cinématographe un aver merveilleux et selon le terme à la mode, des « posbilités » extraordinaires, et voici que l'on se heurte au part à des obstacles que l'on juge trop tôt insurmonbles et que tout semble frappé de stérilité.

Ce n'est là qu'une apparence, assurément, et l'on agiet la cinématographie française réalisera, en dépit s difficultés momentanées, tous les progrès que l'on tend d'elle et que l'on se promet pour elle. Mais il git d'agir.

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lent pour entretenir l'amitié entre des peuples qui se ront d'autant plus près les uns des autres qu'ils se connaîtront davantage et se pénètreront mieux

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On cite volontiers comme un exemple significatif de ce que le cinématographe peut accomplir en fait de miracle diplomatique le grand film officiel sur les marins de France de 1916 à 1917. Joie des yeux. Joie du cœur. Or, ce grand film officiel a fait le tour du monde amical et le tour de ce monde pour qui la neutralité n'est qu'une forme atténuée et prudente de l'amitié. s'est déroulé ici et là pour la gloire de nos marins. On l'a vu non seulement dans toutes les provinces françaises, mais encore en Algérie, mais au Maroc, mais aux Etats-Unis, mais dans la République Argentine. Et on l'a vu en Russie et au Portugal et dans l'Espagne et même dans les pays scandinaves. Maintenant il va se dérouler en Grande-Bretagne et à Londres et dans les comtés, avec un affectueux enchantement les yeux anglais le verront.

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Ainsi travaille le cinématographe pour la plus sérieuse utilité du pays. Mais il peut, mais il doit étendre son labeur. Mais il lui appartient de développer ce labeur méthodiquement et avec quelque véhémence pressante et disciplinée. La propagande n'est pas toujours l'exploitation heureuse et facile de dispositions favorables partout reconnues, elle est souvent un combat. Et maintenant une œuvre de propagande s'impose au cinématographe, qui sera une œuvre de lutte.

Lutte contre l'Allemagne, bien entendu. Mais est-il exact que, dans cette lutte, nous nous soyons laissés devancer déjà? Est-il exact que nous ayons permis à l'Allemagne de choisir déjà son terrain et de l'organiser? Dans toutes les nations neutres l'Allemagne a retenu pour son service et même, s'il reste encore de la place et du temps, pour le service de l'Autriche, la plupart des salles de cinéma. Et nous qu'avons-nous fait ?

Nos diplomates, chargés d'assurer de toute leur intelligence, pénétrante et si adaptée aux nécessités des temps modernes, l'expansion française, ont-ils négligé de diriger leur monocle si perspicace sur ces réalités trop modestes de l'action par le cinématographe ? Nos conbureaucratiques qui les absorbent et dont on sait bien suls si souples n'ont-ils pas quitté un instant les soucis qu'ils les ont en horreur, pour envoyer sur la notable question de la propagande par le cinématographe de beaux rapports à la direction du Quai-d'Orsay où ils auront été lus immédiatement avec une avidité que je qualifierai d'exemplaire, par des hommes ardents à tirer parti de tout pour le développement de la puissance française à l'étranger? Et nous qu'avons-nous fait ?

Nous n'avons pas fait tout ce que nous aurions dû faire. Et M. Pierre Decourcelle à qui rien de ce qui concerne le cinématographe et les entreprises cinématographiques ne demeure étranger, M. Pierre Decourcelle a poussé et jeté le cri d'alarme... Cri d'alarme. Cri d'appel.

Appel à l'action contre l'Allemagne tentaculaire. Et cet appel l'Etat aurait pu l'entendre. On ne lui demandait que de l'argent. L'Etat a toujours eu beaucoup d'argent. Par le temps qui court, l'Etat n'a pas cessé d'avoir beaucoup d'argent. Pourtant l'Etat n'a pas entendu cet appel. On croyait aussi que les fortes institutions de crédit, qui certainement ne sont pas indifférentes aux entreprises françaises plus qu'aux entreprises étrangères soutiendraient une initiative indispensable. M. Pierre Decourcelle se flatte que les fortes institutions de crédit lui prêteront une oreille attentive et qu'elles ne s'écarteront pas sous le prétexte qu'elles sont très occupées ailleurs. Mais quand ? Mais comment la contre-offensive du du cinématographe dans les pays neutres se déclenchera-t-elle ? La tâche est bien nettement précisée et la matière n'est

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pas infertile et petite. Est-ce que quelqu'un de ces | La Vie Littéraire hommes audacieux qui ont gagné beaucoup beaucoup d'argent depuis quatre années ne pourrait pas avoir une hardiesse nouvelle et faire pour le cinématographe un vigoureux effort qui serait un véritable effort patriotique, national et qui produirait évidemment des résultats et sans nul doute des dividendes.

