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qu'il en soit distrait quoi que ce soit par les gérants. Il en est de même des produits des déchéances. Dans les Compagnies anonymes, au contraire, les bénéfices provenant de la différence entre la mortalité réelle et la mortalité qui a servi de base aux engagements, vont intégralement aux actionnaires, soit sous forme de dividendes immédiats, soit sous forme de réserves libres;

3o Bénéfices de placement. Ce que nous venons de dire des bénéfices de mortalité s'applique exactement aux bénéfices sur le produit des placements qui restent, dans les Compagnies anonymes, la propriété des actionnaires, soit sous forme de dividendes immédiats, soit sous forme de réserves libres.

Et qu'on ne dise pas que ces bénéfices sont de peu d'importance puisque, pour l'année 1907, les seuls bénéfices sur les produits des placements pour l'ensemble des Compagnies anonymes, ont atteint la somme de 8.074.618 fr. 20. Or, les bénéfices de mortalité et les économies réalisées sur les chargements ont une importance encore plus considérable. Et c'est ce qui explique que, si l'on compare deux Sociétés, l'une à forme tontinière, l'autre Compagnie anonyme, fondées dans la même année (en 1844), les actions de la Société tontinière ont à grand peine atteint la somme de 4.000 francs pour des actions de 1.000 francs entièrement libérées, et que le dividende distribué pour l'exercice 1910 a été de 268 fr. 80 net d'impôt par action, ce qui représente 26,88 0/0 du capital versé, tandis que les actions de la Compagnie anonyme en question, d'un capital de 1.000 francs sur lequel il n'a été versé que 300 francs ont été cotées, en 1910, de 8.500 à 8.800 francs et ont produit, pour cet exercice, un dividende de 320 francs net d'impôt, soit 106,67 0/0 du capital versé. A ces chiffres comparatifs, et qui pourraient être appuyés par d'autres chiffres résumant la situation financière d'autres Compagnies anonymes, nous estimons qu'il n'y a rien à ajouter. Ils parlent assez éloquemment par eux-mêmes.

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dispensable de mettre sous les yeux des lecteurs de La Revue politique et parlementaire, à savoir que les Sociétés tontinières sont bien des Sociétés d'assurances sur la vie comme les Compagnies anonymes, que, de plus, elles sont fondées à se réclamer des principes de la mutualité, que leur gestion, pour les plus anciennes s'entend, est incontestablement moins onéreuse, et dans des proportions considérables, que celle des Compagnies anonymes.

Nous pourrions nous arrêter là, mais il est dans l'article de M. Lefebvre certaines assertions qu'il nous est impossible de passer sous silence.

1° M. Lebevre prétend, à grands renforts d'arguments plus contestables les uns que les autres, que le contrôle exercé par le ministre du Travail sur les entreprises d'assurances sur la vie à forme tontinière, en vertu de la loi du 17 mars 1905, est complètement illusoire. A cela, nous répondrons que cette affirmation de sa part n'est nullement fondée ; qu'elle est, de plus, singulièrement téméraire, car, si elle était fondée, elle le serait aussi bien pour les Compagnies anonymes que pour les Sociétés tontinières.

Il confond, comme à plaisir, la formalité de l'enregistrement, qui, elle, est automatique, pourvu que les conditions légales aient été respectées par les entreprises qui sollicitent ledit enregistrement, avec la surveillance et contrôle que le ministère compétent exerce avec diligence et clairvoyance, à telle enseigne que, sous son initiative directe, des entreprises d'assurances sur la vie se sont vu retirer l'enregistrement pour leur administration défectueuse.

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2o Dans un passage où il fait parler les Sociétés de gestion de Sociétés tontinières, il dit que, si la Société de gestion était honnête, elle déclarerait : « Il est bien entendu que << seuls participeront au partage final ceux des survivants qui auront versé l'intégralité de leurs cotisations; quant <«< aux autres, s'ils ont versé moins de trois annuités, ils « n'auront droit à rien, je garde tout. » C'est là une contrevérité manifeste. Les clauses de déchéance sont nettement indiquées dans les statuts et dans les polices. Les souscripteurs savent à quoi ils s'engagent. Si les Sociétés tontinières excluent des répartitions de leurs associations de survie les

sociétaires qui n'ont pas versé trois annuités, elles ne font en cela que suivre l'exemple des Compagnies anonymes qui excluent du droit de rachat et de réduction tout assuré qui n'a pas versé les trois premières primes, mais avec cette différence capitale que, dans les Compagnies anonymes, le produit de ces déchéances est confisqué au profit des actionnaires, tandis que, dans les Sociétés à forme tontinière, tout ce qui, dans les deux premières primes, excède les frais statutaires de gestion de 7 0/0 va à la masse de l'avoir des associations et devient le bénéfice exclusif des souscripteurs non défaillants. La Société de gestion, elle, ne garde rien en dehors, nous ne cessons de le répéter, des droits forfaitaires de gestion.

3o M. Lefebvre, parlant des réserves mathématiques des Compagnies anonymes dit textuellement ceci : « L'assureur, << par ses réserves, peut présenter à ses assurés une garantie « effective de ses engagements. La tontine ne possède «< comme réserve que la part des cotisations non absorbée « par la gérance. » Nous avons démontré, au début de cette réponse, que les valeurs représentant l'avoir des associations constituaient des réserves identiques, par leur nature et leur objet, à l'actif représentant les réserves mathématiques des Compagnies anonymes. Mais il est vraiment d'une argumentation peu sérieuse de déclarer qu'aux réserves des Sociétés tontinières ne va que la part des cotisations non absorbée par la gérance, puisque cette part représente 93 0/0 des cotisations. Trouverait-on un pourcentage analogue pour les réserves mathématiques des Compagnies anonymes?

