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ligne parallèle au Transmandchourien et allant de Chinchau, sur le golfe du Petchili, à Aigoun.

La solution est, comme on voit, d'une simplicité parfaite; elle rappelle un peu la fable de La Fontaine, les souris décidant d'attacher un grelot au cou du chat. Personne ne voulut attacher le grelot. De même ici, nul ne se chargera de faire accepter, par la persuasion ou la violence, pareille solution aux Japonais et aux Russes. Les uns et les autres n'ont pas sacrifié tant d'argent et tant de vies humaines pour se voir dépouiller de la sorte.

La presse et le gouvernement japonais ont donc accueilli fraîchement ce projet, qui a reçu, de la part des Russes un accueil à peu près identique. Il semble pour toujours écarté.

La crise ministerielle hongroise. Voilà des mois que cette crise dure après avoir tout fait pour essayer de la résoudre par la manière douce, on se décidé à employer la manière forte. Il est à craindre que la seconde manière n'ait pas plus de succès que la premiè re.

Le Cabinet Wekerlé, qui prit le pouvoir en avril 1906, a démissionné dès le mois d'avril dernier. C'est sur la question de la Banque autonome que se produisit, on se le rappelle, la dissension, au sein du parti de l'Indépendance. Aucun ministère n'ayant pu être constitué alors, le roi pria M. Wekerlé et ses collaborateurs de garder provisoirement leurs fonctions. Cela dura, les vacances aidant, jusqu'à la fin septembre où de nouveau, le premier ministre remit au souverain sa démission. Le roi fit d'abord appel au D Lukacs et le chargea de former un Cabinet parlementaire. La tâche était des plus malaisées, d'autant que Vienne refusait toutes les concessions, même les boutons des tuniques. militaires, qui auraient pu disposer favorablement la majorité de la Chambre. Après de multiples négociations l'homo regius dut avouer son impuissance. Ce qu'on lui demandait, c'était proprement la quadrature du cercle.

C'est alors que François-Joseph recourut aux bons offices d'un de ses plus dévoués serviteurs, le comte Khuen-Hedervary, qui fut, pendant vingt ans, baron de Croatie (1883-1903); de juin à octobre 1903, premier ministre en remplacement de M. de Szell. Le comte Khuen-Hedervary laissa, en Croatie, la réputation, très méritée, d'un homme à poigne,qui s'inquiète assez peu des moyens pourvu qu'il parvienne à son résultat.

C'était folie d'espérer qu'un tel homme, très impopulaire dans les milieux parlementaires, trouverait une majorité à la Chambre.

Ce choix-là ne pouvait signifier qu'une chose: le désir de recourir à la manière forte.

Dès son apparition au Parlement, le nouveau ministre a reçu l'accueil le plus hostile; la Chambre des députés et celle des mognats ont voté contre lui un ordre du jour de méfiance, sur quoi le comte Khuen-Hedervary, sortant de sa poche un rescrit royal, a prorogé le Parlement pour deux mois.

Voilà donc la Hongrie revenue, ou presque, aux plus mauvais jours du ministère Fejervary, avec un Cabinet antiparlementaire et la perspective d'élections faites par un ministre à poigne.

Le pays résista de la façon la plus énergique à cette époque. Tout indique qu'il ne résistera pas moins énergiquement aujourd'hui. C'est à la nation que restera le dernier mot.

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En Grèce. Il faut renoncer à comprendre et encore moins à expliquer, du moins par des raisons raisonnables, ce qui se passe en Grèce. Les affaires de ce pays ne sont plus guère menées que par une logique, celle de l'absurde.

La Ligue militaire, souveraine maîtresse de la Grèce, depuis l'été dernier, avait un ministère et un Parlement tout à sa dévotion. Le ministère proposait, le Parlement votait toutes les mesures exigées par les officiers. Que leur fallait-il donc davantage ? On se le demande vraiment.

Réorganiser les services publics (réorganisation est le mot qui revenait sans cesse à leur bouche), y introduire plus d'ordre et plus d'économies, se servir de ces économies pour augmenter, dans des proportions considérables, le budget de la Marine et surtout celui de la Guerre, tel avait été, dès le début, le programme de la Ligue. C'était à elle de l'appliquer puisque, je le répète, elle en avait le pouvoir, puisqu'elle faisait marcher les ministres au doigt et à l'œil.

Mais, en dépit de leur souplesse et de leur obéissance, ni M.Mavromichalis, ni la Chambre ne contentaient les officiers. Ceux-ci, peu confiants dans les politiciens de chez eux, décidèrent d'importer en Attique, un politicien crétois, M. Vénizélos, dont l'influence a été, par moments considérable dans l'île, sans qu'on puisse dire qu'elle s'est toujours heureusement exercée.

Pourquoi faire appel à un Crétois ? On ne le devine que trop, hélas! c'est sa qualité de Crétois, beaucoup plus encore que son expérience ou son habileté, qui l'a désigné aux militaires. Que resterait-il donc à ces derniers, s'ils ne se montraient pas imprudemment nationalistes? La présence de M. Vénizélos à Athènes,

la haute autorité dont il jouit, ne sont-elles pas la manifestation de cette union gréco-crétoise, qui est devenue le rêve obsédant du nationalisme hellénique ?

M. Vénizélos, comme ferait un illustre docteur, qu'on appelle de fort lcin, pour soigner une maladie difficile, a apporté avec lui ses drogues et ses recettes; l'une d'elles, c'est l'Assemblée Nationale qu'il a plusieurs fois déjà appliquée à la Crètc. Quand les Crétois ne savent trop comment tourner une difficulté, ils réunissent une assemblée nationale. Les Grecs, sur le conseil du médecin Vénizélos, vont recourir à cet étrange remède.