Les nouveaux riches se consultent à l'instar des gens timorés auxquels ils ne ressemblent pas et adhuc sub judice lis est.

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Ainsi la mission de propagande du cinématographe est une mission ample et diverse et il tombe sous le sens qu'elle doit être remplie dans le délai le plus bref.

Et par ailleurs, beaucoup envisagent le rôle du cinématographe dans l'éducation de l'enfance et même des hommes mûrs qui se considèrent comme étant toujours assez jeunes pour avoir encore quelque chose à apprendre...

Tous sont d'accord sur ce point que si le cinématographe ne peut pas remplacer absolument tous les maîtres, il peut leur apporter une aide singulière, et qu'il vivifiera prodigieusement les leçons d'histoire ou de géographie, et aussi tout l'enseignement des sciences naturelles et qu'il constituera, en somme, une constante et toujours lumineuse leçon de choses!

Et dans plusieurs autres domaines qui sont très étendus, le présent ouvre au cinématographe d'immenses perspectives d'avenir.

Vous en concluez naturellement que dans tous les milieux du cinéma, une activité intense doit se manifester... Et cette conclusion est conforme à la pure logique.

Mais, par je ne sais quel fâcheux sortilège, la logique a bien de la peine à l'emporter dans ce bas monde où l'on tourne des films. Et à l'heure où nous nous persuadons que tous les entrepreneurs de cinématographe élaborent et déjà présentent des plans napoléoniens de conquête pacifique et bienfaisante, leur industrie utile à la patrie reste dans la stagnation.

Leur ardeur naturelle s'est mise avec quelque complaisance au régime des restrictions. Sans doute, une méchante fée est venue contrarier l'intervention de tant de fées tutélaires. Sans doute, l'électricité est mesurée chichement aux théâtres de prises de vues. Sans doute, les producteurs de films manquent de pellicules et jamais nulle part le manque de pellicules n'a été aussi désolant. Sans doute un décret, qui était peut-être inévitable mais qui n'est pas moins malencontreux pour cela, a interdit d'exporter les films français. Et les industriels de la cinématographie française, parce que leurs bénéfices allaient être limités, ont paru se résoudre très aisément à ne pas faire de bénéfices du tout et plus aisément encore à ne rien faire du tout.

Et telle est la contradiction flagrante entre les possibilités et les réalisations. N'y a-t-il pas chez nous quelque nonchalance à entreprendre, quelque indolence à oser? Fléchissement momentané des énergies et des initiatives nous aimons à le croire. Et bientôt nous verrons surgir dans le monde du cinématographe des hommes qui seront aussi frémissants comme industriels que comme artistes et qui brûleront pour coopérer à la renaissance française. Ils seront les très bienvenus.

Et on ne pourra pas dire que la mollesse et la timidité ont fait perdre au cinématographe français le bénéfice de sa situation privilégiée dans le monde. Situation privilégiée car le cinématographe français participe de la faveur qu'on accorde partout à nos œuvres littéraires et théâtrales. Et c'est justice incontestablement. Mais dans la rude époque où nous vivons il faut faire beaucoup et plus encore pour mériter toute la justice.

