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anticipation, dans le cadre de réserve, ce qui aurait l'avantage de ménager l'amour-propre de l'intéressé. Entre ces deux mesures, dont les conséquences pécuniaires sont identiques il y a une nuance qui n'est pas sans importance.

Jusqu'en 1912, la mise à la retraite d'office d'un officier général ne pouvait être prononcée que pour raisons de santé ou pour fautes graves analogues à celles qui entraîneraient la mise en réforme l'un officier supérieur ou subalterne (1). Elle pourra désormais être appliquée pour raisons de santé après examen médical ou bien « pour toute autre cause » après un vote du Conseil Supérieur de la Guerre au scrutin secret.

Malgré le nouveau texte législatif, la mise à la retraite d'office est encore considérée comme une mesure d'une gravité exceptionnelle. C'est pour cela que le Gouvernement n'a pas voulu user des pouvoirs dont il disposait.

Le vieil adage « Qui peut le plus, peut le moins » se trouve en défaut; et ce n'est pas la première fois qu'en dépassant le but on ne l'aura pas atteint.

Une retouche bien modeste rendrait facilement applicable la lor du 16 février 1912.

Il suffirait de décider que l'admission anticipée dans le cadre de réserve pourrait être prononcée d'office, pour raison de santé « ou pour toute autre cause », avec les formalités prescrites pour l'admis sion à la retraite.

(1) Lorsqu'un officier général relevé de son commandement à la suite des grandes manœuvres, a été traduit devant un Conseil d'enquête pour «Faute grave contre la discipline », la seule sanction au sujet de laquelle le Conseil d'enquête ait été consulté a été la Retraite d'office.

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Le 4 mars, le nouveau président des Etats-Unis, appartenant au parti démocrate, a pris possession de ses fonctions. Seize ans s'étaient écoulés depuis que le dernier président démocrate, M. Grover Cleveland, avait quitté la Maison Blanche. M. Wilson a comme caractéristique d'être le premier président originaire d'un Etat du Sud depuis la guerre de Sécession; on peut donc affirmer que son arrivée au pouvoir marque la disparition définitive de toute hostilité entre les Etats du Nord et ceux du Sud. Autre caractéristique c'est le premier professeur d'Université qui soit nommé président, et l'on peut voir là, peut-être, le symptôme d'une prédilection naissante, de la part du pays, pour les hommes politiques d'une plus haute instruction que leurs prédécesseurs dans la carrière.

La transmission des pouvoirs a donné lieu au cortège traditionnel. Plus de 100.000 personnes, venues de tous les coins de l'Union, ont assisté au cortège qui se rendit de la Maison Blanche au Capitole, et aux autres cérémonies et réjouissances de ce jour, qu'un temps exceptionnellement beau est venu favoriser. Suivant la tradition, M. Wilson a prononcé un discours d'inauguration très bref, mais d'une dignité et d'une éloquence remarquables. Il a rappelé qu'un nouveau gouvernement allait monter au pouvoir.

Depuis deux ans déjà, la Chambre des Représentants comprend une forte majorité démocrate et le Sénat va être, à son tour, composé de démocrates pour une faible majorité, si bien que le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif se trouvent entre les mains du parti démocrate. C'est là, dit M. Wilson, un fait beaucoup plus

REVUE POLIT., T. LXXVIII.

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important qu'un simple succès de parti, car un succès de ce genre implique que la nation compte employer ce parti à l'accomplissement d'une mission à la fois vaste et précise.

Sur la nature de cette mission, aucun doute ne peut subsister. Ce jour est un jour de consécration et non point de triomphe.

« Ce sont des cours humains, des vies humaines, qui sont dans la balance. L'espoir des hommes nous invite à dire ce que nous voulons faire. Avec l'aide de Dieu, je ne les trahirai pas, s'ils veulent me conseiller et me soutenir ».

Parmi les problèmes qui s'imposent au nouveau gouvernement, M. Wilson a signalé le gaspillage des richesses naturelles du pays et, parmi les choses à modifier, il a signalé :

« Un tarif douanier qui nous empêche de prendre dans le commerce mondial la place qui nous revient, qui est contraire à l'équité fiscale et qui met le gouvernement dans la main d'intérêts privés ;

« Un système bancaire et monétaire basé sur la nécessité, pour le gouvernement, il y a cinquante ans, de vendre les bons émis par lui et propre surtout à concentrer les ressources monétaires et à restreindre les crédits ;

« Un régime industriel qui, tant au point de vue financier qu'au point de vue administratif concentre les capitaux en quelques mains, restreint la liberté du travail, en diminue les occasions et exploite les ressources naturelles du pays sans jamais les renouveler ;

« Un personnel agricole qui n'a jamais joui des avantages des grandes entreprises, qui n'a pas été servi comme il aurait dû l'être par la science mise à sa portée et qui n'a jamais pu disposer des facilités de crédit qui répondaient le mieux à ses besoins.

«Les cours d'eaux inexploités, les terres en friche dédaignées, les forêts négligées en voie de disparition sans aucun reboisement systématique, des monceaux inutilisés de scories à la sortie de chaque mine ».

