faire fructifier, en conciliant la plus grande prudence avec le souci de leur faire rapporter l'intérêt le plus élevé. Je n'ai pas besoin de faire observer que cette solution offre aux déposants des garanties bien supérieures au placement dans les banques privées qui, malgré leur solidité et le soin apporté à la surveillance de leur gestion, peuvent pourtant, à un moment donné, être entraînées dans un krach, ou faire elles-mêmes des opérations malheureuses. Par ailleurs, si, dans un monde encore neuf comme les EtatsUnis, où il existe une considérable demande d'argent pour toutes les entreprises, de la part des groupements de population rurale et des centres de moindre densité, la considération du drainage des capitaux vers un centre unique est d'une importance vitale, il n'en est pas de même en France, le grand banquier du monde, où les capitaux sont assez largement répartis de tous les côtés, pour pouvoir suffire à tous les besoins locaux. Les banques privées, les grands établissements financiers avec leurs succursales multiples, les institutions de crédit industriel et agricole, qui se répandent de plus en plus sur le territoire ont à leur disposition plus de fonds qu'il ne leur en faut pour satisfaire à toutes les demandes de leur clientèle, et ce n'est pas l'accumulation de l'épargne populaire à la Caisse des Dépôts et Consignations, où il est pourvu à son placement, qui raréfie les capitaux dans telle ou telle région de la France. Qu'on lui reproche de servir surtout à maintenir, par des achats continus, le cours de la rente encore que ce résultat ne soit pas, à tout prendre, si néfaste qu'on veut bien le dire cela est une autre affaire. En tout cas, il est permis de penser que la petite épargne qui tient surtout à avoir la certitude de pouvoir disposer de ses économies à tout moment ne les placerait pas dans l'industrie ou le commerce. Quant à l'économie administrative qui découle dit-on de la décentralisation américaine, elle ne pourrait être opposée à notre centralisation que si celle-ci avait pour conséquence de développer à l'excès les frais d'administration. Or, il est loin d'en être ainsi. Si l'on se reporte au dernier rapport adressé au Président de la République par le ministre des Travaux publics, des Postes et des Télégraphes sur les opérations de la Caisse nationale postale d'épargne, on constate tout d'abord que la direction centrale et les 68 succursales de plein exercice entretiennent un effectif de 1.285 personnes, dont les appointements s'élèvent à 6.302.373 fr. 54. Les dépenses de matériel et dépenses accidentelles de la Caisse représentent une somme de 1.814.035 fr. 02. Les frais d'administration sont douc, au total, de 8.116.408 fr. 56. Ces frais sont-ils exagérés? Aucunement. En effet, ils s'appliquent à 7.505.636 opérations, non compris le règlement de chacun des comptes individuels au 1er janvier (inscription des intérêts capitalisés et établissement du solde à nouveau), ce qui fait que, calculé en tenant compte de tous ces éléments, le prix de revient de chaque opération ne ressort qu'à 0,56. D'autre part, calculés par rapport aux sommes dues aux déposants au 31 décembre 1911 (1.704.094.436 fr. 77), les frais d'administration ressortent seulement à 0,47 pour cent. Encore convient-il de faire remarquer que ces frais seraient. bien moins élevés, si la loi du 28 juin 1901 n'avait pas imposé à la Caisse d'épargne postale l'obligation de contribuer, dans la proportion de 5 0/0 des loyers, aux dépenses de location des immeubles affectés aux bureaux de poste, et si les lois de finances des 17 avril 1906 et 31 décembre 1907 n'avaient pas augmenté le contingent que doit verser la Caisse au budget général, à titre de contribution aux dépenses de l'Administration des Postes et des Télégraphes. Car non seulement la Caisse d'épargne postale ne reçoit aucune subvention de l'Etat, mais c'est elle, au contraire qui, en quelque sorte, le subventionne. Et malgré cela, à l'heure actuelle, l'accumulation des bénéfices qu'elle a réalisés sur ses frais d'administration, et des sommes provenant de la capitalisation