par une Constitution républicaine! Vos représentans viennent de prendre l'engagement solennel de former dans peu de jours ce lien indissoluble de tous les départemens. Ils vous appellent à une réunion fraternelle pour cette époque du 10 août, qui sera à jamais l'anniversaire de la conquête de la liberté ! » C'est là que vous promettrez d'abhorrer la royauté, qui vous soumettrait à l'oppression domestique, et le fédéralisme, qui vous livrerait sans force à des tyrans étrangers. » Citoyens de Paris, vous avez vu que jamais la confiance de la Convention nationale ne s'était éloignée de vous; vous avez vu qu'elle se plaît à délibérer au milieu d'un peuple en qui l'amour de la liberté est une passion, et d'une ville que les travaux d'un siècle entier ont rendue, pour l'Europe comme pour la France, le centre des sciences et le foyer des lumières. Soldats de la République, ne craignez plus qu'au moment où vous combattez les tyrans et les rebelles des divisions intestines compromettent la cause de la liberté, pour laquelle vous versez votre sang avec tant de gloire! L'union seule peut sauver la patrie. Quel que soit votre grade, général ou soldat, quel que soit le corps où vous servez, ne vous disputez plus que de courage, comme nous avons juré de ne plus nous disputer que de zèle pour nos devoirs, et de sacrifices pour la patrie ! » Cette adresse, décrétée après une vive opposition du côté droit (1), était le seul objet qui dans la séance du 1er juin (1) Tous les membres dénoncés, en repoussant cette adresse comme un tissu de mensonges, avaient déclaré ne pouvoir voter que celle proposée par l'un d'eux, Lasource: de leur côté les montagnards, en accordant au projet de Lasource le mérite d'être court, le repoussèrent comme renfermant de très longues perfidies. Le voici : « Citoyens, des conspirateurs, travestis en patriotes pour égarer le peuple et perdre la liberté, ont fait tirer le canon d'alarme et sonner le tocsin. Les citoyens de Paris, dignes de la République et d'eux-mêmes, se sont réunis, ont pris les armes pour faire respecter les lois, protéger la Convention nationale et maintenir l'ordre. » Le calme le plus profond règne à Patis; la Convention nationale veille. Elle prendra des mesures qui ne laisseront aux conjurés que la honte, le mépris et la mort! >> eût rappelé les débats de la veille; les intérêts généraux de la République avaient été traités avec calme. La tranquillité régnait dans Paris. Mais la commune n'avait pas obtenu sa proie: seule elle s'agitait. La séance venait d'être levée; il était sept heures. Le tocsin, la générale arrachent les citoyens aux délassemens de la soirée : ils se rendent dans leurs sections respectives, les commissaires des sections à la commune, et les représentans du peuple à leur poste. A neuf heures la Convention rentre en séance, sous la présidence de Grégoire. Le côté droit est désert: on annonce que ses membres, soutenus d'une partie du peuple, se sont rassemblés aux Champs-Elysées. Il y avait en effet beaucoup de monde a cette promenade, mais sans vues hostiles. Des nouvelles fâcheuses, qui étaient arrivées des armées, augmentent encore l'inquiétude. La véritable cause du mouvement ne tarde pas à être connue. A onze heures une députation de la commune se présente : - Il faut en finir, dit l'orateur; il faut terminer cette contre-révolution; il faut que tous les conspirateurs tombent sous le glaive de la loi sans aucune considération! Législateurs, les quarante-huit sections, les autorités, tout le département est venu hier demander le décret d'accusation contre des traîtres dont plusieurs siégent parmi vous: c'est ce décret que nous demandons! Le peuple est levé, il est debout; il l'attend! L'Assemblée délibère. A minuit elle rend un décret portant que sous trois jours le comité de salut public lui présentera un rapport sur la pétition qui vient d'être faite, et qu'à cet effet les autorités et les citoyens sont tenus de communiquer au comité les pièces et renseignemens qui pourraient appuyer leurs dénonciations. Les pétitionnaires se retirent, mais en donnant des marques de mécontentement. Séance du 2 juin 1793. Lanjuinais. « Je demande à faire une motion d'ordre.... (Murmures.) Je demande à parler sur la générale, qui bat dans tout Paris... (A gauche: Vous voulez mettre la division dans l'Assemblée !... Vous voulez allumer la guerre civile !... A bas! A bas!... Lanjuinais continue :) Je viens vous occuper des moyens d'arrêter les mouvemens qui se manifestent encore dans la ville de Paris, mouvemens non moins dangereux pour la liberté que ceux qui ont éclaté depuis deux jours!... (Murmures.) Tant qu'il sera permis de faire entendre ici sa voix je ne laisserai pas avilir dans ma personne le caractère de représentant du peuple! Je réclamerai ses droits et sa liberté! Je vous dirai des vérités, non pas de celles qui tuent la vérité même, qui tuent la liberté!... (Murmures.) Il n'est que trop notoire qué depuis trois jours vous ne délibérez presque plus, que vous êtes influencés et au dedans et au dehors! Une puissance rivale vous commande; elle vous environne au dedans de ses salariés, au dehors de ses canons! Je sais bien que le peuple blâme et déteste l'anarchie et les factieux ; mais enfin il est leur instrument forcé. Des crimes que la loi déclare dignes de mort out été commis; une autorité usurpatrice a fait tirer le canon d'alarme!...