Estimant que le nouveau gouvernement avait reçu mandat formel, de la part du corps électoral, d'appliquer immédiatement le programme qui avait donné la victoire au parti démocrate, le président convoqua aussitôt le Congrès en session extraordinaire pour le 6 mars. En même temps, le nouveau président choisissait les membres de son cabinet et en soumit la liste à l'approbation du Sénat dès que celui-ci se fut réuni. La création d'un ministère du Travail porta de neuf à dix le nombre des Ministres. On savait bien que M. Bryan, trois fois désigné comme candidat démocrate à la présidence, serait nommé secrétaire d'Etat, mais les noms des autres ministres étaient demeurés secrets. Le cabinet défini

tivement constitué comprenait cinq ministres des Etats du Nord et cinq du Sud. Aucun sénateur n'en fit partie, car, vu la faible majo rité dont le parti démocrate dispose dans cette assemblée, le président ne voulut pas lui enlever l'un quelconque des chefs du parti. Seuls, un ou deux des nouveaux ministres étaient des personnalités politiques de marque, de sorte que, dans son ensemble, ces noms ne disent rien au public, mais ce sont cependant, pour la plupart, des hommes d'une haute compétence et dûment appréciés dans les milieux autorisés.

Lorsque le Congrès se réunit, le président vint en personne donner lecture de son message, au lieu de le faire lire ainsi que c'était la coutume depuis plus d'un siècle. Les deux premiers présidents, Washington et Adams, lurent leurs messages eux-mêmes mais le troisième, Jefferson, estimant ce procédé peu démocratique, les fil lire par un fonctionnaire. On approuva généralement ce procédé comme plus conforme à nos institutions démocratiques et cette pratique fut suivie pendant 112 ans. En revenant à la coutume primitive, M. Wilson a donc introduit une innovation importante dans nos usages constitutionnels. S'il l'a fait, ce n'est nullement par vanité ou par faste, mais pour des raisons pratiques.

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Il estime et il a développé cette idée dans ses ouvrages sur le gouvernement américain que des relations plus étroites entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif rendraient leur collaboration plus féconde et leur entente plus facile. Il estime, d'autre part, qu'étant le chef élu de son parti, il est responsable plus que tout autre de l'exécution des engagements pris par ce parti. Il est donc de son devoir, non seulement de conseiller certaines mesures législatives et, à l'occasion, d'opposer son veto à une loi, mais aussi de formuler des programmes législatifs et d'user de tout son pouvoir pour obliger le Congrès à adopter les mesures qu'il préconise. A cet effet, le président doit entretenir d'étroites relations avec les membres des Assemblées législatives et bien souligner sa volonté de jouer un rôle positif dans l'œuvre législative. Comme gouverneur du New-Jersey, ce sont ces principes qui avaient dirigé sa conduite. Non seulement il avait formulé des programmes législatifs, mais encore il s'était souvent adressé en personne à l'Assemblée, et, comme chef de son parti, s'était efforcé d'obtenir le vote des mesures qu'il préconisait. C'est là une conception nouvelle du pouvoir exécutif qui sera sans doute approuvée par les électeurs. Tout indique une tendance, aux Etats-Unis, à accentuer le rôle du pouvoir exécutif et il ne serait pas surprenant que M. Wilson proposât comme l'avait fait M. Taft, que des sièges au Congrès fussent attribués à ses ministres.

Le premier message du président au Congrès, contrasta singulièrement avec ceux de M. Roosevelt et de M. Taft, par sa brièveté extrême et l'absence de tous détails.

Il se distinguait également par son éloquence et sa noblesse de sentiment. Le président a déclaré d'abord qu'il avait convoqué le Congrès en session extraordinaire parce que le pays avait, à la suite des dernières élections, imposé au parti actuellement au pouvoir, un devoir à accomplir sans tarder, en vue d'alléger les charges du peuple et de ne pas laisser trop longtemps le monde des affaires dans l'incertitude au sujet de la nature des modifications fiscales prochaines. « Il est évident, dit-il, que le pays tout entier s'attend à ce que les tarifs douaniers soient modifiés de façon à répondre aux conditions nouvelles de notre vie économique ». Il faudra donc les transformer de manière à les mettre en harmonie avec la réalité. Il y a longtemps que nos industries, autrefois dans l'enfance, n'ont plus besoin de protection. « Consciemment ou inconsciemment, continua M. Wilson, nous avons édifié un système de privilèges et de suppression de la concurrence, grâce auquel a fleuri le monopole ». « Tout ce qui ressemble à des privilèges ou à des avantages artificiels devra disparaître. Les droits sur les produits de première nécessité devront être réduits, ou abolis purement et simplement, et ceux sur les articles de luxe devront être maintenus ou augmentés ». « Néanmoins, il serait peu sage de procéder avec une précipitation inconsidérée et sans une étude approfondie ».

Le président s'est contenté ensuite de proclamer nécessaire une réforme du régime fiscal, mais sans entrer dans aucun détail, cette question devant faire l'objet d'un message ultérieur.

La Commission des voies et moyens, de la Chambre des représentants, chargée d'élaborer un projet de tarifs, avait terminé ses travaux pour ce moment, si bien que, dès le début de la session extraordinaire, le projet était prêt à être déposé. Deux semaines plus tard, il était approuvé à une réunion des membres du parti démocrate à la Chambre des représentants. Cette dernière le discuta du 22 avril au 8 mai, et l'adopta ce jour-là par 281 voix contre 139. Cinq démocrates seulement votèrent contre. Le Sénat fut bientôt saisi de ce projet, et, après y avoir apporté quelques modifications, l'adopta le 9 septembre à une assez forte majorité. Deux démocrates seulement s'y opposèrent. Suivant la procédure usuelle en pareil cas, les deux projets furent renvoyés à une commission interparlementaire, chargée de concilier les divergences de texte, ce qui fut facile, les démocrates des deux chambres étant en somme d'accord au sujet de la plupart des modifications proposées.

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