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dû à la Convention. Carra s'écrie que les interrupteurs sont des scélérats soudoyés pour avilir et dissoudre la représentation nationale Le bruit redouble. Un girondin s'élance à la tribune pour faire une motion d'ordre.

Guadet.

« Citoyens, une représentation nationale avilie n'existe déjà plus! Tout palliatif pour sauver sa dignité est une lâcheté : la répétition des invitations, des ordres du président en prouve assez l'inutilité. Les autorités de Paris ne veulent pas que vous soyez respectés! (Murmures dans l'extrémité gauche.) Il est temps, citoyens, de faire cesser cette lutte entre la nation entière et une poignée de contre-révolutionnaires déguisés sous le nom de patriotes! (Nouveaux murmures.) J'appelle, et j'ai raison d'appeler contre-révolutionnaires déguisés ceux qui ont outragé, avili, menacé la Convention nationale; car que peuvent désirer rien tant les rois et les tyrans coalisés contre nous que de vous voir menacés, avilis, outragés ? Ils savent bien qu'alors vous ne pourrez donner une constitution au peuple, ou que celle que vous lui donnerez se ressentira nécessairement de l'avilissement où l'on veut vous plonger! Je vais faire une proposition qui révoltera sans doute tous ceux qui n'ont pas dans le cœur l'amour de la République et de la liberté; je demande que la Convention nationale décrète que lundi sa séance sera tenue à Versailles. »

Toute la droite se lève pour appuyer la motion de Guadet. La gauche éclate en murmures.

Vigée. « Je crois qu'ajourner à lundi notre départ pour Versailles ce serait donner aux malveillans les moyens de l'empêcher. Je viens renchérir sur la motion de Guadet; je demande qu'au premier murmure des tribunes nous nous retirions tous, et marchions à Versailles le sabre à la main! » (Mémes mouvemens.)

Marat. « Ce n'est pas en escobardant qu'on rétablit le calme, qu'on ramène la confiance! Pour donner à la nation la preuve convaincante du degré de confiance que méritent ses représentans, je vais proposer une grande mesure, propre à lever tous les soupçons. Une partie de l'Assemblée a été déclarée complice de Dumourier par Dumourier lui-même. J'ai demandé déjà que la tête des Capets fugitifs fût mise à prix; c'est le seul moyen de ramener la confiance, qui ne peut siéger ici tant que vous formerez un parti prêt à transiger avec ces traîtres. Je renouvelle ma proposition, afin que les hommes d'état se mettent la corde au cou à l'égard des Capets fugitifs comme les patriotes se la sont mise en votant la mort du tyran. >>>

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Buzot. « Je ne crois pas que par une motion incidente, qu'au surplus je n'appuie ni ne veux combattre, on vous donne le change sur la proposition bien autrement importante de Guadet. Ce n'est pas le vœu des membres dans l'affaire du tyran qui entretient ici la division; tout le monde sait que Ducos, qui parlait de la classe la plus respectable, du laboureur, a voté la mort de Louis.

>> Depuis quelques mois nous sommes réduits à désespérer même de faire la Constitution. On vous a proposé une convocation des assemblées primaires; vous l'avez crue nuisible, et, poussés par des motifs qu'au surplus on n'a pas discutés, vous l'avez rejetée. Voyons, citoyens, voyons, comme la vérité nous le montre, comme la postérité le verra, quelle est notre position! On nous a souvent accusés d'être les meneurs de l'Assemblée; mais vous n'avez pas même une existence politique! Il n'est pas ici une autorité, pas une société qui n'ait plus de pouvoir que vous! (Murmures à gauche)

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>> J'ai pensé, je le pense encore, que des événemens dont je ne veux pas rappeler l'époque ont dénaturé totalement la morale du peuple. Les mêmes hommes qui les ont causés ou défendus ont tant fait qu'ils se sont emparé de toutes les places; armées, ministères département, municipalité, on les trouve partout. Dans un café voisin, qui n'est que le rendez-vous de ces scélérats, dans vos avenues qu'entend-on? Des cris forcenés. Que voit-on? Des figures hideuses, des hommes couverts de sang ng et de crimes! Ainsi l'a voulu la nature, celui qui une fois a trempé ses mains dans le sang de son semblable est un dénaturé qui ne peut plus vivre dans la société; il lui faut du sang, toujours du sang pour éteindre ses

remords! Vous avez tous déploré la situation où nous sommes; j'en suis persuadé: j'en appelle à vos cœurs, j'intime à l'histoire de le dire, si vous n'avez pas puni ces grands forfaits, non, vous ne l'avez pu! Aussi voyez les affreux résultats qui naissent de cette scandaleuse impunité! Demandez-vous les causes de quelque désordre, on se rit de vous! Rappelez-vous l'exécution des lois, on se rit de vous et de vos lois! Punissezvous un d'entre eux, on le charge d'honneurs pour se jouer de vous! Voyez cette société jadis célèbre ; il n'y reste pas trente de ses vrais fondateurs : on n'y trouve que des hommes perdus de crimes et de dettes! Lisez ses journaux, et voyez si, tant qu'existera cet abominable repaire, vous pouvez rester ici !... »

A ces mots les citoyens des tribunes se livrent aux mouvemens d'une brusque indignation: ils prennent exemple du côté gauche, dont plusieurs membres apostrophent Buzot en l'appelant infáme, scélérat, assassin de la patrie. Ce cri, nous sommes tous jacobins, parti de la montagne, est répété par une grande partie des spectateurs. Après un long tumulte cet incident se termine par un décret qui ordonne l'évacuation de la tribune publique où les interruptions avaient commencé.

