traire, une protubérance correspondant à la radicule. Après une courte immersion de la graine dans l'eau, le tégument séminal se déchire souvent et se détache facilement et d'une seule pièce de l'amande, qui présente, à sa surface, une teinte blonde ou jaunâtre, toute différente de la teinte grise qui caractérise le poivre blanc. En outre, le poivre blanc est toujours arrondi, monosperme, marqué de stries nombreuses qui s'étendent d'un pôle à l'autre du fruit et représentent les faisceaux fibro-vasculaires du mésocarpe, tandis que la graine en question, privée de son tégument séminal, est ovale, uplatie, lisse et dépourvue de stries; elle est composée de deux gros cotylédons, qui se détachenttrès facilement l'un de l'autre et sont séparés à leur base par une grosse radicule. Lorsqu'on gratte superficiellement cette amande, on n'y découvre pas, comme dans le poivre blanc, d'éléments scléreux ni le tégument brun et résistant qui représente l'endocarpe et l'enveloppe de la graine. Si l'on coupe transversalement l'amande qui nous occupe, celle-ci est homogène dans sa composition et dans sa teinte, tandis que la section transversale du poivre blanc permet de distinguer, dans le périsperme qui représente la partie féculente du fruit, deux zones concentriques de nuance différente. Frottée entre les doigts ou contusée dans un mortier, la graine examinée n'exhale aucune odeur aromatique. Lorsqu'on la mâche, elle laisse dans la bouche une saveur d'abord fade, qui rappelle celle de la légumine, mais qui est suivie d'un arrière-goût acre, dont l'intensité paraît assez variable. Le principe acre qui communique sa saveur à cette graine existe aussi bien dans le tégument séminal que dans l'amande ; il est très soluble dans l'eau et n'est pas par conséquent de nature résineuse : les graines qui ont séjourné pendant quelque temps dans l'eau ont cédé à ce véhicule la plus grande partie de leur âcreté. J'insiste spécialement sur cette particularité, qu'on n'observe généralement pas pour les substances naturellement acres. Si l'on incinère le tégument d'une dizaine de ces graines, on constate d'une façon très nette, dans les cendres, les réactions des sels de fer. J'indiquerai plus loin les déductions qu'on peut tirer de cette particularité. L'examen et la comparaison de ces caractères extérieurs et organoleptiques indiquent déjà clairement que la graine dont il s'agit est toute différente du fruit des Pipéritées. L'étude de ses caractères anatomiques révèle positivement qu'elle est fournie par une plante de la famille des Légumineuses appartenant au genre Pisum ou Lathyrus. Caractères anatomiques. Examinée au microscope, la graine d'Erviop présente, de dehors en dedans (fig. I), une assise scléreuse (scl), formée d'une seule rangée de cellules sclérenchymateuses, allongées radialement, disposées en forme de palissade, munies de parois épaisses et d'une cavité qui, d'abord assez large, s'étrangle à une petite distance de la périphérie et s'élargit dans la partie inférieure des cellules. La partie correspondant à cet étranglement se présente sous l'apparence d'une ligne plus claire. Vues de face, ces cellules (scl' fig. II) sont polygo. nales ou arrondies et présentent une cavité à contour irrégulier, dont la largeur et l'apparence varient avec les mouvements de la vis micrométrique et selon qu'elles se présentent sur leur face supérieure ou sur leur face inférieure : Une assise de cellules (sa), dites en sublier parce qu'elles sont élargies à leurs deux extrémités et étranglées dans leur partie médiane. Vues de face (sa' fig. 2) et agglomérées, ces cellules sont polygonales, munies de parois ponctuées; elles sont caractérisées par la présence, dans leur partie médiane, d'un cercle ou d'une ellipse reproduisant la projection de leur partie étranglée et d'où partent des stries radiales plus ou moins apparentes. Lorsqu'elles sont désagrégées ou séparées les unes des autres, ces cellules en sablier présentent des formes très différentes, selon le sens dans lequel elles se présentent ; elles sont généra lement plus élargies à l'une de leurs extrémités qu'à l'autre, ce qui contribue à leur donner parfois quelque ressemblance avec un champignon; Un parenchyme (pa) lâche dans sa partie extérieure, qui est formée de cellules polygonales irrégulières, isodiamétriques, plus dense dans sa partie interne, qui est formée de cellules aplaties. Ce parenchyme ne contient ni cristaux, ni cellules résineuses, ni glandes oléifères; PARTIE A OU GAUCHE DE LA FIGURE, a, Grains d'amidon de la graine d'Erviop co, Débris des cotylédons. eco', Enveloppe des cotylédons vue de face. sa, Cellules en sablier vues de profil. sa', Les mêmes, vues de face. scl, Cellules scléreuses vues de profil. - scl', Les mêmes, vues de face. PARTIE BOU DROITE, scca, Cellules scléreuses du tégument de la graine du Capsicum vue de profil, scca', Les mêmes, vues de face. scno, Cellules scléreuses groupées et isolées de la poudre de noyaux d'olives. pte, l'oils étoilés. Sous ces trois assises, qui représentent le tégument séminal de la graine, on observe : l'enveloppe des cotylédons (eco), formée d'une seule rangée de cellules