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Quant aux charbons anglais, leur valeur moyenne dans les divers ports du littoral varie naturellement avec les qualités qui y sont demandées, avec les conditions du fret depuis le Royaume-Uni jusqu'à ces ports.

Pour Saint-Nazaire et Bordeaux par exemple, d'après les évaluations de la douane, la valeur moyenne aurait été en 1909 de :

23 fr. 48 à Bordeaux,

23 fr. 52 à Saint-Nazaire.

Outre ces inégalités dans les prix de revient, certains Bassins comme le Nord, le Pas-de-Calais, Saône-et-Loire, le Bourbonnais, trouvent des avantages particuliers dans l'emploi de voies navigables qui facilitent l'expédition lointaine de leurs produits au détriment des autres mines comme celles de la Loire, du Gard, d'Auvergne, de l'Aveyron, du Tarn.

Sous l'influence de ces diverses causes, sous la pression constante de l'importation étrangère facilitée elle aussi par l'usage des grandes voies navigables comme les canaux du Nord et de l'Est, la Seine et ses affluents, la Loire, la Garonne et ses affluents, le canal du Midi, un certain équilibre s'est établi; tout tarif qui tend à modifier cet équilibre soulève aussitôt les réclamations les plus vives des mines moins bien placées ou plus pauvres, tout avantage donné aux autres bassins concurrents pouvant restreindre leurs débouchés ou même compromettre leur existence.

On l'a vu récemment dans deux circonstances importantes : En 1902 lors de la proposition d'un tarif Nord-P.-L.-M. ayant pour effet de faciliter les envois du Nord et du Pas-de-Calais sur le P.-L.-M., tarif réclamé par les commerçants et industriels de l'Yonne, du Rhône et de la Loire pour remédier à

l'insuffisance de la production et à l'exagération des prix des mines de la Loire, en 1902 et 1905 lors de la réforme des tarifs de transports des charbons sur le réseau P.-O., tant du tarif intérieur que du tarif Nord-P.-O.

En 1902, le tarif Nord-P.-L.-M. souleva les plus ardentes protestations des Bassins desservis par le réseau P.-L.-M., Saône-et-Loire, Loire, Gard, etc.

Etant donné la grande production des Bassins du Nord, leur tendance naturelle à abaisser leurs prix de vente sur ces nouveaux et lointains débouchés, à faire comme on dit, pour les atteindre, des prix d'exportation, le nouveau tarif NordP.-L.-M. devait nécessairement rendre leur concurrence plus pressante dans ces régions, dans cet ancien domaine des mines du Centre où celles-ci avaient par contre la tendance naturelle de tenir leurs prix plus élevés.

En ce qui conernce la Loire en particulier, avec l'écart de 3 fr. 80 qu'on a vu plus haut sur les prix de revient, on se rend bien compte à priori que l'abaissement apporté sur les anciens prix par le nouveau tarif Nord-P.-L.-M. devait avoir pour effet de refouler vers le Sud la ligne de démarcation des zones propres aux deux provenances et par cette restriction de ses débouchés, de léser très gravement les intérêts du Bassin de la Loire déjà gêné par une exploitation particulièrement coûteuse.

Force fut bien de reconnaître le bien fondé de ces protestations si vives, et frappée de leur valeur l'Administration Supérieure ne crut pouvoir mieux faire que recommander une solution singulièrement artificielle, bien éloignée de l'unification rêvée, et consistant à tracer sur le réseau P.-L.-M. une ligne idéale allant de Nevers à Besançon par Dijon, ligne à laquelle s'arrêterait l'application du tarif nouveau NordP.-L.-M.

Le deuxième exemple est tiré, avons-nous dit, du tarif proposé en 1902 par la Compagnie d'Orléans.

On sait que le Bassin de l'Allier est menacé de l'épuisement prochain de ses plus importants gisements déjà les mines

de Doyet et de Bézenet ont été fermées, la fermeture de la mine importante de Commentry est annoncée, c'est pour ce Bassin un déficit plus ou moins prochain de près de 800.000 tonnes sur la production de 1895 par exemple.

Cependant de nombreuses et importantes industries se sont établies dans les régions voisines à Montluçon, Nevers, Vierzon, Bourges, etc., pour profiter au plus près de cette production houillère; aussi la Compagnie d'Orléans se préoccupaitelle à juste titre de la situation qui se préparait pour ces industries quand il leur faudrait subir les conditions des mines voisines demeurées en exploitation et devenant ainsi maîtresses du marché moins largement approvisionné, ou quand il leur faudrait chercher au loin des charbons nouveaux leur revenant naturellement plus cher à cause des distances.

En vue de combler le vide ainsi formé, de prévenir ces gênes industrielles qui devaient en résulter, à un point de vue plus large, pour provoquer un abaissement des prix élevés du charbon qui gênent sur son réseau le développement de l'industrie, la Compagnie proposa un tarif réduit applicable d'une manière tout à fait générale à toutes les provenances, sur toutes ses lignes, pour les envois de 100 tonnes que peuvent recevoir la moyenne et la grande industrie.

