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connus d'une grande nation outrage la première des lois, efface la tradition du respect que les peuples civilisés étaient convenus de lui porter, et ne laisse plus apercevoir que ce droit terrible, réservé jusqu'alors aux hordes barbares, le droit de poursuivre ses ennemis comme on poursuit les bêtes féroces!

>> Le voile qui cachait si faiblement les intentions des ennemis de la France est déchiré !

>> Brunswick nous déclarait en leur nom qu'il venait détruire une Constitution où le pouvoir royal était avili : aujourd'hui ils viennent rétablir cette Constitution parce que du moins le nom du roi y était conservé...

>> Peuples, entendez-vous ce langage? Ce n'est pas pour vos intérêts que coule votre sang et le nôtre ; c'est pour l'orgueil et la tyrannie des rois; c'est à l'indépendance des nations, et non à la France, qu'ils ont déclaré la guerre!

>> Peuples qui vous croyez républicains, ils ne veulent pas souffrir qu'une grande nation n'ait pas un roi; ils savent que l'existence de la République française serait un obstacle éternel au projet qu'ils ont formé de vous donner aussi des maîtres.

>> Peuples qui vivez sous des rois, ils ne veulent pas qu'une nation puissante donne à l'Europe l'exemple d'une Constitution libre, fondée sur les droits sacrés de l'homme; ils craignent que le spectacle de cette liberté ne vous apprenne à connaître, à chérir vos droits : il serait perdu pour eux l'espoir coupable de vous retenir dans ce sommeil dont ils profitent pour saper les fondemens de la liberté qui vous reste, pour forger ces chaînes auxquelles, dans le délire de leur orgueil, ils ont osé condamner l'espèce humaine!

>> Peuples de tous les gouvernemens, c'est sous la sauvegarde de votre générosité et des droits les plus sacrés que lá nation française met ses représentans que la trahison a livrés à la tyrannie! Vous êtes plus intéressés que nous à ce qu'ils soient bientôt libres; vous partageriez la honte d'un crime que vous auriez souffert, et votre faiblesse donnerait aux tyrans la mesure de ce qu'ils peuvent contre vous ! »

XII.

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LA CONVENTION NATIONALE aux armées de la République sur l'évacuation de la Belgique ; adresse décrétée le 26 avril 1793. (Rédigée par Barrère.)

Soldats de la liberté, vous n'avez pas été vaincus dans la Belgique; vous n'avez été que trahis. La nation avait multiplié à côté de vous des approvisionnemens de tout genre: la perfidie d'un infâme général les a livrés à l'Autrichien ; il a épuisé de numéraire le trésor public pour en couvrir un pays qu'il devait lâchement abandonner!

» Rassurez-vous; la France a les plus grands moyens de faire la guerre pendant plusieurs campagnes! Si la victoire, marchant avec les républicains, n'assurait la défaite prochaine des hordes étrangères, la France a pour elle sa population libre, son beau territoire, et le soleil qui le fertilise! Elle a des domaines immenses, sur lesquels repose la fortune publique, et le bien seul des traîtres peut alimenter longtemps la guerre contre toute l'Europe!

» Des subsistances, des habits, des armes s'amoncèlent, et les citoyens accourent de toute part dans nos armées! Tandis que nos ennemis combattent à trois cents lieues du sol dont le despotisme les a arrachés pour les entraîner sur nos frontières, vous combattez sur vos foyers: nos ennemis se livrent aux hasards de la guerre pour une solde journalière; vous êtes armés pour vos familles, vos propriétés et vos droits : nos ennemis sont des esclaves, des mercenaires; vous êtes des hommes libres, des républicains!

>> Nos ennemis font une guerre d'armée; vous faites une guerre de peuple: c'est un vil intérêt qui forma la ligue des tyrans, dont les haines et les rivalités réciproques préparent sourdement la ruine; c'est l'égalité et la liberté qui ont formé notre sainte coalition!

>> Connaissez tous les avantages que votre position vous donne, et que votre courage vous assure! Les Autrichiens cherchent à vous tromper par des paroles de conciliation et par des espérances de paix : la paix est dans leur bouche; mais la guerre est dans leur cœur !

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C'est avec des paroles de paix qu'ils tendent à énerver votre courage, à éteindre votre ardeur, et à flétrir vos lauriers! C'est avec des propositions astucieuses que nos ennemis, ruinés par leurs dépenses, fatigués par leur marche, et divisés par leur ambition, veulent détruire l'esprit public de l'armée, diviser les citoyens, et nous ramener au royalisme! C'est la paix du tombeau qu'ils nous offrent; c'est la vie de la liberté qu'il nous faut !

Les représentans du peuple sauront bien saisir le moment d'une paix honorable et digne de la République; mais c'est votre constance, c'est votre indignation contre les traîtres, ce sont vos triomphes qui nous donneront la paix ! Pour y parvenir il faut combattre, et bientôt nos ennemis, épuisés devant nos places fortes, s'estimeront heureux de l'obtenir!

>> Ils vous parlent de paix, et ils font une guerre atroce! Ils prennent le rôle de pacificateurs, et ils agissent comme des cannibales! Ils vous parlent de l'honneur national, et ils violent tous les droits des nations! Les perfides! ils vous parlaient aussi de paix lorsque le 3 avril, dans la forêt de SaintAmand, leurs soldats vous embrassaient pour massacrer ensuite votre avant-garde!

