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après avoir usé du droit sacré de pétition pour demander le bannissement d'une partie des représentans du peuple, ils vous prient de soumettre leur demande à la volonté des départemens. Ils n'ont pas voulu déchirer les saints nœuds de la fraternité qui les unissent à tous les Français de la République : les pétitionnaires savent bien que cette union fait leur prospérité; qu'une scission, qu'ils se garderaient bien, ainsi que moi de provoquer, consommerait leur ruine. Cependant cette demande a besoin d'une explication.

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C'est aux départemens, disent-ils, que leur pétition doit. être renvoyée; mais qu'entendent-ils par ces mots, aux départemens? Si les pétitionnaires étaient des intrigans ou des aristocrates ils voudraient dire aux corps électoraux, aux administrations, à des aggrégations particulières; mais ils sont républicains, ils sont pleins de respect pour les droits du peuple; ce ne peut donc être que le jugement des assemblées primaires qu'ils ont invoqué: ils savent que c'est là, et là seulement, que réside la souveraineté.

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Massieu. « Vous réclamez la Constitution de 89. » (Murmures.)

Boyer-Fonfrède. « Président, comme cette discussion est d'un grand intérêt pour le peuple français, je demande l'in-sertion au bulletin et au procès-verbal des paroles de Massieu

et des miennes.

Il est piquant néanmoins de remarquer que les pétitionnaires réclament l'expulsion de quelques membres parce qu'ils ont demandé les assemblées primaires, tandis qu'eux-mêmes sollicitent de vous la même mesure! Je serai plus généreux; je ne réclamerai pas l'expulsion des pétitionnaires, car je convertis leur pétition en motion, et je demande que l'Assemblée l'adopte. » (Applaudissemens.)

Massieu. << On m'assure que beaucoup de membres de l'Assemblée donnent aux mots que j'ai dits une interprétation. qui n'est pas véritable. Je n'ai jamais prétendu que la souveraineté du peuple ne fût pas dans les assemblées primaires; j'ai seulement voulu faire entendre que l'opinant, et quelques

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autres membres qui parlent dans le même sens, invoquaient souvent la Constitution et des lois qui n'ont plus d'existence depuis le 10 août... (Plusieurs voix : Fonfrède n'a pas dit cela.) J'ai voulu faire observer que depuis le 10 août les assemblées primaires n'ont point été distinguées des assemblées de section, et qu'il est arrivé plus d'une fois que la Convention a fait droit à une adresse comme venant du peuple souverain... (murmures) comme venant, dis-je, sinon du souverain, mais d'une portion du souverain, toujours estimable à ses yeux. Voilà le sens que j'ai voulu donner à mes expressions. »

Boyer-Fonfrède. « Je réfuterai les erreurs qui viennent de vous être débitées, non pas pour vous, citoyens, trop instruits pour être séduits par elles, mais pour l'instruction de l'opinant. D'abord, je vous en atteste tous, je n'ai pas parlé, je n'ai pas proféré le mot de constitution, et ce n'est pas moi qui pendant une demi-heure vous ai fait, à la royauté près, l'éloge de cette Constitution aristocratique de 89. Qu'avais-je besoin de le faire? La souveraineté du peuple n'est-elle pas préexistante à toute constitution? L'opinant a confondu le droit de pétition avec l'exercice de la souveraineté. Le premier est individuel; il est à chacun et à tous : l'autre n'appartient qu'à la masse entière du peuple. Les individus, les sections du peuple, les sociétés populaires font des pétitions, des demandes : le peuple entier ordonne, commande; et je veux enfin que lui seul règne sur vous et sur moi! S'il est quelqu'un qui nie ces principes éternels, ces axiomes de l'art social, qu'il se lève, et qu'il m'interrompe!

» Je continue. Ici je dois faire une déclaration. Si j'avais eu le bonheur d'être sur la liste qui vous a été présentée, tout en applaudissant au zèle éclairé des pétitionnaires, quelle que fût votre détermination, je les conduirais, ainsi que moi, devant leur maître et le mien, devant le peuple français! Tant qu'une goutte de sang coulera dans mes veines, j'ai le cœur trop haut, j'ai l'âme trop fière pour reconnaître d'autre souverain que le peuple! J'estime assez ceux de mes collègues qui ont eu le bonheur d'être proscrits pour croire qu'ils ne balanceront pas à suivre cette marche. Vous ne pouvez les placer que dans deux hypothèses différentes; ils ne peuvent avoir pour juge de leur rappel que le peuple entier, ou que les assemblées primaires de leur département.

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A cette déclaration j'en ajoute une autre. Si j'étais dans mon département, et puisse ma voix y être entendue! je révêrerais trop les représentans du peuple pour croire qu'ils accordassent à une section du peuple le droit exclusif d'émettre son vœu, et, sûr au moins que mes braves compatriotes n'ont pas voulu commettre la lâcheté de le concéder à d'autres qu'à la Convention nationale, je les inviterais à se rassembler. Sans doute ceux qui ont tant applaudi au dévouement héroïque des pétitionnaires et des citoyens du département de Paris ne sauraient blâmer, par exemple, ceux du département de la Gironde de tenir la même conduite.

» Maintenant, citoyens, si vous ne légalisez pas une mesure que les pétitionnaires patriotes, que j'appuie, vous ont ravi la faculté d'improuver, que va-t-il arriver? Ou les Français que les députés proscrits représentent sont des lâches, et loin de moi cette pensée! ou ce sont des hommes libres, et je ne leur fais pas l'injure d'en douter: dans ce cas ils doivent se réunir et s'assembler pour exprimer aussi leur vœu. Ils vous demanderont aussi des rappels, et, je vous l'annonce avec assurance, les députés qu'on proscrit ici sont révérés là-bas, et ceux que les pétitionnaires ont voulu couvrir d'opprobre seront bientôt couverts du témoignage de l'estime publique; douce récompense de ceux qui ont bien servi la patrie!

