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mation est demandée de différents côtés et notamment, par la Chambre de Commerce française à Londres. Elle voit deprès les avantages considérables du chèque barré et elle a tout spécialement signalé le vœu suivant, émis par la Chambre de Commerce d'Orléans et du Loiret : « Considérant les très importants services que l'emploi des chèques barrés rendrait au commerce, émet le vœu que les chèques barrés soient l'objet d'une réglementation spéciale. » La Chambre de Commerce de Paris demande aussi l'intervention du législateur en cette matière. Un projet en ce sens, dû à l'initiative privée, est, depuis quelques années, déposé au Sénat. S'il reste dans les cartons de cette haute Assemblée, c'est comme s'il n'existait pas; ou plutôt, il constitue un obstacle moral à ce que cette même initiative privée se manifeste à la Chambre des députés.

II

Le chèque barré ayant une existence légale et non pas seulement une existence officieuse, comme actuellement, deviendra d'un usage courant. La plupart des transactions se résoudront en des opérations d'écriture sans déplacement d'espèces métalliques. Les Chambres de compensations se multiplieront nécessairement comme en Angleterre. Il en résultera un grand allègement pour la circulation du billet de banque. Cet allègement a son importance maintenant que l'émission du billet de banque est limitée à un chiffre déterminé par la loi.

Pendant la période du cours forcé, c'est-à-dire de 1870 à 1878, la limite des émissions a varié de 1 milliard 800 millions à 3 milliards 200 millions. Le cours forcé n'a été édicté ni en 1815, ni en 1830. Il n'est apparu que deux fois dans notre histoire, de 1848 à 1850 et de 1870 à 1878. A cette dernière époque, au lieu de revenir à l'état de chose antérieur à 1870, c'est-à-dire à la liberté pour la banque de proportionner ses émissions à son encaisse et à son portefeuille, on a commis la faute de déterminer une limite du chiffre des

billets de banque. L'émission illimitée basée sur l'escompte des effets commerciaux ne présente aucun danger. Pour un billet de 1.000 francs émis, la Banque place dans son portefeuille une valeur garantie par trois signatures et supérieure à 1.000 francs. Avec un Comité d'escompte comme celui qui existe à la Banque de France, aucune imprudence ne peut être commise. Ce qui doit déterminer la limite de l'émission, ce n'est ni le gouvernement, ni le Parlement. Le public d'une part et la Banque d'autre part, ont seuls qualité et compétence. Le niveau de l'encaisse métallique et sa composition en or ou en argent sont des indications dont il importe de tenir compte, mais c'est surtout dans le portefeuille que se trouve la vraie garantie des billets de banque.

La pensée de rendre le législateur juge de la limite de l'émission est pleine de dangers et d'inconvénients. Cette limitation dépend des besoins du public et le législateur ne peut apprécier que très imparfaitement ces besoins. L'obligation de recourir à lui quand la limite est atteinte ou va être atteinte, la forme solennelle d'une loi peuvent être des causes d'inquiétude pour le marché. Le public est impressionnable. Il peut mal interpréter des décisions en ces matières. Cela est tellement vrai que, vers 1883, la limite légale a été atteinte et dépassée. Le gouvernement a eu la sagesse de fermer les yeux afin d'éviter une catastrophe. Il y a des jours où la Banque escompte des sommes colossales. Si elle s'arrêtait subitement ou si seulement une panique s'emparait du public, un écroulement se produirait comme tomberait un homme dont le cœur cesserait de battre.

La limitation est dangereuse parce qu'il faut toujours arriver à la surélever et que chaque modification peut être une cause de trouble dans le monde des affaires. Ce système que n'avait pas eu en vue le fondateur de la Banque a,sans doute, été inspiré par une méfiance à l'égard des ministres des Finances. Il paraît que, depuis 1879, surtout, les ministres des Finances ont fait des opérations directement avec la Banque. Ils ont trouvé commode d'émettre des bons du Trésor et, au lieu de les lancer sur le marché, soit directement, soit par l'intermédiaire des banques privées, ils ont trouvé plus facile et plus simple de les porter à la Banque de France.

REVUE POLIT., T. LXIII.

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L'abus pouvait être bien voisin de l'usage. Pour empêcher cette manière de battre monnaie, il serait facile de déclarer dans un article du budget, qu'au-delà d'un certain chiffre, le ministre des Finances ne pourrait placer ses bons du Trésor que chez des particuliers.

Il est nécessaire de faire rentrer la Banque dans l'exercice d'un droit qui lui appartenait à l'origine. La vraie limite de son émission, c'est son intérêt bien compris, c'est sa prudence, ce sont ses traditions de haute sagesse.

