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mode de recrutement ait été modifié, n'a plus de raison d'être telle qu'elle est maintenant constituée. Les hommes d'Etat les plus intelligents estiment qu'il vaudrait mieux lui attribuer des pouvoirs définis et soumettre ses membres à l'élection. Il a donc été question de faire nommer, par des collèges spéciaux, une seconde Chambre qui se composerait de 200 à 250 membres, soit le tiers environ des membres de la Chambre des Communes lorsque les deux assemblées se trouveraient en désaccord, on les réunirait en Congrès pour délibérer et voter. Si cette solution était adoptée et on devra, dans tous les cas, en adopter une, car on ne peut pas rester dans le statu quo —, il est fort possible que le Sénat britannique soit élu, dans de larges collèges, par la R. P., comme le suggère la commission royale. Les objections d'ordre politique qu'on adresse à la R. P., l'émiettement des partis, par exemple, ne s'appliqueraient plus à une assemblée en quelque sorte consultative et qui n'aurait pas le pouvoir de renverser les Cabinets.

Mais si une pareille assemblée était élue par un mode de scrutin qui permettrait aux hommes de talent et de caractère. d'en faire partie, elle jouerait un rôle important dans l'organisme constitutionnel. Et si cette assemblée comprenait des hommes indépendants et exclusivement préoccupés du bien public, ne deviendrait-elle pas, assez vite, très populaire et peut-être même plus populaire que la Chambre des Communes, déjà encombrée par un certain nombre d'inutilités ? En reconnaissant implicitement que la R. P. serait de nature à assurer l'élection d'une Chambre Haute dans les meilleures conditions, la commission royale a singulièrement fortifié la thèse des proportionnalistes; elle leur a donné raison sur un point essentiel de leur programme, qui consiste à fournir aux partis politiques le moyen d'être représentés dans les assemblées par leurs membres les plus intelligents et les plus autorisés.

La question de la R. P. va donc se poser en Angleterre lorsque le problème des deux Chambres sera de nouveau discuté dans le pays et dans le Parlement. Elle se posera, en outre, lorsque la Chambre des Communes examinera la série de réformes électorales dont les libéraux et le parti du travail proclament l'urgence : l'extension du droit de suffrage à tous les

citoyens majeurs et la suppression du vote plural des propriétaires la simplification des formalités de l'inscription sur les listes électorales, dont la révision devrait s'opérer automatiquement, après six mois de résidence, toute l'année et non pendant une trop courte période; la redistribution, c'est-à-dire la division nouvelle des collèges électoraux; la question même de l'élection des députés, qui devrait avoir lieu, à la majorité absolue, et non à la majorité relative, soit par un second tour, soit, ce qui vaudrait mieux, par le vote alter-' natif (1). Et nous ne parlons pas de la question du vote des femmes dont les excès des suffragettes ont peut-être compromis la cause, mais qui n'en sera pas moins réglée dans quelques années dans le sens le plus libéral. Ces importants problèmes recevraient certainement une solution plus aiséc, si l'on commençait par réaliser la réforme qui est la clef de toutes les autres. Mais qu'elle les précède ou qu'elle les suive, la R. P. triomphera en Angleterre, pour des raisons politiques, sinon pour des raisons de justice. Tous les partis ont intérêt à supprimer le scrutin uninominal, parce qu'il se heurte à des objections graves, et qu'il soulève, comme en France, une réprobation à peu près générale dans le monde du travail et dans les milieux intellectuels.

Un régime démocratique ne peut s'accommoder des procédés n régime aristocratique et censitaire. L'Angleterre moderne ne ressemble plus à l'Angleterre du siècle passé les sur

(1) Le vote alternatif, recommandé par la commission royale, n'est pas autre chose que l'application du vote unique transférable dans les eirconscriptions n'ayant qu'un député à nommer. Il consiste, en effet, à donner à l'électeur la faculté d'indiquer l'ordre de ses préférences par un numéro, afin que son vote puisse être attribué à un autre candidat, si celui qu'il a choisi en première ligne n'arrive pas en rang utile. Au recensement général, on commence par attribuer à chaque candidat autant de suffrages qu'il a réuni de fois le numéro 1. Puis on élimine celui des candidats qui a obtenu le moins de suffrages: les bulletins sur lesquels son nom porte le numéro 1 sont alors transférés au candidat qui porte le numéro 2. Si, par ce procédé, la majorité absolue n'est pas atteinte, ce qui n'arrivera que lorsqu'il y aura plus de trois candidats, on élimine un autre candidat dont on transfère les votes de la même manière, et ainsi de suite. De la sorte, il est procédé, en même temps, à un premier et à un second tour. La méthode du vote transférable nous paraît bien meilleure sans celle du scrutin de ballottage, puisqu'elle assure l'élection d'un député par la majorité absolue.

