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trop peu nombreuses dans chaque arrondissement, pris isolément, pour faire élire un candidat, mais qui, réunies, deviennent une véritable force.

Il reste un système majoritaire, puisque ce sont les premiers candidats, ayant obtenu le plus grand nombre de voix, qui sont élus.

D'autre part, avec ce système, point n'est besoin pour déterminer quels sont les élus, de calculs compliqués et obscurs: c'est la simplicité élémentaire du scrutin d'arrondissement, mais d'un scrutin d'arrondissement élargi.

Un double écueil serait seulement à éviter avec ce système. Ce serait d'abord, pour les partis susceptibles de faire élire plusieurs candidats, de faire bloc sur un seul candidat; car ce candidat aurait un nombre de voix beaucoup plus considérable qu'il ne lui en serait nécessaire pour être élu, et il y aurait là au profit de celui-ci, mais au détriment des autres candidats du même parti, un gaspillage inutile de voix..

Ce serait, d'autre part, pour un parti quelconque de présenter un trop grand nombre de candidats, hors de proportion avec les forces dont il dispose, car les voix ainsi disséminées ne seraient plus assez nombreuses sur chaque candidat pour les faire élire.

Ce sera une question de prudence et de doigté: chaque parti devra voir à peu près ce qu'il peut espérer et ne pas présenter plus de candidats qu'il peut raisonnablement en faire nommer, sous peine pour lui de risquer un échee complet.

Il faudra donc qu'il n'y ait pour chaque parti ni trop, ni trop peu de candidats.

D'ailleurs, les conditions exigées, pour que le premier tour de scrutin donne un résultat définitif et qu'il n'y ait pas lieu de procéder au second tour, sont assez sérieuses pour qu'on n'ait pas à redouter de surprises.

Songeons, en effet, que dans un département devant élire 6 députés, par exemple, et où il y aurait 120.000 votants, il faudrait que les 6 premiers candidats réunissent un total de voix suc'est-à-dire supérieur à. 72.000, et que

périeur à

5

3 × 120.000

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dire plus de 10.000 voix, pour que le premier tour fút suffisant (article 14).

Si ces deux conditions n'étaient pas remplies, le second tour

de scrutin deviendrait nécessaire et alors, le premier tour ayant servi d'indication et de pierre de touche, chaque parti verrait l'attitude qu'il doit prendre et la tactique qu'il doit suivre.

Une question se pose. Comment se fera la répartition des voix des électeurs entre candidats d'un même parti et n'y aura-t-il pas lieu de craindre de grandes inégalités de traitement entre tel ou tel de ces candidats ?

L'objection est sérieuse, mais la solution est simple, en réalité. Cette répartition se fera d'abord suivant les convenances personnelles des électeurs, chaque candidat ayant sa clientèle personnelle, et, d'autre part, si les candidats s'entendent entre eux, suivant des circonscriptions territoriales librement assignées a chacun d'eux.

En effet, si chaque candidat peut avoir pour champ d'action un département tout entier (ou une circonscription dans la Seine et le Nord), rien ne l'empêche, si tel est son bon plaisir, de se cantonner dans une fraction du département, abandonnant le reste à ses concurrents de même parti, d'un commun accord avec eux.

Chacun, en un mot, se taille une circonscription comme il l'en tend, « à son aulne », et suivant l'intérêt et la discipline de son parti.

Il est certain que chaque candidat sera tenté de se tailler la plus grande circonscription possible afin d'assurer son élection, mais son ambition aura pour frein l'ambition tout aussi grande de ses autres concurrents, si bien qu'en fin de compte chacun en réalité, se cantonnera dans un milieu plus ou moins restreint, sans trop en sortir.

Le système, on le voit, est une prime à la notoriété, à la valeur personnelle, à l'activité déployée « cuique suum », peut-être aussi à l'ambition; mais qui saurait s'en plaindre, car ce sont là qualités plutôt que défauts ?

D'autre part, et c'est un point sur lequel on ne saurait trop insister, ce système assure dans une très large mesure la représentation des minorités, puisqu'il permet à chaque parti de présenter autant de candidats qu'il le juge à propos, peu ou beaucoup, et de diviser le département comme il l'entend, en une ou plusieurs circonscriptions, suivant ses forces numériques et la densité relative de ses partisans dans le département par rapport au nombre total des électeurs.

Enfin, l'institution des députés suppléants, telle qu'elle a été indiquée, est une conception neuve et originale.

Elle a pour but de pourvoir automatiquement et sans nouvelles

élections aux vacances qui viendraient à se produire en cours de législature dans la représentation départementale l'appel se fera dans l'ordre des voies obtenues, peu importe que le député rem plaçant soit ou non de même opinion que le député remplacé.

C'est, en outre, une compensation éventuelle pour les candidats qui n'ont pu être élus et même un avantage réel et immédiat pour eux puisqu'ils feront de droit partie du Conseil général.