rectangulaires; vue de face, cette membrane (eco' fig. 2), qui se détache facilement après immersion de la graine dans l'eau alcalinisée, se présente sous l'aspect de cellules irrégulières, quadrilatérales ou polygonales, munies de parois faiblement épaissies et légèrement colorées en brun; Les cotylédons (co), formés d'un tissu de cellules polygonales qui sont remplies de gros grains d'amidon, disséminés dans une masse de matière amorpheou finement granuleuse, constituée par de la légumine. Ces cellules sont munies de parois assez épaisses et sont séparées par des méats plus ou moins larges. L'amidon qu'elles contiennent se présente en gros grains simples, ovales, à contour rarement régulier, le plus souvent bosselé ou marqué de protubérances plus ou moins saillantes. Ces grains d'amidon, pourvus d'un hile allongé plus ou moins sineux. mesurent en moyenne 25 à 50 4 dans leur plus grand diamètre; ils présentent des stries concentriques, qu'on peut rendre plus apparentes au moyen de la solution d'acide chromique au 1/50. Cette structure anatomique, toute différente de celle qu'on observe dans le poivre noir et dans le fruit des Pipériteés, est, au contraire, tout à fait caractéristique des graines de Légumi neuses. L'apparence extérieure des graines, leurs dimensions, leur forme, la comparaison de leurs caractères anatomiques, la forme et la grosseur des grains d'amidon contenus dans leurs cotylédons permettent de les identifier avec les graines d'un pois Pisum, très voisin de notre Pisum sativum ou d'une gesse (Lathyrus). Si l'on pulvérise ces graines, on retrouve, dans la poudre obtenue, tous les éléments anatomiques que je viens de décrire, avec la disposition que j'ai reproduite dans la partie gauche de la figure II. En comparant cette figure avec celle qui, dans les ouvrages classiques, reproduit les éléments anatomiques de la poudre de poivre noir, on constate une différence absolue. Outre la graine entière, qui est destinée à être mélangée en proportions plus ou moins notables avec le poivre noir entier, les propagateurs de l'Erviop ou nouveau succédané du poivre offrent à leurs clients deux poudres d'apparence différente, destinées à ètre introduites dans le poivre noir ou dans le poivre blanc pulvérisés. L'une de ces poudres serait, au dire des marchands, préparée avec les cotylédons seuls, tandis que l'autre serait confectionnée avec l'amande recouverte de son tégument séminal. Ces deux poudres reproduisent assez exactement l'apparence extérieure des poudres commerciales de poivre; elles en diffèrent toutefois par l'absence de tout arome et par leur vertu fortement sternutatoire. Théoriquement, ces deux poudres ne devraient contenir que les éléments anatomiques reproduits dans la partie gauche de la figure II, mais l'examen microscopique démontre clairement qu'il n'en est pas ainsi et donne l'explication des procédés employés pour donner à la graine qui nous occupe l'acreté que ne possèdent pas les graines de Légumineuses. La poudre la plus pâle, qui est destinée à être substituée à la poudre de poivre blanc, contient bien tous les éléments de la graine d'Erviop entière; les téguments de celle-ci y sont toutefois en proportion minime: en outre, les débris de ces téguments présentent deux teintes différentes; les uns sont gris, tandis que les autres sont fortement colorés en brun. A côté de ces éléments tout à fait caractéristiques, on observe une grande quantité de cellules scléreuses, parfois isolées, plus souvent réunies en groupes assez volumineux et présentant les formes et les dimensions les plus variables. Ces cellules scléreuses ne sont autre chose que de la poudre de noyaux d'olives. A côté d'elles, on trouve les grosses cellules sinueuses, réfringentes, qui caractérisent la couche sclérenchymateuse des semences de Capsicum et, en outre, des débris d'un parenchyme dont la teinte verdâtre et toute spéciale est trop intense pour être naturelle. Ces éléments, colorés artificiellement, ont été introduits dans la poudre pâle, vraisemblablement pour lui donner la teinte grise que possède la poudre de poivre blanc. La poudre d'Erviop no 2, celle qui est destinée à être substituée à la poudre de poivre noir, est encore plus complexe dans sa composition. Les téguments séminaux y existent en proportion bien plus considérable que dans la précédente; les débris de ces téguments affectent deux nuances différentes: les uns, assez pâles, ont une teinte grise; les autres sont fortement colorés en brun; les premiers doivent provenir de la graine telle qu'elle est récoltée; les seconds sont fournis par des graines qui ont subi un traitement spécial. La poudre de semences de Capsicum et la poudre de noyaux d'olives existent dans cette poudre en proportion très notable, mélangées avec les débris des cotylédons. A côté de ces divers éléments, on observe d'autres matières étrangères de structure très nettement définie et toute différente, qui indiquent la nature complexe du mélange. Parmi ces éléments étrangers, je citerai notamment des poils étoilés, semblables à ceux qui existent sur les feuilles de Malvacées, d'Hamamélis et de Boldo, et un tégument séminal sclé |