La barrière de l'émission réside dans les faits économiques et dans l'observation attentive de la circulation monétaire. L'extension des paiements par chèques barrés diminuerait le rôle du billet fiduciaire puisqu'il en fait l'office dans bien des cas. En Angleterre, le chiffre des affaires est 40 fois plus considérable qu'en France et cependant minime est le nombre des billets qui circulent. A l'heure actuelle, la limite de l'émission en France est de 5 milliards 800 millions et nos billets de banque en circulation s'élèvent à 5 milliards 415 millions.

III

Nous ne dirons que quelques mots du chèque postal que l'on veut établir et qui aura pour mission précisément, de faire en partie l'office du chèque barré. L'Etat n'est déjà que trop chargé d'attributions. Il serait préférable de laisser à l'initiative individuelle, le soin de pourvoir à ces divers services. Le personnel des postes a vu, depuis dix ans, ses occupations augmenter, à tel point qu'il ne peut presque plus faire face aux devoirs qui lui incombent. Accroître encore ses occupations serait folie. Si on rendait à l'Administration des Postes le très mauvais service de lui confier l'émission du chèque postal, il faudrait presque doubler le personnel. L'Etat devrait être dépositaire de fonds rapportant probablement un petit intérêt. Des cautionnements seraient exigés de ces nouveaux manieurs de fonds. Tout milite contre une innovation inspirée par un bon sentiment,

mais qu'il est bien facile de rendre inutile en créant le chèque barré.

L'exemple de nos vcisins, les Anglais, est la meilleure démonstration de la nécessité de légaliser le chèque barré. Cette réforme est tellement indispensable que dans la pratique, elle est déjà presque accomplie en fait. Ce sont les vraies et bonnes réformes, celles que le public entreprend lui-même. Il faut achever ce commencement d'innovations, qui est en parfait accord avec tous les principes essentiels de la science économique. Le public a montré le chemin. Bien aveugle serait le législateur qui se refuserait à entrer dans une voie tracée et à l'extrémité de laquelle se trouve un succès assuré.

ARTHUR LEGRAND.

Député

I

UN JOURNALISTE RÉPUBLICAIN : ALPHONSE PEYRAT (1)

Messieurs,

La Ligue de l'Enseignement a reçu récemment un don important de Mme la marquise Arconati-Visconti. Notre amie est coutumière de la générosité; elle y trouve une double joie celle de contribuer tantôt au développement d'une association républicaine, tantôt à la prospérité d'un éta

(1) Nous avons le plaisir d'annoncer à nos lecteurs que nous publierons, in extenso, dans les numéros de février à juillet 1910, le texte des dix conférences organisées, cet hiver, par la Ligue de l'Enseignement, dans son nouvel hôtel de la rue Récamier.

En nous chargeant de cette publication, que nous commençons aujourd'hui, le Bureau du Conseil général de la Ligue de l'Enseignement et les honorables conférenciers d'accord avec lui, nous ont donné un témoignage de sympathie dont nous tenons à leur exprimer ici notre vive reconnaissance.

Voici le programme des conférences:

Mercredi 19 janvier: MADAME RECAMIER, par M. HERRIOT, Maire de Lyon.

Mercredi 26 janvier: L'OPPOSITION REPUBLICAINE A LA FIN DE L'EMPIRE, par M. CAMILLE PELLETAN, député.

Mercredi 2 février: UN JOURNALISTE REPUBLICAIN (ALPHONSE PEYRAT), par M. JOSEPH REINACH, Député.

Mercredi 9 février: L'EXPANSION COMMERCIALE ET INDUSTRIELLE DE LA FRANCE, par M. JEAN CRUPPI, Député.

Mercredi 16 février: L'ŒUVRE SOCIALE DE LA TROISIEME REPUBLIQUE, par M. PAUL DESCHANEL, Député, de l'Académic Française.

Mercredi 23 février: L'ŒUVRE COLONIALE DE LA REPUBLIQUE, par M. PAUL DOUMER, Député.

Mercredi 2 mars: LES HABITATIONS A BON MARCHE, par M. ALEXANDRE RIBOT, Sénateur, de l'Académie Française.

Mercredi 9 mars: LES RETRAITES OUVRIERES, par M. FERDINANDDREYFUS, Sénateur.

Mercredi 16 mars: LA JUSTICE ET LE CRIME, par M. HENRI ROBERT, Avocat à la Cour.

Mercredi 23 mars: L'IDEE DE PATRIE, par M. RAYMOND POINCARÉ, Sénateur, de l'Académie Française.

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