(Murmures.) Il semblait qu'un voile officieux devait être jeté sur tout ce qui s'était passé; mais le lendemain le désordre continue; le surlendemain il recominence !... (Bruit à gauche et dans les tribunes; longue interruption.) Comment voulez-vous assurer la liberté de la représentation nationale, lorsqu'un député vient de me dire à cette barre : jusqu'à extinction des scélérats qui te ressemblent nous remuerons el agirons ainsi!... (A gauche : Entendez les pétitionnaires!... A droite : Maintenez la parole à Lanjuinais!... Julien: Il en abuse pour calomnier Paris!) » Qu'avons-nous fait pour arrêter le mal, qui marche et croît sans cesse? Nous avons pallié les démarches des coupables, des factieux, des anarchistes (Violens murmures. BillaudVarennes: Et la contre-révolution que tu as faite à Rennes!...) Ces messieurs ont arrêté à la poste les lettres des citoyens des sections de Rennes qui m'annoncent que j'ai bien mérité de la patrie... (Eclats de rire et murmures. Drouet : Tu as menti! Tu es un infâme imposteur! Il est faux qu'on ait violé le secret des lettres à l'égard de Lanjuinais!) Fermont. « Je dois dire à l'Assemblée que j'ai reçu un paquet ouvert, mais où l'on a eu la bonté de laisser une lettre dans laquelle on annonce qu'on a chassé de Rennes un nommé Bernard, accusé et convaincu de friponnerie dans les fournitures publiques. Voilà la contre-révolution qu'on a faite à Rennes! » Lanjuinais. Qu'avez-vous fait ? Rien pour la dignité de la Convention! Rien pour la conservation de l'intégrité de la représentation nationale, attaquée depuis deux jours! Voici mes preuves.... (Turreau : Tu as donc juré de perdre la République par tes déclamations, par tes éternelles calomnies!) » Une assemblée usurpatrice non seulement existe, non seulement délibère, mais elle agit! Mais dans la nuit du vendredi au samedi elle a conspiré! Non pas la grande assemblée qui séduit, égare et trompe les ignorans, mais le comité directorial et exécutif de cette assemblée ! C'est lui qui a fait hier sonner le tocsin jusqu'à onze heures du soir! C'est lui qui recommencera encore aujourd'hui! Vous savez quelles odieuses manœuvres on a employées pour armer les citoyens les uns contre les autres! Les comités révolutionnaires de section, que vous avez réduits à la simple surveillance des étrangers, ont fait arrêter des personnes qui ne sont point des étrangers! Le commandant provisoire nommé par l'autorité rivale continue ses fonctions, donne des ordres; cependant vous ne l'avez point reconnu! Cette commune révoltée, illégalement nommée, existe encore! Le secret des lettres a été violé, et n'est pas rétabli ! » Si, lorsque je parlai jeudi soir des mouvemens qu'on préparait, vous aviez voulu m'entendre, tout cela ne serait pas arrivé. Hé bien, écoutez-moi donc! Quand cette autorité rivale et usurpatrice vous faisait entourer d'armes et de canons, on venait vous reproduire cette pétition traînée dans la boue des rues de Paris.... (Mouvement dans les tribunes; murmures à gauche ; une voix : Lanjuinais insulte le peuple dans l'exercice même de son droit de pétition!) Cette même pétition, dis-je, qui avait été déclarée calomnieuse par un décret rendu après une longue discussion, et pour ainsi dire à l'unanimité, cette pétition quand on vous la reproduit que faites-vous ? Vous la renvoyez au comité de salut public. Pourquoi ? Pour en faire un rapport! Vous avez donc supposé qu'on pouvait vous faire un rapport sur des faits déclarés calomnieux par vous ? >> On nous accuse de calomnier Paris... (A gauche : Oui! Oui!) Non! Non! Paris est pur, Paris est bon, Paris est opprimé par des tyrans qui veulent du sang et de la domination!... (A gauche: A bas! A bas! Drouet, Robespierre jeune, Julien (de Toulouse), Legendre et plusieurs autres se portent à la tribune; ils veulent en arracher Lanjuinais, qui s'y cramponne. Les cris des citoyens des tribunes ajoutent encore à ce tumulte. Le président (Mallarmé). « La scène qui vient de se passer est des plus affligeantes! La liberté périra si vous continuez à vous conduire de même ! (Plusieurs voix : Non! Non!) Je vous rappelle à l'ordre, vous qui vous êtes ainsi portés à cette tribune! Plusieurs fois j'ai invité Lanjuinais à se renfermer dans la question. Je vous rappelle au calme, à la dignité. Conduisons-nous comme les représentans d'un peuple libre ! » Lanjuinais. « Je demande que toutes les autorités révolutionnaires de Paris, et notamment l'assemblée de l'Evêché, le comité central ou exécutif de cette assemblée, soient cassés, ainsi que ce qu'ils ont fait depuis trois jours, et que le comité de salut public vous rende compte après demain de l'exécution du décret que vous rendrez à ce sujet. Je demande encore que tous ceux qui voudront s'arroger une autorité nouvelle et eet contraire à la loi soient déclarés hors de la loi, et qu'il soit permis à tous les citoyens de leur courir sus! » Le président. « Une députation des autorités révolutionnaires et constituées du département de Paris demande à être admise à la barre pour présenter les dernières mesures de salut public. >> Quelques membres de la droite s'opposent à l'admission. Elle est décrétée à une grande majorité. |