J. ERNEST-CHARLES.

Une Anthologie des écrivains belges

Plusieurs choix de pages empruntées aux lettres fran çaises de Belgique avaient été publiés à Bruxelles, e Allemagne, en Angleterre, en Italie, voire en Pologn Au cours de la guerre, un éditeur d'Amsterdam en a de mandé un autre, qu'il présenta dans une typographi soignée, à M. Jan Greshoff (1), un jeune écrivain ho landais très averti des plus récentes manifestations litt raires en langue française, autant que des tendance de la nouvelle Allemagne littéraire. L'édition français qui a donné à Maeterlinck, à Verhaeren et van La berghe une notoriété qu'ils n'ont jamais connue en faisant imprimer dans leur propre pays, manqua d'une bonne anthologie qui révélât au public d'ici d écrivains moins renommés que ces trois grands poète qu'un Camille Lemonnier, mais qui méritent mieu pourtant que la demi-obscurité où ils se sont relégué du fait de leur éloignement de Paris et de la faibl circulation des ouvrages édités en Belgique.

Cette lacune vient d'être comblée. Un éditeur par sien (2) a demandé cette anthologie à M.Louis Dumon Wilden, critique et essayiste belge qui a la conflan du lecteur français. Le choix qu'il a fait est des pl judicieux. M. Dumont-Wilden a évité le travers dan lequel tombent la plupart des fabricants d'antholog qui, sous prétexte de donner plusieurs morceaux à cha que auteur, multiplient les courts fragments qui, is lés de leur contexte, nous donnent une idée fausse insuffisante de la personnalité de l'écrivain. Ici, a contraire, chaque conteur ou romancier est représent par un seul fragment, mais important et bien chois qui forme un tout nouvelle, chapitre de roman, vra ment caractéristique de sa manière. Il y a quelques om sions dont M. Dumont-Wilden s'excuse auprès du p blic français en demandant qu'on lui tienne comp des circonstances difficiles dans lesquelles, en exil, il dû composer ce recueil. On regrettera que des poèt comme Thomas Braunn qui est le disciple bel de Francis Jammes, comme Franz Ansel, Arth Toisoul et Henri Vandeputte, qu'un chronique comme Jean d'Ardenne, des essayistes ou conter comme Christian Beck, André Ruyters P. H. D vos, des auteurs, dramatiques comme Paul Spaak F. Crommelynck ne figurent pas dans cette anthol gie excellente. Mais encore une fois, il ne serait por raisonnable d'en tenir rigueur à M. Dumont-Wilde Il nous suffit que son florilège donne à nos amis de Pa ris une notion plus complète de l'extrême vitalité et d la richesse, aux marches septentrionales de la cultu de cinquante ans, et qui a donné au monde un Verhae française, d'un mouvement littéraire né il y a moin ren et un Maeterlinck. Il nous suffit surtout qu'il fass mieux connaître ici des poètes comme ce Max Elskamy à la fois très subtil, très rare et très ingénu, Grégoire Roy, Fernand Séverin, Jean Dominique, un maître o vrier du vers parnassien comme Albert Giraud, de conteurs et romanciers comme le Flamand Eugène De molder qui prit aux vieux peintres de nos Pays-Bas le couleur même, comme le Bruxellois Courouble, père d ces Kackebroeck qui sont des Beulemans avant la le tre, mais combien plus vivants et plus vrais ! -Comm les Wallons Henry Maubel, l'exquis Louis Delatt Maurice des Ombiaux, Georges Garnir, l'âpre Hube

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(1) A la Gloire de la Belgique (Ed. van Looy, Amsterdam (2) Louis-Dumont Wilden: Anthologie des écrivains belg 2 vol. Ed. Georges Crès et Cie, Paris,

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ains, Blanche Rousseau et de jeunes poètes comme Collin, Pierre Nothomb, Jules Delacre.

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Dumont-Wilden a placé au seuil de cette anthobee une pénétrante étude de ce mouvement littéraire e. Mais peut-on parler d'une littérature belge ? levant en français ou tout au moins, nous y efforBru nous appartenons aux lettres françaises, rous avons du jugement du public de langue française. dan Froissart, né en Hainaut, grand voyageur devant eternel, un prince de Ligne, grand seigneur wallon, énopolite, parfait représentant de cette Europe franestatie du XVIII° dont nul n'a mieux parlé que M. Dudes t-Wilden et qui put inspirer à un Rivarol son fationix éloge de l'universalité de la langue française, ne et pas plus des écrivains belges que Jean-Jacques Cosseau n'est un écrivain suisse. « De toutes façons, Days, M. Dumont-Wilden, même lorsqu'elle accentue ses publi: frences à l'extrême, la littérature belge d'expression grançaise, pour employer un terme assez impropre mais mérite acré par l'usage, n'existe qu'en fonction de la littée sorte française. C'est une province un peu plus partiet de iste que les autres, mais une province néanmoins gique comme toutes les provinces, reçoit les impulsions es du centre .» Jn édi

cependant... On ne peut nier que les écrivains belLousonstituent une province très à part dans la littérai a hai française actuelle, une province très province. Mais fait Ils n'ont pas à en rougir. Leur littérature est ré