3o. Toujours soutenu par la plaine, le côté droit tenait tête à l'orage. Au renouvellement de la présidence il parvint encore à porter un des siens au fauteuil : Boyer-Fonfrède y remplaça Lasource le 2 mai. Un autre appui survint aux girondins; à la pétition des trente-cinq sections de Paris, déclarée calomnieuse, ils en opposèrent une de la ville de Bordeaux que la majorité de la Convention accueillit avec faveur, et dont elle ordonna la publication.

PÉTITION. - Orateur, Duvigneau. (Séance du 14 mai 1793.) << Législateurs, organes des cent vingt mille citoyens de Bordeaux, et de tous les corps administratifs de cette cité, nous nous présentons pour transmettre à la Convention nationale les vives alarmes que vient d'éprouver cette grande portion du peuple français.

>> Législateurs, les regards des Bordelais sont constamment attachés sur vous; vous remplissez toute leur âme; nous nous enivrons de vos triomphes: vos dangers nous plongent dans les plus douloureuses agitations. Vos dangers!..... Combien ils se sont multipliés dans un court intervalle! La République entière en a retenti. Il y a peu de jours qu'une conspiration, publiquement formée, s'avançait aussi publiquement vers son exécution; les victimes étaient comptées; les poignards, plus acérés, brillaient sur la tête des législateurs! Bientôt après l'audacieuse calomnie, abusant de la bonne foi, qu'elle égare, et du patriotisme, qu'elle pervertit, s'érige en autorité, et vient vous proscrire devant vous-mêmes! Dans le même temps une correspondance criminelle infectait les départemens; elle appelait de toute part les couteaux qui devaient vous égorger; et vos décrets nous ont appris qu'à l'instant même où vous vous occupiez de punir ces horribles complots ces voûtes retentissaient d'applaudissemens, comme à la jouissance anticipée d'un massacre!

>> Tout récemment les mêmes conspirateurs s'agitent avec plus de violence; ils annoncent, ils préparent une force armée qui doit venir exiger ici que trois cents d'entre vous soient chassés, et que vingt-deux autres soient immolés à leur fureur! A ces dernières nouvelles la ville de Bordeaux est frappée de consternation; mais aussitôt tous les citoyens se lèvent à la fois; ils s'indignent, accourent, et se précipitent simultanément dans leurs sections.... La représentation populaire est menacée! Ils se pressent autour d'elle; ils l'environnent de leur énergie et de leur fidélité : dans quelques heures ils rédigent, adoptent, communiquent aux corps administratifs une adresse à la Convention nationale, et nous ordonne de venir vous faire entendre ces paroles :

Les citoyens de Bordeaux à la Convention nationale.

>> Législateurs, quel horrible cri vient de retentir jusqu'aux extrémités de la République! Trois cents représentans du peuple voués aux proscriptions! vingt-deux à la hache liberticide des centumvirs!

>> Législateurs, lorsque nous choisîmes des députés nous les mêmes sous la sauvegarde des lois, de la vertu, et de tout ce

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qu'il y a de plus sacré sur la terre: nous crûmes les envoyer parmi des hommes; ils sont environnés de tigres altérés de sang! Ces courageux citoyens sont en ce moment sous le poignard des assassins! Que disons-nous, hélas! peut-être ils ne sont plus! Si ce crime atroce se consomme, frémissez, législateurs! frémissez de l'excès de notre indignation et de notre désespoir! Si la soif du sang nous a ravi nos frères, nos représentans, l'horreur du crime dirigera notre vengeance, et les cannibales qui auront violé toutes les lois de la justice et de l'humanité ne périront que sous nos coups!

»

Convention nationale, Parisiens, jadis si fiers et si grands, sauvez les députés du peuple! Sauvez-nous de notre désespoir! Sauvez-nous, sauvez-vous de la guerre civile! Oui, nous organisons sur le champ la moitié de notre garde nationale, nous nous élançons sur Paris si un décret vengeur ne nous arrête, et nous jurons de sauver nos représentans, ou de périr sur leur tombeau!

› Voilà, législateurs, les sentimens douloureux auxquels ont été en proie les fidèles Bordelais; voilà les traits qui caractérisent tous les citoyens de la Gironde, de ce département qui a donné vingt-cinq mille soldats à la patrie; qui dans ce moment même, à l'exemple de l'Hérault, lève encore six mille sept cents hommes; de ce département où le pauvre mange le pain à dix sous la livre, et souffre en homme libre; et cependant ces courageux républicains ont aussi été calomniés! Des scélérats, qui vivent de mensonge comme les vautours vivent de cadavres, ont eu l'audace de dire que Bordeaux était en contrerévolution ouverte, parce que nous avons constamment voulu que l'ordre et les lois accompagnassent la liberté, et que nous ne voulons pas d'une révolution qui imprimerait constamment à la République un mouvement convulsionnaire et désorganisateur; parce que, sous le titre imposteur de révolution, nous ne voulons pas ériger l'assassinat en principe, et constituer le crime en une sorte d'autorité légale; parce que, sous le titre derévolution, nous ne voulons pas le fédéralisme et l'anarchie ; parce que, sous le titre de révolution, nous ne voulons pas d'un ordre de choses où l'effronterie supplée au courage, la violence au pouvoir, l'amour-propre en délire au talent, et

!

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