>> Leur cri est : la paix ou la royauté ! Le vôtre doit être : la République ou la guerre ! »

LA CONVENTION NATIONALE aux citoyens des départemens troublés par les armées dites catholiques et royales; adresse décrétée le 23 mai 1793. (Rédigée par Condorcet.)

« Citoyens, la révolution vous avait délivrés des dîmes, des droits que vous payiez à vos oppresseurs féodaux, de leur tyrannie, plus humiliante et plus ruineuse encore! A des intendans envoyés par un despote pour vous dépouiller et vous opprimer, à des praticiens qui avaient acheté le droit de vous vendre leurs sentences, ont succédé des administrateurs et des juges de votre choix: des impôts, que tant de vexations arbitraires rendaient onéreux, sont emplacés par des impôts plus

modérés, répartis avec équité, et perçus sans violence : vous jouissez en paix des bienfaits de la révolution. La loi, faite en votre nom par vos représentans, appliquée, exécutée par vos propres agens, veillait efficacement à la sûreté de vos propriétés; et tout à coup vous prenez les armes pour piller, pour égorger vos frères !

>> Quel autre crime ont-ils commis envers vous sinon d'avoir conquis cette liberté que vous partagez?

>> On vous engage à demander un roi... Mais celui que nous avons justement puni avait conspiré contre vous; mais les puissances étrangères vous font la guerre pour le rétablir dans son autorité tyrannique; mais ces ci-devant nobles, ces chefs qui vous séduisent, ne demandent un roi que pour rétablir par ses mains toutes les servitudes sous lesquelles vous gémissiez!

>> Des intendans déprédateurs, des seigneurs insolens, des exactions féodales, des impôts ruineux sont les seuls bienfaits que vous puissiez espérer d'un roi!

>> L'humiliation et la misère, tel serait le prix de vos services! Voilà ce que vous destinent ces prétendus nobles qui vous flattent aujourd'hui, mais qui se vengeront sur vous de l'effort que leur vanité a fait un instant sur eux-mêmes pour combattre avec vous !

>> Vous demandez un roi!... C'est à dire que vous voulez être esclaves et misérables! Ah! ne savez-vous pas que la liberté, l'égalité, le bonheur et la vertu disparaissent d'une terre souillée par la présence d'un roi!

>> Vous désirez conserver votre religion!... Mais qui a tenté de vous l'enlever, de gêner vos consciences? Vous a-t-on proposé de rien changer dans votre croyance, dans les cérémonies de votre culte? Non. On vous a privés de ceux que vous regardiez comme les seuls ministres légitimes; mais n'ont-ils pas justifié par leur conduite cette rigueur trop nécessaire? Ces hommes, qui vous prêchent aujourd'hui le meurtre et le pillage, sont-ils les véritables ministres d'un dieu de paix, ou les vils satellites des despotes ligués contre votre patrie? Ce ne sont point vos prêtres qu'on a éloignés de vous, ce sont d'hypocrites et sanguinaires conspirateurs!

>> Pourriez-vous exiger qu'on payât aux dépens de la nation des hommes qui refusaient d'en reconnaître les lois, ou qu'on les laissât paisiblement vendre à ses ennemis l'entrée de son

territoire?

>> Infortunés, comme on vous trompe! Les prêtres qui se disent les seuls catholiques sont payés par l'or de l'Angleterre protestante: le prodigue-t-elle pour venger votre religion, qu'elle persécute et qu'elle méprise? Non, c'est pour que la France se déchire de ses propres mains, que votre sang coule pour la cause de l'esclavage, ou le notre pour celle de la liberté; c'est toujours du sang français! Le gouvernement anglais, dont vous n'êtes que les instrumens aveugles, toujours prêt à jouir et à profiter de vos défaites, insulte dans son cabinet à votre malheureuse crédulité!

» Les complices, les exécuteurs de cette trame exécrable sont-ils donc à vos yeux les dignes interprètes des volontés du ciel? Dans les hommes qui ont vendu à des tyraus étrangers le sang de leurs frères pouvez-vous reconnaître les ministres d'une loi de douceur et de charité? Abjurez ces honteuses erreurs! Abandonnez au fer de la loi ce vil ramas d'esclaves insolens, de prêtres hypocrites qui ont fait de vous les agens abusés de leur scélératesse vénale! Jurez avec nous de maintenir la République! Jurez de ne plus employer vos armes que pour la défendre; de purifier par ce noble usage ces armes que la rébellion, le crime ont souillées! Montrez-vous, par votre haine pour la royauté, dignes de reprendre le nom de Français! Alors vous ne trouverez plus que des frères dans la République entière, qui s'arime à regret pour vous punir, qui, prête à vous écraser de toute sa puissance, pleurerait sur des succès achetés au prix de votre sang!

» Alors, si des scrupules agitent encore vos consciences, souvenez-vous que la liberté des cultes est une des conditions nécessaires d'une Constitution républicaine; déposez vos inquiétudes, vos craintes, vos griefs dans le sein de vos représentans: ils vous écouteront avec cette indulgence qu'ils doivent à l'infortune et l'erreur; en vous maintenant avec justice dans vos droits à la liberté religieuse, ils sauront garantir avec fermeté

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