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liste au meilleur sens du mot. Leurs écrits doivent

cants dntiel de leur originalité, de leur vertu à un cerS morcea parfum de terroir dont ils auraient tort de se agment ire. La plus belle idée générale, située dans la tième dimension, ne vaudra jamais tel drame quol'écriva où se débattent des êtres qui tiennent par toutes cier est fibres à leur race et à la terre où ils sont nés. De ant eterlinck, on pourrait dire comme Hugo disait de e delaire, qu'il a inventé un <<< frisson nouveau >>. yaqut en chercher le secret dans sa sensibilité flause aue. M. Verhaeren, kui aussi, a su ajouter « de nouui tem cordes à la lyre poétique ». Certes, il a découvert elle, beauté moderne qu'il a exaltée dans les grandes que d'Europe; mais ce qui nous émeut surtout, c'est disa ugue plébéienne, un peu barbare, avec laquelle ce Anand a traduit cette beauté et clamé l'évangile nou

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Paul nce. On le sera sans doute beaucoup moins de-

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Que cela pourtant n'incite point nos poètes à eer dans je ne sais quel patriotisme de cantate offiLes écrivains belges doivent se défier également Styrannie de Paris et de celle de Bruxelles, capiadministrative d'un pays qui possède une si admiHe variété de terroirs.

Belgique est une province de la littérature franmais c'est on l'a dit avant nous tqui a droit à l'autonomie.

une pro

ant 1880, personne ne s'avisa de parler en Belgique Clittérature belge. C'est vers cette époque que naLe mouvement de la Jeune Belgique avec Waller, Gn, Giraud, Gille, Fontainas, Eekoud. Il avait des dseurs Ch. Decoster, Octave Pirmey. Il eut son Pade file, Camille Lemonnier, son héraut, Edmond

Durond, grand excitateur d'énergies.

vraisbach, faisait blanchir son linge à Paris. ans a jà, l'un des écrivains les mieux doués de ce groupe,

ir,

Lous faut que la jeune littérature belge conserve ce je ne is quoi « de dru, de sain,de haut en couleur, dont pas encore Dumont-Wilden, qu'on ne rencontre plus dans la littérature française que chez quelques sins exceptionnels qui semblent sortir des profon

Loop,

deurs du peuple. » L'auteur d'un tel jugement n'est point suspect de mollesse, de tiédeur dans la défense de l'influence française. Avec lui, nous voyons et dénonçons une maladie dont a souffert le mouvement littéraire belge le culte du néologisme, du barbarisme, d'une langue faussement artiste qu'un jour on désigna du nom de « macaque flamboyant ». Mais outre qu'on ne peut céler qu'un Verhaeren souvent, en épurant sa forme, en tendant à je ne sais quelle pureté néoclassique, a perdu de sa vigueur (des épreuves corrigées de sa main me l'ont prouvé tout récemment encore), il convient de dire que les écrivains belges, à leurs débuts, vers 1885, ont subi, au point de vue du style, l'influence souvent funeste d'un écrivain français établi à Bruxelles et qui s'appelait Léon Cladel.

Beaux-Arts & Curiosité

ENQUÊTE

LOUIS PIERARD.

sur les problèmes architecturaux actuels (1)

M. LEANDRE VAILLAT, écrivain d'art.

puis qu'approuver toute propagande en faveur des déCertes, je trouve votre enquête opportune, et je ne cisions qui veulent sauvegarder la physionomie, le pourtraict, comme on écrivait jadis, de la France. Contrairement à quelques esprits chagrins, dont le patriotisme me semble peu clairvoyant, je ne pense pas qu'il soit trop tôt pour nous occuper d'une chose qui nous concerne, nous Français, et que guettent déjà les neutres, les Allemands sous le couvert des neutres.