D'ailleurs, l'économie du système ne saurait se comprendre autrement, car son principe essentiel, afin d'arriver à la représentation des minorités, est de procéder simultanément à l'élection de plusieurs députés (2 au minimum), ce qui ne pourrait avoir lieu pour des élections partielles.

En résumé, ce système est simple, pratique, équitable et, pardessus tous, bien français. A l'opinion publique maintenant, de le juger et à la Chambre ensuite de le discuter et, souhaitons-le, de l'adopter dès le début de la prochaine législature.

ANDRÉ BLANC.

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REVUE POLIT., T. LXIII.

LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DU MOIS

Les élections anglaises. Les Américains et la Mandchourie.
La crise ministérielle hongroise. En Grèce.

Les élections anglaises. J'ai assez longuement, ici même, insisté sur ce sujet, pour qu'il soit inutile d'en souligner l'importance et l'intérêt capital qu'il présente pour tous, pour les Anglais aussi bien que pour les étrangers.

Deux grandes questions dominent toute cette crise: une question politique, la réforme ou l'amoindrissement de la Chambre des Lords, une question économique, la substitution projetée du protectionnisme au libre-échange, dont l'Angleterre s'était faite un dogme.

En repoussant le budget de M. Lloyd George, les Lords devaient bien s'attendre à soulever les protestations les plus violentes des libéraux. Jusqu'à présent, en effet, la majorité libérale des Communes avait vu un certain nombre de ses projets de loi rejetés par la Chambre-Haute; elle gardait, du moins, la consolation de penser que le budget, en tant que mesure financière, échappait à un pareil danger. Le privilège financier des Communes, auquel elle tient tant, demeurait absolument intact. Or, c'est à ce privilège que les Lords viennent de porter atteinte; par là s'explique suffisamment la fureur des radicaux.

Ce que le ministère demandait au pays, en décrétant la dissolution du Parlement, c'est de l'aider à venger l'injure faite aux élus du peuple, de prendre parti pour ces élus du peuple contre les législateurs héréditaires et aristocrates de la Chambre-Haute.

La question était donc très clairement posée. Les libéraux disposaient dans la dernière Chambre d'une énorme majorité. Si les électeurs leur conservaient cette majorité ou tout au moins ne la diminuaient que dans de faibles proportions, le gouvernement était fondé à conclure que le pays partageait son avis touchant les Lords, que la démocratie britannique était résolue à secouer enfin la tutelle de la Chambre-Haute.

Or, quelle a été sur ce point, la réponse des électeurs? Libéraux et socialistes, qui marchent, quoi qu'on en dise, entièrement d'accord, étaient au dernier Parlement représentés par :

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J'ai laissé de côté les 73 députés irlandais, qui votent avec le ministère, mais à certaines conditions.

L'énorme majorité dont le gouvernement disposait a donc considérablement diminué. On ne peut pas dire que d'une manière absolue, les libéraux aient perdu du terrain, puisque le nombre de voix qu'ils recueillent est légèrement supérieur à celui qu'ils obtinrent en 1906. Seulement, tandis qu'ils restaient ainsi stationnaires, les suffrages conservateurs s'accroissaient dans de très grandes proportions et ainsi l'axe de la majorité se déplaçait. La grande querelle constitutionnelle soulevée par M. Lloyd George est bien loin d'avoir suscité chez le peuple l'enthousiasme que d'aucuns attendaient. Un pareil scrutin, dans lequel les deux grands partis historiques voient leurs forces s'équilibrer à peu près ne permet pas au prochain gouvernement d'opérer par la force cette réforme radicale des Lords. Il ne peut plus être question d'annihiler les Lords, de supprimer d'une manière plus ou moins franche leur véto. La réforme, si l'on en fait une, ce qui est probable, devra être une vraie réforme et non pas une suppression déguisée. C'est dire que, pour la mener à bout, un compromis sera nécessaire; il faudra l'accord des deux partis, chacun d'eux sacrifiant certaines de ses exigences et finissant par trouver, après de longues négociations, un terrain d'entente. Le compromis, la solution moyenne qui est l'alpha et l'oméga de la politique britannique, interviendraient donc en cette affaire.

Tandis que les libéraux essayaient vainement de soulever le pays contre les Lords, les conservateurs, en dépit des apparences, n'obtiennent pas une réponse plus décisive touchant la grande question du protectionnisme. Je sais bien qu'on va m'objecter les gains considérables réalisés par les unionistes. « Il était impossible de tout faire en une fois, me dira-t-on, et l'on n'en est qu'à la première partie de la bataille. Dans cette première partie, les conservateurs sont parvenus à arrêter, à contenir l'élan de l'adversaire; dans la prochaine bataille, ils le mettront complè tement en déroute et leur doctrine conquerra le pays. >>

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