vivants de l'époque où Lord Beaconsfield et Gladstone engageaient leurs luttes héroïques, ne la reconnaissent même plus. La réforme électorale de 1884, quelque insuffisante qu'elle paraisse, a cependant fait son œuvre et, lorsqu'elle sera complétée par un accroissement du droit de suffrage qui s'étendra à près de vingt-quatre millions de citoyens des deux sexes, comment sera-t-il possible de laisser subsister un régime électoral qui constitue un obstacle à la libre expression de la volonté nationale et qui, au lieu d'assurer à chaque parti un nombre de mandats proportionnel au nombre de ses adhérents, fait dépendre sa représentation du hasard ? Les assemblées politiques qui ont chez nos voisins le droit de tout faire, doivent être élues par des procédés d'autant plus justes qu'elles sont plus puissantes; elles doivent être l'image fidèle et exacte d'un pays maître de ses destinées, refléter ses tendances diverses, ne serait-ce que pour permettre aux minorités de se faire entendre et d'empêcher les majorités triomphantes d'abuser de leur force. Les admirateurs sincères du grand peuple qui, le premier, a donné aux autres l'exemple de la liberté, ne peuvent que souhaiter le succès prochain d'une œuvre de justice et d'honnêteté qui sera, en même temps, pour les institutions représentatives de l'Angleterre comme pour les nôtres, une œuvre de régénération, de progrès pacifique et de

salut.

GEORGES LACHAPELLE.

Secrétaire général du Comité Républicain de la R. P.

DU RACHAT DES CHEMINS DE FER SUISSES

I

La ratification par le Parlement helvétique, au mois d'avril dernier, de la Convention du Gothard constitue le dernier acte du rachat des principaux réseaux ferrés suisses. Seize années se sont écoulées depuis que, par son Message du 25 mars 1897, le Conseil fédéral amorçait cette entreprise considérable. Le moment paraît venu de jeter un coup d'œil d'ensemble sur les résultats de cette opération.

C'est le 15 octobre 1897 que la loi de rachat fut votée par le Parlement et le 20 février 1898 qu'elle fut ratifiée par le peuple suisse. Le premier réseau racheté par la Confédération fut celui du Central Suisse (1900); puis vint le tour du NordEst Suisse (1901); ensuite l'Union Suisse (1902); le Jura-Simplon (1902); pour le Gothard, l'opération fut beaucoup plus longue, car la reprise du réseau n'eut lieu qu'en 1909.

Tous ces rachats furent réalisés à l'amiable, en vertu de conventions passées entre les Compagnies rachetées et le gouvernement helvétique. Ce fut le rachat du Gothard qui présenta les plus sérieuses difficultés de droit; la Compagnie et la Confédération eurent beaucoup de peine à éviter une solution judiciaire. Les difficultés politiques auxquelles le rachat de ce réseau devaient donner lieu furent plus graves encore, ainsi que nous le verrons plus loin.

Un premier déboire attendait la Confédération en ce qui concerne le prix du rachat. Pour chacun des réseaux le coût de l'opération a dépassé sensiblement, de 26 à 51 0/0, les évaluations officielles du Conseil fédéral. Au total les indemnités

de rachat l'emportérent de 35 0/0 sur les évaluations. C'est ce qui résulte du tableau ci-dessous :

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Dans une très intéressante étude publiée récemment par M. Weissenbach (La dernière étape de la nationalisation des grandes lignes suisses et dix années d'exploitation par l'Etat), l'ancien Président de la Direction générale des Chemins de fer fédéraux suisses fait observer que, si le prix de rachat a dépassé les prévisions dans une proportion si importante, il faut tenir compte, en sens contraire, de la plus-value de produit net capitalisé du Central suisse, de l'Union suisse et du Gothard, et de celle du capital d'établissement du Jura-Simplon et du Nord-Est suisse qu'il chiffre à 86 millions par rapport à l'évaluation indiquée par le Message du rachat. Mais si l'on envisage à ce point de vue la question de savoir si le rachat a entraîné, ou non, des charges plus lourdes que celles qui avaient été prévues, il faut alors faire entrer en comple beaucoup d'autres éléments d'appréciation. C'est ce qu'a fait notamment l'auteur d'un excellent article, publié dans les numéros de novembre 1904 et juillet 1905 des Annales des Sciences politiques, M. Paul Henry.

Il faut tenir compte, d'une part, de ce que, traitant de gré à gré, la Confédération a dû renoncer à son interprétation de la clause stipulant l'état parfaitement satisfaisant dans lequel des lignes devaient lui être remises.

D'autre part, la somme de 101 millions correspondant à l'excédent du prix réel de rachat ne représente que la diffé

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