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prunts ne pèsent pas sur les budgets, leur service d'intérêt et d'amortissement étant assuré par les recettes tirées de leur exploitation.

Mais une métropole comme Paris est obligée d'exécuter sans trop longs délais de grands travaux pour améliorer sa circulation, perfectionner son outillage urbain, embellir ses aspects, rendre plus efficace son hygiène, etc.

Etait-il possible de continuer l'amortissement prévu des dettes anciennes et de trouver les capitaux considérables nécessaires à l'exécution d'un programme de travaux digne de Paris sans accroître le pesant fardeau du service de sa dette? C'est la question qui vient d'être débattue à l'Hôtel de Ville. Cela était possible en se contentant de dépenser, à partir de 1910, chaque année, la somme correspondant exactement aux disponibilités résultant de l'extinction tant des emprunts représentés par les obligations aux mains du public que des annuités dues à divers pour rachats d'entreprises municipalisées.

Comment donc le Conseil municipal a-t-il été amené, au lieu d'employer cette méthode financière, à demander l'autorisation de contracter, pour doter le plan de campagne des grands travaux qu'il entend exécuter, un emprunt gigantesque de 900 millions de francs ? Nous allons essayer de l'exposer impartialement.

L'importance de ce programme de travaux, dont la nécessité n'est pas contestable, a été diversement évaluée. Ces années dernières, les élus et l'administration avaient paru se mettre d'accord sur le total - déjà fort imposant d'un demi-milliard de francs, à dépenser dans un délai de 25 à 30 ans; ce qui eût permis de payer toutes les dépenses de ce plan de campagne au moyen de l'affectation des disponibilités successives du chapitre de la dette, sans rien emprunter.

Mais, en 1908, quand on précisa ce programme, le demimilliard de francs fut tenu pour insuffisant, voire pour « mesquin » et, sous la poussée des demandes dont étaient saisis les 80 conseillers, le préfet de la Seine admit qu'on devrait dépenser environ 750 millions de francs, ce qui rendait difficile la renonciation aux emprunts. Finalement, au mois de juillet 1909, avant de se séparer pour ses vacances, le Conseil municipal, sous la même pression des demandes des divers quartiers, a porté ce total du programme des grands travaux au chiffre de 900 millions de francs, ce qui a eu pour conséquence de faire écarter le procédé de la dotation directe et de revenir au système de l'emprunt. Ce vote eut lieu les 13 et 14 juillet.

La répartition de ce crédit gigantesque ne se fit pas sans difficultés ; il fut nécessaire, après le vote de l'emprunt, de la préciser par une nouvelle délibération qui fut prise le 27 juillet sur le rapport de M. Ernest Caron.

En voici le détail :

1o Edifices municipaux divers:

Grosses réparations, installations et modifications jugées nécessaires dans les divers immeubles communaux. Retauration, agrandissement et reconstruction de mairies. Aménagement de la caserne du Château-d'Eau pour la Garde républicaine, de la caserne de la rue de Rivoli pour l'Administration municipale et, comme conséquence, modification d'installations à l'Hôtel de Ville. Déplacement de la Fourrière. Aménagement de l'annexe de la Bourse du travail. Achèvement du musée Carnavalet et de la bibliothèque Saint-Fargeau.

Dépense évaluée à 25.000.000 de francs.

Promenades et plantations:

Remise en état des promenades actuelles. Achèvement des squares déjà commencés. Etablissement de kiosques à musique. Création de nouveaux squares et plateaux plantés.

Dépense évaluée à 15.000.000 de francs.

3o Subvention extraordinaire à l'Administration générale de l'Assistance publique pour construction, reconstruction, grosses réparations et améliorations des immeubles hospitaliers, 35.000.000 de francs.

4° Mesures contre la tuberculose. Démolition d'immeubles insalubres. Prêts à des sociétés d'habitations à bon marché, 30.000.000 de francs.

5o Amélioration des chaussées et trottoirs. Extension de l'éclairage public et des plantations d'alignement. Création de passages souterrains. Amélioration des ouvrages d'art dépendant de la voie publique. Transformation du matériel du Nettoiement et de l'enlèvement des ordures ménagères. Etablissement de dépôts, écuries et resserres. Création d'une usine de traitement des gadoues, 44.000.000 de francs.

6o Reconstruction des abattoirs de la Villette, 40.000.000 de francs. 7o Construction des deux derniers pavillons des Halles, 15.000.000 de francs.

8o Grosses réparations dans les édifices scolaires, 4.000.000 de francs. 9o Travaux neufs du service des Eaux et Amélioration des canaux, 125.000.000 de francs.

10° Remboursement des bons émis par l'Assistance publique pour cons

titution du fonds de 45 millions (1) (convention du 17 janvier 1903 et loi du 7 avril 1903), 15.000.000 de francs.

Frais divers y afférents, mémoire.

11° Remboursement des avances faites par la Compagnie du chemin de fer électrique Nord-Sud pour l'achèvement du boulevard Raspail (convention du 10 septembre 1906 et loi du 5 avril 1907), 5.000.000 de francs. Sauf compte à faire.

12o Remboursement des avances faites par l'Administration générale de l'Assistance publique pour le prolongement de la rue Dussoubs (convention du 17 août 1908 et loi du 25 juin 1909), 2.000.000 de francs. Sauf compte à faire.

13o Solde à l'Etat pour l'échange relatif à l'immeuble de la rue Oudinot et à la caserne Napoléon (convention du 21 mai 1906 et loi du 26 juillet 1906), 700.000 francs.

14° Sapeurs-pompiers. Evacuation de la caserne de la Cité et réinstallation des services d'incendie, 2.000.000 de franes.