des intérêts de ses fonds, est telle qu'elle possède une dotation propre de 69 millions 880.907 francs. On voit donc que chez nous non seulement la Caisse nationale d'épargne fait face elle-même au coût de son administration, sans imposer aucune charge aux contribuables, mais qu'elle vient en aide au budget, et que par surcroît elle trouve le moyen de réaliser de sérieuses économies, ce qui ne l'empêche pas de servir aux déposants un intérêt supérieur à celui qui est servi aux EtatsUnis (2,50 0/0 au lieu de 2 0/0). ** Le système américain offre-t-il du moins aux déposants plus de facilités et de commodités que le nôtre? Réduit-il beaucoup plus la durée des opérations de versement et de retrait des fonds? Il serait difficile de le soutenir. Remarquons en premier lieu qu'il restreint la liberté des déposants quant au choix des bureaux de poste où ils peuvent opérer leurs dépôts et leurs retraits. C'est ainsi en effet que seules les personnes recevant leur courrier, par l'entremise d'un certain bureau de poste, peuvent devenir déposantes à la caisse d'épargne de ce bureau, qu'il ne leur est pas loisible d'ouvrir des comptes dans d'autres bureaux, qu'elles doivent par suite effectuer tous leurs dépôts dans ce bureau, et qu'il leur faut recourir à ses offices, si elles veulent opérer le retrait de tout ou partie de leurs fonds. En France, au contraire, l'ouverture d'un compte peut se faire n'importe où, et les versements comme les remboursements ultérieurs peuvent être effectués, au gré du déposant et de ses déplacements, dans tous les bureaux de poste de France, d'Algérie, de Tunisie, et même dans certains bureaux à l'étranger. On voit donc déjà la supériorité incontestable de notre régime. Au premier abord, il semble que la délivrance des coupures de « certificats d'épargne », au lieu de livrets individuels, doive produire une simplification considérable de comptabilité, et assurer aux déposants une grande économie de temps dans leurs opérations de versement et de retrait de fonds. Il n'en est rien, si on veut bien remarquer que les nombreuses inscriptions à faire sur chaque certificat, au moment de la délivrance, les échanges perpétuels de certificats, à chaque nouveau dépôt ou retrait, pour en restreindre le nombre au strict minimum (voir plus haut), imposent en fait aux receveurs un assez long travail d'écriture, et retiennent certainement les clients à leurs guichets, aussi longtemps que les inscriptions à opérer sur nos livrets de caisse d'épargne. Et comme les receveurs locaux doivent tenir registre de leurs opérations au jour le jour, faire parvenir certains rapports à l'Office central, aux fins de contrôle, d'apurement de comptes et de statistique, sans parler de leur correspondance avec les banques privées, on ne voit pas trop en quoi la décentralisation américaine réduit plus les écritures que notre centralisation. On dira peut-être que les dispositions en vertu desquelles il n'est payé d'intérêt que pour une année pleine, et il n'est pas calculé d'intérêts composés, allègent beaucoup le travail de l'administration. Mais cette économie de travail s'obtient au détriment des déposants qui, chez nous, ont droit à l'intérêt de leurs dépôts, à partir du quinzième jour, quelle qu'en soit la durée, et pour qui, au 31 décembre de chaque année, l'intérêt acquis s'ajoute à leur capital, devenant lui-même productif d'intérêts. On dira aussi que le système de remboursement sur simple présentation. des certificats d'épargne est plus expéditif que le nôtre, qui oblige les déposants à faire une demande et à attendre la réponse d'auto risation. Mais je ferai observer que déjà un système de remboursement à vue fonctionne à Paris, rue Saint-Romain, pour les déposants dont les comptes sont tenus par la Direction centrale, et qui sont en résidence ou de passage dans la capitale; qu'ils peuvent également obtenir des remboursements rapides par la voie des tubes pneumatiques; qu'au siège des succursales, l'Administration a organisé depuis le 1er janvier 1905 un mode de remboursement accéléré, et que partout les remboursements peuvent