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veut égorger plusieurs membres de la Convention nationale pour la dissoudre; et ce moment sera saisi par les Anglais pour faire une descente, à laquelle ils sont préparés; et alors la contre-révolution s'opère!

› Voilà le projet. Peuple, c'est à toi de le déjouer! Déjà des citoyens éclairés s'en sont aperçu; mais une classe que sa vertu mêine rend crédule est trompée, et, sans le croire, sert le projet de nos ennemis!

>> Voilà la déclaration que je devais à mon pays! Je l'ai faite : j'attends les événemens; j'ai acquitté ma conscience.

La majorité applaudit à cette déclaration du président, et, sur la demande de Vergniaud, il est décrété qu'elle sera imprimée, affichée dans Paris, et envoyée dans les dépar

temens.

« Déclarons encore, ajoute Meaulle avec enthousiasme, déclarons que nous ne nous quitterons pas, que nous mourrons tous ensemble ! »

Oui! oui! s'écrie-t-on de toute part. L'Assemblée entière se lève, et décrète par acclamation :

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Les dangers qui menacent la Convention sont déclarés communs à tous les députés; tous jurent de mourir ensemble à leur poste. >>>

La confiance et le calme renaissent dans la majorité: on voit encore l'inquiétude agiter l'extrême gauche et les spectateurs; mais elle est silencieuse.

Un député inspecteur de la salle informe l'Assemblée des mesures qui ont été prises pour maintenir la police des tribunes; il rapporte quelques traits des interrogatoires qu'ont subis plusieurs femmes auteurs du désordre, et il démontre évidemment que ces fenimes, qui presque toutes portent les livrées de la misère, et se disent dames de la fraternité, sont salariées pour troubler les séances, surveiller ceux qui s'y rendent, obstruer les corridors, bloquer les tribunes réservées aux citoyens des départemens, arracher les billes à ceux qui viennent occuper ces tribunes, sous le prétexte que ce sont des aristocrates, des privilégiés qui les obtien

nent (1). L'une d'elles, interpellée sur le motif qui la portait à s'emparer ainsi de billets dont elle ne profitait pas, avait répondu : cela nous est égal; avec ces billets nous avons des assignats, et souvent de l'argent... D'autres membres ajoutent des faits analogues qui sont à leur connaissance, et s'accordent à attribuer ces manœuvres aux ennemis de la République.

Quelques traits sont lancés contre les sociétés populaires... Alors le bruit, les cris éclatent de nouveau. Marat parcourt les corridors; il exp'ique à la foule ce qu'il entend par hommes d'état : apercevant un membre du côté droit, il lui dit: tu en es un, toi! mais sois persuadé que le peuple fera bientot justice de toi et des autres! A ce spectacle la majorité se soulève. Guadet s'élance à la tribune; il rappelle tout ce qui depuis quelque temps a été dit aux Jacobins; il en conclut que l'on touche au moment, à l'heure où la Convention va cesser d'être : il signale les assassins; ils sont apostés, il les voit, ils vont frapper!... Des membres de l'extrême gauche et des spectateurs applaudissent aux discours que Guadet cite comme ayant été tenus aux Jacobins; mais ils nient, ils improuvent les conséquences qu'il en tire. C'est lui et les siens qu'on accuse d'être des conspirateurs, des traîtres: Marat voit sur leur front la marque indélébile de complices de Dumourier; et ce n'est pas moi, dit-il, qui les ai déclarés contre-révolutionnaires; c'est Dumourier luimême en faisant leur éloge. Au surplus, continue Marat, ils n'ont qu'un moyen de prouver leur civisme, d'être d'accord avec les patriotes; c'est de se mettre aussi la corde au cou en se joignant à eux pour décréter la mise à prix de la tête des fils d'Orléans et de tous les Capets.

(1) Dès l'onverture de la Convention ces tribunes réservées avaient excité des débats, et entretenu la jalousie du peuple. La montagne voulait que, par respect pour le principe de l'égalité, il n'y eût de billets sous aucun prétexte pour assister aux séances de l'Assemblée nationale; mais ces billets avaient été maintenus en faveur des citoyens des départemens qui ne venaient passer que quelques jours à Paris. Us furent enfin supprimés dans la séance fameuse du 31 mai.

Cette proposition, déjà vingt fois reproduite par Marat, et toujours dans les mêmes termes, est encore une fois repoussée.

Le tumulte continue; il s'accroît. Guadet était resté à la tribune; il voulait conjurer l'orage, réunir une forte majorité à l'effet de faire prendre une vigoureuse mesure. Il redouble d'efforts; il annonce qu'il veut proposer un décret important; les interrupteurs cèdent.