15o Avances aux propriétaires pour mise en état de viabilité et assainissement des voies privées, 3.000.000 de francs,

16° Elargissement et prolongement du canal de l'Ourcq (travaux préparatoires et achat de terrains), 5.000.000 de francs.

17° Construction, translation, agrandissement d'établissements scolaires. Acquisition d'immeubles. Ameublement de nouvelles écoles. Travaux complémentaires et améliorations dans les écoles actuelles, 91.265.000

francs.

18o Opérations de voirie, 440.000.000 de francs.
19o Réserve et frais de l'emprunt, 13.035.000 francs.

Total, 900.000.000 de francs.

Jamais aucune ville n'a contracté pareille emprunt en une seule fois.

Nous ne discuterons aucun des points de ce vaste programme de grands travaux.

Nous n'examinerons pas davantage quelles autres dépenses inéluctables devront être faites forcément à Paris, dans les mêmes années qui verront sa réalisation, telles que l'accroissement de la puissance de production des usines à gaz et des usines d'électricité, la réfection des voies et du matériel des tramways, la transformation des lignes d'omnibus, l'établissement et l'outillage du réseau complémentaire du Métropolitain, la réfection du réseau urbain des téléphones, etc. Tout cela se chiffrera également par un ensemble de dépenses dans Paris, d'au moins un demi-milliard de francs.

Nous entendons simplement exposer pour l'instant les di

(1) Réfection des bâtiments hospitaliers entreprise depuis six ans et gagées à l'aide de subventions de la Ville de Paris et du Département de la Seine.

vers procédés qui ont été préconisés pour doter le plan magistral des grands travaux parisiens esquissé par le Conseil municipal.

Nous espérons que le lecteur qui voudra bien nous suivre pourra facilement, après notre analyse, apprécier par luimême si la solution adoptée, celle d'un emprunt municipal d'une importance inconnue jusqu'à présent est la meilleure pour l'avenir des finances de Paris ou si la limitation du plan de campagne à 500 millions de francs et sa dotation directe sans emprunt n'eussent pas été préférables.

*

Essayons d'abord de nous rendre compte des motifs qui ont fait triompher le système de l'emprunt.

Au milieu des difficultés que le Conseil municipal de Paris rencontra chaque année, depuis bientôt dix ans, quand il dressa les budgets, une idée d'avenir soutint l'assemblée (et son porte-parole le rapporteur général du budget), dans la résistance obstinée qu'elle ne cessa d'opposer aux incitations de l'administration préfectorale lui demandant, au moment de la présentation de chaque projet budgétaire, la création de ressources nouvelles, normales et permanentes, pour augmenter les recettes ordinaires de 7 à 8 millions de francs de plus annuellement.

C'est que, si, par des ajournements de dépenses, des reculs d'entreprises ou même des expédients financiers, il était possible d'équilibrer tant bien que mal les budgets jusqu'à 1910, les Conseils municipaux étaient tous convaincus qu'ils éviteraient le vote douloureux de nouvelles taxes. En effet, l'expiration des lourdes annuités du service de la dette municipale devait procurer, à partir de 1910, une série de ressources de plus en plus importantes et, dès cet exercice, une disponibilité d'environ 14 millions de francs, chiffre presque double de celui du déficit latent que le préfet de la Seine, sans se lasser, remettait en évidence au début de chaque session budgétaire.

Cette vision de la disponibilité, de plus en plus prochaine,

de l'annuité de l'emprunt de 1869 finit par se cristalliser dans l'esprit du Conseil municipal et, d'un consentement unanime, il fut implicitement mais bien entendu que l'on ferait l'impossible pour arriver, sans voter de charges nouvelles, à l'époque de cette bienfaisante disponibilité, et qu'on la laisserait intacte sans vouloir l'escompter d'avance soit pour doter certaines opérations, soit à la fois tant pour aider à l'équilibre stable des budgets futurs que pour acquitter des dépenses ayant, plus ou moins, le caractère de dépenses anormales et extraordinaires. C'était d'une sage politique.

A cette considération, à cette sorte de tabou dont fut ainsi frappée la future disponibilité, se joignit, pendant quelques années, l'espoir vite déçu que les produits nouveaux qu'il serait possible d'obtenir des services industriels municipaux (eaux, gaz, électricité, omnibus et tramways), services dont la Ville de Paris allait avoir la libre disposition à l'expiration des contrats en cours, et que beaucoup comptaient la voir exploiter par elle-même, procureraient une plus-value annuelle de 10 à 15 millions de francs, qui s'augmenterait automatiquement en raison de l'accroissement de la population. Ces produits supplémentaires, sinon nouveaux, de l'exploitation du « domaine industriel », suffiraient, crut-on, à procurer aux futurs budgets ordinaires des recettes de plus en plus abondantes, de nature à en assurer, pendant une longue période, l'exécution avec des plus-values importantes rendant aux finances communales leur ancienne élasticité.

A ce moment 1899-1902 on croyait donc équilibrer aisément les budgets ordinaires, dès 1909-1910, au moyen des recettes de plus en plus productives des services publics exploités industriellement par la Ville, tout en assurant l'exécution de grands travaux à doter, au fur et à mesure de l'expiration des annuités de la dette municipale en obligations ou des remboursements de la dette secondaire, par les disponibilités résultant du complet amortissement de deux grands emprunts ou du remboursement des dettes secondaires.

Mais une amère déconvenue devait rendre l'exécution de ces beaux projets financiers impossible.

Quand le Conseil municipal eut à discuter le nouveau régime du service du gaz, service considérable, qui formait le

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