Depuis longtemps, je n'ai cessé, vous le savez, de combattre les prétentions de l'Allemagne qui mobilise, depuis longtemps, l'artillerie lourde de ses artistes, de ses architectes, de ses banquiers, de ses hommes d'affaires, contre les efforts dispersés de nos compatriotes.

aux

On évalue à dix milliards la remise en état de nos milliards iront aux Allemands, aux neutres ou départements envahis: il s'agit de savoir si ces dix. Français. Mais à supposer que le principe du gain soit acquis dans cette affaire au profit de nos nationaux, comment envisager la double question que vous posez, suivant quels modes doit-on et peut-on restaurer les monuments, ou reconstruire les villes et les villages ? Il va sans dire que les idées générales que l'on peut avoir sur la restauration, dépendent avant tout de l'expérience et sont relatives à chaque cas particnulier. Il convient cependant de faire confiance au service des monuments historiques; il semble qu'il y ait là depuis quelques années, une direction intelligente et une équipe de collaborateurs de grand goût, dont le budget, d'ailleurs, ne seconde pas suffisamment les efforts ingénieux. Pourra-t-il dominer la situation? Je le souhaite sans trop l'espérer.

Quant à la reconstruction des villages, je n'ai pas grand'chose à ajouter aux chroniques que j'ai publiées dans le Temps et la Revue hebdomadaire, en 1916 et en 1917, ni à l'exposition dont je me suis occupé de concert avec la S. A. D. G., aux Galeries Goupil, en janvier-février 1917. Les unes et les autres ont prouvé l'existence d'une architecture régionale dans chacune des provinces envahies, de la Flandre à l'Alsace, en passant par l'Artois, la Picardie, l'Ile-de-France, le Valois, la Champagne et la Lorraine ; l'exposition dont il s'agit constitue un répertoire précieux des documents. dont aucun architecte ne saurait se passer s'il veut faire

(1) Voir l'Opinion des 9, 16, 23, 30 mars, 6, 20, 27 avril et

4 mai.

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œuvre en harmonie avec le climat, le décor naturel, les coutumes agricoles ou industrielles des habitants, les matériaux que l'on trouve sur place. Mais cet homme se tromperait étrangement en estimant que nous avons cherché à travers les provinces, le décor d'un ballet paysan; non, nous avons voulu définir la tradition architecturale dans ses raisons profondes, démêler dans les usages des maîtres à bâtir la part de l'éternel et celle de l'éphémère, et proposer une formule à adapter. Le rôle de l'architecte, c'est moins d'imaginer que d'adapter; chacune des formules qui dans le recul des siècles nous paraît révolutionnaire et complètement originale, est au contraire une œuvre collective et progressive nous la cristallisons dans le passé, mais elle s'élabora lentement; et chacun des progrès tendant à cette formule est précisément une adaptation. Adapter des lois de toujours parce que dictées par un déterminisme physique, aux besoins d'aujourd'hui, à notre connaissance de l'hygiène, aux exigences sociales, aux perfectionnements des machines,à la transformation des usages agricoles ou industriels, au déplacement des carrefours et des axes de circulation; voilà la tâche de l'architecte qui travaillera demain à la renaissance des cités endormies. Aussi c'est, dans cet esprit que la S. A. D. G. avait rédigé les programmes d'un concours d'habitations rurales, dont l'exposition d'architecture régionale n'était que la préface nécessaire, en quelque sorte le dictionnaire d'images à l'usage des concurrents. Elle a renoncé à prendre elle-même la direction de ce concours et remis les programmes entre les mains du service des monuments historiques. On sait le succès qu'a obtenu le concours. Dès maintenant, on est en possession d'un recueil de types d'habitations rurales, que l'exécution locale saura diversifier à l'infini. Tâchons d'obtenir, par des concours analogues et successifs, des types régionaux d'églises, de mairies, d'écoles, de gares, d'hôpitaux, bref d'édifices publics. Il ne restera plus, ensuite, qu'à étudier les moyens de persuader aux habitants, aux communes, aux départements, d'utiliser ces types quand ils.songeront à reconstruire. Cette persuasion sera précisément la tâche du ministère des régions libérées: faire passer dans le décor de nos paysages de France, l'image de la maison des pays de France.