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Est-il plus sérieux d'écrire, comme le fait, quelques lignes plus loin, M. Lefebvre, que, dans la tontine, «< il subsiste << une indétermination totale sur ce qui revient à l'adhérent; «<notons qu'il pourrait ne rien lui revenir du tout et, si le «< cas ne s'est pas encore présenté, rien n'interdit de penser qu'il ne se produira pas quelque jour. » Evidemment, c'est là raisonner par l'absurde, car pour que l'événement puisse se produire, il faudrait qu'à la suite d'un cataclysme, qu'il est même impossible d'envisager, les valeurs composant l'avoir des associations et qui sont fixées par décret du 9 juin 1906, tombassent à zéro. Mais, dans ce cas, l'argument s'ap

pliquerait forcément et identiquement aux Compagnies à primes fixes pour les valeurs composant l'actif représentant les réserves mathématiques de leurs contrats.

Mais, nous le répétons, ce sont là arguments et hypothèses vraiment peu dignes d'un esprit sérieux.

4° M. Lefebvre s'étonne de ce qu'une Société tontinière ait imprimé dans un prospectus qu'à la fin de 1910, elle avait recueilli 200 millions de souscriptions, et, à l'entendre, ce chiffre ne représente rien, puisque le montant des encaissements opérés par la dite Société n'atteint pas le chiffre des souscriptions. Et, dit-il, « encaissement n'est pas souscription ». C'est là l'évidence même. Et il est singulier que M. Lefebvre substitue à la lettre du texte de la Société tontinière qui dit « souscription », souscription », son interprétation à lui, d'après laquelle elle aurait voulu faire entendre « encaissements », et, s'il y a mauvaise foi, elle n'est pas où il le laisse entendre. Et nous demanderons à notre tour à M. Lefebvre si, lorsque telle ou telle Compagnie par actions annonce qu'elle a, dans une certaine année, réalisé tant de millions de capitaux assurés, qu'au 31 décembre d'une certaine année l'ensemble de ses capitaux assurés s'élève à tant de millions, il trouverait aux réserves mathématiques de cette Compagnies, surtout si elle n'a pas une longue ancienneté, la représentation en valeurs de ces capitaux en cours.

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5° M. Lefebvre réclame, en terminant, la suppression des tontines et, dit-il, « on ne ferait, en édictant cette sévère in« terdiction, que suivre la bonne voie ouverte par le Gou« vernement suisse qui a entendu mettre en pratique les indications du bureau fédéral des assurances, cet organe unique au monde, de contrôle et de surveillance. »

Nous ne voulons pas mettre en discussion la haute compétence du Bureau fédéral des Assurances suisse, mais cet organe de contrôle et de surveillance serait-il, aux yeux de M. Lefebvre, unique au monde parce qu'il a interdit le fonctionnement des Tontines françaises sur le territoire fédéral?

Il a d'ailleurs étendu cette interdiction d'opérer sur le territoire fédéral à toutes les entreprises de capitalisation qu'au début de son article M. Lefebvre oppose aux Sociétés tontinières en les qualifiant de «< rationnelles au même titre que REVUE POLIT., T. LXXIII.

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celles d'assurances à primes fixes ». M. Lefebvre, appliquant aux entreprises de capitalisation le raisonnement qu'il applique aux Sociétés tontinières demanderait-il, par hasard, que le Gouvernement français interdise les opérations de capitalisation parce que le Bureau fédéral ne les tolère pas sur le territoire helvétique ?

A dire vrai, le Bureau fédéral exige des entreprises tontinières qui sollicitent l'autorisation d'opérer en Suisse, qu'elles inscrivent dans leurs polices la garantie d'un minimum. Et c'est précisément ce que la loi française leur interdit sévèrement de pratiquer.

On conviendra qu'il est difficile aux Sociétés tontinières de satisfaire simultanément à deux exigences nettement contradictoires. Mais nous ajouterons enfin que, si le Bureau fédéral suisse est tout à fait à la hauteur de sa mission, l'Office impérial des Assurances privées qui fonctionne à Berlin ne lui est inférieur ni en compétence technique, ni en sévérité administrative. Or, il est à notre connaissance qu'une Société tontinière française opère officiellement en Allemagne, de l'aveu des autorités allemandes, depuis 1862, et que l'Office impérial à la suite de la mise en vigueur de la nouvelle législation votée par le Reichstag sur les assurances, législation qui avait suspendu toutes les autorisations antérieures, l'Office impérial, disons-nous, vient de renouveler, en 1909, au bénéfice de ladite Société tontinière française, l'autorisation accordée en 1862.

Nous pourrions poursuivre longtemps cette réfutation mais il faut finir et, à notre tour, nous allons indiquer notre conclusion.

Notre conclusion sera toute différente, on le pense bien, de celle de M. Lefebvre. Nous ne demandons pas que le Gouvernement français interdise les opérations tontinières; nous nous élevons même avec la plus grande énergie contre une semblable proposition.

Les opérations tontinières sont des opérations d'assurances et de mutualité tout à fait légitimes et profitables. Elles

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