Guadet. « Citoyens, pendant que les hommes vertueux se bornent à gémir sur les malheurs de leur patrie, c'est alors que les conspirateurs s'agitent pour la perdre ; comme César, ils disent : laissons-les dire, et agissons! Hé bien, agissez aussi! Quoi! votre police intérieure est faite par des femmes forcenées, salariées sans doute par les agens de Pitt, et vous gardez le silence !.... (Murmures des tribunes.) Si vous eussiez pu m'écouter je vous aurais annoncé qu'il existe un complot pour dissoudre, pour égorger la Convention nationale! Mémes murmures.) Je vous aurais appris qu'avant hier, dans une assemblée de prétendus membres de comités révolutionnaires, il a été arrêté de mettre en état d'arrestation tous les hommes suspects, c'est à dire tous ceux qui n'ont pas de patentes des honorables journées des 2 septembre et 10 mars; et à la suite de ces arrestations on devait vous livrer à cette multitude égarée à qui l'on est parvenu à faire aimer le sang! (Agitation dans toutes les parties de la salle.) Je vous aurais appris qu'en présence du conseil général de la commune de Paris le commandant de la force armée de la section des Sans-Culottes, Henriot, a dit : « Songez, citoyens, qu'en partant pour la Vendée vous laissez >> ici des rolandins, des brissotins, des girondins, des cra» pauds du marais (1), dont....

Les citoyens des tribunes applaudissent; on entend répéter à gauche et dans le public: Oui! Oui! C'est vrai! Il faut que tous les conspirateurs périssent !...

(1) Les membres de la Convention qui siégaient dans le bas de

salle, ou an centre, nommé plus ordinairement la plaine.

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Doulcet-Pontécoulant. « Je prends acte de ce que les complices de ce scélérat viennent de se faire connaître ! >>>

Guadet. « Enfin je vous aurais dit que le tumulte que vous voyez n'a d'autre objet que d'amener ce mouvement.... (Murmures, cris d'impatience à gauche et dans les tribunes. Guadet continue dans le bruit.)

» Jusques à quand, citoyens.... Jusques à quand dormirezvous.... Jusques à quand, citoyens, dormirez-vous ainsi sur le bord de l'abîme? Jusques à quand remettrez-vous au hasard le sort de la liberté ? Si jusqu'à présent la fortune a fait tout pour vous, sans doute vous devez être contens d'elle; mais si vous ne faites rien pour la liberté, je vous le demande, serezvous conţens de vous! C'est donc des mesures vigoureuses que je vous engage à prendre, afin de déjouer les complots qui vous environnent de toute part!

>> Jusqu'à présent les conjurés du 10 mars sont restés impunis: il faut avoir le courage de sonder la profondeur de la plaie! Le mal est dans l'anarchie, dans cette sorte d'insurrection des autorités contre la Convention; il est dans les autorités de Paris, autorités qui ont dépassé les limites que leur imposaient les lois, qui se sont permis d'en interpréter le sens, autorités anarchiques, qu'il faut... (Violent mouvement d'improbation à gauche et dans les tribunes.)

» Oui, je le répète, le mal est dans l'existence des autotorités de Paris, autorités avides à la fois d'argent et de domination! (Méme mouvement.)

>> Citoyens, il en est temps encore; prenez de grandes mesures, et vous pouvez sauver la République et votre gloire compromise!

» Je propose à la Convention les trois mesures suivantes :

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1o. Les autorités de Paris sont cassées. (Applaudissemens de la majorité; murmures à gauche ; menaces dans les tribunes.) La municipalité sera provisoirement, et dans les vingtquatre heures, remplacée par les présidens des sections.

> 2°. Les suppléans des membres de la Convention se réuniront à Bourges dans le plus court délai; néanmoins ils ne pourront délibérer que d'après un décret précis qui les y

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autorise, ou sur la nouvelle certaine de la dissolution de la Convention.

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3o. Ce décret sera envoyé aux départemens par des courriers extraordinaires.

» Quand ces mesures seront adoptées, citoyens, nous travaillerons avec énergie et tranquillité d'âme, sûrs d'avoir mis en sûreté le dépôt sacré de la liberté ! >>

On ne peut décrire la position de l'Assemblée après cette héroïque proposition de Guadet: on eût dit d'une part que la foudre était tombée, de l'autre que des naufragés saluaient enfin un sol hospitalier.

Sortis de leur stupeur, les membres de la gauche se forment en groupe; ils se consultent. - Enfin, s'écrie Collotd'Herbois, voilà la conspiration découverte! Danton veut répondre à Guadet; ses collègues le retiennent: ce n'était pas un athlète qu'il fallait dans la circonstance; c'était un médiateur: Barrère est choisi; il parle au nom du comité de salut public.

Barrère. « Il est vrai qu'il existe à Paris, et par des ramifications dans toute la République, un mouvement préparé pour perdre la liberté. Depuis plusieurs jours je me suis présenté à cette tribune pour faire à l'Assemblée, au nom du comité de salut públic, un rapport sur la situation actuelle de la France, et si l'Assemblée avait voulu m'entendre elle aurait pu prendre des mesures contre les autorités constituées et les citoyens qui peuvent perdre la liberté.

» Je dis qu'il existe un mouvement commencé d'abord à Marseille, et qui depuis s'est étendu jusqu'à Lyon et dans plusieurs autres départemens. Parmi nous la peur, la vengeance et les haines personnelles ont fait attribuer aux divers côtés de l'Assemblée ce qui n'est l'ouvrage que de l'aristocratie. Voilà la véritable cause de nos dissensions; et aujourd'hui Duhem, arrivant de la frontière du nord, nous a donné des détails qui eonfirment ce que je viens de vous dire : les étrangers ne veulent pas nous attaquer; ils espèrent tout de l'esprit de discorde qui règne parmi nous.

» Je vais vous citer plusieurs faits qui vous prouveront que

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