Mais aussitôt, en raison notamment de ce que ce tarif général devait naturellement jouer pour les charbons étrangers expédiés des ports du littoral, les objections surgirent de la part des houillères indigènes, surtout de celles qui plus ou moins voisines du Centre, se trouvaient frustrées de la maîtrise qu'elles espéraient sur ce marché privé des anciennes ressources des mines épuisées.

Des négociations prolongées s'en suivirent; pour aboutir, la Compagnie dut accepter un relèvement général (0 fr. 50) des prix du Barême réduit qu'elle avait soumis à l'homologation, bien que ce relèvement fût préjudiciable aux consommateurs et contraire au but qu'elle se proposait.

En outre, première atteinte au principe de l'unification, elle dut encore dédommager les houillères françaises par un abaissement spécial de 100 tonnes à 40 tonnes de la condition de tonnage imposée pour tous leurs envois sur le Centre et

l'Ouest de son réseau, concession qui, d'ailleurs, suivait celle d'un tarif antérieur comportant un barême spécial très réduit à 2 cent. par tonne kilométrique pour leurs envois sur les destinations situées au delà de la ligne de Tours à Bordeaux.

Ce n'est pas d'ailleurs la seule ni la plus forte atteinte qu'ait reçue à cette occasion le principe d'unification l'Administration Supérieure avait demandé, en outre, à l'Orléans, l'établissement de tarifs communs avec les autres Compagnies pour les Bassins houillers extérieurs à son réseau, et il avait en particulier été satisfait à cette demande par un tarif commun avec le Nord pour les Bassins du Nord et du Pas-deCalais.

Pour ménager les houillères du Centre et du Midi, on avait dans ce tarif pris la précaution de relever la base kilométrique finale du barême à 0 fr. 02 au lieu de 0 fr. 015 au tarif NordP.-L.-M., de 0 fr. 0125 au tarif intérieur P.-O.

On avait ainsi pour les parcours supérieurs à 300 kilomètres, parcours usuels pour ces charbons du Nord, les majorations considérables que marque le tableau suivant par rapport aux taxes de ce dernier tarif intérieur P.-O.

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Or, malgré l'avantage qui leur était ainsi laissé, ce tarit n'en provoqua pas moins les réclamations les plus vives des houillères du Centre et du Midi, réclamations appuyées par l'Administration Supérieure et qu'on put apaiser seulement par des concessions nouvelles sur les prix intérieurs de la Compagnie, de telle manière que, par exemple, on arrive aujourd'hui à un prix, d'Albi à Orléans, de 8 fr. 90 pour 587 kilom., quand le tarif commun Nord-P.-O. donne de Lens

(1) Au départ de Lens par exemple.

9 fr. 35 pour 342 kilom. ; et quand l'application du tarif intérieur P.-O. à ce dernier parcours donnerait seulement 7 fr. 05.

Dernier trait enfin pour montrer combien, même dans un cas des plus simples, on est actuellement éloigné dans la pratique de cette idée d'unification des tarifs.

Dans le même tarif de 1905, l'Administration Supérieure avait demandé et obtenu l'insertion d'un prix extrêmement réduit de 5 50 pour faciliter la vente des charbons de l'Aveyron au gaz de Bordeaux. Or, depuis cette époque, par suite des difficultés d'exploitation dans le bassin de l'Aveyron, à cause du développement considérable qu'y a pris l'industrie sidérurgique, les disponibilités de combustibles s'y sont restreintes dans une forte mesure. Cette situation porte préjudice aux autres industries de la région et compromet leur développement.

Pour en contrebalancer les effets, on a demandé la simple réciprocité du prix ci-dessus de 5 50 rendu ainsi applicable au départ de Bordeaux pour permettre de compléter les approvisionnements en charbons anglais. Mais en dépit du fondement réel de ces plaintes, la Compagnie d'Orléans craignant l'échec de toute proposition de cette nature qui naîtrait de son initiative, n'a pu que conseiller aux intéressés de s'adresser d'abord à l'Administration Supérieure qui ne donne aucune suite à leurs demandes.

En définitive pour le trafic des houilles, les faits survenus au cours des dernières années dans l'histoire des tarifs de chemins de fer montrent combien l'unification des tarifs serait actuellement une mesure des plus mal accueillies par les industriels les exemples qu'on vient de voir montrent qu'elle serait, en outre, déplorable dans ses résultats.

Qu'on n'objecte pas toutefois qu'on prend ici l'effet pour la cause et que les difficultés rencontrées par l'unification proviendraient de la diversité des tarifs en vigueur sur les divers réseaux et des situations nées de cette diversité même.

On ne peut imputer, en effet, aux tarifs de chemins de fer les différences des conditions d'exploitation des divers gise

ments.

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