être demandés et autorisés par la voie télégraphique. Il y a là, on en conviendra sans peine, un ensemble de mesures qui, à peu de chose près, assure aux déposants tous les avantages du remboursement à vue. Et si on considère avec quelle souplesse l'Administration de la Caisse d'épargne postale s'est prêtée à l'extension du fonctionnement de cette caisse, à bord des bâtiments de la flotte, et dans les dépôts de nos équipages, dans les corps de troupes stationnés aux colonies, dans un certain nombre de villes de l'étranger, enfin à l'organisation d'un service international en Belgique et en Italie, on ne peut s'empêcher de reconnaître que notre institution est infiniment supérieure à celle des Etats-Unis. Au surplus, la lettre si élogieuse que la délégation de ce pays qui était venue, il y a quelque temps, étudier les modalités de notre régime d'épargne postale, a adressée au sous-secrétaire d'Etat des Postes et des Télégraphes, est la meilleure preuve que ce régime peut soutenir avantageusement la comparaison avec le régime américain; et les améliorations que ses dirigeants ne cessent d'y apporter expliquent son merveilleux développement. Je terminerai cependant par une critique de la réglementation de la caisse. Ce sera, du reste, la seule. Aux termes des dispositions régissant les dépôts, « le montant total des versements opé«rés du 1er janvier au 31 décembre ne peut excéder le chiffre de « 1.500 francs. » C'est là une interdiction peu justifiée. Que le compte de chaque déposant ne dépasse à aucun moment le chiffre de 1.500 francs, rien de mieux ! Cette limitation du crédit total est aussi prudente que sage dans une institution d'épargne populaire. Mais celle des versements annuels, au même chiffre, ne se recommande par aucun motif plausible; et dans bien des cas elle peut être fâcheuse pour les déposants qu'une circonstance imprévue oblige à retirer des fonds qu'ils ne peuvent plus replacer ensuite. A mon avis, elle devrait disparaître. Les fêtes solennelles célébrées cette année en Russie à l'occasion du tricentenaire de la dynastie des Romanof furent empreintes du plus vif éclat, et la participation de toutes les classes du peuple russe leur a donné un caractère vraiment national et patriotique. L'Empereur, accompagné de la famille impériale, a choisi ce moment pour visiter plusieurs villes dont le passé est intimement lié aux fastes de la dynastie. Les détails de ces solennités ont été reproduits dans la presse. Nous essaierons ici de préciser l'origine de la famille de souverains dont le règne a donné à la Russie un développement considérable, un merveilleux essor, la classant au rang des premières puissances du monde. En 1598, à la mort du dernier Tsar de la famille régnante des Rurik, Théodore (Joannovitch), dont le frère cadet avait été assassiné en 1591, commence la période de guerre civile et d'anarchie qui se prolongea durant quinze années, jusqu'à l'avènement au trône, en 1613, de Michel, premier Tsar de la dynastie des Romanof.. D'après les documents historiques, les descendants de Glianda Kambila, gentilhomme de Lithuanie venu en Russie en 1280, avaient pour la plupart occupé des fonctions importantes dans l'empire. Son petit-fils Théodore avait illustré sa maison en s'alliant à la célèbre famille des Rurik par le mariage de sa fille avec le prince Théodore de Tver. Un de ses fils, Iouri, était le père de Roman, dont le nom devait servir plus tard, à désigner toute la dynastie. Roman, allié à la famille régnante de Russie par le mariage de sa fille Anastasie avec Ivan IV, le Terrible, avait eu deux fils : Daniel et Nikita qui furent admis dans l'entourage du redoutable empereur. Mais, alors que le rôle de Daniel devait passer complètement inaperçu, Nikita, au contraire, par son ascendant sur le souverain, se révélait à l'attention du peuple russe, acquérait une popularité justifiée et provoquait un mouvement de sympathique reconnaissance chez ce peuple. plus accoutumé à la rudesse de l'autorité qu'à la bienveillance d'un prince aux larges vues. Théodore ayant succédé à Ivan IV sur le trône de Moscovie, |