M. HECTOR GUIMARD, architecte d'art

Les problèmes qui font l'objet de votre intéressante enquête sont si vastes que ma réponse sera bien brève. I. Si le monument n'est pas d'une valeur artistique reconnue, indépendamment de l'ancienneté de sa construction, il faut simplement le réparer en tenant compte de ses conditions d'utilisation et de sa meilleure harmonie architectonique.

Si le monument est d'une valeur artistique indiscutable, je voudrais que l'on conservât la trace vivante de la mutilation boche. Les ruines de la guerre deviendront des lieux de pèlerinage où le monde entier viendra constater les crimes commis en pleine civilisation contre les œuvres d'art.

Consolider et préserver de la désagrégation les éléments architecturaux ou sculpturaux du monument devra être la tâche de nos architectes; leur savoir et leur goût leur permettront de reconstituer, pour son usage et sa destination toutes les parties utilisables.

Du reste, peut-il, financièrement, en être autrement ? Peut-on songer à engager les crédits nécessaires pour reconstituer ou restaurer les centaines de chefs-d'œuvre détruits..... toute l'œuvre des siècles écoulés ?

II.

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Il serait regrettable d'hésiter, en ce qui concerne les villes détruites, ou des portions, ou des quartiers de ville détruits, à ne pas tenir compte dans les

reconstitutions des conditions nouvelles de la circul tion, du développement économique des villes, des gles indispensables de l'hygiène et de l'esthétique, Leur adaptation aux besoins modernes est aussi lo que que l'emploi de tous les matériaux que le progrès mis à notre disposition.

Mais je voudrais, d'autre part, que les lus bea spécimens des maisons, ou fragments de maison, sent conservés ou rassemblés et que chaque ville détru possédât un « Musée des dévastations », vivant. tém gnage des conséquences de la « Guerre organisée » III. Je crois qu'une formule architecturale m derne non seulement peut, mais doit naître; quoiq beaucoup de jeunes talents aient disparu déjà, il reste encore pour créer des œuvres capables de rempl cer avantageusement les constructions privées détruit

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Quant aux matériaux qui seront employés, il fa drait utiliser ceux mêmes de la région qui se combi ront avec des agglomérés de toutes sortes. C'est vers dérivés de ces matériaux que devront porter les rech ches des architectes.

Vous me demandez enfin vers quels grands princi architecturaux devra évoluer la construction,

Les Entretiens » de Viollet-le-Duc sur l'archit ture les expose tous avec une clarté lumineuse ; ils a duisent à la recherche des solutions architectoniq rationnelles adaptées aux besoins de l'usage à satisfa et à la mise en œuvre des matériaux appropriés.

Ce sont les meilleurs principes de logique professio nelle et d'harmonie architecturale ; j'ajouterai seulem qu'il faut les réaliser avec intelligence et considérer l'art est surtout un sentiment; si notre époque veut la ser une trace profonde, elle devra marquer l'empre du sentiment français sur les œuvres architectura qui incarneront dans nos régions la France de dema il se traduira par la loyauté, la clarté et l'élégance MORA-BISSIER (A suivre.)

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Et toi, qu'est-ce que tu fais ? demandait une à un passant? Etudiant? Employé ? Non..., journaliste.

Un silence, puis la voix de la femme reprend : Si ça ne te fait rien, tu me feras ton petit deau d'avance.

Acceptez l'anecdote, lecteurs de l'Opinion. Elle paru dans l'Heure, qui n'est pas un journal de mauv compagnie.

Le narrateur ajoute: « La confiance, comme on voit, semblait régner fort peu déjà, à cette époque, Montmartre, touchant le crédit qu'il convient d'ac der à la situation de journaliste. » Puis il évoque procès du Bonnet Rouge « qui ne sera pas fait p l'augmenter », et ce discrédit lui paraît non seulem regrettable, mais injustifié, puisqu'il dit encore: « On ne se doute point, dans le public, de la som de connaissances, ou tout au moins de la faculté si tant daptation que réclame cette profession que c'en soit une.

« Je sais nombre de gens

dont je m'honore d

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