Pourquoi cette Assemblée, réunie, remarquons-le, en violation formelle de la Constitution? Il importe, nous dit-on, de réviser la loi électorale, de supprimer l'inamovibilité des juges, etc. Mais il semble que la Chambre pouvait aisément accomplir cette tâche. M. Mavromichalis, plutôt que de céder aux injonctions de la Ligue, et d'accepter l'Assemblée nationale, a préféré démissionner. M. Théotokis, le chef de la majorité, le roi lui-même y étaient hostiles. Mais, en présence des volontés formelles de la Ligue, ils ont cédé une fois de plus. Un nouveau ministère a été rapidement constitué sous la présidence de M. Dragoumis; le gé néral Zorbas, chef de la Ligue, a pris le portefeuille de la Guerre.

La seule chose grave dans tout cela, c'est la question crétoise. Elle est intimement liée aux élections prochaines. Quand auront lieu ces élections ? Les hommes d'Etat grecs, sentant le danger, avaient décidé de les reculer le plus possible, à la fin de cette année, pour retarder le moment où les Crétois voudraient envoyer leurs représentants à Athènes. M. Vénizélos et ses confrères montreront-ils maintenant la même prudence?

Ils savent qu'on ne leur a pas permis de réaliser leurs desseins l'été dernier. Depuis lors, la situation ne s'est point améliorée pour eux, tout au contraire. Moins que jamais, en présence de la situation troublée, presque anarchique de la Grèce, les grandes puissances n'ont le désir de lui sacrifier entièrement l'avenir du nouveau régime en Turquie.

Si les Grecs, malgré tout, s'obstinent à commettre des folies, il faut absolument qu'on les en empêche. Il ne faut pas que par leur imprudence, la guerre éclate en Orient.

C'est aux quatre puissances à y veiller soigneusement. Elles ont déjà occupé la Crête, qui peut être occupée de nouveau. Si cela ne suffisait pas, il y a d'autres moyens qu'on peut et qu'on doit employer.

RAYMOND RECOULY.

REVUE DES QUESTIONS POLITIQUES CONTEMPORAINES

REVUE DES QUESTIONS DE TRANSPORTS

Par C. COLSON

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La navigation en 1908. Après l'essor exceptionnel donné aux transports de toute nature dans le monde entier par la prospérité industrielle qui a caractérisé les années 1906 et 1907, l'année 1908, dont les statistiques sont aujourd'hui connues, a été une année d'arrêt, et même de recul. Mais ce recul a été en France à peine sensible, et nous trouvons dans les relevés du trafic la confirmation du fait souvent constaté déjà, que nous avons souffert de la crise moins que la plupart des autres grands Etats industriels, précisément parce que nous avions pris une part moins active à l'effervescence qui l'avait précédée et engendrée. La prudence, qui expose si souvent nos hommes d'affaires au reproche de manquer d'initiative et les empêche de profiter aussi largement que leurs concurrents étrangers des circonstances favorables, trouve une compensation, peut-être, il est vrai, insuffisante au point de vue du développement de la richesse nationale, dans l'acuité moindre des crises périodiques; mais elle a le grand avantage de faire moins souffrir la population ouvrière des chômages qui accompagnent ces crises, et nous ne voyons guère en France ces armées de sans-travail qui apparaissent à certains moments dans d'autres pays. Il faut remarquer, d'ailleurs, qu'indépendamment des dispositions des hommes, la nature elle-même, en nous dotant très pauvrement de houille, a limité en France le développement des grosses industries, telles que la métallurgie et les constructions mécaniques, qui sont les plus sensibles aux inégalités de l'activité économique, parce qu'elles travaillent pour les autres usines plus que pour les con sommateurs. Enfin, une cause spéciale est venue compenser en partie, pour la métallurgie française, l'effet de la dépression générale de 1908; celle-ci est survenue, en effet, précisément au mo ment où la mise en valeur des nouveaux gisements de minerai de fer concédés dans la Meurthe-et-Moselle, il y a quelques années, devait nécessairement amener une extension notable de la place que l'industrie de cette région tient dans le monde, et le gain relatif sur lequel elle pouvait compter, s'est réalisé sous la forme

la plus heureuse, en moins perdant pendant l'ère des difficultés C'est ce qui explique la bonne tenue des chiffres représentant le trafic en 1908, que nous allons reproduire ci-après.

Navigation intérieure. Le tableau ci-dessous résume le mouvement des transports à l'intérieur de la France, non seulement sur les voies navigables, mais aussi sur les chemins de fer d'intérêt général en petite vitesse, au cours des dernières années :

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On voit que le trafic des voies navigables n'a subi, en 1908, qu'une diminution infime, n'atteignant pas 1 0/0 du tonnage kilométrique. Il est vrai que les chemins de fer bénéficiaient en même temps d'une augmentation de près de 4 0/0 qui, tout en étant très inférieure à celle de l'année précédente, n'en est pas moins sensible. Mais il ne faut pas oublier que les chemins de fer, qui seuls peuvent pénétrer dans toutes les parties du territoire, desservent presque seuls les transports de l'agriculture nationale, dont l'abondance dépend des récoltes bien plus que de la situation industrielle. Or, les récoltes de 1907 et de 1908 ont été satisfaisantes et ont donné, en 1908, un surcroît de trafic compensant la diminution des transports industriels.

La seule voie navigable sur laquelle on ait enregistré une augmentation notable est la Seine, en aval de Paris. Pour la section de Rouen à Conflans, où le courant de trafic entre la capitale et les grands ports de l'estuaire ne se confond avec aucun autre, le mouvement moyen des marchandises sur chaque kilomètre a manifesté depuis 1905 une progression extrêmement rapide, me surée par les chiffres ci-dessous :

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