» Par ces différens rappels, par ces listes fatales, la confiance, ainsi que la Convention nationale, sera désorganisée ; à l'union, si nécessaire pour repousser l'ennemi, succédera l'esprit de parti, qui va planer sur toute la République, et notre malheureuse patrie, attaquée de toute part, sera encore en proie aux discordes civiles! (Murmures.)

>> Citoyens, ce n'est pas moi, c'est le zèle des pétitionnaires patriotes qui vous amène à ces tristes résultats. On dira que je demande la guerre civile.... Citoyens, lorsque je développe la pétition des citoyens de Paris, ce n'est pas à moi qu'il faut adresser ce reproche. On dira que ces idées, que je vous offre sans méditation et sans art, sont empreintes de fédéralisme.... Citoyens, ce n'est pas moi, ce sont les pétitionnaires de París qui vous les ont présentées les premiers; c'est encore à eux qu'il faut en adresser le reproche.

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Comme je ne soupçonne pas qu'aucun représentant du peuple veuille se rendre coupable envers ses commettans du crime de haute trahison par une lâche concession de ses droits, je n'oserai mettre en doute que vous ne permettiez aux citoyens des départemens ce que vous avez permis aux pétitionnaires patriotes et au département de Paris, et je terminerai par un dilemme que j'offrirai au provocateur de cette patriotique pétition et à ceux qui l'ont si fastueusement annoncée. Ou les citoyens de Paris ont usé d'un droit légitime et sacré, et alors vous ne pouvez ravir aux citoyens des départemens l'exercice du même droit; ou ils ont voulu attenter à la représentation nationale et usurper les droits du peuple, et dans ce dernier cas vous devez faire un exemple éclatant de justice et de sévérité. Pour moi, qui révère le droit sacré de pétition, qui ne sais pas sonder les cœurs pour empoisonner les intentions, j'applaudis à la demande des citoyens de Paris; je la convertis en motion, et j'en demande l'examen et le renvoi à son adresse, c'est à dire au peuple. >>

Boyer-Fonfrède reçoit les applaudissemens de la grande majorité; des murmures ne se font entendre que dans l'extrémité gauche; partout on demande à aller aux voix.

Thirion. « C'est à vous, représentans du peuple souverain, d'examiner si la pétition qui vous est présentée est bonne ou mauvaise: si elle est bonne il faut y faire droit; mais si elle est mauvaise, comme je vais le prouver... (Quelques murmures à gauche et dans les tribunes publiques.) Je demande si, sans aucune discussion, l'Assemblée peut adopter une mesure qui peut perdre la chose publique? La pétition qui vous est présentée n'est pas bonne parce qu'elle est partielle. S'il n'y avait pas dans cette Assemblée deux partis vous n'auriez pas vu ce côté (désignant la droite) se lever tout entier pour adhérer à un objet qui ne concernait que quelques individus. (Plusieurs voix à droite : Tous! Tous!) Ce sont les mêmes qui ont voté de la même manière dans le jugement du tyran! (Voix à gauche : Oui! Oui!) Ce sont les mêmes individus qui ont voulu l'appel au peuple, et qui le veulent encore! (Les memes voix : Oui!) Ce sont encore ces mêmes individus, connus sous le nom d'hommes d'état... (les mémes: C'est vrai!) dont la manière de voter a été désapprouvée par la nation entière!... (Les mémes: Il a raison!) Les adresses de félicitations et d'adhésion, portées de tous les points de la République, ont ratifié la conduite de la majorité de la Convention nationale, qui a eu le courage de voter la mort du tyran. (Applaudissemens de la gauche et des tribunes.) Je dis donc, président, que le grand procès qu'on veut susciter dans cette circonstance, où nous avons plus de cinq cent mille citoyens sur les frontières qui ne peuvent se trouver dans les assemblées primaires, est déjà jugé par le fait. Il y a une question bien simple à poser: le peuple français approuve-t-il, ratifie-t-il la conduite des quatre cents membres de la Convention nationale qui ont eu l'énergie de fonder la République sur les débris du trône et du tyran? (Mémes applaudissemens.) Conservera-t-il au nombre de ses mandataires, pour lui faire une Constitution ces hommes lâches qui ont trahi l'égalité, ces hommes qui ont tremblé devant l'idole du tyran détrôné, ces hommes qui ont entravé les délibérations les plus salutaires pour la chose publique, ces hommes qui, tout récemment encore, se sont refusés à une motion sage qui tendait à proscrire la tête d'un individu qui, après la fondation de la République, se fait appeler le régent du royaume de France? Je dis qué ces hommes sont royalistes.

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La question ainsi posée, le peuple français reconnaîtrat-il ceux qui ont voté la mort du tyran ou ceux qui s'y sont refusés, je dis que cette question est déjà décidée par le fait; je dis que, d'après les adresses qui sont venues de tous les départemens, ces hommes', s'ils avaient eu quelque pudeur, se seraient déjà retirés du sein d'une Convention qu'ils déshonorent! >> (Mouvement d'approbation dans l'extrémité gauche; applaudissemens des tribunes publiques.)

La discussion est interrompue par la lecture de lettres venues des armées. La Convention délibère sur les intérêts

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